Gestion durable de la forêt

Gestion durable de la forêt

Gestion durable des forêts

Dans un contexte climatique incertain, un des enjeux de la gestion forestière est d'en accroître la résilience écologique. Au Japon, Akira Miyawaki, sur la base de nombreuses expériences de restauration de forêts recommande l'utilisation d'essences locales, dont les graines peuvent encore être trouvées dans les forêts sacrées, dont les arbres descendent de la forêt préhistorique, par exemple ici dans la forêt sacrée Tadasu no Mori de Otocyon

La gestion durable des forêts est un mode de gestion forestière qui fixe des critères, indicateurs et objectifs sociaux et environnementaux en plus des objectifs économiques à la gestion forestière.

Depuis le milieu des années 1990, la gestion durable des forêts entre dans le cadre du développement durable et prend une importance croissante, pour les pays producteurs à couvert forestier abondant ou non comme pour les acheteurs de bois ou de sous-produits de la forêt (champignons, gibier, baies, etc).

Une partie des institutions sylvicoles pratiquent maintenant diverses formes de gestion dites durable ou soutenable de la forêt, avec une large gamme de labels, méthodes et outils, pour certains éprouvés et pour d'autres plus expérimentaux ou encore sujets à caution.

Une définition de la gestion durable des forêts a été développée par la « Conférence ministérielle sur la protection des forêts en Europe »[1], et a depuis été adoptée par l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). La gestion durable des forêts est définie ainsi :

« Sustainable Forest Management is the stewardship and use of forests and forest lands in a way, and at a rate, that maintains their biodiversity, productivity, regeneration capacity, vitality and their potential to fulfill, now and in the future, relevant ecological, economic and social functions, at local, national, and global levels, and that does not cause damage to other ecosystems. —
La gestion durable des forêts signifie la gestion et l'utilisation des forêts et des terrains boisés d'une manière et à une intensité telle qu'elles maintiennent leur diversité biologique, leur productivité, leur capacité de régénération, leur vitalité et leur capacité à satisfaire, actuellement et pour le futur, les fonctions écologiques, économiques et sociales pertinentes aux niveaux local, national et mondial, et qu'elles ne causent pas de préjudices à d'autres écosystèmes.  »

La notion de « gestion durable des forêts » regroupe habituellement les opérations effectuées pour administrer et exploiter les forêts de manière à ce qu'elles remplissent durablement certaines fonctions écologiques, économiques et sociales pertinentes... Cette définition sous-entend que les forêts gérées font l'objet d'interventions humaines périodiques ou permanentes. Certaines ONG dont World Wide Fund for Nature, les Amis de la Terre ou Greenpeace demandent également qu'un réseau de forêts primaires soit protégé des coupes et de la gestion sylvicole, et que la restauration qualitative des forêts soit prise en compte au delà de seuls critères quantitatifs.

Lors du Sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992, les états n'ont pas réussi à s'entendre pour la signature d'une convention sur la forêt. C'est pourquoi la forêt n'a fait que l'objet d'une déclaration de moindre valeur juridique et opérationnelle que les convention signées sur la biodiversité ou le climat. La déclaration de Rio sur les forêts regroupent des vœux et des recommandations internationales pour une gestion durable des forêts. Cependant la convention sur la biodiversité contient des principes d'application théoriquement obligatoire, dont certains concernent la forêt.

Des critères et indicateurs (C&I) ont depuis été développés pour évaluer et parfois mesurer et certifier, de manière plus ou moins crédible et indépendante les progrès vers une gestion durable, au niveau des états, et d'instituts de gestion, souvent avec certains propriétaires, gestionnaires et ONG environnementales.

Sommaire

Critères et indicateurs de la gestion durable des forêts

Les « principes, critères et indicateurs » sont des instruments politiques de plus en plus utilisés par des États, collectivités et ONG (rapports locaux ou nationaux) voulant évaluer l'implémentation de la gestion durable des forêts ou mesurer les progrès à faire. Ces « critères » doivent donc caractériser et/ou définir les enjeux et facteurs essentiels, les conditions ou processus nécessaires à l'évaluation de l'aménagement forestier durable ou soutenable. Des « indicateurs » qualitatifs et quantitatifs, périodiquement mesurés, devant permettre de mesurer les progrès restant à faire pour chaque critère (généralement divisé en quelques sous-critères, adaptés au type de forêt et au contexte socioéconomiques et biogéographique).

