Alternances municipales à Beauvais depuis l'Après-guerre

Alternances municipales à Beauvais depuis l'Après-guerre

Alternances municipales à Beauvais depuis l'Après-guerre

L’installation de la gauche à la mairie (1977-1989)

Depuis l'après-guerre, la vie politique beauvaisienne avait été dominée par la droite modérée ou gaulliste, qui avait emporté la mairie sans réelle difficulté. La cité bellovaque était en effet réputée pour son conservatisme foncier : monarchiste sous la monarchie, bonapartiste sous le second Empire, républicaine (mais modérée) sous la IIIe République, le dernier maire de gauche qu'elle ait eu avait été élu en 1935. C'était Charles Desgroux, un radical, mais aussi un membre d'une des familles les plus influentes de la bourgeoisie locale,

L'élection municipale de 1977 marqua donc une nouvelle ère dans la vie politique de la ville.

Cette année-là, en effet, la liste d'union de la gauche, menée par le socialiste Walter Amsallem, pharmacien dans le quartier populaire de la Soie-Vauban, l'emporta par 52,3 % des voix contre celle menée par le maire sortant, Édouard Grospiron. Ce dernier avait succédé en cours de mandat, en 1972, à Pierre Jacoby, qui occupait le fauteuil de premier magistrat de la ville depuis 1954.

Cette élection fut mise sur le compte de la très forte poussée de la gauche lors des municipales de cette année-là. La droite locale se trouvait en fait dans une grande difficulté, compte tenu de l'absence de chef de file capable de contester la prééminence au nouveau maire.

Le député gaulliste Marcel Dassault, avionneur célèbre et élu de l'Oise depuis 1956, ne souhaitait pas briguer la mairie. Sa grande popularité, marquée par sa réélection lors des législatives de 1978, dès le premier tour, avec 51,1 % des voix, dans la circonscription nord-ouest, ne pouvait donc être mise à profit pour emporter la ville. Pourtant, face à lui, Walter Amsallem n'obtenait que 21 % des voix, devançant cependant largement son adjoint communiste Claude Aury (16,7 %).

Le résultat de la circonscription sud, associant alors Beauvais et Méru, donna enfin un hérault au RPR beauvaisien. À la surprise générale, ce fut un jeune conseiller municipal de Beauvais, âgé de tout juste 30 ans, Jean-François Mancel, qui l'emporta contre le communiste Jean Sylla. Il se plaça aussitôt dans la logique de reprendre la mairie à la gauche.

Fort étrangement, le découplage entre résultats nationaux, favorables à la droite, et locaux, favorables à la gauche, s'amplifia encore l'année suivante. Lors de la cantonale de 1979, qui concernait le canton de Beauvais sud ouest, le premier adjoint socialiste de la ville, Henri Bonan, un cardiologue, d'origine juive d'Afrique du Nord comme W. Amsallem, l'emporta très largement au second tour, avec 58 % des voix.

Lors des législatives de 1981, si la droite perdit la circonscription de Beauvais-Méru au profit du maire de Méru Guy Vadepied (PS), Walter Amsallem échoua une nouvelle fois dès le premier tour contre Marcel Dassault dans la circonscription nord.

Les élections suivantes furent difficiles pour la gauche, mais elle parvint à sauvegarder ses positions. En 1982, W.Amsallem conserva de peu son siège au Conseil général, dans le canton nord-ouest. Et, en 1983, il fut réélu maire de Beauvais avec à peine 51,3 % des voix, contre la liste de droite menée par le RPR Jean-François Mancel.

Malgré l'étroitesse de ces résultats, jugés cependant positifs compte tenu de la situation politique locale et nationale, les socialistes beauvaisiens gagnèrent en influence. En 1982, Henri Bonan fut élu Président du Conseil général, profitant du passage à gauche d'un élu radical indépendant indécis, Raymond Lafolley, qui fit basculer la majorité.

L'année suivante, la création du Conseil régional de Picardie, instance qui n'était alors pas élue directement, mais désignée au deuxième degré, permit à Walter Amsallem de devenir le premier président de la nouvelle région.

Cette montée d'influence fut de très courte durée, compte tenu des résultats des élections suivantes.

