- Kenneth Arnold
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Pour les articles homonymes, voir Arnold.
Kenneth Albert Arnold (29 mars 1915 à Sebeka (en), Minnesota - 16 janvier 1984 à Bellevue, État de Washington) est un aviateur américain qui fut le témoin de ce qui est considéré comme la première grande observation d'OVNI.
Sommaire
Les faits
Le mardi 24 juin 1947, Kenneth Arnold, un pilote privé de Boise, dans l'Idaho membre du « Search and Rescue Mercy Flyer », rapporte avoir vu neuf objets volants inhabituels près du Mont Rainier dans l'État de Washington alors qu'il effectue un déplacement à bord de son appareil - un CallAir A-2 - entre Chehalis et Yakima, déplacement qu'il met à profit pour rechercher un avion militaire disparu en décembre 1946. Arnold décrivit des objets d'une forme inhabituelle, arrondis à l'avant et triangulaires à l'arrière, et dotés d'une vitesse prodigieuse, plus de deux fois la vitesse du son (aucun avion n'a encore franchi le mur du son à l'époque). C'est cette histoire, largement diffusée par l'Associated Press, qui est à l'origine de la controverse sur les "soucoupes volantes" (en anglais flying saucer, ou flying disk) devenues par la suite ovnis (objets volants non identifiés).
Les différentes versions de l'histoire
L'histoire de l'observation de Kenneth Arnold a longtemps été décrite de façon inexacte, à partir de sources incomplètes. Les rares enquêtes réalisées par des chercheurs privés, sur l'observation d'Arnold ou sur cette période de l'histoire des ovnis, ont fait l'objet de publications confidentielles[1]. La majorité des auteurs de livres sur les ovnis se sont contentés de reprendre les versions de "l'affaire Arnold" données par les auteurs qui les avait précédés.
Les versions les plus souvent publiées décrivent qu'après avoir fait son observation, Arnold se serait posé à Yakima, aurait discuté avec des amis pilotes, puis qu'il serait reparti en direction de Pendleton où il aurait été accueilli par des journalistes qui avaient eu vent de l'affaire. Cette version est inexacte. Il est vrai qu'une heure après avoir effectué son observation, Arnold atterrit à Yakima, dans l'État de Washington où il décrit ce qu'il a vu à des amis pilotes. Il est exact également qu'après cela, il se rendit à Pendleton, dans l'Oregon, où il répéta son histoire à d'autres pilotes. Mais il n'y avait aucun journaliste parmi eux. Certains historiens et spécialistes de la question, notamment le chercheur américain Loren Gross[2]ou le sociologue Pierre Lagrange[3], ont montré qu'aucun journaliste n'était présent parmi les personnes qui se trouvaient à Pendleton. Ils n'interviendront qu'à partir du lendemain. Pour l'instant, Arnold tente de contacter la permanence du FBI (il n'y a même pas de bureau local de l'agence), sans résultat. Il passe la nuit dans cette petite ville du nord-est de l'Oregon et c'est le lendemain, après avoir discuté avec un inconnu qui aurait lui aussi observé des phénomènes étranges quelque temps plus tôt, que Kenneth Arnold décide de se rendre à la rédaction du quotidien local, l'East Oregonian. Le chercheur américain Loren Gross est le premier à être jamais retourné consulter les articles publiés à la suite de la rencontre qu'Arnold a alors eue avec deux journalistes, Nolan Skiff et Bill Bequette (1917-2011). En 1988, Pierre Lagrange a retrouvé l'un des deux journalistes, Bill Bequette (Nolan Skiff est décédé en 1970) qui résidait alors dans l'État de Washington[4]. D'après les souvenirs livrés par Bequette, c'est au cours de cet entretien du 25 juin 1947 qu'un détail livré par Arnold conduit par erreur à l'invention de l'expression "flying saucer". Arnold décrit à nouveau son observation aux deux journalistes. Il leur explique notamment que les objets volaient de façon irrégulière, "comme une soucoupe qui ricocherait sur l'eau" (like a saucer if you skipped it accross the water). À partir de ces informations, Bill Bequette rédige un petit article qui paraît dans l'édition du jour de l'East Oregonian. Il adresse aussi une dépêche Associated Press à Portland. Il apprend à son retour de déjeuner, en début d'après-midi, que la dépêche a été diffusée sur le réseau national de l'AP, où elle a suscité l'intérêt de très nombreuses rédactions de presse. Bill Bequette retourne donc s'entretenir avec Arnold à son hôtel et téléphone de nouvelles informations à l'AP de Portland. C'est à la suite de la parution des articles le lendemain dans la presse et des commentaires faits à la radio que les expressions « soucoupe volante » et "disque volant" seront inventées par les journalistes, bien que cette description se référât au déplacement des objets plutôt qu'à leur forme. Dans la semaine qui suivit, des centaines d'observations similaires seront rapportées par des témoins qui reprendront ces termes pour les désigner. Arnold se plaignit à de nombreuses reprises d'avoir été cité de façon inexacte, et maintint que les objets avaient la forme d'un demi cercle à l'avant et d'un triangle à l'arrière. Il précisera aussi par la suite que l'un d'eux ressemblait à un « boomerang » ou un « croissant »[5], (photo ci-contre).
