Hughes de Digne

Hughes de Digne

Hugues de Digne

Hugues de Digne, Frère Mineur provençal du XIIIe siècle, prédicateur, ministre provincial de Provence, commentateur de la Règle franciscaine, influencé par les écrits de Joachim de Flore, précurseur des grands Spirituels de France et d'Italie.

Sommaire

Sa Vie

Frère mineur originaire de Digne (Alpes de haute-Provence, France) ainsi que sa sœur sainte Douceline. Il est parfois nommé Hugues de Barjols. Il nous est connu dans trois sources historiques du XIIIe siècle, ainsi que dans ses écrits, et dans les références que lui font les Franciscains spirituels de la fin du XIIIe siècle et du XIVe siècle. Ils lui attribuèrent des prophéties concernant l’avenir de l’Ordre.

La Chronique du Frère Salimbene de Adam

Salimbene, qui le tient en haute estime, l’aurait rencontré à trois reprises, et le qualifie de grand clerc et de « grand Joachimiste ». Nous savons par ces textes qu’Hugues était un prédicateur très renommé, qu’il avait été vicaire et gardien du couvent d’Hyères, qu’il était ami du ministre général Jean de Parme (déposé en 1257) et comme lui partisan de l’interprétation «joachimiste », abbé cistercien du (ne) siècle) de l’histoire de l’Église, de la fin des temps, et du rôle que s’attribuaient les Frères mineurs, dans ce contexte. Salimbene a entendu la prédication d’Hugues à plusieurs reprises: à Sienne, à Lucques et à Tarascon. Hugues était connu pour son franc-parler : ainsi Salimbene nous rapporte qu’il s’adressa aux cardinaux (probablement lors du (ne) Concile de Lyon en 1245, ou lors de son voyage à Rome), et leur reprocha leur train de vie et leur désir de « faire carrière ».

Histoire de saint Louis

C’est ce que montre aussi l’Histoire de saint Louis par le sieur de Joinville qui fut témoin de la prédication d’Hugues, lorsque saint Louis, de retour de la Croisade, débarqua à Hyères, le 17 juillet 1254. Il voulut saluer les Frères Mineurs du lieu et surtout le célèbre prédicateur frère Hugues. Celui-ci recommanda vivement au roi d’exercer une justice impartiale, de se préoccuper des pauvres et des humbles, et de veiller à la simplicité du train de vie de son entourage. Il en profita pour critiquer les religieux qui se trouvaient plus à l’aise à la cour du roi que dans leur couvent. On sait aussi qu’avant 1248, il fut ministre provincial de Provence. Beaucoup d’habitants de la région recouraient à ses conseils spirituels, comme ces bourgeois de Provence qui souhaitaient mener une vie évangélique ; mais au lieu de les accueillir dans l’Ordre franciscain, Hugues leur conseille de mener une vie érémitique, dans la forêt. Deux d’entre eux, Raymond Athénoux et Bertrand de Manarra, fondèrent une nouvelle famille religieuse, les Frères de la pénitence de Jésus-Christ, connus sous le nom de « Frères Sachets » (ou frère du sac, à cause de leur vêtement de toile de sac). On pense que Hugues tint un certain rôle dans l’organisation de cette nouvelle milice.

Correspondances

L’autre source importante pour connaître Hugues, ce sont ses correspondances avec d’illustres amis : le théologien franciscain Adam de Marsh, Robert Grossetête, évêque de Lincoln, et l’archevêque Jean Ier de Vienne. Ces deux évêques correspondent à l’idéal d’évêques instruits et consciencieux, désintéressés et spirituels dont Hugues traçait le portrait, dans sa mercuriale aux cardinaux.

D’après la Vie de sainte Douceline, on sait que Hugues mourut avant la fin du mandat de Jean de Parme, donc avant 1257, et qu’il fut enterré dans l’église des Franciscains de Marseille, là où fut enterrée, plus tard, à côté de lui, sa sœur sainte Douceline († 1274). On lui attribua des miracles, après sa mort et sur sa tombe, et il est inscrit comme « bienheureux » au martyrologe franciscain, à la date du 21 février (bien qu’il ne fut jamais béatifié).

Son œuvre

Trois écrits nous sont connus, concernant la vie franciscaine

  • Disputatio inter zelatorem paupertatis et inimicum domesticum eius : « Dispute entre un zélateur de la pauvreté et un frère ennemi de celle-ci », qui est une critique en règle contre les frères qui dévient de la pauvreté primitive et contre les responsables religieux qui tolèrent ces déviations de l’idéal franciscain. Toutefois Hugues de Digne ne doit plus être considéré comme l’auteur de la Disputatio, cf. Damien Ruiz, Hugues de Digne, O. Min., est-il l'auteur de la Disputatio inter zelatorem paupertatis et inimicum domesticum eius? Étude et texte, dans AFH 93 (2002)
  • De finibus paupertatis ou « Pourquoi la pauvreté ? » qui est une justification de la Règle des Mineurs et de son obligation pour ceux qui la professent. Aucun responsable religieux n’a le droit d’édulcorer les exigences de la pauvreté voulue par François d’Assise. (Seul écrit d’Hugues ayant fait l’objet d’une édition critique moderne : Claudia Florovsky, dans AFH, t.5, (1912), pp. 277-290).
  • Exposition sur la Règle des Frères Mineurs, qui est un commentaire de la Règle qui prend en compte l’Exposition des quatre maîtres, rédigée quelques années plus tôt par les maîtres franciscains de l’université de Paris. Texte assez modéré par rapport aux écrits postérieurs des leaders de la branche spirituelle de l’Ordre : Angelo Clareno, Ubertin de Casale etc... Hugues, qui est lui-même un intellectuel, ne remet pas en cause la cléricalisation de l’Ordre et l’accès aux études, mais il demeure très sévère sur l’usage de l’argent.

Bibliographie

  • Jérôme Poulenc, Hugues de Digne (bienheureux) in Catholicisme, Paris (Letouzey), t.5 (1962), col. 1020-1022.
  • Jérôme Poulenc, Hugues de Digne (bienheureux in Dict. de Spiritualité, VII, 875-879.
  • Jacques Paul, Le Commentaire d’Hugues de Digne sur la Règle franciscaine, in Revue d’Histoire de l’Église de France, t.61 (1975), p 231-241.
  • Jacques Paul, Hugues de Digne, in Cahiers de Fanjeaux, 10, 69-97, Toulouse (1975).
  • Damien Ruiz, Frère Hugues de Digne et son œuvre (édition critique), thèse de doctorat. Une histoire par les sources narratives, la codicologie et la doctrine (XIIIe-XVe s.), sous la direction de MM. André Vauchez et Antonio Rigon, Université de Paris X-Nanterre/Università degli Studi di Padova, 2008, 5 vol.
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