Lors des cantonales de 1985, la création d'un nouveau canton ne profita pas au Parti Socialiste. Dans ce canton, baptisé "Beauvais Nord-Est", ce fut une personnalité du centre, ancien candidat MRP à la mairie, Michel Gorin (UDF), qui l'emporta très largement, avec 57 % des voix au second tour tandis que la gauche, partagée entre trois candidats au premier tour (un PS, un PCF et un MRG), totalisait 45 % des voix.

Mais, surtout, dans le canton sud-ouest, Henri Bonan fut sèchement battu par un autre médecin, le radiologiste Jacques Néhorai (RPR), qui l'emporta au second tour avec 53,4 % des voix. Dans la foulée, la gauche perdit la majorité du Conseil Général de l'Oise, et ce fut Jean-François Mancel, concurrent malheureux de la municipale de 1983, élu dans le canton de Noailles, qui succéda à Henri Bonan à la présidence.

Ce reflux ne permit pas à Walter Amsallem de prétendre sérieusement à un siège éligible sur la liste socialiste pour les législatives de 1986, qui se déroulèrent à la proportionelle. En guise de lot de consolation, il fut désigné pour prendre la tête de la liste socialiste de l'Oise pour les régionales, avec fort peu de chances de conserver son poste de président de région.

Il obtint cependant un résultat tout à fait convenable, avec 31,4 % des voix à l'échelle du département. Sa liste était certes devancée par celle de l'union des droites RPR-UDF, qui obtint 39,8 %, il devançait nettement les autres listes : FN (11,7%), PCF (11 %), LO (3,6 %) et MRG (2,6 %).

Après la réélection de François Mitterrand à la présidence de la République, Amsallem pensa que les conditions étaient réunies pour qu'il fasse son entrée au Palais-Bourbon. En effet, Marcel Dassault étant décédé peu après sa réélection en 1986, le siège de la circonscription nord, redécoupée, n'avait pas de sortant à droite. Il se décida donc à se présenter de nouveau.

Cette élection, comme celle qui se déroula en même temps dans la circonscription sud, fut un cas de contentieux électoral désormais classique. Une mauvaise rédaction des bulletins de vote des candidats socialistes entraîna en effet leur annulation par le Préfet, ce qui conduisit à l'élection dès le premier tour des candidats de droite : Mancel, réélu, dans la circonscription Sud, et Guy Desessart (sans étiquette, mais soutenu par l'Union du Rassemblement et du Centre, i.e. le RPR et l'UDF), élu dans la circonscription nord.

Par la suite, le Conseil constitutionnel jugea cette annulation abusive, car l'erreur de rédaction (le mot « suppléant » ayant été placé après et non avant le nom du candidat suppléant) n'entraînait aucun risque de confusion dans l'esprit des électeurs.

L'élection partielle organisée en septembre voit cependant l'arrivée sur la scène politique locale d'une nouvelle personnalité. Olivier Dassault, petit-fils de Marcel, jusque là Conseiller de Paris (RPR), se présente et est élu dans un contexte de fort abstentionnisme.

En même temps que ces partielles se déroulaient les cantonales. Un seul des trois cantons de Beauvais était concerné, mais, après la victoire de la droite dans les deux autres, lors des élections précédentes, l'enjeu était de taille. De plus, ce canton, celui de Beauvais nord-ouest, était particulièrement symbolique, puisque le sortant, qui ne se représentait pas, n'était autre que Walter Amsallem.

Pour lui succéder, le Parti Socialiste désigna un de ses adjoints, Georges Becquerelle, personnel de direction de l'éducation nationale. Il eut face à lui Olivier Taboureux, figure locale de l'UDF, mais aussi les chefs de file du PCF, Claude Aury, et du FN, Katherine d'Herbais. L'issue de l'élection n'était pas certaine, mais Becquerelle put profiter de mésententes au sein de la droite, qui conduisit à une candidature dissidente de l'UDF Joseph Cueff.

À l'issue du premier tour, cependant, Becquerelle était largement en tête, avec 47,1 % des voix, contre 26,3 % à Taboureux. Cueff, pour sa part, n'obtenait que 12,7 %. Le second tour fut donc relativement paisible, le candidat socialiste l'emportant avec 58 % des voix.

Ce résultat relança la dynamique à gauche, tout en démontrant le manque de discipline à droite, et la difficulté à trouver des personnalités assez forte pour s'opposer à une équipe socialiste encore largement soudée.

Lors des municipales de l'année suivante, la gauche présenta une liste unie, menée par le maire sortant, qui ne manqua que de très peu la réélection au premier tour, puisqu'elle obtint 49,5 % des voix.

