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Le terme de jurisprudence désigne, en français, l'ensemble des décisions de justice relatives à la solution d'une question juridique donnée.Il s'agit d'abord des décisions rendues par les hautes juridictions nationales du pays considéré (les Cours suprêmes ou souveraines, notamment les Cours ou Conseils constitutionnels , Cours de cassation , Conseils d'État de plusieurs pays), mais aussi, avec un poids moindre, celles rendues par les autres juridictions (cours d'appel et tribunaux ordinaires). On considère également la jurisprudence issue des juridictions internationales (telles Cour européenne des droits de l'homme et Cour de justice des Communautés européennes...) qui a un impact certain sur la jurisprudence nationale des pays concernés.
Sommaire
Terminologie
Au sens large, c'est l'ensemble des décisions rendues par les juges. On parle de la jurisprudence.
Au sens étroit, ce terme est utilisé pour désigner une solution particulière d'un juge à une question de droit donnée. On parle d'une jurisprudence. Cette jurisprudence peut devenir commune : ce sera l'interprétation que les tribunaux adopteront par rapport à une ou des dispositions législatives ou règlementaires, ces dernières étant parfois imprécises, incomplètes ou obscures. L'on pourrait par ailleurs qualifier de jurisprudence, l'activité juridictionnelle, la jurisdictio des juges.
Dans un sens ancien, la jurisprudence était la science du droit.
Rôle et sens de la jurisprudence
Dans les pays de common law, la jurisprudence (case law, loi issue des procès, des jugements) joue un rôle particulièrement important : les arrêts des cours d'appel lient les tribunaux inférieurs jugeant d'autres affaires, voire les cours mêmes qui les ont rendus (règle du précédent, dite aussi du rule of stare decisis).
En revanche, les pays de tradition romano-germanique répugnent à l'existence d'un droit créé par les tribunaux et non par le législateur. Par exemple, le Code civil français interdit dans son article 5 les arrêts de règlement en disposant : « Il est défendu aux juges de prononcer par voie de disposition générale et réglementaire sur les causes qui leur sont soumises ». La décision d'un juge ne peut donc régler à l'avenir le sort d'une question de droit et ne s'applique en principe qu'à l'affaire jugée. Mais c'est malgré tout le rôle des juridictions suprêmes d'uniformiser la jurisprudence afin d'éviter la disparité des jugements et des arrêts des juridictions inférieures dans une matière donnée.
Ainsi, en France, si la solution adoptée par la Cour de cassation dans une affaire ne contraint pas les cours d'appel et les tribunaux à statuer d'une manière identique dans des affaires similaires, il demeure que les arrêts de la Cour de cassation, et particulièrement ceux qui font l'objet d'une publication au Bulletin des Arrêts, marquent une tendance qui est généralement suivie par les juridictions de fond pour éviter la multiplication des recours et notamment des pourvois en cassation.
La jurisprudence peut être également définie comme l'habitude de juger des tribunaux, qui, bien que dépourvue de tout pouvoir normatif, n'en constitue pas moins, en pratique, une autre source du droit à l'instar de la doctrine par exemple.
De fait, lorsque cette habitude de juger est établie de longue date, peut-on parler de « jurisprudence constante », à l'instar du quieta non movere (littéralement : ne pas déranger la quiétude ; ne pas faire du droit une « girouette jurisprudentielle ») des droits anglo-américains.
L'habitude n'exclut toutefois pas un revirement de jurisprudence, c'est à dire un tournant dans l'interprétation d'un point de droit, principalement par les juridictions suprêmes (comme la Cour de cassation et le Conseil d'État en France). Le revirement peut également provenir d'un nouveau courant d'interprétation des juges du fond que les juridictions supérieures consacrent lorsqu'elles sont saisies. Ces revirements de jurisprudence, sauf rares exceptions, ont un effet rétroactif sur l'interprétation de la règle de droit et les situations juridiques [1]. Ils sont parfois difficiles à prévoir, voire à repérer et à identifier, mais les juridictions suprêmes sont attentives à gérer au mieux ces revirements (rôle des publications, des rapports, des colloques).
Critères de formation d'une jurisprudence
L'on pourrait énoncer trois critères théoriques, à l'origine de la formation de la jurisprudence. On dit alors qu'une décision « fait jurisprudence ».
- Formulation de la décision : une décision peut faire jurisprudence grâce :
- à la fermeté du principe : si la formulation de la décision se voit être abstraite, générale et brève ;
- à la nature de la juridiction ayant rendu la décision : par exemple, une décision émanant d'un Tribunal d'Instance sera beaucoup moins importante que celle émanant de la Cour de Cassation du pays ;
- au nombre de décisions similaires rendues par la ou les Cours supérieures (telles la Cour de cassation ou la Cour suprême dans divers pays).
- Constance de la décision : la répétition d'une décision.
- Publicité de la décision : la publication de la décision. En effet, la jurisprudence n'aurait pas sa valeur sans la reconnaissance de la communauté des juristes.
Publication de la jurisprudence dans les pays de droit civil
La jurisprudence désigne toujours une sélection de décisions car il semble inimaginable de publier l'ensemble des décisions judiciaires. De plus, un grand nombre d'arrêts et de jugements ne présentent pratiquement aucun intérêt. Beaucoup de décisions traitant en fait du même problème juridique.