Neuf « critères et indicateurs » régionaux et internationaux sont suivis par plus de 150 pays (FAO, 2001). Des initiatives plus avancées sont :

le « Groupe de travail sur les critères et indicateurs pour la conservation et la gestion durable des forêts tempérées et boréales » (aussi appelée le Processus de Montréal[2]),
la « Conférence ministérielle pour la protection des forêts en Europe » ([pdf][1]),
« l'Organisation internationale du bois tropical » ([pdf][2]).
le Forest Stewardship Council (Conseil de bonne gestion de la forêt) initié après Rio par le WWF notamment

Un consensus international semble émerger sur quelques éléments clés de la gestion forestière durable. Sept thématiques communes de gestion durable des forêts ont émergé (basées sur les neufs critères et indicateurs régionaux et internationaux précédemment cités) :

  1. Étendue des ressources forestières ;
  2. Diversité biologique (incluant donc les espèces des milieux associés, des lisières, clairières, zones humides et du bois mort);
  3. Santé et vitalité des forêts (comme condition de rentabilité et de résilience écologique des forêts);
  4. Fonctions de protection des ressources forestières ;
  5. Fonctions de production des forêts et ressources forestières ;
  6. Fonctions socio-économiques ;
  7. Cadre juridique, politique et institutionnel.

D'autres critères émergents sont le rôle de puits de carbone des forêts et de leur sol et leur capacité à durablement fournir des ressources aux populations autochtones et sociétés y vivant et en dépendant traditionnellement en zone tropicale.
Les sept premières thématiques ont été reconnues par la communauté forestière internationale lors de la quatrième session du « Forum des Nations unies sur les forêts »[3] de 2004 et à la 16e session du « Comité de sylviculture de la FAO »[4] de 2003.

Gestion durable des forêts et « approche par écosystème »

L'approche par écosystème est un principe fondamental[5] de la mise en œuvre de la Convention sur la diversité biologique.

Il n'y a pas de définition convenue de l'approche par écosystème sous la CDB[6] mais la description ainsi qu'un ensemble de principes pour son application furent développées lors d'une réunion d'experts au Malawi en 1998 — connus sous le nom de « Principes du Malawi »[7]. La description, cinq points de direction opérationnels, fut adopté par la cinquième conférence des Parties en 2000[8]. La description de la CDB est la suivante :

  1. L'approche par écosystème est une stratégie de gestion intégrée des terres, des eaux et des ressources vivantes, qui favorise la conservation et l'utilisation durable d'une manière équitable. Ainsi, l'application d'une telle approche aidera à assurer l'équilibre entre les trois objectifs de la Convention que sont la conservation, l'utilisation durable et le partage juste et équitable des avantages découlant de l'exploitation des ressources génétiques.
  2. L'approche par écosystème repose sur l'application de méthodes scientifiques appropriées aux divers niveaux d'organisation biologique, qui incluent les processus, les fonctions et les interactions essentiels entre les organismes et leur environnement. Elle reconnaît que les êtres humains, avec leur diversité culturelle, font partie intégrante des écosystèmes.
  3. L'accent mis sur la structure, les processus, les fonctions et les interactions est dans le droit fil de la définition de l'écosystème, qu'on trouve à l'article 2 de la Convention qui se lit comme suit :
    « On entend par "écosystème" un complexe dynamique formé de communautés de plantes, d'animaux et de micro-organismes et de leur environnement non vivant qui, par leur interaction, forment une unité fonctionnelle ».
    Cette définition ne mentionne pas d'unité ou d'échelle spatiale particulière, contrairement à la définition de la l'habitat" donnée par la Convention. Par conséquent, le terme « écosystème » ne correspond pas nécessairement aux termes « biome » ou « zone écologique », mais peut renvoyer à toute unité fonctionnelle, à quelque échelle que ce soit. De fait, c'est le problème à considérer qui devrait déterminer l'échelle de l'analyse et de l'action. Ce pourrait être, par exemple, un grain de terre arable, un étang, une forêt, un biome ou toute la biosphère.
  4. L'approche par écosystème exige une gestion qui puisse s'adapter à la nature complexe et dynamique des écosystèmes et à une connaissance et une compréhension insuffisante de leur fonctionnement. Les écosystèmes obéissent souvent à des processus non linéaires, et l'on observe fréquemment un décalage entre ces processus et l'apparition de leurs conséquences. Il en résulte des discontinuités, qui engendrent la surprise et l'incertitude. La gestion doit savoir s'adapter pour répondre à ces incertitudes et accepter dans une certaine mesure d'apprendre « sur le tas » ou tirer parti des résultats de recherche. Il peut se révéler nécessaire de prendre certaines mesures même lorsque la relation de cause à effet n'a pu être parfaitement établie sur le plan scientifique.
  5. L'approche par écosystème, qui n'exclut pas d'autres méthodes de gestion et de conservation telles que les réserves de la biosphère, les zones protégées et les programmes de conservation portant sur une espèce déterminée, ainsi que d'autres approches utilisées dans le cadre des politiques et législations nationales, pourrait plutôt intégrer toutes ces approches et d'autres méthodes pour traiter des situations complexes. Il n'y a pas une seule façon d'appliquer l'approche par écosystème car elle dépend des conditions locales, provinciales, nationales, régionales ou mondiales. En fait, l'approche par écosystème pourrait être utilisée de diverses façons en tant que cadre propre à assurer concrètement la réalisation des objectifs de la Convention.

