René-Charles Guilbert de Pixérécourt

René-Charles Guilbert de Pixérécourt

René-Charles Guilbert de Pixerécourt

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René-Charles Guilbert de Pixerécourt
Gravure d’après Staal
Gravure d’après Staal

Autres noms « Charles »
Activité(s) Dramaturge, directeur de théâtre
Naissance 22  janvier 1773
Nancy
Décès 27 juillet 1844
Nancy
Langue d'écriture Français

René-Charles Guilbert de Pixerécourt[1], né le 22  janvier 1773 à Nancy[2] où il est mort le 27 juillet 1844, est un auteur dramatique, directeur de théâtre et bibliophile[3] français

Sommaire

Biographie

Pixerécourt est issu d’une famille lorraine de hobereaux éprise de noblesse. Ses parents, après la vente du domaine de Pixerécourt, avaient acheté, en 1787, le domaine vosgien de Saint-Vallier pour en récupérer tous les droits féodaux et seigneuriaux en vue d’un marquisat; avec un château en mauvais état, « qui pouvait faire un marquis et un mendiant tout à la fois » selon le mot de Jules Janin. Ces espérances seront ruinées par la Révolution toute proche. À vingt ans, début 1793, il abandonne les études de droit et doit partir de Nancy « le jour de la mort du roi » rejoindre son père qui l’a appelé à Coblence pour entrer comme officier au régiment de Bretagne, dans l’armée de Condé qui combattait de l’étranger la jeune République. Il reviendra à la fin de l’année chercher fortune en France. D’abord il passe prudemment à Nancy et arrive à Paris, le 27 février 1794, où c’est encore le régime de la Terreur. Lors des dénonciations au Comité de Salut public, il ne devra son salut qu’à la protection de Carnot dont il sera pour près de 2 ans, au ministère des Armées, un des secrétaires. Il obtiendra peu après deux emplois, à la fois dans l’Administration des Domaines et celle de l’Enregistrement, où il restera trente ans et qui lui permettront, surtout à ses débuts, de persévérer dans son ambition théâtrale. Il assurera également la direction du Théâtre royal de l’Opéra-Comique[4] , de 1824 à 1827 selon F. J. Fétis et celle du Théâtre de l'Ambigu-Comique.

Devant la défiance à l’égard des ex-émigrés, il prend pour débuter en écriture le pseudonyme de « Charles ». Il n’avait emporté dans son exil qu’un seul livre : les « Nouvelles » de Florian, qui lui donneront au retour le sujet de ses deux premières pièces : Selico ou les Nègres généreux, achetée par le Théâtre-Français et Claudine ou l’Anglais vertueux, reçue à la salle Favart. Son premier grand succès vint en 1800 avec Cœlina ou l’Enfant du mystère. L’année suivante, en avril, le Pèlerin blanc ou les Enfants du hameau va obtenir 386 représentations à l’Ambigu. Puis c’est le tour de l’Homme à trois visages qui en accumule 378 au même théâtre. En septembre 1802, la femme à deux maris continue le triomphe. En 1803, « Tékéli » [Héros hongrois], avec les acteurs Tantin et Mme Bourgeois, bat le record avec 430 journées. En 1805, la Forteresse du Danube et Robinson Crusoé tiennent l’affiche toute l’année à la Porte-Saint-Martin.

En 1809, il est au Théâtre de la Gaîté, où il fait jouer la Citerne ; le 30 octobre 1810, c’est la grande réussite des Ruines de Babylone. Jusqu’en 1814, le succès est toujours là mais pour un nouveau triomphe, il lui faut attendre en juin « le Chien de Montargis » (quelque 400 représentations). En 1815, après le gros échec de son Christophe Colomb, il doit fournir l’effort du Monastère abandonné ou la Malédiction paternelle pour revenir à 267 représentations. En 1818, toujours à la Gaîté, le Belvédère ou la Vallée de l’Etna soulève l’enthousiasme car ce succès fut renforcé par le magnifique travail de décoration de Daguerre qui peignit les décors du site volcanique. En 1819, à l’Ambigu, est jouée la Fille de l’Exilé ou Huit mois en deux heures.

À partir de 1820, le succès réapparaît de temps à autre mais ce sont pour les meilleures pièces une centaine de représentations : le Drapeau blanc (1821) ; Ali Baba ou les Quarante voleurs (1822) ; le Moulin des Étangs (1826) ; la Tête de mort ou les Ruines de Pompéi (1827). Ensuite, on note des pièces écrites en collaboration, telle la Muette de la forêt (1828). Son dernier drame sera Latude ou Trente-cinq ans de captivité, écrit avec la participation de son jeune disciple Bourgeois. Pendant près de 40 ans, il soutint une intense activité d’auteur, de direction de théâtres et d’inspecteur zélé de l’Administration. Son immense talent d’auteur dramatique le fit surnommer le « Corneille des Boulevards ». Paul Lacroix rappelle que Charles Nodier le mettait au premier rang des auteurs de son temps. Sa réputation dépassa les frontières : Russie, Allemagne, Angleterre... Ses succès lui auront permis d’enrichir, peu à peu, de livres les plus rares sa chère bibliothèque, la grande passion de sa vie. Le distique inscrit au-dessus de la porte était : « Tel est le triste sort de tout livre prêté : Souvent il est perdu, toujours il est gâté. »et sa devise (souvent copiée) inscrite en ex-libris était : « Un livre est un ami qui ne change jamais. ».