Face à lui, la droite avait investi Olivier Dassault, tandis que le FN présentait sa candidate, Katherine d'Herbais, et qu'un autre médecin, le docteur Éric Mardyla, candidat de droite « indépendant » menait une quatrième liste. Dassault fut loin de pouvoir prétendre à contester la mairie à Amsallem, mais réussit à fédérer la droite derrière son nom et à fortement bipolariser l'élection. Il obtint ainsi 43,5 % des voix, ne laissant aux autres listes que des miettes (4,1 % pour le FN, 3,3 % pour la liste Mardyla).

Le lent déclin de Walter Amsallem (1989-2001)

La période qui suivit ne fut pas particulièrement glorieuse pour le Parti Socialiste au niveau national, et cela eut des répercussions au niveau local.

Les élections de 1992 (régionales et cantonales) furent particulièrement difficiles pour le maire de Beauvais et sa majorité. Désigné pour mener la liste socialiste aux régionales, il n'obtint que 14,5 % des voix à l'échelle du département. Il était devancé par la liste RPR-UDF d'Olivier Dassault (35,2 %) mais aussi par celle du Front national, menée par Pierre Descaves (15,6 %).

À Beauvais même, s'il était en deuxième position, avec 25,0 % des voix, sa liste était cependant distancée de 13 points par celle de son rival malheureux de 1989, qui obtenait 37,6 %. Et encore, celui-ci pouvait compter sur des réserves, la liste d'Olivier Taboureux obtenant 3,7 % des voix, tandis qu'à gauche, la division était forte : la liste Lionel Stoléru, étiquetée Génération écologie, obtenait 7,2 %, celle des Verts 5,6 %, tandis que l'allié communiste décrochait difficilement 4,5 %.

Les cantonales ne furent pas plus encourageantes. Dans le canton Sud-Ouest, la division de l'équipe Amsallem se montra au grand jour. Le candidat du Parti Socialiste, l'adjoint au maire Daniel Mortelecq, fut en effet concurrencé par un ancien adjoint, tombé en disgrâce, Christian Filippi, qui se présenta sous l'étiquette Génération écologie. Mortelecq lui-même ne tarderait pas à subir les foudres du maire, et à entrer lui aussi en dissidence. Le fait est, cependant, que Jacques Néhorai put conserver son siège assez facilement, malgré le maintien au second tour de la candidate FN. Le RPR obtient en effet 49,9 % des voix, contre 36,5 % au candidat socialiste, et 13,6 % à Katherine d'Herbais.

Dans le canton Nord-ouest, le PS ne sembla pas vouloir réellement contester le siège de Michel Gorin. Le candidat qu'il se choisit, André Vaudrée, un horticulteur, maire-adjoint, n'était pas connu pour son grand dynamisme. Pourtant, dans ce canton sociologiquement à gauche (composé pour l'essentiel du quartier populaire d'Argentine, dit « la ZUP »), il ne fit pas mieux que son homologue du sud-ouest. Michel Gorin fut réélu avec 49,4 % des voix, contre 37,5 % à Vaudrée, et 13,1 % au candidat FN, Francis Dufresne, qui avait pu se maintenir.

Face à cette situation délicate, le PS beauvaisien estima prudent de ne pas se mêler des législatives de l'année suivante. Amsallem abandonna donc l'investiture socialiste dans la circonscription nord à Yves Rome, récent conseiller général du canton de Nivillers et maire du village de Bailleul-sur-Thérain, qui ne parvint pas à empêcher la réélection dès le premier tour d'Olivier Dassault, avec 50,4 % des voix.

Dans la circonscription sud, le PS soutint un candidat « d'ouverture », l'ancien syndicaliste André Sainjeon, inconnu dans le département, qui non seulement ne fit pas le poids face au Président du Conseil général, Jean-François Mancel, réélu dès le premier tour avec 51,1 % des voix, mais, n'obtenant que 10,6 %, fut même devancé par le FN (14,6%).

Alors que les nuages semblaient s'accumuler sur la tête d'Amsallem, les cantonales de 1994 peuvent apparaître comme un petit rayon de soleil. Dans son fief « historique » de Beauvais nord-ouest, le PS beauvaisien parvient en effet à faire réélire Georges Becquerelle. Profitant de nouveau d'une forte division à droite, qui voit le dissident RPR Bernard Parmentier, avec 17, 0 % des voix, prendre le dessus le candidat officiel de la majorité départemental qui n'obtient que 14,1 %, le conseiller général sortant est réélu au second tour avec 56,3 % des voix.

