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Pierre-Corneille Blessebois
Paul-Alexis Blessebois, dit ultérieurement Pierre-Corneille de Blessebois, né à Verneuil-sur-Avre, vers 1646 et mort en 1700 est un écrivain français.
Auteur fort mystérieux que Pierre-Corneille de Blessebois, surnommé le « Casanova du dix-septième siècle » ou encore le « poète-galérien », dont certains érudits ont été jusqu’à nier l’existence, d’autres à théoriser l’existence de deux Corneille de Blessebois, l’un auteur des tragédies sérieuses, l’autre des ouvrages licencieux. Le fait qu’on ait publié certains ouvrages sous son nom n’a pas facilité la tâche des bibliophiles Ses œuvres ont souvent un fort accent autobiographique fondé sur une vie pour le moins aventureuse.
- « Ce n’est pas toutefois, que ma Muse normande
- Ne pût, en s’efforçant, cueillir une guirlande… »
Pierre-Corneille est le septième de huit enfants nés de Paul Blessebois, d’Alençon, devenu receveur des tailles de l’élection de Verneuil en 1643, et de Madeleine (ou Julienne) Gaultier de Coutances. Cette dernière élève seule ses enfants après 1657, date de la mort de son mari, en continuant d’administrer la recette de la taille tout en gérant la manufacture de fils de France de la ville. Son changement de prénom de « Paul-Alexis » en « Pierre-Corneille » date de 1660, année à laquelle il abjure, apparemment plus par intérêt que par conviction profonde, la religion protestante de ses parents. On ignore la date à laquelle Blessebois doit quitter Verneuil pour la ville paternelle d’Alençon mais le motif en est connu : ses frasques amoureuses d’homme à bonnes fortunes lui en ont rendu le séjour impossible. Il n’y mènera pas meilleure vie et c’est de là que naîtront ses premiers ennuis avec la publication de son premier ouvrage paru en 1668. Ses Aventures du Parc d’Alençon relatent en effet les aventures galantes de l’auteur en égratignant sérieusement au passage la vertu des Alençonnaises et la réputation de ses concurrents malheureux. Ceci lui vaudra de solides inimitiés dont celle, dangereuse car puissante, d’Hector de Marle, seigneur de Versigny, Intendant de la généralité d'Alençon. Ce dernier eut l’occasion idéale de se venger de Blessebois lorsque, investi de la tâche de vérifier les titres de noblesse à la suite des scandales révélés après l’arrestation de Fouquet, il « oublie » d’y faire figurer le nom de la famille de Blessebois, ce qui aurait eu pour conséquence de la rendre imposable. Revenu à Verneuil, Blessebois tente, le 30 juillet 1670, de couper l’herbe sous le pied à Hector de Marle en mettant le feu, avec son frère Philippe, à la maison familiale dépositaire des registres de la taille de la ville. Arrêté au moment où il allait passer en Angleterre, Blessebois est emprisonné à Alençon le 25 août tandis que de Marle obtient du Conseil du Roi le droit « d’instruire et de juger l’affaire en dernier ressort et sans appel » au lieu des officiers de Verneuil. Le 15 novembre, il est condamné au bannissement perpétuel sous peine de mort, à 500 livres d’amende et à la confiscation de tous ses biens meubles et immeubles. Blessebois ne pouvant payer les 500 livres d’amende, il reste en prison à Alençon où ses nombreuses maîtresses continuent de venir se disputer ses faveurs. Sa mère étant morte à l’été 1671, sa pension n’est plus payée et Blessebois doit demander sa relaxe au Présidial d’Alençon afin de lui permettre d’accomplir sa peine de bannissement, requête appuyée par Marthe de Sçay, une de ses maîtresses, et acceptée le 19 novembre 1671. De Marle se manifeste à nouveau en « oubliant » de le faire libérer jusqu’au 24 décembre. Le lendemain, Blessebois se met en chemin pour Paris et s’arrête à Sées où l’attend Marthe de Sçay à laquelle il a promis le mariage. Dans cette ville, Blessebois signe (en ajoutant au passage la particule « de » à son nom) un contrat de mariage avec Marthe de Sçay et empoche 2 580 livres de dot. Arrivé à Paris, Blessebois s’empresse de la mettre dans un bordel moyennant deux pistoles avant de se mettre en route pour la Hollande. Revenue de ses illusions, Marthe de Sçay fait rendre une ordonnance de prise de corps contre son « fiancé » à la Cour du Châtelet. Entre-temps, celui-ci guerroie du côté des Pays-Bas avant de revenir, à l’été 1672, à Paris où il cherche et retrouve Marthe de Sçay. Celle-ci lui fait bonne figure et s’empresse de le faire arrêter :
- — N’êtes vous pas ce méchant garçon qui avez débauché tant de filles ?
- — Non, je suis ce jeune garçon que tant de méchantes filles ont débauché, rétorque-t-il crânement au lieutenant-criminel du Châtelet qui l’interroge.
