- Jack Merridew
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Sa Majesté des Mouches
Sa Majesté des Mouches (Lord of the Flies) est un roman de l'auteur anglais William Golding écrit en 1954 qui montre la fragilité de la civilisation. Un avion transportant exclusivement des garçons anglais issus de la haute société s'écrase durant le vol sur une île déserte. Le pilote et les adultes accompagnateurs périssent. Livrés à eux-mêmes dans une nature sauvage et paradisiaque, les nombreux enfants survivants tentent de s'organiser en reproduisant les schémas sociaux qui leur ont été inculqués. Mais bien vite le vernis craque, la fragile société vole en éclats et laisse peu à peu la place à une organisation tribale, sauvage et violente bâtie autour d'un chef charismatique et d'une religion rudimentaire. Sacrifices humains, chasse à l'homme, guerres sanglantes : la civilisation disparaît au profit d'un retour à un état proche de l'animal que les enfants les plus fragiles ou les plus raisonnables paient de leur vie.
En France, ce roman est souvent considéré comme un livre pour enfant et régulièrement étudié en primaire ou au collège. Pourtant, sa violence sauvage, crue et sensuelle en fait un livre difficile et troublant. La finesse de son analyse et la qualité de son écriture en font par ailleurs une œuvre à part entière.
Sommaire
Résumé de l'histoire du livre
Un avion qui transporte de jeunes enfants anglais âgés de 6 à 12 ans s'écrase sur une île apparemment déserte. Aucun adulte ne survit, et les enfants se retrouvent alors seuls dans ce monde nouveau. Ralph, rescapé presque adolescent, rencontre Porcinet (Piggy dans le texte original), enfant fragile et obèse. Ensemble ils trouvent une conque, grand coquillage qui produit une note grave et puissante lorsqu'on souffle dedans. Le bruit attire les autres enfants rescapés qui se rassemblent tous sous le signe de la conque. Le coquillage devient dès lors un symbole d'organisation et de pouvoir. Ralph instaure une règle organisant la circulation de la parole : celui qui tient la conque détient la parole.
Survient alors Jack, à la tête d'une maîtrise : une amitié naît vite entre les deux jeunes garçons Ralph et Jack. Le pouvoir de Ralph n'est pas contesté et Jack est nommé chef d'un groupe de chasseurs, chargé d'apporter la nourriture au groupe. D'autres ont la responsabilité de l'entretient du feu, tandis que les petits s'occupent comme ils le peuvent et le veulent dans le reste de l'île.
Cependant, peu à peu une rivalité apparaît entre les deux chefs et s'aggrave au fil des jours. Jack aime l'aventure et l'ivresse de la chasse, il n'apprécie pas les contraintes et les responsabilités qu'implique l'organisation dirigée par Ralph. Il finit par s'en détacher et peu à peu les enfants le rejoignent un par un : ensemble ils créent une société tribale autour de Jack qui s'arroge les pleins pouvoirs. Cependant la dépendance envers Porcinet, dont les lunettes permettent d'allumer le feu et qui reste fidèle à Ralph, cristallise un terrain de conflit entre les deux sociétés rivales.
En parallèle se développe un culte primaire envers une sorte de divinité sanglante symbolisée par une tête de cochon plantée sur un piquet. Jack utilise la peur d'un monstre entrevu en haut de la colline pour justifier l'adoration de l'idole. Seul le sage Simon aura le courage d'aller jusqu'en haut pour constater qu'il n'y a aucune bête, seulement le corps d'un parachutiste mort tombé dans les rochers. Mais lorsqu'il redescend à la nuit tombante pour donner la nouvelle, une fête orgiaque bat son plein : dans la pénombre Simon est associé au monstre, les enfants surexcités et à moitié en transe se jettent sur lui pour le rouer de coup de bâtons. Il n'y survivra pas.
Ce crime auquel Ralph et Porcinet ont eux-mêmes participé, pris dans l'ivresse de la fête — galvanise le camp de Jack et lui donne une sorte de fondement collectif moral. Ils s'organisent en commando, et pourchassent les derniers compagnons de Ralph pour les emprisonner ou les ramener dans leur camp. Ils volent ensuite les lunettes de Porcinet puis l'assassinent et organisent une vaste recherche afin de tuer Ralph qui se terre dans la jungle. Jack décide alors de mettre le feu à la forêt pour faire sortir le fuyard de sa cachette : A la suite d'une course poursuite où les enfants pourchassent Ralph en poussant de grands cris sauvages, ils arrivent devant un groupe de marins adultes interloqués qui viennent de débarquer sur l'île. Après un instant de flottement, les enfants s'effondrent tous en pleurs.
Analyse
L'analyse sociologique, anthropologique et philosophique que William Golding illustre finement dans ce roman est sombre et pessimiste : la civilisation n'est qu'un vernis qui ne tient pas à grand chose ; dès que les humains sont livrés à eux-mêmes, leur liberté prend le visage de la sauvagerie, de la superstition et de la violence. L'auteur assène un ultime coup de massue à la fin du roman lorsque les enfants, finalement retrouvés par l'équipage d'un navire de guerre croisant dans les parages, s'écroulent en pleurs : il montre ainsi que l'homme fuit sa propre liberté, qu'il s'empresse de mettre entre les mains d'une entité supérieure dès qu'il en a la possibilité.
Analyse symbolique
Par ailleurs, le roman peut être analysé sous un angle symbolique, chaque personnage représentant des forces ou des idées sociologiques différentes :
Ralph, le personnage principal et le plus vieil enfant de l'île avec Jack, presque adolescent, qui tente d'organiser le groupe en utilisant un symbole fort de communication et de rassemblement (la conque) peut représenter les tentatives humaines de rassemblement en des sociétés égalitaires comme la démocratie.