L'élection municipale de 1995 ne se présente pas sous les meilleurs auspices pour Walter Amsallem. En mai, lors du second tour de l'élection présidentielle, Jacques Chirac est arrivé en tête dans la ville, avec 52,6 % des voix. Deux conseillers généraux sur trois sont dans l'opposition municipale, et il a face à lui un député réélu triomphalement, Olivier Dassault, qui a fait l'unité derrière lui et présente une liste RPR-UDF solide.

La gauche, en revanche est divisée. Amsallem parvient à trouver un accord avec le Parti Communiste Français, mais doit faire face à deux dissidences. L'une est menée par Christian Filippi, ancien « dauphin » jugé trop ambitieux par Amsallem, qui est entré en dissidence deux ans auparavant, et qui présente une liste sans étiquette. L'autre est menée par André Alluchon, maire-adjoint sortant, ancien rénovateur communiste, allié pour l'occasion avec la LCR représentée par Catherine Méry, une institutrice syndicaliste, et un autre conseiller municipal, Patrice Picart, ouvrier métallurgiste, ancien communiste passé au Mouvement des citoyens de Jean-Pierre Chevènement. Cette liste est à l'origine de la création de la "Gauche citoyenne", groupe politique local assez influent pour donner à son chef de file, André Alluchon, un rôle assez important dans la vie politique locale.

Le résultat du premier tour est serré. La liste d'Olivier Dassault devance celle de Walter Amsallem d'une seule voix, avec 40,4 %. Derrière, la liste FN de Katherine d'Herbais obtient 11,8 %. André Alluchon, avec 4,1 % manque de passer la barre des 5 % qui lui permettrait d'obtenir une fusion avec la liste d'Amsallem, mais appelle tout de même à voter pour le maire sortant. Christian Filippi, pour sa part, joue les utilités avec 3,2 % des voix.

Au second tour, le FN décide de maintenir sa liste. Cela porte un coup sans doute fatal à Olivier Dassault, et marquera la droite locale. Walter Amsallem n'est en effet réélu qu'avec 280 voix d'avance, soit 46,6 % des voix, contre 45,4 % à la liste RPR-UDF. Katherine d'Herbais voit son résultat se tasser considérablement, mais, avec 8,0 % des voix, elle fait son entrée au conseil municipal.

Elle ne tardera cependant pas à le quitter, frappée par un scandale assez anecdotique, mais qui la déconsidère auprès d'une partie de son électorat, catholique et traditionaliste. Il apparaît en effet que le château qu'elle possède a été loué à une société de production pour le tournage d'un film pornographique mettant en scène l'actrice X en vogue à cette période, Tabatha Cash.

La réelection difficile d'Amsallem attise les convoitises à gauche. Nombreux sont ceux qui estiment que le maire sortant ne prendra pas le risque d'un élection de trop, et passera la main lors des élections suivantes.

Mais, celui-ci semble s'accrocher et ne pas vouloir tolérer la moindre indiscipline dans ses rangs. Daniel Mortelecq, son adjoint et candidat malheureux aux cantonales de 1992, entre ainsi en dissidence, créant avec une autre socialiste, Marie-France Contant, une enseignante qui aura ensuite des responsabilités départementale au sein de l'UNSA, un groupe d'opposition au sein du conseil municipal.

Plus subtil, sans doute, le conseiller général Yves Rome ne déclare pas de guerre ouverte, mais fait mener par ses proches un travail de sape au sein de la section socialiste de Beauvais, entraînant de la part d'Amsallem une crainte permanente de déstabilisation.

Lors des élections législatives de 1997, le danger se précise de ce côté là. Yves Rome, bénéficiant d'une triangulaire au second tour et de la poussée de la gauche plurielle, est élu député de la circonscription nord. Avec 44,1 % des voix, il défait Olivier Dassault (39,6 %), tandis que le candidat FN Laurent Isoré obtient 16,4 %.

Le chef de file de la droite beauvaisienne prend relativement mal cet échec, dans une circonscription qui fut celle de son grand-père pendant près de 30 ans. Il décide d'abandonner la vie politique locale, du moins pour un certain temps.

