Logique polyvalente

Logique polyvalente

Les logiques polyvalentes (ou multivalentes, ou multivaluées) sont des alternatives à la logique classique aristotélienne, bivalente, dans laquelle toute proposition doit être soit vraie soit fausse. Elles sont apparues à partir des années 1920, surtout à la suite des travaux du logicien polonais Jan Łukasiewicz. Elles sont principalement étudiées au niveau du seul calcul propositionnel et peu au niveau du calcul des prédicats.

Elles ont au début eu leurs heures de succès car elles répondaient, en lien avec la physique quantique, à une demande d'existence d'un état autre que le vrai ou le faux. Ensuite, elles ont suscité un intérêt mathématique indépendant, non lié aux enjeux philosophiques, lorsque Chang (en) a formulé le concept de MV-algèbre (en)[1]. Aujourd'hui, elles sont principalement étudiées dans le contexte de la mise en question générale des principes du tiers exclu et de contradiction, donnant ainsi naissance aux logiques partielles et paraconsistantes (en).

Elles ont des parentés avec

  • la logique intuitionniste qui n'accepte pas le tiers exclu, car elle identifie la vérité mathématique au démontrable.
  • les logiques modales.
  • les modèles de Kripke de la logique intuitionniste, inspirés du forcing.
  • la logique floue, qui ajoute à la polyvalence la prise en compte combinée de l'imprécision et de l'incertitude. Plus précisément cette logique est une logique infinie non dénombrable-valente car la valeur de vérité d'une proposition est un réel compris entre 0 et 1.

Sommaire

Exemples de trivalence

Le meilleur exemple de physique est le paradoxe du chat de Schrödinger. On peut se demander dans quel état est le chat à la fin de l'expérience, quand on ne l'a pas encore regardé : est-il mort, est-il vivant ? Nul ne le sait et surtout nul ne peut le démontrer (approche intuitionniste). On peut alors faire intervenir un nouvel état, le chat est mort-vivant. En termes de modèle de Kripke, on dirait qu'il y a trois mondes possibles, un monde où le chat est vivant, un monde où le chat est mort et un monde où on ne peut ni dire si le chat est vivant ou mort. Ces trois mondes sont tous les trois aussi possibles. En revanche le monde où le chat est mort (respectivement où le chat est vivant) est accessible depuis le monde où le chat est vivant ou mort.

Les logiques partielles prennent comme troisième valeur le "ni vrai ni faux".

Les logiques paraconsistantes[2] interprètent la troisième valeur comme le "vrai et faux".

Trivalence ou Polyvalence ?

En menant à terme cette contestation des principes aristotéliciens, on en arrive naturellement à la logique à quatre valeurs: "vrai", faux", "ni vrai ni faux", "vrai et faux".

Par ailleurs, si la logique trivalente est la logique où l'univers des modèles de Kripke contient trois mondes possibles, on peut envisager d'autres formes de logiques, polyvalentes ou n-valentes, voire de valence infinie[3], comme on peut envisager des modèles de Kripke à n mondes ou même à un nombre infini de mondes. L'inconvénient de cette logique polyvalente-là est qu'elle « aplatit » tout et ne met pas en relation les mondes ou états entre eux.

Logique quaternaire

Un modèle de logique quaternaire visant à tenir compte de l'ensemble du réel est actuellement développé par Jean-François Froger, physicien et Robert Lutz, mathématicien.[réf. nécessaire]

Résultats

Le calcul propositionnel classique se généralise aisément à toute logique classique finie-valente avec comme sémantique les tables de vérité.

Emil Post en a fait une étude générale en 1921 montrant que toute logique finie-valente est complète et que le problème de la satisfaisabilité est décidable.

Une logique p-valente a p(pn) connecteurs n-aires pour tout entier n, mais Post a montré que l'on avait toujours un système complet de connecteurs (en) en n'utilisant que deux connecteurs unaires (dont une permutation circulaire) et deux connecteurs binaires, min (généralisant la conjonction) et max (généralisant la disjonction), par une construction inspirée des formes normales disjonctives et conjonctives du calcul propositionnel bivalent.

Références

  1. C. C. Chang, "Algebraic analysis of many-valued logics", Transactions AMS 88 (1958) 467–490 et "A new proof of the completeness of the Lukasiewicz axioms", Transactions AMS 93 (1959) 74–80.
  2. (en) Graham Priest (en), Paraconsistent logic sur le site plato.stanford.edu
  3. Par exemple en identifiant, comme Rudolf Carnap, les valeurs de vérité à des probabilités.

Bibliographie

  • Emil L. Post. Introduction to a general theory of elementary propositions. American Journal of Mathematics, 43:163–185, 1921. trad. fr. de J. Largeault dans Logique Mathématique : Textes, Paris : Armand Colin, 1972.
  • Alexandre Zinoviev, Philosophical Problems of Many-Valued Logic, D. Reidel Publishing Company, 169p., 1963.

Voir aussi


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