Pierre Guerin de Tencin

Pierre Guerin de Tencin

Pierre Guérin de Tencin

Cardinal
Berretta cardinalizia.png
Pierre-Paul Guérin de Tencin
de l'Église catholique romaine
Image de Pierre-Paul Guérin de Tencin
cardinal-prêtre
de Ss. Nereo ed Achilleo
Blason de Pierre-Paul Guérin de Tencin
Naissance 22 août 1680
à Grenoble (France)
Ordination
sacerdotale
Consécration
épiscopale
2 juillet 1724 par le
pape Benoît XIII
Évêque Archevêque d' Embrun
Archevêque de Lyon
Créé
cardinal
23 février 1739 par le
pape Clément XII
Décès 2 mars 1758
à Lyon
 
Cardinal
Titre cardinalice
Collège cardinalice · Consistoire
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(en) Fiche

Portail du catholicisme · Instructions

Pierre-Paul Guérin de Tencin, né le 22 août 1680[1] à Grenoble et mort le 2 mars 1758 à Lyon, fut cardinal, archevêque de Lyon et un homme politique sous Louis XV. C'est l'exemple même d'un abbé qui sut mêler la vie de cour avec un véritable engagement en faveur des pauvres, les intrigues avec la compassion.

Sommaire

Une famille récemment anoblie

Le quadriaïeul de la famille, Pierre Guérin, issu d'une famille travaillant la terre près de Gap, à Ceillac, était simple colporteur. La trentaine venue, il vint s'établir en 1520 à Romans dans le Dauphiné. Habile de ses mains et ayant quelques économies, il acheta une petite boutique où il vendit tout d'abord des articles d'épicerie puis de joaillerie.

S'étant enrichi, il put acquérir une terre à Monteux, prendre de moitié l'entreprise des péages par eau et par terre de Valence et de Mirmande et, ainsi, envoyer ses deux enfants, Pierre et Antoine, à l'Université. Ce dernier, devenu docteur ès lois, acheta ensuite une charge d'officier de justice à Romans, puis épousa plus tard Françoise de Garagnol, une jeune fille de bonne maison.

Lors des guerres de religion qui ravagèrent la région, il sut, grâce à sa sagesse et modération, sauver la ville de Romans des protestants ; ce qui valut à ce catholique modéré et fidèle au roi le 3 octobre 1585 des lettres de noblesses de Henri III, enregistrées au parlement le 21 mars 1586. Voilà comment le fils d'un colporteur enrichi devint noble. Il était cependant méprisé des nobles les plus anciens.

Son fils, Henri-Antoine Guérin, en 1597, sauva une deuxième fois la ville en empêchant par une action héroïque qu'elle ne soit livrée, par des traîtres, au duc de Savoie. Il eut sept enfants dont un, François, acheta la charge anoblissante de conseiller au parlement de Grenoble. Son épouse, Justine du Faure, lui apporta la petite terre de peu d'importance appelée Tencin (Grésivaudan), qui faisait partie du domaine de Monteynard. François remplaça son patronyme par celui de cette terre et, juste avant sa mort (1672), acheta pour faire bonne figure, en bordure des vignes de son domaine, un vieux castel sarrasin à demi ruiné appelé simplement le château de la Tour. Il y fit édifier une vaste demeure à la mode de l'époque.

Un fils cadet promis aux ordres

Le fils aîné de François Guérin, Antoine, devint conseiller au parlement de Grenoble puis premier président à Chambéry lors de l'occupation française. Il épousa Louise de Buffévent, une femme fort vertueuse qui lui donna deux fils, dont Pierre-Paul Guérin de Tencin, et trois filles, dont l'une, Alexandrine, devint la fameuse dame de Tencin et une autre, Marie-Angélique, fut la mère d' Antoine de Feriol de Pont-de-Veyle et de Charles-Augustin de Ferriol d'Argental.