Amsallem, cependant, avait cherché à ouvrir des contre-feux, en se cherchant des alliés pour préparer sa succession, même s'il l'envisage plus tardive que beaucoup d'autres socialistes. Lors de ces élections arrive ainsi à Beauvais une ancienne collaboratrice de François Mitterrand, Béatrice Marre, qui, profitant tout comme Rome de la conjoncture, est élue dans la circonscription sud, plus difficilement cependant. Avec 42,8 %, elle bat le sortant Jean-François Mancel (39,3 %), tandis que le candidat FN maintenu, Éric Delcroix, obtient encore 18 %.

Béatrice Marre, cependant, ne s'inscrira pas dans une stratégie "beauvaisienne". Visant avant tout la politique nationale, elle privilégiera sa réélection à l'Assemblée nationale et fera son possible pour battre définitivement Mancel. Elle marquera des points, comme son élection comme maire de Noailles, le chef-lieu de canton dont l'élu est Mancel, mais ne parviendra pas à reprendre ce canton, perdra son siège de députée en 2002, et quittera définitivement l'Oise en 2008.

En 1998, Walter Amsallem mène une liste d'union de la gauche dans l'Oise pour les élections régionales. Avec 28,0 % des voix, il arrive en tête, devant la liste de Patrice Fontaine (RPR-UDF) avec 25,2 %. Mais, c'est surtout la poussée du Front national qui marque ces élections. La liste de Pierre Descaves obtient ainsi 24,4 % des voix dans l'Oise. Au niveau régional, le Président du Conseil régional, Charles Baur (UDF), ne sera réélu à cette fonction que grâce au vote en sa faveur des élus d'extrême-droite, provoquant une polémique forte. La gauche n'acceptera ainsi jamais cette élection, et le maire d'Amiens, Gilles de Robien, quittera l'UDF pour protester contre ce qu'il estime être une contradiction avec les principes démocratiques de son parti.

Cette poussée a aussi des effets au niveau beauvaisien. Lors des cantonales, le FN se montre en force dans la capitale de l'Oise. Dans le canton nord-est, dans lequel Olivier Dassault, qui a succédé à l'occasion d'une partielle à Michel Gorin, décédé, ne se représente pas, le candidat frontiste, Laurent Isoré, arrive en tête avec 29,7 % des voix. Derrière lui, Henri Bonan, premier adjoint d'Amsallem, qui tente un retour à l'assemblée départementale, n'obtient que 20,5 % des voix. Quant au candidat de la droite, Éric Mardyla (MPF), il recueille 20 % des voix, malgré un positionnement très à droite qui suscite d'ailleurs une candidature dissidente de la conseillère municipale Agnès Petit, une centriste, qui approche les 10 % (9,8 %). Cette situation profite finalement à Henri Bonan. Malgré une campagne très dure de la part du FN, centrée sur le maintien de Mardyla, qui obtient 23,9 %, l'ancien président du conseil général l'emporte avec 40,4 % contre 35,8 % à Laurent Isoré.

Dans le canton sud-ouest, le sortant Jacques Néhorai (RPR) est en tête avec 28,8 % des voix, mais trois candidats sont dans un mouchoir de poche. Le FN Francis Dufresne est deuxième avec 28,4 % et la maire-adjointe Sylvie Houssin, une urbaniste ancienne conseillère technique du maire élue au conseil municipal en 1995, ferme ce trio avec 27,3 %. Entre les deux tours, Jacques Néhorai suivra son chef de file Jean-François Mancel et passera un accord de désistement avec le Front national. Dufresne se retire donc en sa faveur, mais cette décision suscite une polémique très forte qui aboutira à l'exclusion du RPR de Néhorai et Mancel, qui était pourtant le premier responsable départemental du parti néo-gaulliste. Plus directement, ce coup de barre à droite ne profite pas à Néhorai, qui perd son siège, n'obtenant que 48,3 % des voix contre 51,7 % à Sylvie Houssin, dont le potentiel électoral était cependant nettement plus faible (le total des voix de gauche au premier tour était de l'ordre de 43 %).