Blessebois invoque alors, comme motif pour refuser d’épouser Marthe de Sçay conformément au contrat de mariage qu’il a signé, qu’il ne peut épouser une prostituée, et de citer son séjour au bordel de La Serre pour preuve. Blessebois emprisonné tente, en prison, de faire épouser Marthe de Sçay au frère d’un compagnon d’incarcération pour se libérer de sa promesse de mariage. Celle-ci ayant vu clair dans sa machination, le fait à nouveau écrouer à la Conciergerie le 23 avril 1673, date à partir de laquelle il lui vouera une haine féroce qu’il exhalera dans plusieurs écrits ; il entreprend la rédaction du Rut ou la pudeur éteinte consacré à la traîner dans la boue. Libéré le 26 août 1673, il rédige les Palmes du Fils de l’homme, ouvrage sur la vie de Jésus et la tragédie des Soupirs de Sifroi ou l’innocence reconnue, tirée de la légende de la vie de Geneviève de Brabant.
Retourné en Normandie au mépris de sa peine de bannissement, il y tue en juin 1674 M. de Verdin, le mari d’une de ses maîtresses qui refusait de lui payer le prix promis pour ses faveurs. Cette fois, Blessebois s’enfuit en Hollande où il reprend sa profession de gigolo à La Haye. Il produit également Le Bordel de mademoiselle de Sçay, une tragédie en 3 actes où il exhale sa rancœur contre son ancienne « fiancée ». Une dame hollandaise, Eva van Alphen lui obtient un poste dans la marine hollandaise au sein de laquelle il se bat contre les Suédois. Ayant quitté l’uniforme hollandais, il vit quelque temps de sa plume à Leyde avant de retourner en France entre 1676 et 1677 où il entame La Corneille mademoiselle de Sçay. À bout de ressources, il s’engage bientôt comme dragon dans le régiment de la Bretêche. À nouveau emprisonné pendant 14 mois pour avoir roué de coups la femme et la fille d’un perruquier parisien un jour de permission, il s’engage à sa libération dans la marine royale dont il finira par déserter. Le 14 août 1681, le Conseil de guerre de Rochefort le condamne aux galères à perpétuité. Transféré le 22 octobre de l’année suivante au bagne de Marseille, Blessebois est déclaré invalide au bout de trois ans et vendu comme engagé aux colons de Guadeloupe avec défense de le « laisser rentrer en France sous quelque prétexte que ce soit ». Arrivé à Basse-Terre en mai 1686, Blessebois est vendu à Marguerite la Garrigue, veuve de Jean Dupont, propriétaire du domaine du Grand-Pérou. Il recommence bientôt à intriguer en se faisant passer pour sorcier, ce qui amener Félicité de Lespinay, dite comtesse de Cocagne à solliciter l’aide de ses soi-disant pouvoirs surnaturels afin de l’aider à épouser le fils de sa propriétaire, Charles Dupont, dit le marquis du Grand-Pérou en l’envoûtant et en faisant mourir sa maîtresse, Marguerite La Garrigue. Blessebois satisfait Félicité de Lespinay à l’aide de plusieurs mises en scène et en simulant l’apparition d’un zombie. La mystification prendra de l’envergure lorsque le frère de Charles Dupont aura, à son tour, recours à Blessebois pour duper Félicité de Lespinay. Le bruit donné dans l’île à ces mystérieuses apparitions finira lorsque la justice finira par en avoir vent. Blessebois est décrété de prise de corps et emprisonné. Le 3 avril 1690, il est « condamné à faire amende honorable, nud en chemise, la torche au poing devant l’église de Nostre-Dame du Mont-Carmel et devant la porte du Palais, demandant pardon à Dieu, au Roy et à Justice, sous peine d’estre pendu et estranglé en cas de récidive ». En février 1697, est paru le roman Le Zombi du grand Pérou où Blessebois a relaté toute cette aventure.
Une dernière et non moins importante controverse agitant la réception de l’œuvre de Blessebois tourne autour du lieu de publication du Zombi du grand Pérou : comme nul ne sait si Blessebois est revenu en France ou s’il a fini sa vie à la Guadeloupe. Certains érudits affirment que le Zombi du grand Pérou a été imprimé à Rouen tandis que d’autres assurent que tout, dans la disposition de l’ouvrage, diffère de la forme ordinairement pratiquée par les imprimeurs rouennais, auquel cas Le Zombi du grand Pérou, qui comporte un grand nombre de mots de créole, aurait été imprimé aux Antilles, ce qui en ferait le premier roman de la littérature francophone.
Œuvres avérées
- Aventures du Parc d’Alençon, 1668
- Les Palmes du Fils de l’homme, 1675
- Les Soupirs de Sifroi ou l’innocence reconnue, 1675
- Le Rut ou la pudeur éteinte, 1676
- Marthe le Hayer, ou Mademoiselle de Sçay, 1676
- L’Eugénie, 1676
- Le Bretteur, 1676
- Filon réduit à mettre à cinq contre un, 1676
- La Bibliothèque de l’Arétin, 1676
- Le Lion d’Angélie, 1676
- La Corneille mademoiselle de Sçay, 1678
- Le Zombi du grand Pérou, ou La comtesse de Cocagne, 1697
Référence
- Frédéric Lachèvre, Le Casanova du XVIIe siècle Pierre Corneille Blessebois, Normand (1646?-1700?), Paris, Champion, 1927
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