Les décisions de certaines juridictions sont cependant publiées systématiquement. C'est généralement le cas des décisions des plus hautes institutions nationales et internationales. Cette pratique est souvent liée à l'application de la hiérarchie judiciaire. Quand le juge suprême donne son avis, il a bien plus de valeur qu'une décision de première instance.
À l'ère du tout numérique, les décisions ne sont cependant pas à la dispositions des spécialistes immédiatement et il faut généralement un certain délai, qui peut être compensé par la mise à disposition des textes par voie électronique (http://www.cass.be, Eur-Lex ou Juricaf, par exemple).
Autrement dit, en règle générale, le recensement et la publication de jugements ou d'arrêts sont en grande partie laissés à la discrétion des éditeurs de revues juridiques. Ceux-ci sont tenus informés des décisions intéressantes par un réseau de collaborateurs spécialisés (magistrats, avocats, greffiers). Ils opèrent un tri dans les textes en fonction de leur domaines d'intérêt, mais aussi de leur importance : soit que ces décisions abordent un problème nouveau, soit qu'elles précisent une solution déjà retenue antérieurement, soit qu'elles opèrent un revirement de jurisprudence.
Il n'existe pas de délai fixe entre la décision rendue et sa publication : elle peut être signalée dans un format résumé et « brut » très rapidement dans telle revue, ou plusieurs années plus tard dans sa version intégrale accompagnée du commentaire d'un juriste dans telle autre.
Pour en savoir plus
Articles connexes
- Case law, Règle du précédent
- Arrêt de règlement
- Juridictions suprêmes : Cour suprême, Cour constitutionnelle, Conseil constitutionnel, Cour de cassation, Conseil d'État.
- Wikipédia comme référence judiciaire
- Pour la France
- Cour de cassation (France), Conseil d'État (France).
- Grands arrêts du Conseil d'État (France), Grands arrêts du Tribunal des conflits (France)
- Rétroactivité en droit français
- Liste de revues françaises de jurisprudence
Moteurs de jurisprudence
La recherche de la jurisprudence nécessite de nombreux liens suivant les pays et les juridictions concernées.
- Jurisprudence internationale
- Affaires jugées par la Cour internationale de justice
- Association des Hautes Juridictions de Cassation des pays ayant en partage l'usage du Français
- Association internationale des hautes juridictions administratives
- Jurisprudence européenne
- Recherche en jurisprudence de la CEDH
- Recherche en jurisprudence de l'Union européenne (CJCE)
- Répertoire de jurisprudence communautaire et Formulaire de recherche
- Portail commun de jurisprudence du Réseau des présidents des cours suprêmes judiciaires de l'Union européenne
- Recherche dans les jurisprudences nationales concernant le droit communautaire européen, sur le site de l' Association des Conseils d'Etat et des Juridictions administratives suprêmes de l'Union européenne
- Pour la Belgique
- Pour la France
Sites Internet officiels réservés à la diffusion de la jurisprudence :
- Légifrance, le service public de la diffusion du droit : Jurisprudence constitutionnelle, Jurisprudence judiciaire, Jurisprudence administrative.
Sites Internet officiels avec jurisprudence commentée :
- Décisions DC du Conseil constitutionnel (France)
- Jurisprudence et Publications de la Cour de cassation (France)
- Jurisprudence du Conseil d'État (France)
- Jurisprudence de la Cour des comptes (France)
Autres sites gratuits :
- Liens vers la jurisprudence diffusée sur Internet sur le site droit.org
- De quel droit !, une cyberbase de jurisprudence relative au droit des étrangers en France
- Jurisprudence droit des technologies de l'information (NTIC)
- Cours sur la jurisprudence administrative sur Fallait pas faire du droit
- Recherche experte dans les jurisprudences de la cour de Cassation et des juridictions administratives sur le site easydroit.fr
Bibliographie conseillée
- Nicolas Molfessis (dir.), La Cour de cassation et l'élaboration du droit, coll. Études juridiques, vol. 20, Economica, 2004
- Nicolas Molfessis (dir.), Les revirements de jurisprudence : rapport remis à Monsieur le Premier Président Guy Canivet, Paris, Juris Classeur, 2005
Autres liens
- Serge Braudo, Définition du mot jurisprudence dans le Dictionnaire du droit privé français de Serge Braudo.
- « Interprétation et portée des arrêts de la Cour de cassation en matière civile », Bulletin d’information de la Cour de cassation, n° 661, 15 mai 2007, p. 6-21
- Guy Canivet, 1er Président de la Cour de cassation française, « Activisme judiciaire et prudence interprétative », in La création du droit par le juge, Archives de philosophie du droit, tome 50, Dalloz, 2007.
- Incertitude et politique jurisprudentielle de sécurisation du droit (2005), « Questions et évolutions majeures de la jurisprudence : une politique jurisprudentielle de sécurisation du droit », par Guy Canivet, Premier Président de la Cour de cassation
- La politique jurisprudentielle (2007), par Guy Canivet et Nicolas Molfessis
- Les revirements de jurisprudence : rapport remis à Monsieur le Premier Président Guy Canivet (dit Rapport Molfessis), par Nicolas Molfessis (30 novembre 2004)
Notes et références
- ↑ Cf. par exemple l'arrêt Cass. soc. du 17 décembre 2004 (Application à l'instance en cours d'une nouvelle jurisprudence)
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