Ces deux victoires, emportées par des proches de Walter Amsallem, conforte le maire sortant dans l'idée de se représenter pour un quatrième mandat, et ce d'autant plus que la droite locale semble complètement désemparée. Olivier Dassault est aux abonnés absents, Mancel, concentré sur son maintien à la tête du Département, et Néhorai, exclu du RPR, pas en situation de mener une liste, Mardyla situé trop à droite, et Agnès Petit, trop au centre, incapables de réunir derrière leur nom sans provoquer de dissidence, Taboureux discrédité par une série de candidatures solitaires et minoritaires qui ont surtout montré son peu de popularité dans la ville, le RPR se tourne vers une nouvelle venue, Caroline Cayeux, épouse d'un grand propriétaire terrien, qui a été choisie pour prendre la direction du RPR de l'Oise après l'exclusion de Mancel, essentiellement parce que personne au sein du parti ne souhaitait se mettre en porte-à-faux avec le véritable « patron » de la droite locale.

L'investiture de cette quasi-inconnue rassérène la gauche locale, tandis qu'elle attise les clivages à droite. Néhorai décide de présenter sa propre liste, tandis que la droite dépêche un jeune militant, Bastien Millot, proche de Jean-François Copé, pour organiser la bataille.

L'extrême-droite, qui semblait en position de force, accuse mal la scission en son sein, suite aux oppositions entre Bruno Mégret et Jean-Marie Le Pen. Laurent Isoré, qui a rejoint le MNR, mène sa propre liste, tandis que le FN présente la sienne, menée par Dominique Pruvost.

Face à ce champ de ruine à droite et à l'extrême-droite, Walter Amsallem tient sa réélection pour acquise. Il se s'embarrasse pas de diplomatie, ce qui va provoquer de gros problèmes à gauche. Les alliés du Parti socialiste, notamment, mécontents d'être assez maltraités par le maire sortant, décide de constituer leur propre liste. Elle sera menée par Thierry Aury (PCF), André Alluchon (Gauche Citoyenne) et Régis Lecuru (Verts). Au Parti Socialiste, tout ne va pas non plus pour le mieux. Henri Bonan, premier adjoint sortant, mécontent d'être rétrogradé au profit de Sylvie Houssin, intronisée par là même comme « dauphine » d'Amsallem, décide de claquer la porte de la liste, et de se présenter dans la petite commune de Nivillers, où il réside, pour sauvegarder son siège à la communauté de commune de Beauvais, dont il a été le principal artisan.

Le groupe oppositionnel constitué autour de Daniel Mortelecq, qui a quitté Beauvais, veut aussi se faire entendre. Mais c'est un autre adjoint, l'avocat François Gairin, qui prend l'initiative de présenter une liste dissidente, sur laquelle figure Marie-France Contant.

Le résultat du premier tour ne semble guère favorable, cependant, à la gauche. Walter Amsallem n'obtient que 27,6 % des voix, devant Caroline Cayeux (24,8 %), tandis que la liste de Thierry Aury décroche 13,9 %, et celle de Néhorai 10,3 %

Derrière, l'extrême-droite est marginalisée : ni Isoré, avec 8,0 %, ni le FN "pur sucre", dont la liste décroche 6,7 %, ne peuvent se maintenir au second tour.

Le résultat de la liste Lutte ouvrière, menée par François Laporte, marque le début de la poussée de l'extrême-gauche, qui obtient ainsi 4,3 % des voix. Quant à François Gairin, pourtant peu connu des beauvaisiens, son résultat de 4,3 % montre la défiance d'une partie de l'électorat de gauche vis-à-vis du maire sortant, jugé usé et trop autoritaire.

La messe semble dite lorsque, après une fusion relativement aisée entre la liste PS et celle de ses alliés traditionnels, Jacques Néhorai annonce le maintien de la sienne. La campagne du deuxième tour n'est guère dynamique du côté d'Amsallem, tandis que Caroline Cayeux, elle, ne s'avoue pas vaincue.

Le résultat du second tour fait l'effet d'un coup de tonnerre. Caroline Cayeux est élue nettement, avec 47,4 % des voix, contre seulement 43,4 % à Walter Amsallem. Jacques Néhorai, lui, maintien son score avec 9,2 %.

L'ère Amsallem se finit donc dans une déroute que nul n'avait réellement imaginé, pas même d'ailleurs la nouvelle élue, dont les premiers mois à la tête de la ville seront caractérisés par de très nombreux couacs.

La période Cayeux : des couacs à la réélection triomphale (2001-2008)

Le résultat des élections de 2001 ne laissent pas de doute quant à l'analyse. Il s'agit bien d'une défaite pour Walter Amsallem, et non d'un vote d'adhésion pour la nouvelle maire, qui a d'ailleurs échoué à prendre le canton de Beauvais nord-ouest à Georges Becquerelle, réélu avec 51,2 % des voix au second tour.

