Onde de tempête

Onde de tempête
Effet d'une onde de tempête

Une onde de tempête est le rehaussement du niveau de la mer sur la côte causé par les vents d'une importante dépression qui pousse sur la surface de l'océan ou d'un lac. Il en résulte un empilement de l'eau. Elle peut être accentué encore plus par la pression centrale du système qui cause un pompage d'Ekman et la forme du fond marin. En général, ce phénomène est associé aux cyclones tropicaux mais va également se produire avec les fortes dépressions des latitudes moyennes, surtout celles en développement rapide (les bombes) hivernal.

Les ondes de tempête sont particulièrement dangereuses quand elles surviennent en conjonction avec la marée haute. On a alors une addition du niveau des eaux. La prévision du niveau qu'atteindra la marée de tempête est donc dépendante de la synchronisation de l'arrivée des deux phénomènes.

Sommaire

Mécanisme

Diagramme illustrant la formation d'une onde de tempête par un cyclone tropical

Au moins cinq facteurs influencent les ondes de tempêtes: la pression atmosphérique centrale de la dépression, les vents, la rotation de la Terre, la configuration du fond marin et la marée (Harris 1963).

  1. Le vent: en se déplaçant, l'air agit par friction sur la surface de la mer. Cet effet crée une accumulation d'eau dans les régions sous le vent, similaire à celui qui crée un effet de seiche, qui est inversement proportionnel à la profondeur (Harris 1963). Le vent est le principal facteur dans la création des ondes de tempêtes[1] et plus il s'exerce sur une grande distance plus l'effet sera important.
  2. Pression centrale: la pression étant plus faible au centre de la dépression, la colonne d'air exerce un poids moindre sur la mer à cet endroit qu'à l'extérieur de la dépression. Pour égaliser les pressions dans l'eau, le niveau de la mer sera plus élevé au centre de la dépression comme le mercure montant dans un baromètre. Une règle empirique simple dit que pour estimer le rôle de la basse pression dans la formation d'une onde de tempête : une élévation supérieure de 1 cm à celle prévue normalement en fonction de la marée pour chaque hectopascal en dessous de la pression atmosphérique normale de 1013 hectopascals (hPa)[1]. Par exemple dans le cas de l'ouragan Juan, la variation due à sa pression centrale de 974 hPa était de 39 cm des 150 cm notés de l'onde de tempête à Halifax (Canada)[1].
  3. Rotation de la Terre: les vents tournant autour d'une dépression déplacent la surface de la mer. La force de Coriolis dévie ce mouvement vers l'extérieur d'une dépression ce qui crée une onde par transport d'Ekman qui s'ajoute à celle créée par la pression.
  4. La profondeur du fond marin: l'onde qui arrive de l'océan déplace un certain volume d'eau. Lorsqu'elle entre dans une zone où le fond marin s'élève ou dans une baie, le volume restant le même, la hauteur du niveau de la mer augmente sous forme de marée et de vagues. Plus la pente est raide, moins l'onde de tempête entrera dans les terres mais elle créera des vagues importantes. Inversement, une pente douce du plateau continental permettra à la mer d'entrer plus loin de la côte mais les vagues seront plus faibles[2].
  5. L'onde de marée: la coïncidence entre l'arrivée de la marée et celle de l'onde de tempête augmente considérablement la hauteur du niveau de la mer. Si on affaire à une marée d'eau vive, l'effet est encore plus grand.

Une règle empirique permet d'évaluer la surcote du niveau de la mer dans une zone de basse pression par la formation d'une onde de tempête : une élévation supérieure de 1 cm à celle prévue normalement en fonction de la marée pour chaque hectopascal en dessous de la pression atmosphérique normale de 1013 hectopascals (hPa)[1]. Cette évaluation est la combinaison des cinq phénomènes ci-dessus.

Histoire

De nombreux cas anciens d'invasion brutale de la mer sont documentés, dont la plupart ne semblent pas être des tsunamis.

Les Pays-Bas et l'Allemagne ont notamment retenus les épisodes (dits « Mandränke », « Mandrenke » ou « Grote Mandränke » en haut-allemand) d'inondations dévastatrices survenues en 1362 et 1634 qui ont bouleversé le trait de côte de la Mer du Nord et localement (comme au Schleswig-Holstein) du côté de la Mer Baltique. L'inondation catastrophique de 1953 est également le résultat d'une onde de tempête.

Potentiel

Le long d’un littoral exposé, les ondes de tempête sont souvent suivies de hautes vagues. Se trouver près du littoral pendant l'inondation causée par une onde de tempête tue bien des gens car elles se produisent rapidement, sans laisser beaucoup de temps de préparation. Les résidents, surtout ceux qui vivent dans les terres basses du littoral, doivent prendre des précautions et se préparer à affronter ce phénomène naturel.

Un grand nombre de victimes tuées par un cyclone tropical le sont en fait par l'onde de tempête. L'ouragan de catégorie 4 qui a détruit Galveston le 8 septembre 1900 poussait une onde de tempête qui a complètement submergé l'île de Galveston et noyé de 6 à 12 000 personnes. La plus forte marée de tempête signalée s'est produite en 1899 avec le Cyclone Mahina qui frappa Bathurst Bay, Australie avec une marée de 13 mètres. La plus importante aux États-Unis d'Amérique fut de 9 mètres avec l'ouragan Katrina en 2005 à Bay St. Louis (Mississippi).