Étant le fils cadet, Pierre-Paul de Tencin, né à Grenoble le 22 août 1679, dut suivre à Paris le séminaire oratorien de Saint-Magloire. Si ses connaissances générales n'étaient pas extraordinaires, ce fut néanmoins un bon latiniste et un excellent théologien. En 1700, il suit le cardinal Le Camus, évêque de Grenoble, pour l'assister pendant la durée du conclave. Le Pape choisi, le cardinal Albani, se jugeant indigne de la charge, refuse : ce sera le jeune de Tencin qui sera chargé de le faire changer d'avis. Il y réussira fort bien et le cardinal est finalement élu sous le nom de Clément XI. La récompense est tôt accordée : Louis XIV lui attribue l'abbaye de Vézelay, qui lui vaut 12'000 livres de revenus[2] (15 avril 1702).

A la Sorbonne, il remplit les fonctions de prieur et passe sa licence. L'archevêque de Sens, Mgr de La Hoguette, qui l'a pris en amitié, le nomme peu après archidiacre de sa cathédrale. Finalement il reçoit la prêtrise puis obtient un canonicat. Le 9 mars 1705, il devient docteur en Sorbonne et la même année, député du clergé pour la province de Vienne, en qualité de chanoine prébendier du prieuré de La Mure, dans le diocèse de Grenoble. En 1710, le diocèse de Sens le désigne pour siéger à l'assemblée du clergé, chargée de verser des sommes d'argent au roi qui en manquait cruellement. En effet la fin du règne de Louis XIV fut très sombre pour la France. Le pays ne connaissait que défaites et famines. Le vieux roi sollicita ainsi son bon clergé pour soulager la peine du peuple. Celui-ci accepta de lui accorder une partie de ses revenus. Ce fut un don gratuit, preuve que le clergé français se souciait également du bien du royaume.

L'ascension politique

Protégé de Dubois depuis 1714 et secondé par sa sœur qui ne déplaisait pas au cardinal, l'abbé de Tencin fut à l'origine de la conversion de Law au catholicisme le 17 septembre 1719. Il ne se contenta pas toutefois de ce rôle de convertisseur : il prit une part active au Système. Officiellement il ne fut chargé que de la gestion des aumônes gouvernementales. Ce qu'il fit avec compétence et autorité. Cependant, comme d'immenses fonds passaient par ses mains, le public de l'époque n'eut aucun doute sur les profits qu'il avait pu réaliser dès les débuts du système. Il passait également pour l'un des principaux conseillers de Law, ainsi que le témoigne une lettre du diplomate Chavigny à Lafitau :


"M. Law a associé à son travail M. l'abbé de Tencin comme l'homme qui était le plus propre à le remplacer en cas d'accident, il n'y a effectivement personne en France qui ait mieux connu et mieux compris que M. l'abbé de Tencin le système de Law (...)". (12 janvier 1720)[3]


S'il est certain donc que l'abbé de Tencin a profité du Système, il convient d'ajouter à sa décharge cependant qu'il aurait pu encore en profiter davantage. Mais ses principes chrétiens lui permirent de conserver une certaine modération malgré la tentation certaine qu'il eût à vaincre.

L'année suivante, en 1721, à un moment où l'opinion publique était très remontée contre lui, l'abbé de Tencin perdit définitivement un procès contre l'abbé Etienne de Veissières, au sujet d'une dépendance de l'abbaye de Vézelay, et acheva ainsi de se perdre au yeux du monde qui ne vit plus en lui "qu'un abbé habile et fripon, capable de tout pour s'enrichir"[4]. Ce fut à nouveau le cardinal Dubois qui le remit en selle : il l'envoie à Rome à la suite du cardinal de Bissy pour assister au conclave et surtout pour l'aider à obtenir le cardinalat, ce dont Tencin s'acquittera avec succès. La récompense ne tarde pas : Tencin est nommé chargé des affaires du roi Louis XV à Rome le 6 novembre 1721.

L'abbé de Tencin passa plus de trois ans en Italie : il y laissa un excellent souvenir - n'est-ce pas lui par exemple qui fit dessiner et construire le majestueux escalier de la place d'Espagne ? - devint même l'ami du pape Innocent XIII, suscitant la jalousie et les médisances de ses coreligionnaires. L'abbé était à la fois un homme du monde accompli et un véritable homme de foi. Ceci contrastait avec le climat d'intrigues politiques de la curie romaine dont les membres étaient préoccupés par leur ascension politique auprès du pape.