Jack, le fougueux chef du chœur d'enfants qui prend peu à peu le contrôle du groupe, représente le pouvoir guerrier, brutal et violent mais charismatique et aventureux par opposition au côté contraignant de l'organisation démocratique.
Roger, le second de Jack dans la nouvelle hiérarchie, représente la cruauté brute et inquiétante, le plaisir d'infliger la douleur ou de tuer, le fascisme grandissant à l'ombre du pouvoir guerrier.
Porcinet, l'obèse intellectuel et fragile dont les lunettes sont utilisées pour faire le feu représente le savoir et la connaissance, mais aussi la dépendance et la faiblesse. Méprisé par le pouvoir guerrier, il lui est pourtant vital : le feu qu'il est capable de créer est le symbole du pouvoir par excellence. L'instrument de ce pouvoir, les lunettes, finit par être volé par Jack et leur propriétaire écrasé par un rocher poussé du haut d'une falaise.
On confère parfois à l'œuvre une portée freudienne : Ralph serait le Moi, Porcinet le Surmoi et Jack le Ça[réf. nécessaire].
Simon, l'enfant courageux qui n'hésite pas à défier ses peurs représente la sagesse et la vérité - il sera le premier tué parmi les enfants, sacrifié en une fête orgiaque sanglante sur l'autel des superstitions qu'il était justement sur le point de détruire en apportant la vérité.
Les jumeaux Sam-Erik (Sam et Eric) ainsi que les autres enfants du groupe, ballottés entre les deux pouvoirs qui s'affrontent, peuvent représenter le peuple qui se débrouille comme il peut pour survivre.
Tout ce petit monde gravite autour d'une tête de cochon en décomposition (qui attire les mouches, d'où le titre de l'œuvre) plantée sur une pique par Jack et idolâtrée comme une divinité qui cristallise les peurs des enfants face à une nature mystérieuse et inquiétante. Elle représente plus, à l'insu des enfants, prenant dans l'hallucination de Simon - juste avant sa découverte du corps du parachutiste - ce nom symbolique d'un démon ancestral : Belzébuth signifie en hébreu « seigneur des mouches » ; cet épisode préfigure le réveil d'une sauvagerie destructrice refoulée dans les profondeurs de l'être humain par les normes sociales.
Adaptations
- Sa Majesté des mouches (Lord of the Flies), film anglais de Peter Brook sorti en 1963.
- Sa Majesté des mouches (Lord of the Flies), film américain de Harry Hook sorti en 1990 ; connu aussi sous le titre français : L'Île oubliée.
- Adaptation théâtrale, par Nigel Williams (1996), traduite en français par Ahmed Madani (sous le même titre que le roman original), éditée dans la collection Théâtre par l'École des Loisirs, en 2001 (ISBN : 221106017X)
Inspirations et références
Encore actuellement, ce roman inspire nombre de séries.
Notamment :
- L'épisode Les petits sauvages de la série Les Simpsons.
- L'épisode Le Mot en « M » de la série South Park.
- L'épisode Sa Majesté des pizzas de la série Les Weekenders.
- Le livre a ostensiblement inspiré le film Battle Royale et le reality show Survivor
- L'anime japonais Infinite Ryvius en est très fortement inspiré
- Le groupe Iron Maiden a sorti une chanson qui s'intitule Lord of the Flies.
- Le groupe américain The Offspring a sorti une chanson : You're gonna go far kid qui fait clairement référence a ce roman, dont le nom est d'ailleurs cité dans les paroles.
- Dans un épisode de la série Lost, Charlie dit, en parlant des rescapés de la queue de l'avion, « Ils se sont faits un trip « Sa majesté des mouches » » en référence à la violence de leur comportement comparée à la relative paix de leur campement. Sawyer y fait également référence dans la saison 1 en appelant Hurley Porcinet (une fois seulement) et en citant lui aussi le roman lorsqu'il capture Jin dans l'épisode 17.
- Ce roman a aussi été le livre de chevet de Tom Hanks alors qu'il abordait le tournage de Seul au monde
- Le livre Sa Majesté des clones, la version science-fiction de l'œuvre originale. De Jean-Pierre Hubert.
- Un projet d’émission de télé-réalité, Kid Nation
- Dans l'anime Mai Hime, Naji Homura lit Lord of the Flies avant de confronter les Hime les unes aux autres.
- Stephen King y fait longuement référence dans le recueil de nouvelles Cœurs perdus en Atlantide (2001) et le fait lire à l'un de ses personnages.
- Dans l'épisode Hyde s'installe de la série That '70s Show, Michael Kelso y fait référence comme un modèle de vie sans adultes.
- Le roman d'Alexandre Jardin, les Coloriés (paru en 2004 chez Gallimard). L'auteur y défend la théorie inverse d'un peuple-enfant paisible et joueur, à l'opposé de la violence et de l'hypocrisie adulte.
- La bande-dessinée Seuls de Vehlmann et Gazzotti. Velhmann a d'ailleurs déclaré avoir été très marqué par la lecture du livre dans sa jeunesse.
- Poppy Z. Brite dans Lost Souls (Ames perdues en français) fait référence à « Lord of the flies » au début de son roman.
- Le manga L'école emportée de Kazuo Umezu, dans lequel une école primaire et ses occupants se retrouvent inexplicablement projetés dans un désert sinistre et cruel.
Notes et références
Voir aussi
Articles connexes
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