Jean-françois senault

Jean-françois senault

Jean-François Senault

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Jean-François Senault, théologien belge, fils de Pierre Senault, secrétaire du roi, commis au greffe du Parlement de Paris et l'un des Seize sous la Ligue, naquit à Anvers en 1604 ou, selon d'autres, en 1599.

Sommaire

Biographie

Il montra autant de modération et de douceur que son père avait été fougueux et emporté. Après avoir fait ses premières études à Douai, il vint les continuer à Paris. Touché de sa modestie et de sa piété, le P. de Berulle, fondateur de l'Oratoire, l'attira, en 1618, dans sa congrégation naissante. Senault en sortit au bout de cinq ans ; mais, s'étant attaché de nouveau, en qualité d'aumônier, au P. de Berulle, devenu cardinal, il y rentra en 1628. Ses supérieurs l'engagèrent à se vouer au ministère de la prédication. Il s'y prépara durant quinze années entières par une étude approfondie de la théologie, de l'Ecriture et des Pères. Il joignit à cette étude la lecture des meilleurs auteurs que pouvait lui offrir alors la littérature française et surtout celle d'Amyot, qui, malgré son français déjà vieilli, lui apprit à former ses phrases et ses périodes.

Après s'être ainsi muni d'un grand fonds de doctrine, il prêcha quarante stations dans les principales églises de la capitale et des provinces. Ses sermons, écrits avec beaucoup d'ordre, de pureté et de goût, lui méritèrent les applaudissements de tout ce qu'il y avait de plus distingué à la cour et à la ville. Il est un de ceux qui ont le plus contribué à purger la chaire de ce défaut de méthode, de ce vain étalage d'érudition profane et de ce langage confus qui la déshonoraient, et, le premier, il introduisit dans les sermons des divisions, jusqu'alors inconnues. Les talents oratoires étaient relevés en lui par tous les avantages extérieurs. Une belle prestance, un port grave, un air majestueux, une voix nette et sonore, des gestes nobles et réglés en faisaient un véritable orateur. Ce fut avec de tels avantages qu'il ouvrit la carrière des grands prédicateurs du XVIIIe siècle, qui, en le surpassant, ne l'ont pas fait oublier.

Sa réputation inspira à plusieurs prédicateurs de son temps, incapables de composer eux-mêmes des sermons, le désir de se procurer les siens. Parvenus à en faire transcrire plusieurs pendant qu'il les prêchait, en apostant des copistes au bas de la chaire, ils se mirent à les débiter, soit dans les églises les moins fréquentées de Paris, soit clans celles des provinces. C'est ainsi qu'à Clermont il se vit obligé de changer la forme d'un avent, par un travail forcé, qui lui causa une grave maladie, parce qu'un religieux l'y avait prêché l'année précédente.

Pour n'être plus exposé à un pareil inconvénient, il composa des doubles stations, précaution qui lui fut très utile à Bourges, à Marseille et à Toulouse. Pendant qu'il était supérieur du séminaire de Saint-Magloire, le P. Senault s'appliqua à former, dans la carrière qu'il avait parcourue avec tant de distinction, de jeunes ecclésiastiques, parmi lesquels on compte Mascaron, l'abbé de Fromentières, les PP. Hubert, la Roche, etc. Le P. Bourgoin, supérieur général de l'Oratoire, étant mort en 1662, Senault fut choisi pour lui succéder, et ses confrères n'eurent aucun égard aux représentations qu'il fit pour refuser cet honneur. La confiance qu'il inspira dans l'exercice de ces honorables fonctions fut aussi générale que les suffrages qui l'avaient placé à la tête de son ordre avaient été unanimes, et il administra avec tant de bienveillance qu'il fut appelé les délices de la congrégation. Il y avait dix ans qu'il était revêtu de la dignité de supérieur général lorsqu'il fut frappé d'une attaque d'apoplexie, dont il mourut le 3 août 1672.