Nommé archevêque d'Embrun en mai 1724, il fut rappelé en France et renvoyé dans son diocèse où il resta en disgrâce quelque quinze ans. Il présidera le concile d'Embrun contre les jansénistes en 1727 qui verra la condamnation de l'archevêque Jean Soanen. Créé cardinal le 23 février 1739 grâce à l'aide du Prétendant Stuart, il fut reçu primat de Lyon le 24 septembre 1740, avec une pension de 366'000 livres[5] par an. Le bordereau de ses aumones quant à lui était d'environ 200'000 livres l'année, c'est dire là amplement de son soucis constant pour les indigents.[6]

Sous Fleury, il devint deux ans plus tard, en septembre, ministre d'État sans portefeuille, siégeant au Conseil du Roi. Cependant, à la mort du cardinal (1743), il perdit le semblant d'autorité qu'il possédait encore et se trouva dans un isolement complet. "Sa seule fonction à la Cour consistait désormais à présider le bureau des pauvres communautés".[7]Le 9 août 1749, il est encore nommé proviseur de la Sorbonne. Il prit le parti finalement en 1751 de se retirer dans son diocèse auquel il avait prouvé sa constante sollicitude par de nombreux mandements :


"Il est tout simple, écrivait-il à l'évêque d'Auxerre[8], qu'un évêque à mon âge songe à rejoindre son épouse. Je n'aurois pas tant tardé, si je n'avois pas été retenu par les sollicitations du Pape : Sa Sainteté m'a cru beaucoup plus utile à l'Eglise et à la religion que je ne le suis".[9]


Installé dans son diocèse, "il résolut de s'y consacrer exclusivement, multipliant ses visites pastorales, s'occupant avec zèle des moindres détails de son administration, indifférent désormais aux querelles religieuses, aux événements politiques, laissant même tomber sa correspondance avec Benoît XIV qui ne devait guère lui survivre."[10]

Il mourut à Lyon en 1758, regretté de toute la population qui appréciait son humanité et sa générosité, l'essentiel de ses gains allant vers les pauvres de son diocèse.

Œuvres

Concilium provinciale Ebreduni habitum, Gratianopolis (Grenoble), P. Faure, petit in-folio, 1728, 2 ff. 2268 pages. Relié à la suite : Mandement de Mgr l'Archevêque Prince d'Embrun portant condamnation de l'écrit intitulé : Consultation des avocats au sujet du jugement.

Notes et références

  1. certaines sources indiquent 1679, d'autres indiquent 1680
  2. (Environ 180 000 euros actuels.)
  3. Jean Sareil, Les Tencins, Librairie Droz, Genève, 1969, p.63.
  4. Jean Sareil, op.cit, p. 78.
  5. (Environ 5,5 millions d'euros actuels.)
  6. Renée Caroline de Froulay de Créquy (1714-1803), Souvenirs de la marquise de Créquy de 1710 à 1803, Paris, Garnier Frères, Libraires Editeurs, T. 2, 1873, p.154.
  7. Boutry, Maurice, Intrigues et missions du cardinal de Tencin, Paris, Emile-Paul, Editeur, 1902, p.273.
  8. Le Dran, Mémoires, "Sur le progrès et la fortune de l'abbé de Tencin".
  9. Duc de Luynes, ''Mémoires du duc de Luynes sur la Cour de Louis XV (1735-1758), L.Dussieux et E. Soulié, Paris, Firmin-Didot, 1864, 17 vol. in-8, 8 mai 1751.
  10. Boutry, Maurice, op. cit, p.276.

Bibliographie

  • Maurice Boutry, Une créature du cardinal Dubois : Intrigues et missions du cardinal de Tencin, Emile-Paul, Editeur, Beauvais, 1902.
Précédé par Pierre Guérin de Tencin Suivi par
Charles-François de Châteauneuf de Rochebonne
Primat des Gaules
Antoine de Malvin de Montazet
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