Le 21 février 1835, le Théâtre de la Gaîté, sis boulevard du Temple, où depuis 1825 il exploitait un privilège[5], est anéanti par un incendie. Sa dernière comédie aura été Bijou ou l’Enfant de Paris, qu’on répétait le soir même de l’incendie de ce théâtre - on y testait des feux d’artifice. Le Théâtre de la Gaîté sera pourtant reconstruit dans un délai très court avec charpente métallique pour le 19 novembre de la même année par le courageux comédien Bernard Léon qui avait été, juste avant le sinistre, le repreneur pour 500 000 francs. Mais ce théâtre devra finalement fusionner avec l’Ambigu deux ans plus tard. Pixerécourt gagne le procès en défense et évite la ruine complète. S’il n’était pas le propriétaire, il a tout de même subi la perte importante du mobilier lui appartenant, estimée à 300 000 francs, les accessoires et les décors tenant une place primordiale dans ses pièces. Sa santé va en être irrémédiablement altérée. Souffrant déjà de gravelle et de goutte, il est alors victime d’une première attaque d’apoplexie.

Vers 1838, délaissant sa « campagne » parisienne de Fontenay-sous-Bois, maison ayant précédemment appartenu à son ami, le compositeur Dalayrac, dont il avait établi une biographie et le catalogue complet des œuvres, il se retire à Nancy, sa ville natale - il est possible que ce soit dans sa propriété de Haussonville, « le seul bien que m’ait laissé ma famille » - où, très affaibli, il s’occupe de l’édition de ses œuvres. Son Théâtre choisi paraîtra chez un éditeur de Nancy, en 4 tomes de 1841 à 1843. Il fera aussi publier le Catalogue de sa bibliothèque à Saint-Nicolas-de-Port. Il possédait, en effet, plus de 4000 volumes précieux – que désormais il ne pouvait plus guère ni lire, ni admirer – estimés à l’acquisition plus de 100.000 francs, dont la valeur avait considérablement augmentée et que le 22 janvier 1839 il dut mettre en vente chez le libraire Crozet, à Paris. Devenu impotent et complètement aveugle, il meurt à 71 ans.

L’œuvre

Pixerécourt avait l’instinct du drame, et savait trouver ce qui touche ou inquiète. Il est un des maîtres du suspense, de la progression rigoureuse de l’intrigue. Puisant abondamment dans les romans à succès, français et étrangers, notamment anglais et allemands, il ajoute des situations dramatiques aux effets très puissants, avec tous les ressorts possibles du théâtre - après lui, on n’a plus rien inventé - sans jamais ni tomber dans le vulgaire ni contrarier la morale. Il a su donner un supplément d’âme à un public friand en ce temps-là de spectacles à machinerie et à décors somptueux. Cependant, la vague romantique de la seconde partie du siècle que son imagination avait annoncée, mais aux sentiments plus vertigineux, allait bientôt envahir la scène et faire tomber ses mélodrames dans l’oubli. Il fut l’auteur d’une époque, avec son génie, mais aussi son style emphatique et ses procédés rebattus. Il a signé quelque 125 pièces, chiffre annoncé par Paul Lacroix dans son recueil de souvenirs, consacré à son ami. Jules Janin avait calculé de son côté que son œuvre avait été jouée trente mille fois. Il composa des œuvres de tous genres : des mélodrames, bien sûr, mais aussi des comédies, des vaudevilles, des drames historiques, des tragédies (deux versifiées) et des livrets d’opéra-comique.

Le Pixerécourt littérateur a donné une traduction des Souvenirs de Paris (Paris, 1805) et des Souvenirs d’un voyage en Livonie, à Rome et à Naples (Paris, 1806) de Kotzebue. Il a lui-même écrit une brochure : Guerre aux mélodrames ! (Paris, 1818) et les Esquisses et Fragments de voyages en France, à Bade, en Suisse et à Chamouny, (Paris, 1843), qui sont des souvenirs d’un voyage fait en 1833.

Il fut chevalier de la Légion d’Honneur et un des huit membres fondateurs de la « Société des Bibliophiles français ».

Notes

  1. En place du courant « Pixérécourt », un certain nombre d’ouvrages écrivent « Pixerécourt » sans le premier accent. Entre autres, deux qui font autorité : 1. le « Dictionnaire topographique du département de la Meurthe », d’Henri Lepage, Société d’archéologie lorraine, (1862) page 109 (et qui, de plus, indique que la prononciation est : « Pisserécourt »). 2/ toute la série du « Théâtre choisi » de l’auteur lui-même qui en a surveillé l’édition ; incluse son intéressante notice autobiographique du tome II (Souvenirs de la Révolution).
  2. il est probable que ce soit la terre patrimoniale de Pixerécourt, lieu-dit au nord de Nancy, « face à Champigneulles ».
  3. il possédait aussi une très belle collection d’autographes.
  4. Il y sera en butte à la fronde des comédiens sociétaires mécontents de son despotisme et qui finalement le feront débarquer.
  5. Les administrateurs associés étaient les comédiens Dubois et Marty et l’auteur Martainville ; 'Pixerécourt en était le « directeur breveté ».

Sources

  • Paul Lacroix : Guilbert de Pixérécourt, 1869
  • Pixerécourt, Théâtre choisi, tome II, 1841
  • Alphonse Royer, Histoire universelle du théâtre, 1878
  • François-Joseph Fétis, Biographie universelle des musiciens, 1865
  • Jules Janin, Histoire de la littérature dramatique, 1864
  • William Duckett fils, Dictionnaire de la conversation et de la lecture, Paris, Michel Lévy, 1855.

Bibliographie

  • W. G. Hartog, Guilbert de Pixerécourt : sa vie, son mélodrame, sa technique et son influence, Paris, H. Champion, 1913.
  • André Virely, René-Charles Guilbert de Pixerécourt (1773-1844), Paris, Édouard Rahir, 1909.
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