La presse interroge l'armée pour savoir si des engins expérimentaux étaient en vol. Mais l'US Air Force affirma toujours n'avoir eu aucun avion dans la zone du Mont Rainier au moment de l'observation. Arnold n'a pas affirmé que les objets étaient des astronefs extraterrestres, bien qu'il ait dit : « étant de nature non américaine, si ce n'est pas fabriqué par notre science ou une autre force aérienne, j'incline à croire que cela est d'origine extraterrestre. » Après, il ajouta « je ne pense pas que c'est quelque chose qui peut provoquer une hystérie populaire. » Les spéculations extraterrestres peuvent avoir été motivées par un désir d'apaiser les peurs du public de l'apparente réelle possibilité d'une invasion étrangère. L'observation d'Arnold se déroula moins de deux ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, dans la première phase de la guerre froide.
Arnold affirma également avoir vu les mêmes objets trois autres fois, et au moins huit autres pilotes volant dans le nord-ouest des États-Unis firent des observations similaires. Cependant, l'histoire originale ne fut jamais corroborée, en fait, un pilote de DC-4 quelque 15 kilomètres plus loin ne constata rien d'inhabituel. Néanmoins, Arnold était un pilote expérimenté qui n'avait apparemment rien à gagner en fabriquant cette histoire. En effet, il ne semblait pas apprécier la publicité qui s'ensuivit, remarquant qu' « aucun d'entre nous n'apprécie les moqueries. » En outre, sa description resta justement cohérente, alors que d'autres pas, comme les autres premières histoires de rencontre d'OVNI, comme l'incident de Roswell.
En 1952, Kenneth Arnold publia le livre The Coming of the Saucers, en compagnie de Raymond Palmer, un rédacteur-en-chef de magazines de science-fiction populaire, qui lui avait écrit dès le lendemain de la publication de son observation par la presse, et qui se tournera plus tard vers la publication de magazines consacrés au paranormal et aux ovnis. Dans cet ouvrage, Arnold décrit son observation du 24 juin 1947 ainsi que les événements qui ont suivi, notamment l'enquête qu'il a effectuée quelque temps plus tard à Tacoma sur une autre observation qui se révéla par la suite être un canular (malgré la controverse entretenue par certains auteurs qui ont, à diverses reprises depuis 1947, tenté de relancer cette histoire).
Explications sceptiques
Depuis 1947, de très nombreuses explications ont été proposées pour rendre compte de l'observation de Kenneth Arnold. On a évoqué un mirage, des bolides, des avions expérimentaux, etc. Un journaliste écrivant dans le magazine L'Illustration en 1952 a même soupçonné que Kenneth Arnold lui-même était une invention de la presse américaine. Pour certains sceptiques[Qui ?], elle s'explique par une méprise avec un troupeau de pélicans blancs américains. Ils volent dans le type de formation observée par Arnold et ils ont un plumage blanc qui reflète la lumière. De plus, ils ont une queue très petite, ce qui correspond aussi à l'aspect de boomerang que le témoin a donné à l'un des engins (mais pas aux huit autres, à la forme générale plutôt circulaire). Enfin, leur observation n'est pas courante, ce qui rend très probable qu'Arnold n'en ait pas vu auparavant. En fait, la seule chose que le témoin ait mal évaluée, c'est leur taille et par là leur vitesse. Mais on sait que l'être humain n'est pas capable d'évaluer la taille réelle d'un objet dont il n'a pas de référence cognitive (il ne sait pas ce qu'il est en train d'observer, comme un ovni), particulièrement sur un fond uni comme le ciel (où il n'y a pas d'autres objets pour faire la comparaison). En ce qui concerne les pélicans d'Arnold, il est probable qu'ils soient passés un moment devant la montagne, mais comme elle était couverte de neige, ils disparaissaient aux yeux de l'observateur, ce qui lui a donné l'impression subjective que les objets étaient loin derrière... C'est à cause de cette explication du cas fondateurs du phénomène ovni que les sceptiques sont parfois surnommés, particulièrement dans le monde anglo-saxon, des pélicanistes.
