Logique minimale

Logique minimale

La logique minimale, créée par Ingebrigt Johansson, est, comme la logique intuitionniste, une variante de la logique classique. Les trois logiques diffèrent sur la façon de traiter la négation et la contradiction dans le calcul des propositions ou le calcul des prédicats. Dans une certaine mesure, la logique minimale n'aborde pas ce concept et représente une logique sans véritable négation.

Sommaire

Comparaison entre les diverses logiques

On utisera comme notation les symboles suivants : \lor pour la disjonction, \land pour la conjonction, \to pour l'implication, \lnot pour la négation, \leftrightarrow pour l'équivalence.

Les règles communes

Dans les trois logiques, on dispose des deux règles suivantes, relatives à la négation :

  • La règle d'élimination de la négation : Si on a à la fois une proposition A et sa négation \lnot A, alors on a une contradiction, notée \bot .
  • La règle d'introduction de la négation : Si une proposition A conduit à une contradiction, alors c'est que \lnot A est valide. Cette règle peut d'ailleurs être prise comme définition de la négation : \lnot A est un synonyme de A 
\to \bot.

Les différences

Les trois logiques diffèrent sur les conséquences à tirer d'une contradiction.

  • La logique classique utilise le raisonnement par l'absurde et déduit de \lnot A \to \bot le fait que A est valide. C'est en fait une règle d'élimination de la double négation, puisque \lnot A \to \bot est un synonyme de \lnot \lnot A.
  • La logique intuitionniste déduit d'une contradiction n'importe quelle proposition : \bot \to B, ce qu'on résume par la formule ex falso sequitur quodlibet.
  • La logique minimale ne prévoit aucun traitement lié à \bot.

Il en résulte que la logique minimale n'établit pas de différence entre la formule \bot et n'importe quelle autre formule. Considérons par exemple une formule quelconque C. Définissons A comme synonyme de A \to C. On a alors :

  • Si on a à la fois A et A, alors on a C. En effet, de A et de A \to C, on peut déduire C. C'est la règle du modus ponens.
  • Si une proposition A conduit à C, alors on a A \to C et donc A.

On voit donc que, si on n'attribue aucun rôle particulier à la contradiction, on peut faire jouer le rôle de cette contradiction à n'importe quelle formule C, en définissant la négation comme étant A \to C, et qu'inversement, on peut supprimer toute référence à la négation en logique minimale.

Par souci de comparaison avec les autres logiques, nous continuerons néanmoins à utiliser les symboles \lnot et \bot

Exemples de formules valides en logique minimale

Exemple 1 : (\lnot A \land \lnot B) \leftrightarrow \lnot(A \lor B)

En effet, supposons qu'on ait \lnot A \land \lnot B (autrement dit, on a à la fois \lnot A et \lnot B). Montrons que l'on a \lnot(A \lor B), autrement dit, montrons que l'hypothèse A \lor B conduit à une contradiction. Distinguons les cas : soit on a A qui est bien contradictoire avec l'hypothèse \lnot A, ou bien on a B qui est contradictoire avec \lnot B. Dans tous les cas, on a une contradiction, CQFD.

Réciproquement, supposons que l'on ait \lnot(A \lor B) et montrons que l'on a \lnot A, autrement dit que A conduit à une contradiction. Mais A entraîne A \lor B qui est contradictoire avec l'hypothèse. CQFD. On procède de même pour montrer \lnot B.

Par contre, on a seulement (\lnot A \lor \lnot B) \to \lnot(A \land B), la réciproque étant seulement vraie en logique classique.

Exemple 2 : A \to \lnot\lnot A

Supposons qu'on ait A. Alors l'hypothèse supplémentaire \lnot A conduit à une contradiction. On a donc \lnot \lnot A. CQFD

La réciproque est invalide en logique minimale et en logique intuitionniste. On dispose cependant de \lnot\lnot\lnot A \to \lnot A. En effet, supposons que \lnot\lnot\lnot A. L'hypothèse supplémentaire A entraîne \lnot\lnot A qui est contradictoire avec \lnot\lnot\lnot A, donc on a \lnot A.

Exemple 3 : On peut montrer la validité en logique minimale de \lnot\lnot (A \to B) \to (\lnot\lnot A \to \lnot\lnot B). Mais la réciproque est seulement valide en logique intuitionniste ou en logique classique.

Exemple 4 : En ce qui concerne la contraposition, on peut montrer qu'en logique minimale, on a (A \to B) \to (\lnot B \to \lnot A), ainsi que (A \to \lnot B) \to (B \to \lnot A) et (\lnot A \to \lnot B) \to (B \to \lnot\lnot A), mais on ne dispose pas de (\lnot A \to \lnot B) \to (B \to A) qui est une variante du raisonnement par l'absurde.

Exemples de formules invalides

Exemple 1 : La formule \lnot\lnot A \to A est invalide en logique minimale. En effet, si elle était prouvable, alors on pourrait prouver également, en remplaçant \bot par une proposition quelconque C que ((A \to C) \to C) \to A, or cette dernière formule n'est pas même prouvable en logique classique, sans hypothèse supplémentaire sur C.

Exemple 2 : La formule (\lnot A \lor B) \to (A \to B) est valide en logique intuitionniste et en logique classique, mais pas en logique minimale. En effet, une preuve demanderait de supposer \lnot A \lor B et d'en déduire A \to B, et donc de supposer A et d'en déduire B. L'utilisation de \lnot A \lor B par disjonction des cas et de A pour prouver B demanderait de prouver que \lnot A et A prouvent B, et que B et A prouvent B. Mais la preuve de B à partir de \lnot A et A n'existe pas en logique minimale. Elle existe en logique intuitionniste, puisque, de la contradiction A \land \lnot A, on peut déduire B.

Logique minimale et logique classique

La traduction de Gödel

La logique minimale, amputée du traitement de la négation, semble bien pauvre devant la logique classique ou la logique intuitionniste. Elle n'en est cependant pas si éloignée. On montre en effet, que, pour toute formule A, il existe une formule A', équivalente à A en logique classique, telle que A est prouvable en logique classique si et seulement si A' est prouvable en logique minimale. A' est obtenue au moyen de la traduction de Gödel, définie itérativement comme suit :

\bot' = \bot
p' = \lnot \lnot p pour toute formule atomique différente de \bot
(\lnot A)' = \lnot A'
(A \land B)' = A' \land B'
(A \to B)' = A' \to B'
(A \lor B)' = \lnot \lnot (A'\lor B')
(\forall x \; A)' = \forall x \; A'
(\exists x \; A)' = \lnot \lnot \exists x \; A'

Autrement dit, la traduction de Gödel d'une formule consiste à rajouter des doubles négations devant les formules atomiques, les disjonctions et les quantificateurs existentiels. Cela signifie qu'en logique classique, il suffit de faire appel à des raisonnements par l'absurde seulement devant des formules atomiques, des disjonctions ou des quantificateurs existentiels.

Exemples

Par exemple, le tiers exclu A \lor \lnot A est un théorème de la logique classique, mais pas de la logique minimale. Par contre, en logique minimale la formule \lnot \lnot (\lnot \lnot A \lor \lnot \lnot \lnot A) est valide. En effet, celle-ci est équivalente, en logique minimale, à \lnot \lnot (\lnot \lnot A \lor \lnot A) ou à \lnot (\lnot \lnot \lnot A \land \lnot \lnot A) ou encore à \lnot \bot, c'est-à-dire à \bot \to \bot qui est une formule valide.


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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Logique minimale de Wikipédia en français (auteurs)

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