Peu préparée à l'exercice de la première magistrature municipales, Caroline Cayeux va en effet accumuler les erreurs dans les premiers temps de son mandat. Elle fait ainsi élire comme premier adjoint Bastien Millot, inconnu des beauvaisiens, ne figurant pas parmi les premiers candidats de sa liste, et avec lequel elle se brouillera assez rapidement, jusqu'à ce que celui-ci quitte Beauvais pour un poste au cabinet ministériel de Jean-François Copé.

Elle se laisse ensuite aller à des règlements de compte censés apaisé les frustrations d'une droite privée du pouvoir municipal depuis plus d'un quart de siècle. L'épisode du Théâtre de Beauvais en est l'exemple type. Sous la houlette du maire-adjoint Sébastien Chenu, des dizaines de militants de droite adhèrent en masse à l'association qui gère le théâtre subventionné de la Ville, et dont le président sortant était André Alluchon (qui ne se représentait pas), sans pour autant réussir à prendre la direction de l'association. La petite guerre qui s'ensuit entre la municipalité et son théâtre va ensuite alimenter la chronique pendant près d'un an.

De même, elle va omettre de participer au "tir de canon" de la Fête Jeanne-Hachette, grand moment, fin juin, du folklore local...

Autre maladresse, qui n'échappe à personne, Caroline Cayeux tente d'asseoir trop rapidement son élection en se présentant quasiment à toutes les élections qui suivront, avec, à chaque fois, un échec à la clef.

Le premier épisode se déroule lors des sénatoriales de septembre 2001. Elle est candidate sur la liste menée par le sénateur sortant (RPR) et Conseiller général de Froissy, Alain Vasselle. Placée en deuxième position, elle n'est pas élue.

Elle est ensuite candidate législatives de 2002. Malgré l'investiture officielle de l'UMP accordée à l'ancien député, Olivier Dassault, elle va se présenter en candidate « sans étiquette ». Elle obtient ainsi 19,5 % des voix, nettement derrière Dassault (27,1 %) et derrière le sortant socialiste Yves Rome (25,2 %). Dassault, élu facilement au second tour, fait ainsi son grand retour dans la vie politique locale.

Enfin, en 2004, elle mène la liste UMP dans l'Oise, derrière le candidat à la présidence de la région Picardie, le maire d'Amiens Gilles de Robien. C'est le maire de Clermont-de-l'Oise, Claude Gewerc (PS), qui l'emporte finalement.

Cette boulimie de mandats, couplée à la présence sur sa liste régionale d'Élodie Gossuin, une ancienne Miss France, la fera surnommer pendant quelques temps "miss élection" par ses adversaires.

L'opposition municipale, cependant, n'est pas non plus à la fête. L'échec de 2001 ouvre la porte à des règlements de comptes internes très douloureux.

La première victime en est Walter Amsallem. Il est d'abord privé de toute responsabilité au sein de la section socialiste de Beauvais pas ses anciens soutiens. Isolé, ayant quelques difficultés à assumer l'échec qu'il attribue à la déloyauté de certains de ses anciens proches, il finit par démissionner du conseil municipal après que la chambre régionale des comptes a rendu un rapport ne signalant aucune irrégularité notoire dans la gestion de la ville.

Cette démission fait suite à celle de Gérard Caullier, un ancien trotskiste lambertiste, maire adjoint et surtout secrétaire de la section socialiste de Beauvais. Celle-ci désigne José Ayllon, un proche d'Amsallem, pour lui succéder, mais celui-ci démissionnera au bout d'un an et demi de mandat.

L'ambiance délétère au sein de la gauche est renforcée par la publication régulière dans la presse de tribune d'un anonyme signant "Caton" et dévoilant de façon très orientée les turpitudes, petites alliances et mauvaises intentions supposées des socialistes beauvaisiens.

Les cantonales de 2004 marquent cependant le terme de ces errements, à droite comme à gauche. Dans le canton sud-ouest, où elle affrontait le maire-adjoint Sébastien Chenu, Sylvie Houssin l'emporte largement, avec 54,3 % des voix au second tour. Elle s'impose ainsi comme la chef de file incontestable de la gauche beauvaisienne, position qu'elle assumait déjà depuis qu'elle présidait le groupe socialiste au conseil municipal.