L'abbé de Fromentières, son disciple, depuis évêque d'Aire, prononça son oraison funèbre, qui fut imprimée après avoir subi quelques suppressions ordonnées par la cour. Le P. Senault ne voulut jamais accepter ni pensions ni bénéfices, bien qu'on lui en eût offert souvent avec instance. Il réfusa plusieurs fois la dignité épiscopale, et il répondit un jour à la reine mère, qui le pressait d'accepter un brevet pour le premier évêché considérable qui viendrait à vaquer :

« Je vous déclare, madame, qu'à l'âge que j'ai, bien loin d'être disposé à sortir de l'Oratoire pour mourir évêque, si j'étais évêque, je quitte terais mon évêché pour avoir la consolation de mourir dans l'Oratoire. »

C'est par un tel désintéressement qu'il conserva toujours la liberté de son ministère et qu'il dit quelquefois des vérités peu agréables aux courtisans, sans jamais compromettre la dignité du caractère dont il était revêtu. Instruit que les dames de la cour, sans en excepter la reine mère, ne se faisaient point scrupule d'aller à la comédie et au bal, les jours même où elles s'étaient approchées de la sainte table, il ne craignit point de s'exprimer avec

force, en chaire et en leur présence, contre un pareil scandale. Les courtisans ne manquèrent pas de relever devant Anne d'Autriche là hardiesse du prédicateur. Mais cette princesse, qui avait une-estime particulière pour le P. Senault, le remercia le lendemain de lui avoir fait connaître une faute dont on rie lui avait jamais parlé. Elle promit de s'en corriger, et elle tint parole[1].

On a lieu d'être surpris que ce prédicateur, qui a publié tant d'ouvrages sur toutes sortes de sujets, n'ait fait imprimer aucun de ses sermons de morale et de ses discours sur les mystères, qui furent le principal fondement de sa réputation. On n'en a trouvé après sa mort que des abrégés écrits de sa main, mais hors d'état d'être mis au jour.

Publications

Nous avons de lui :

  1. Panégyriques des saints, Paris, 1656, 1657 et 1658, vol. in-4° ; réimprimés in-8°. Ces panégyriques sont supérieurs à tout ce qui avait été composé jusqu'alors dans ce genre ; mais ils manquent d'élévation et de mouvement, et le style se ressent trop du temps où ils ont été composés. L'épître dédicatoire à la reine Anne d'Autriche est remarquable, en ce qu'il y demande grâce pour certains faits apocryphes qu'il y rapporte, n'ayant pas cru, dit-il, en parlant au peuplé, devoir combattre ses préjugés, de peur d'affaiblir sa dévotion. Le P. Senault avait prononcé un assez grand nombre d'oraisons funèbres, qui furent imprimées séparément : elles eurent du succès dans le temps ; mais elles ne sauraient soutenir le parallèle avec les chefs-d'œuvre de Bossuet, de Fléchier, ni même avec quelques-unes de Mascaron. Celles de Marie de Médicis et de Louis XIII présentaient des sujets difficiles à traiter : il s'en tira avec beaucoup d'adresse. L'épître dédicatoire à Gaston d'Orléans est un modèle de délicatesse, à une époque où il était si dangereux de parler dés affaires d'Etat sans se compromettre avec l'un ou l'autre des deux partis qui divisaient la cour.
  2. Un traité De l'usagé des passions, Paris, 1641, in-4°, souvent réimprimé sous différents formats et traduit en anglais, en allemand, en italien et en espagnol. Cet ouvrage est divisé en deux parties, dont la première traité des passions en général et la dernière de chacune en particulier.
  3. Paraphrases sur Job, Paris, 1637. Ce livre, bien écrit et digne d'un philosophe chrétien, est le premier qui soit sorti de la plume du P. Senault. Il eut neuf éditions, dont la neuvième est de Rouen ;
  4. L'Homme criminel, ou la Corruption de la nature par le péché, Paris, 1644 ;
  5. l'Homme chrétien, ou la Réparation de la nature par la grâce, Paris, 1648, in-4°. L'auteur, après avoir exposé les misères de l'homme dans le traité précédent, lui offre dans celui-ci les consolations et les ressources de la grâce.
  6. Plusieurs vies dé personnes distinguées par leur éminente piété.

Il existe une vie manuscrite de Senault, par le garde des sceaux Marillac, son ami, qui contient des faits curieux.

Notes et références

  1. Jean-Louis de Fromentières avait comparé le courage de Senault, prêchant en présence d'Anne d'Autriche, à celui de Saint-Ambroise déclamant contre les jeux qui avaient lieu devant la statue de impératrice Eudoxie et interdisant l'entrée de l'église à Théodose le Grand.

Source

« Jean-François Senault », dans Louis-Gabriel Michaud, Biographie universelle ancienne et moderne : histoire par ordre alphabétique de la vie publique et privée de tous les hommes avec la collaboration de plus de 300 savants et littérateurs français ou étrangers, 2e édition, 1843-1865 [détail de l’édition]

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