La gestion durable des forêts a été reconnue par les Parties de la Convention sur la diversité biologique en 2004 (décision VII/11 de la 7e conférence des Parties[9]) comme étant un moyen concret d'appliquer l'approche par écosystème aux écosystèmes forestiers.

L'approche par écosystème pour la diversité biologique des forêts peut être décrite comme une stratégie de gestion intégrée des forêts qui favorise la conservation et l'utilisation durable de manière équitable. Les êtres humains, dans leur diversité culturelle, font partie intégrante de l'écosystème forestier. L'approche par écosystème nécessite une gestion adaptée pour traiter la nature dynamique et complexe de l'écosystème forestier et l'absence de connaissances ou de compréhension complète de son fonctionnement.
L'écosystème forestier devrait donc être géré pour ses valeurs intrinsèques et pour les bénéfices qu'il apporte aux êtres humains, d'une manière juste et équitable. Ses gestionnaires devrait considérer les effets, actuels et potentiels de leurs activités, pour éviter des effets inconnus et imprévisibles sur son fonctionnement et, donc, sur sa valeur. L'écosystème forestier devrait également être compris et géré dans un contexte économique. En particulier, les coûts et les bénéfices de l'écosystème forestier devraient être internalisés dans la mesure du possible. En outre, les distorsions du marché qui compromettent la diversité biologique de la forêt devraient être réduites et des incitations qui favorisent la diversité biologique et la gestion durable devraient être appliquées.

En conclusion, la gestion de l'écosystème forestier doit se faire à l'intérieur des limites de sa dynamique. Par conséquent, la conservation de leur structure et leur fonctionnement doivent être la priorité. C'est la nécessité pour conserver ses pleines valeurs, y compris les marchandises et services que la forêts délivrent aux être humains.

En Europe, le MCPFE[1] et le « Conseil pour la Stratégie pour la diversité biologique et paysagère pan-européenne[10] » (PEBLDS) ont conjointement reconnu que la gestion durable des forêts était en accord avec l'approche écosystémique en 2006 ((en)[pdf] dixième réunion du Conseil de la PEBLDS).

Certification indépendante des opérations de gestion durable des forêts

Pour plus d'informations sur la certification environnementale de produits, voir l'article : écolabel.

L'accroissement des préoccupations environnementales et de la demande des consommateurs pour un commerce socialement plus responsable a permis à une certification indépendante des forêts d'émerger dans les années 1990 comme étant un outil crédible pour communiquer sur les performances sociales et environnementales des opérations forestières.

Il y a de nombreux utilisateurs potentiels de la certification, dont les entrepreneurs forestiers, les investisseurs, les écologistes, les entreprises consommant de grandes quantités de bois et de papier, et les particuliers.

Avec la certification forestière, une organisation indépendante développe des standards de bonne gestion forestière, et les organismes d'audit indépendants certifient les opérations forestières qui répondent à ces standards. Cette certification prouve que les forêts sont bien gérées — selon la définition des standards utilisés — et assure que les produits en bois et le papier proviennent de forêts gérées de façon responsable.

Cette montée de la certification a conduit à l'émergence de plusieurs systèmes différents à travers le monde. Le résultat est qu'il n'y a aucun standard mondial communément accepté, et chaque système utilise en quelque sorte une approche différente pour définir les standards de gestion durable des forêts.

Logo de la certification PEFC
Logo de la certification FSC

La certification forestière par des organisations indépendantes est un outil important pour ceux cherchant à s'assurer que le papier et les produits en bois qu'ils achètent proviennent de forêts qui sont bien gérées et exploitées légalement. L'intégration de certifications indépendantes dans les pratiques d'obtention des produits forestiers peut être primordiale pour des politiques forestières qui incluent des facteurs tels que la protection de ressources forestières sensibles, la sélection réfléchie de matériaux et l'utilisation efficace de produits[11].

