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Ostracisme (Grèce antique)
Pour les articles homonymes, voir Ostracisme.L'ostracisme (en grec ancien ἐξοστρακίζω, bannir; La racine "ostr", que l'on retrouve dans ostréiculture, signifie coquillage : en effet, des coquillages furent utilisés comme bulletins de vote dans les plus anciennes procédures de ce type connues) est, à Athènes et quelques autres cités, au Ve siècle av. J.-C., une institution qui permet de bannir pendant dix ans un citoyen, sans que celui-ci perde ses biens. C'est un mécanisme d'auto-défense populaire, un simple vote de défiance politique : ce n'est pas une peine juridictionnelle, cette sanction n'est pas une condamnation pénale (pas de peine pécuniaire, conservation des droits civiques, etc.). Cette importante institution est marquée d'un grand esprit d'humanité tant dans la procédure suivie que dans la peine prononcée.
Sommaire
Athènes
On l'attribue traditionnellement à Clisthène, mais le premier vote d'ostracisme n'eut lieu qu'en 488. Chaque année, durant la sixième prytanie (entre janvier et février : période ou les citoyens pouvaient se rendre en masse à la ville, les récoltes étant engrangées) l'ecclésia (l'assemblée des citoyens) votait pour savoir si l'on devait procéder à un ostracisme. Le vote s'effectuait à main levée, il n'y avait pas de débats et les noms des suspects n'étaient pas révélés. Si l'accord se faisait sur le principe de l'ostracisme, l'assemblée du peuple se réunissait une deuxième fois la prytanie suivante, en assemblée solennelle (catecclésia) devant comporter au minimum 6 000 votants, et chaque citoyen qui souhaitait voter, inscrivait sur un tesson de céramique ou éventuellement une coquille d'huître (d'où le mot ostracon) le nom de la personne dont le bannissement hors d'Athènes lui semblait nécessaire au bien public. Il n'y avait encore une fois pas de débat. Pourvu qu'il y eût une majorité absolue de dégagée lors du vote, la personne dont le nom apparaissait devait quitter la cité dans les dix jours pour les dix ans (cette peine demeurait souvent théorique, car beaucoup d'ostracisés étaient rappelés par anticipation).
L'ostracisme fut surtout utilisé comme arme politique dans les rivalités entre hétairies (factions aristocratiques) dans le premier quart du Ve siècle av. J.-C. L'analyse graphologique des centaines d'ostraca retrouvés lors des fouilles de l'agora a montré que pour un vote donné seule une dizaine de mains différentes avaient inscrit les noms sur les tessons : c'est la preuve que ces « bulletins » étaient préparés à l'avance et distribués par les responsables de ces factions à leur clientèle, dont le vote était ainsi dirigé. La littérature antique apporte la confirmation de ces pratiques : ainsi Plutarque, dans la Vie d'Aristide (VII, 7–8), rapporte comment un paysan illettré demande à Aristide d'écrire pour lui son nom sur le tesson. Dans le même passage, l'auteur explique comment Hyperbolos fut ostracisé en 417 grâce à une entente entre Nicias et Alcibiade, qui devaient être les protagonistes de l'ostracophorie cette année-là.
Le premier homme ostracisé fut un certain Hipparque vers (487), suivi en 486 par Mégaclès de la famille des Alcméonides. Parmi d'autres hommes connus pour avoir été ostracisés, on compte Xanthippe, Aristide le Juste, Thémistocle, Cimon et Thucydide. Hyperbolos est la dernière victime connue (v.417).
Plutarque évoque l'ostracisme d'Aristide le Juste par une anecdote assez cocasse : alors qu'on votait à Athènes pour son ostracisme, un paysan illettré demanda à un homme distingué de l'aider à inscrire sur son tesson (ostrakon) le nom d'Aristide. L'homme lui demanda ce qu'il reprochait à Aristide. « Rien » répondit le paysan. « Je ne le connais même pas, mais j'en ai assez de l'entendre partout appeler "Le Juste". » Suite à cela, Aristide - car c'était lui l'homme distingué - écrivit honnêtement sur le tesson le nom qu'on lui demandait.
La disparition de l'ostracisme s'explique par la possibilité d'utiliser d'autres méthodes, moins lourdes (sans nécessité de quorum), pour écarter des adversaires politiques : l'eisangélia, la procédure de mise en accusation d'un magistrat devant l'assemblée, est la plus importante d'entre elles.
Pétalisme à Syracuse
À Syracuse, l'institution s'appelait « pétalisme », car on écrivait les noms sur des feuilles d'olivier (πέταλον / petalon). La durée du bannissement était de cinq ans. Diodore de Sicile ne date pas précisément l'époque où cette procédure fut en vigueur. Il précise qu'elle est postérieure à la condamnation à mort en -454 de Tyndaridès, qui aspirait à la tyrannie, et qu'elle fut abrogée peu de temps après sa promulgation, car jugée contre-productive, dissuadant des citoyens valables de participer aux affaires publiques[1]. Hermocrate en -411 et Dioclès en -408 furent bannis de Syracuse, sans qu'on sache quelle fut la procédure utilisée.
Argos
On sait par Aristote que l'ostracisme était pratiqué à Argos comme à Athènes[2].
Éphèse
Hermodore, ami d'Héraclite, fut exilé par les Éphésiens en ces termes : « Qu’il n’y ait personne qui soit meilleur que nous ; s’il y en a un qu’il aille vivre avec d’autres gens. » [3]. Cette simple indication, qui ne renseigne ni sur la durée de la peine ni sur la procédure utilisée, ne permet pas d'établir une similitude avec l'ostracisme athénien au-delà du caractère anti-aristocratique de la formule.
Notes
- ↑ Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, Livre XI, chapitre XXXV (ou autre numérotation : Livre XI, chapitre 86, et 87)
- ↑ Politique, Livre VIII (ordinairement placé le cinquième), §5
- ↑ source : Diogène Laërce, Héraclite.
Bibliographie
- M. Lang, Ostraka, The Athenian agora, vol. 25, Princeton, American school of classical studies in America, 1990.
- M. Michel HUMBERT, "Histoire des institutions politiques et sociales de l'Antiquité", DALLOZ, 8e édition
Articles connexes
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