Un autre point important dans le cadre du modèle sociopsychologique du phénomène ovni est que l'expression soucoupe volante résulte d'une méprise par les journalistes et non de l'observation d'Arnold. Il a décrit aux journalistes le mouvement des objets comme similaire à ceux de soucoupes qu'on lancerait sur l'eau (un déplacement par ricochets). En rédigeant hâtivement son article, le journaliste Bill Bequette a attribué le terme soucoupe à la forme au lieu du mouvement, ce qui donna le terme de soucoupes volantes. Or, dans les semaines qui suivirent, des dizaines de témoins se manifestèrent, pour dire qu'ils avaient vu des soucoupes volantes. Ils décrivirent non pas la forme réellement observée par Arnold (circulaires à l'avant et triangulaires à l'arrière), mais celle véhiculée par la presse. C'est un exemple parfait de l'importance de la suggestion[6] des médias, et de l'influence qu'ils ont lorsqu'ils façonnent les témoignages fortéens en général, ou d'ovni en particulier...
Mais, il faut aussi noter que d'autres témoins ont décrit au cours de cet été 1947 des "soucoupes volantes" sans leur attribuer la forme de soucoupes[7]. Certains récits diffusés par la presse ont donc pu résulter du même genre de rédaction hâtive que l'article initial de Bill Bequette. Seule une enquête précise permettant de faire la part entre la description des témoins et la retranscription donnée par les journaux permettrait de trancher ce point.
Publication
- avec Raymond Palmer, The Coming of the Saucers. A documentary report on sky objects that have mystified the world, Boise (Idaho) ; Amherst (Wisconsin), Kenneth Arnold and Ray Palmer, 1952. Édition privée.
Notes et références
- Voir notamment Ted Bloecher, Report on the UFO Wave of 1947, 1967 et Loren Gross, Charles Fort, the Fortean Society & the Unidentified Flying Objects, Fremon, Ca, 1976.
- Voir Loren Gross, Charles Fort, the Fortean Society & the Unidentified Flying Objects, Fremont, Ca, 1976, p. 77-78.
- http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/comm_0588-8018_1990_num_52_1_1794 Voir Pierre Lagrange, "L'affaire Kenneth Arnold. Note sur l'art de construire et de déconstruire quelques soucoupes volantes", Communications n° 52, novembre 1990, pp. 283-309.
- Voir: Pierre Lagrange “EO Journalist Broke First 'Flying Saucer' Story”, East Oregonian, 24 juin 1997, p. 1, 5; même auteur, “Le jour où les soucoupes volantes ont débarqué”, Science & Vie Junior n° 94, juillet 1997, p. 36-39; P. Lagrange et Kim Arnold, “Soucoupes volantes : la première fois”, Science & Vie Édition spéciale 50 ans d'ovnis, juin 1997, p.16-21 .
- Voir les articles de P. Lagrange déjà cités. Cette forme en croissant a souvent donné lieu à des interprétations. Certains ont supposé, sans apporter le moindre élément concret, qu'Arnold avait pu voir des ailes volantes, comme celles construites par la firme Northrop. C'est le cas notamment de l'ouvrage de Hallet, M. (1989). Critique historique et scientifique du phénomène OVNI.. Liège: Chez l'auteur.
- http://www.csicop.org/si/9709/sheaffer.html Voir à ce propos l'article de Robert Sheaffer: The Truth is: They never were saucers:
- Voir à ce propos l'étude de Ted Bloecher, Report on the UFO Wave of 1947, Washington DC, The Author, 1967.
Voir aussi
Liens internes
Liens externes
- (en) Description par Kenneth Arnold de son observation du 24 juin 1947
- (en) Transcription de la conversation téléphonique entre le journaliste Edward Murrow et Kenneth Arnold (7 avril 1950)
- (fr) Archive: un reportage présenté par Jean-Claude Bourret sur l'observation de Kenneth Arnold
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