Exécution de Louis XVI

Exécution de Louis XVI
L'Exécution de Louis XVI, d'après une gravure allemande.

L'exécution de Louis XVI, est l'application du jugement de mise à mort du roi par décapitation prononcé par les députés de la Convention nationale à la suite de son procès. Elle eut lieu le 21 janvier 1793 à 10h22, à Paris, sur la place de la Révolution (ancienne place Louis XV, devenue en 1795 la place de la Concorde). C'est un événement majeur de la Révolution française, et plus généralement de l'histoire de France.

Sommaire

Contexte

À la suite des événements de la journée du 10 août 1792 et de l'attaque des Tuileries par le peuple parisien, Louis XVI est interné à la prison du Temple avec sa famille pour haute trahison. A l'issue de son procès, Louis XVI est condamné à mort à une courte majorité le 15 janvier 1793.

Louis XVI demanda aux représentants de la Convention qu'il rencontra les derniers jours s'ils avaient reçu des nouvelles de la Pérouse, disparu depuis environ cinq ans début 1788. Il essaya aussi de discuter des Annales de Tacite.

L'exécution

Le trajet de la prison du Temple à la place de la Révolution

Plaque rue de Beauregard commémorant la tentative d'évasion
Louis XVI sur l'échafaud, couvert d’un simple gilet de molleton blanc, d’une culotte grise et de bas de soie blancs (gravure anglaise de 1798).

Louis XVI se réveille à 5 heures. Cléry, son valet, assiste le roi dans sa toilette. Louis XVI rejoint ensuite l'abbé Henri Essex Edgeworth de Firmont, se confesse, assiste à sa dernière messe servie par Cléry et reçoit la communion.

Sur les conseils de l'abbé, Louis XVI évite une dernière scène d'adieux avec sa famille. A 7h, Louis XVI confie ses dernières volontés à l'abbé, son sceau pour le Dauphin et son alliance pour la reine. