Argerich

Argerich

Martha Argerich

Martha Argerich
Martha Argerich à l'âge de 21 ans (1962)
Martha Argerich à l'âge de 21 ans (1962)

Naissance 5 juin 1941 (68 ans)
Buenos Aires, Argentine Argentine
Activité principale Pianiste
Conjoint Robert Chen
Charles Dutoit
Stephen Kovacevich
Récompenses


Distinctions honorifiques 1996 : ‘’’officier de l’Ordre des arts et des Lettres’’’ (France)
2004 : commandeur de l’Ordre des Arts et des Lettres’’’ (France),
2005: l'Ordre du Soleil Levant, Rayons jaunes avec rosette (Empereur du Japon)

Martha Argerich, née à Buenos Aires le 5 juin 1941, est une pianiste argentine. Elle déteste la publicité faite autour de son nom ce qui l'amènera à s'éloigner de la scène pendant une partie importante de sa carrière[1]. Elle n'accordera que peu d'entretiens avec le corollaire d'être mal connue du public. Elle est néanmoins considérée comme une des pianistes les plus talentueuses des temps modernes[2].

Sommaire

Biographie

Le nom d’Argerich est typiquement catalan, porté par plusieurs centaines de personnes en Catalogne espagnole[3].

Ses dons pour la musique sont remarqués dès l'âge de deux ans et demi. Elle est alors capable de reproduire au piano les partitions que son frère étudie ou rejoue immédiatement sur un piano un air qu'elle a entendu chanter[1]. Elle a la capacité, enfant, de jouer les octaves comme de simples notes (Eugène List). Sa mère la présente, à l'âge de cinq ans et contre son gré (la petite Martha voulait être médecin[4]), à Vincenzo Scaramuzza qui lui donnera ses premières leçons de piano et exacerbe chez elle sa sensibilité et son lyrisme naturels.

En 1949, dès l'âge de huit ans, elle joue au cours d'un concert le Concerto pour piano n° 1 en do majeur, op. 15 de Beethoven, le Concerto pour piano n° 20 en ré mineur, K. 466 de Mozart ainsi que la Suite française n° 5 en sol majeur, BWV 816 de Bach.

En 1955, la famille Argerich émigre en Europe. Grâce à une bourse octroyée par l’État argentin (à l’époque, dirigé par Juan Peron), la jeune Martha étudie avec les plus grands noms du piano à Londres, Vienne, Autriche et en Suisse : Bruno Seilhoffer, Friedrich Gulda, Nikita Magaloff, Mme Lipatti[1], [5]. Elle complètera sa formation auprès des plus grands pianistes : Arturo Benedetti Michelangeli et Stefan Askenase.

En 1957, âgée de seulement 16 ans, elle remporte deux concours importants : le Concours international d'exécution musicale de Genève et le Concours Busoni à Bolzano[6] en l'espace de deux semaines[1]. C'est lors de ce dernier concours qu'elle rencontre Michelangeli auquel elle demandera des leçons quatre ans plus tard[2].

En 1965, elle crée la surprise lors du Concours international de piano Frédéric-Chopin de Varsovie en interprétant l'Étude op. 10 n° 1 de Chopin et une mazurka du même compositeur. Son incroyable maîtrise de l'instrument, son extrême sensibilité et sa technique hors pair lui font remporter trois prix [1]: le premier prix, le prix du public et celui de la meilleure interprétation des Mazurkas[7]. Les critiques comme les spectateurs ne tarissent pas d'éloges[8], [9]

L'année suivante, elle débute une carrière professionnelle au Lincoln Center de New York

Sauvage et rebelle, son indépendance – qu'elle revendique elle-même haut et fort – est un « cauchemar » pour les organisateurs de ses concerts : elle se désiste au dernier moment de façon impromptue et répétée, ou bien se présente pour son récital mais décide d'interpréter des œuvres qui ne sont pas au programme ou encore arrête son travail au gré de sa fantaisie tout en sachant que son activité de concertiste est programmée pour plusieurs mois. C'est ainsi qu'elle décide brutalement de prendre du repos de 1961 à 1965, après avoir donné naissance à son premier enfant, puis, à nouveau, entre 1973 et 1976[1]. Elle n'a jamais été poursuivie en rupture de contrat pour la simple raison que, jalouse de son indépendance, elle n'en a jamais signé[10], . Son caractère entier se manifeste jusque dans sa discographie : pas de grandes « suites » comme celles d'un Brendel, d'un Horowitz ou d'un Pollini. Elle interprète ce qu'elle aime en fonction de son inspiration.

Son caractère influence également sa vie privée. Elle se sera mariée plusieurs fois jusqu'à ce jour. Elle épouse en premières noces Robert Chen dont elle aura une fille, Lyda Chen. De 1969 à 1973, elle est la femme du chef d'orchestre Charles Dutoit sous la direction duquel elle poursuit sa carrière de concertiste et discographique. De leur union naît son troisième enfant, Annie Dutoit. Son troisième mari est le pianiste américain Stephen Kovacevich avec lequel elle conçoit Stéphanie Argerich. Martha Argerich a également été la compagne des pianistes Michel Béroff et Alexandre Rabinovitch.

Depuis 1976, elle semble avoir repris une activité plus régulière, mais continue à revendiquer sa liberté.

Femme au cœur généreux, Martha Argerich œuvre sans relâche pour promouvoir de jeunes talents qu’elle prend sous son aile. En 1999, elle crée à leur intention un Concours international de piano, le Festival Martha Argerich de Buenos Aires, et, en juin 2002, le Martha Argerich Project de Lugano[5].

Elle fait fréquemment partie du jury lors de concours importants et se montre clémente lorsqu'elle juge les candidats. Elle a soutenu le pianiste croate Ivo Pogorelić qui était éliminé en troisième épreuve lors du Concours international de piano Frédéric-Chopin de 1980 en affirmant qu'il était génial et encourant, par là, les protestations des autres membres du jury[2].

Martha Argerich est actuellement domiciliée à Bruxelles avec sa fille Stéphanie et accueille chez elle un groupe de pianistes afin de se sentir moins solitaire. Elle se couche au petit matin après avoir joué, écouté de la musique et participé à des conversations sans fin sur son blog[11]. Martha Argérich possède également un pied-à-terre dans le seizième arrondissement de Paris, dans le même immeuble que celui qu'habite Nelson Freire.

Carrière

Le répertoire de Martha Argerich est très étendu. Il recouvre de Bach jusqu'au compositeur contemporain d'origine russe Alexandre Rabinovitch[12] en passant par Bartok, Beethoven, Chopin, Liszt, Debussy, et plus près de nous, Ravel, Franck, Prokofiev, Stravinski, et bien d'autres[1].

Artiste demandée par les chefs d’orchestres ainsi que par les orchestres les plus prestigieux, Argerich se produits dans maints festivals de musique aux États-Unis, en Europe et au Japon. Elle joue régulièrement en compagnie du pianiste brésilien Nelson Freire – son ami intime depuis 1957[13]–, du pianiste Alexandre Rabinovitch, du violoncelliste Mischa Maisky et du violoniste Gidon Kremer[5].

Son premier disque, capté en 1960 par Deutsche Grammophon, au programme duquel on trouve des œuvres de Chopin, Brahms, Ravel, Prokofiev et Liszt, lui valut les félicitations de Vladimir Horowitz. Quelques années plus tard, elle enregistre la Sonate n° 3 de Chopin ainsi que la Polonaise op. 53 du même compositeur. S'ensuivront de nombreux disques dont le Concerto pour piano n° 3 de Prokofiev, enregistré avec l'Orchestre philharmonique de Berlin sous la direction du chef d'orchestre italien Claudio Abbado, en 1968.

Elle est, pour certains, la dernière pianiste de légende[14], la meilleure pianiste de sa génération de par sa grande sensibilité alliée à une technique virtuose, à proprement parler, absolument stupéfiante et à une imagination sans bornes[5]. L'un de ses premiers producteurs de disques a dit d’elle :

« ... s'il s'agissait là d'un condensé de son jeu, Argerich était probablement l'interprète la plus formidable qu'il nous ait été donné de rencontrer. Les larges accords sonnaient de manière gigantesque entrecoupés de traits virtuoses impeccables... [1] »

Sa technique pianistique est considérée comme l'une des plus impressionnantes dans le cercle relativement restreint des plus grands interprètes contemporains[2]. Certains n'hésitent pas à la comparer à Vladimir Horowitz ou a Maurizio Pollini[2], [15]. De fait, les enregistrements qu'elle a réalisés très tôt, dès l'âge de 19 ans, de la Toccata de Prokofiev ou de la sixième des dix-neuf Rhapsodies hongroises de Liszt soutiennent aisément la comparaison avec ce dernier[2] et demeurent encore aujourd'hui des références[2]. Bien que certains critiques trouvent sa dynamique sonore et ses tempi exagérés, son jeu est caractérisé par un son passionné et unique.