Le Golfe du Bengale est particulièrement propice à ces marées étant dans une zone active en tempêtes tropicales et ayant une forme d'entonnoir peu profond. Avec 142 ondes d'intensités modérées à violentes notés entre 1582 et 1991, certaines ayant plus de huit mètres de haut, on y déplore des centaines de milliers de victimes (Murty et Flather, 1994) durant cette période. Elle porte d'ailleurs le surnom de capitale des ondes de tempêtes et la plus grande perte de vie causée par ce phénomène y est survenue en 1970 avec le cyclone de Bhola.

Prévision

Pour les cyclones tropicaux, et uniquement pour les cyclones tropicaux, une formule mathématique rapide a été développé pour estimer rapidement la hauteur potentiel d'une onde de tempête[3] : Sp = (0,070 * ΔP) * FS * FM.

Dans cet formule, Sp est le niveau de l'onde de tempête en mètre. ΔP est la différence de pression avec la pression minimale P0 telle que ΔP = 1010 − P0. FS est le « shoaling factor », facteur de correction fonction de la bathymétrie des lieux, qui augmente avec des fonds plats et peu profonds. Finalement, FM est le facteur de correction du déplacement de l'ouragan, qui augmente avec la vitesse de déplacement de l'ouragan.

Cette formule met en évidence le fait que les ondes de tempêtes sont les plus hautes quand l'ouragan se déplace rapidement en eau peu profonde. Un modèle plus exact est utilisé par le National Hurricane Center, le SLOSH (Sea, Lake, and Overland Surges from Hurricanes)[4],[5].

Pour les cyclones extratropicaux, ou dépressions des latitudes moyennes, les mêmes phénomènes sont mise en jeu et de la même manière. Cependant, la structure de ces systèmes météorologiques est radicalement différente, et est en particulier asymétrique. D'autres modèles doivent donc être utilisés.

Précautions

Les services météorologiques émettent des alertes lorsque le potentiel d'onde de tempête est présent. Les dépressions importantes et les cyclones tropicaux sont suivis et on calcule les différents effets pour estimer la hauteur de la marée qui arrivera sur les côtes. Des pays comme les Pays-Bas[6], les États-Unis d'Amérique [7], le Canada, la Grande-Bretagne [8] et la France[9] qui ont d'importantes zones côtières ont un tel système. Plus particulièrement pour les États-Unis d'Amérique, le National Hurricane Center mène depuis la fin des années 2000, une réflexion pour intégrer directement dans ses avis public une alerte aux ondes de tempêtes[10]. Une étape a été de retirer l'association faite dans l'Échelle de Saffir-Simpson entre les vents et l'onde de tempête, afin d'avoir une échelle plus spécifique aux ondes de tempêtes[11].

Des murs côtiers ont été érigés dans certains pays pour contenir les ondes de tempête. Par exemple, aux Pays-Bas des barrages et digues ont été construits après l'inondation causée par la mer du Nord en 1953. Les ouvrages principaux sont Oosterscheldekering et Maeslantkering. La barrière sur la Tamise vise un effet similaire.

En cas d'onde de tempête, l’intérieur d'un édifice plus élevé que la hauteur prévu de l'onde offre une protection des eaux montantes. S'il est de construction solide, les personnes qui se réfugient dans les étages supérieurs sont à l’abri des vents et des eaux pour autant qu'ils se tiennent loin des fenêtres. Conduire dans les eaux d’inondation peut devenir dangereux car le courant emporte tout sur son passage.

Notes

  1. a, b, c et d (fr) L'onde de tempête et les vagues causées par l'ouragan Juan à Halifax, Centre canadien de prévision d'ouragan, 2003-10-17. Consulté le 2010-03-30
  2. (en) Storm Surge, NOAA. Consulté le 2007-03-29
  3. (en)S. A. Hsu, DeWitt Braud et Brian Blanchard, « Rapid Estimation of Maximum Storm Surges Induced by Hurricanes Katrina and Rita in 2005 », National Weathr Association. Consulté le 2010-03-04
  4. (en)National Weather Service, « Sea Lake and Overland Surge from Hurricanes (SLOSH) », NOAA, 8 décembre 2009. Consulté le 2010-03-04
  5. (en)FEMA, « Sea, Lake, Overland, Surge from Hurricanes (SLOSH) », Gouvernement des États-Unis, 4 juin 2009. Consulté le 2010-03-04
  6. (en) Storm surge warning service, Ministère néerlandais de la sécurité. Consulté le 2007-03-29
  7. (en) Storm ready, National Weather Service. Consulté le 2007-03-29
  8. (en) Floodwarming, Environmental Agency. Consulté le 2007-03-29
  9. (fr) La prévision des surcotes à Météo-France, Météo-France. Consulté le 2007-09-06
  10. (en)National Hurricane Center, « Storm Surge Scales and Storm Surge Forecasting », NOAA, 19 février 2010. Consulté le 2010-03-04
  11. (en)National Hurricane Center, « The Saffir-Simpson Hurricane Wind Scale », NOAA, 19 février 2010. Consulté le 2010-03-04

Bibliographie

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  • Dunn, G.E. and Miller, B., 1964. Atlantic Hurricanes. Baton Rouge: Louisiana State University Press, 377 p.
  • P. Daniel, « Modélisation des marées de tempêtes dues aux cyclones », dans Actes des Ateliers de modélisation de l'atmosphère (Interactions Océan-Atmosphère), Toulouse, Météo-France, 1996, p. 183-188 
  • P. Daniel, « Un logiciel de prévision des surcotes pour les DOM/TOM », dans Metmar, no 163, 1994, p. 11-16 
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Voir aussi

Articles connexes

Liens externes


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