Quelques standards communs sont :

La surface de forêts certifiées augmente rapidement. En décembre 2005, il y avait 2 420 000 km² de forêts certifiées selon les standards[12], FSC ou SFI, dont 1 190 000 km2 au Canada.[13]. En 2009, 8 % de la forêt mondiale est certifiée dont 80 % selon les standards PEFC dont le SFI fait désormais partie.

Le PEFC contrairement au FSC favorise la consommation de bois local afin d'éviter des échanges couteux d'un point de vue environnemental.

Tandis que la certification est prévue comme un outil pour améliorer la gestion forestière à travers le monde, à ce jour la plupart des opérations certifiées de sylviculture sont situées en Europe et Amérique du Nord. Une barrière importante pour de nombreux gestionnaires forestiers dans les pays en voie de développement est le manque de capacité à pratiquer des audits de certification et à maintenir les standards de certification.

Forêts urbaines

La forêt urbaine ou péri-urbaine pose des problèmes par exemple liés à l'accessibilité, la coexistence de différentes fonctions autres que la production ligneuse d'intérêt commercial, une fragilisation par la surfréquentation, etc. Ces forêts nécessitent des précautions et des modes de gestion adaptés [14].

En Europe

L'Agence européenne pour l'environnement a estimé en mai 2008 dans un rapport[15] que l'Europe ne pourrait tenir ses engagements en matière d'arrêt de réduction de la biodiversité d'ici 2010 sans une utilisation plus "soutenable" de la forêt. Selon le rapport, les forêts en tant qu'abritant la plus grande partie de la biodiversité terrestre en Europe sont de ce point de vue vitales, et toute initiative visant à stopper la perte de biodiversité en Europe doit prendre les forêts en compte. Des efforts sont à faire en faveur de la naturalité des forêts et de certains groupes d'espèces dépendant du bois mort et de forêts moins fragmentées. Les oiseaux communs forestiers sont en déclin plus net dans les forêts du sud et du nord de l'Europe[16]. Certaines espèces menacées continuent à régresser, dont par exemple certains pics ; Dendrocopos minor (-81%, de 1980 à 2005), Parus montanus (-58%, de 1980 à 2005) alors qu'une espèce telle que Ficedula albicollis semble reconstituer ses effectifs (+ 92 % de 1998 à 2005). La diversité génétique des forêts est étudiée et parfois protégée (par exemple le peuplier noir (Populus nigra) a fortement régressé ou a localement disparu, mais des graines en ont été protégées dans des collections ex situ.

En France

L'ambition du Plan forestier national (2006-2013) est que la gestion durable, « toutes forêts confondues », couvre « les deux tiers de la surface totale en 2015 ». « La moitié de la surface appartenant à des propriétaires privés serait concernée. » Cet objectif est parfois jugé peu ambitieux par certaines parties, tandis que d'autres le considèrent comme un progrès important compte tenu de l'extrême morcellement et de la faible surface unitaire des propriétés forestières française. La loi d’orientation forestière de 2001 encourage un plus grand nombre de propriétaires à rédiger un document de gestion durable (plan simple de gestion, soumis pour approbation au CRPF) ou à adhérer à un document de gestion durable pré-existant (règlement-type de gestion et/ou code de bonnes pratiques sylvicoles).

En Amérique du Nord

Au Canada

Aux États-Unis

Notes et références

  1. a  et b Ministerial Conference on the Protection of Forests in Europe (MCPFE)
  2. Processus de Montréal
  3. Forum des Nations unies sur les forêts (2004)
  4. Comité de sylviculture de la FAO (2003)
  5. Lors de sa seconde réunion (Jakarta, novembre 1995), la « Conférence des Parties » avait retenu l'approche par écosystème comme principal cadre d'action de la Convention.
  6. Ecosystem Approach
  7. Principes du Malawi
  8. COP Decisions
  9. Décisions de la COP
  10. Conseil pour la Stratégie pour la diversité biologique et paysagère pan-européenne (PEBLDS)
  11. Source : Forest Certification Resource Center (Centre de ressources pour la certification forestière)
  12. CSA
  13. Source: Canadian Sustainable Forestry Certification Coalition
  14. Thierry Moigneu ; Gérer les forêts périurbaines ; Ed:ONF ; 2005 ; 414 pages ISBN:2-84207-297-9 (http://www.onf.fr/idf-n-o/sommaire/mediatheque/@@display_media.html?oid=IN0000000405&datatype:int=3&conf_id:int=1857665054 voir)
  15. Rapport EEA N° 3/2008: European forests - ecosystem conditions and sustainable use(ISSN:1725-9177)
  16. Source : figure 3.5 Regional indicators of common forest birds in four European regions, page 38/110 du rapport AEE déjà cité

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Liens externes

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