Dans l'autre canton, Beauvais nord-est, Henri Bonan est réélu face au député Olivier Dassault, par 48,0% des voix contre 36,4 % et 15,6 % au nouvel chef de file de l'extrême-droite, Thomas Joly. Au premier tour, le communiste Thierry Aury avait confirmé, dans ce canton strictement urbain, sa bonne implantation personnelle, réalisant un résultat de 16,3 %, bien au-delà de l'influence réelle du PCF.

À cette occasion, la majorité du Conseil général passe à gauche, et Sylvie Houssin hérite d'une vice-présidence. La situation est donc clarifiée : la gauche, relativement réconciliée, se range derrière sa chef de file, tandis que l'hypothèque d'une candidature Dassault à la municipale était levée.

En revanche, la faible popularité de l'équipe Cayeux s'est aussi révélée. La maire de Beauvais va donc changer de méthode, cesser de courir après les mandats et se construire une image la plus locale possible, remisant son étiquette UMP le plus souvent pour mettre en avant celle de groupe local "Beauvais pour tous".

En 2007, la maire de Beauvais se désintéresse des législatives, laissant aux deux sortants, Olivier Dassault au nord et Jean-François Mancel, au sud, le soin de représenter l'UMP. Sylvie Houssin, en revanche, profite du retrait de Béatrice Marre pour solliciter et obtenir facilement l'investiture socialiste dans la circonscription sud.

La victoire de Nicolas Sarkozy rend sa tâche difficile. Après un premier tour décevant (elle n'obtient que 21,1 % contre 41,9 % à Mancel), elle est sèchement battue au second tour, obtenant moins de 46 %.

Ce reflux assez net se confirme dans les mois suivants, dans le cadre de la campagne pour les élections municipales. Caroline Cayeux, recentrée sur une liste qui ne s'affiche pas UMP et constituée de fidèles, défend son bilan, tandis que la gauche tente de s'unir derrière Sylvie Houssin. Celle-ci parvient à trouver un accord avec le PCF, la Gauche citoyenne, les radicaux de gauche et les Verts, me se retrouve fortement concurrencée à sa gauche.

D'une part, la LCR présente sa liste, conformément à sa stratégie nationale. Celle-ci est menée par une syndicaliste SUD, Martine Souday. LO, après avoir proposé une alliance avec le PS, se voit éconduire pour cause de prétentions excessive, et présente aussi sa liste.

Mais c'est surtout la liste de Régis Lecuru, conseiller municipal sortant, étiqueté Vert jusqu'à sa rupture avec son parti pour cause de soutien à la candidature de José Bové à la présidentielle, qui mène une campagne très active. Intitulée "Beauvais nouvelle génération", elle articule des propositions altermondialistes et écologistes.

À droite, c'est Agnès Petit, travailleuse sociale, plus ancienne conseillère municipale en cours de mandat, maire-adjointe disgrâciée par Caroline Cayeux dont elle contestait l'autoritarisme, qui mène la dissidence.

Le premier tour ne laisse aucun doute sur l'issue de l'élection. Caroline Cayeux obtient 47,3 % des voix, devant Sylvie Houssin, avec 26,3 %. L'écart est impressionnant. Derrière, aucune liste ne dépasse les 10 % : Agnès Petit obtient 7,4 %, Lecuru 7,3 %, la liste FN de Thomas Joly 6,1 %. Les deux listes d'extrême-gauche restent marginales : 3,7 % pour la LCR, et 1,9 % pour LO.

Entre les deux tours, aucune négociation n'est menée entre les différentes listes. Agnès Petit ne donne aucune consigne de vote, tandis que la liste Lecuru appelle à voter blanc. Privée de cet éventuel report de voix, Sylvie Houssin n'obtient que 41,6 % des voix.

Caroline Cayeux est triomphalement réélue avec 58,4 % des voix, un des meilleurs scores jamais obtenu par un maire à Beauvais.

Ce triomphe est cependant très personnel. Dans le canton nord-ouest, Georges Becquerelle et sa suppléante, Stéphanie Priou, est réélu avec 53 % des voix, contre une maire-adjointe parmi les plus proches de Caroline Cayeux, Claire Beuil.

À l'inverse des résultats nationaux, ces élections furent donc à Beauvais bien plus marquées par la situation locale que par des considérations nationales.

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