Myope et timide sur scène[5], Martha Argerich a plusieurs fois exprimé un sentiment de « solitude » lorsqu'elle joue en soliste tout au long d'un récital[2], [1],[16]. De fait, à partir de l'année 1980, à l'exception d'un récital au Carnegie Hall de New York en faveur d'une fondation de lutte contre le cancer et d'un autre au Festival de Beppu (Japon) - dont elle est la directrice artistique depuis 1996[2] -, elle joue très rarement seule préférant les concertos, la musique de chambre, ou encore les œuvres pour deux pianos dont elle partage l'exécution avec le pianiste Nelson Freire[2], [17]. Sa plus récente apparition en tant que soliste était pour Festival de Verbier de 2008. Elle y interprète la Partita n°2 de J. S. Bach.

Elle est particulièrement remarquée pour ses enregistrement de musique classique contemporaine de compositeurs tels que Rachmaninoff, Olivier Messiaen ou Prokofiev. Un enregistrement notable regroupe le Concerto pour piano N°3 de Rachmaninoff avec le Concerto N°1 de Tchaikovski[18]. Shura Cherkassky, l'un des plus grands pianistes romantiques, aujourd'hui disparu, ne cessait de louer le « génie » de Martha Argerich; Stephen Kovacevitch parle, quant à lui, « d'une facilité et d'une aisance au-delà de tout entendement ». Qui êtes vous réellement Madame Argerich ? Peut-être tout simplement « un phénomène de la nature (Eugène List) ».

Récompenses

Artiste exceptionnelle entrée de son vivant dans la légende, Martha Argerich a été largement récompensée :

Pour ses nombreux enregistrements qui ont fait date dans l’histoire de la musique, Martha Argerich s’est vue décerner :

  • 2000: Grammy Award pour la meilleure interprétation des Concertos pour Piano N° 1 & 3 de Prokofiev et du Concerto pour Piano N°3 de Bela Bartok (EMI)
  • Gramophone Artist of the Year, Best Piano Concerto Recording of the Year pour ses Concertos de Chopin (EMI)
  • 2005: Grammy Awardpour la meilleure musique de Chambre
  • 2006: Grammy Award pour la meilleure prestation des Concertos pour piano N°2 & 3
  • Choc du Monde de la Musique pour son Récital d’Amsterdam (EMI)
  • Künstler des Jahres der deutschen Schallplattenkritik pour la suite Cinderella (arrangement pour deux pianos) en compagnie de Mikhail Pletnev (DG)
  • Grammy Awards pour la suite Cinderella (arrangement pour deux pianos) en compagnie de Mikhail Pletnev (DG),

Elle a également été nominée pour les ‘’Grammy Awards’’ suivants :

  • Martha Argerich and Friends / Live from the Lugano Festival (EMI)
  • Meilleur Album de musique classique
  • Meilleure musique de chambre
  • Concertos pour Piano 2 & 3 de Beethoven. ‘’Mahler Chamber Orchestra. Direction Claudio Abbado (DG)
  • Meilleure Soliste

Discographie et vidéographie partielles

Une discographie complète est maintenue à jour par les nombreux admirateurs d'Argerich. Il existe d'elle plus de 100 CD d'enregistrements. Les titres disponibles sont répertoriés sur le site A Tribute to Martha Argerich. Consulté le 12-10-2008 (en) et "Argerich--Discography," (11 août 1999) (en).



Bibliographie

Liens externes

Notes et références

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu d’une traduction de l’article en anglais intitulé « Martha Argerich ».

  1. a , b , c , d , e , f , g , h  et i Martha Argerich, Piano bleu. Consulté le 11-10-2008 (fr)
  2. a , b , c , d , e , f , g , h , i  et j Martha Argerich, Wikipedia anglophone. Consulté le 12-10-2008 (en).
  3. Répartition du nom de famille "Argerich" en Espagne.
  4. Martha Argerich, the untamable / At the same moment Sun and black Moon, Olivier Bellamy, pour Le Monde de la musique, mai 2001. Consulté le 07-11-2008
  5. a , b , c , d  et e Evening Talks, un film de Georges Gachot dressant un portrait de la grande pianiste
  6. Concours international de piano Ferruccio Busoni (1957)
  7. (Traduction de l'article original en polonais) « Le premier concurrent à se présenter sur la scène ce vendredi était l'Argentine Martha Argerich. Elle a déjà attiré l'attention sur sa personne par son jeu [pianistique] merveilleux lors de sa première comparution aux éliminatoires. Il n'est pas surprenant que sa prestation présente soit attendue avec une énorme tension. Les brillantes études et mazurkas interprétées avec impétuosité et vigueur révélaient constamment une technique splendide : tout ceci fut spontanément applaudi par les auditeurs qui gratifièrent l'artiste d'une immense ovation. » - ZYCIE WARSZAWY, 6 mars 1965
  8. Traduction de l'article original en polonais « Depuis le début de la prestation d'Argerich, les émotions des auditeurs aussi bien que celles des critiques s'intensifiaient. Dès avant sa seconde apparition sur scène, les critiques l'avaient surnommée « la coqueluche des auditeurs. ». Beaucoup de superlatifs avaient été utilisés pour qualifier son jeu [pianistique] : « merveilleux », « passionné », « étincelant », « plein de tempérament », « techniquement parfait », « distingué » » - ZWIERCIADYO, 4 avril 1965
  9. (Traduction de l'article original en polonais) « Personne ne pouvait discuter le premier prix attribué à l'Argentine Martha Argerich. Son jeu [pianistique] étincelant, sa technique parfaite, sa prestation brillantissime et sa virtuosité toute romantique lui gagna d'emblée la faveur du public. Son interprétation des Mazurkas, pour lesquelles elle reçut le prix de la Radio polonaise, étaient tellement dansante et mélodieuse qu'elle atteignait pratiquement un sommet. » - TRYBUNA MAZOWIECKA, 20-21 mars 1965
  10. Martha Argerich, the untamable, Roger Bellamy pour Le Monde de la musique, mai 2001. Consulté le 07-11-2008 (en)
  11. Martha Argerich, the untamable, Brussels, Stephanie and the pianists, Olivier Bellamy, pour Le Monde de la musique, mai 2001. Consulté le 07-11-2008 (en)
  12. Incantations - Schwanengesang an Apollo - Belle musique N°3 - Liebliches lied
  13. Nelson Freire sent us a few lines about his friendship with Martha Argerich, Nelson Friere. Consulté le 07-11-2008 {{en}
  14. lien web|url=http://www.andrys.com/armonde2.html|titre="Martha is a survival"|éditeur=Ivry Gitlis|consulté le=07-11-2008}} (en)
  15. Traduction de l'article original en polonais « Bien des pianistes talentueux ont tenté d'interpréter la difficile Étude en Do-majeur Op.10 jusqu'à ce qu'Horowitz l'enregistre, mais nul ne lui a succédé aussi brillamment que Martha Argerich. Depuis ses tous débuts, cette phénoménale Argentine aux doigts d'acier a montré l'étendue de ses extraordinaires possibilités au cours des passages pour la main droite stupéfiants de luminosité - sa rapidité d'exécution et son expressivité au cours de cette Etude sont restées inégalées; et une telle prestation du Prélude en Ré mineur n'a jamais été entendue depuis Maurizio Pollini, le gagnant de ce Concours, l'a interprétée cinq ans auparavant. » - STOLICA, 7 mars 1965.
  16. « This harmony within a group of people gives me a strong and peacefull feeling - MARTHA ARGERICH in Evening Talks »
    (NdT)« Cette harmonie au sein d'un groupe me donne une sensation de force et de paix (intérieure) - MARTHA ARGERICH in Evening Talks »
  17. Serge Rachmaninov, Concerto pour piano N°3 - Suite N°2 pour 2 pianos, opus 17, Ricardo Chailly - Phillips
  18. Phillips 446 673-2

Dean Elder: Pianist at Play, Kahn and Averill, 17 janvier 1998, ISBN 9781871082104; ISBN 1871082102 [1]

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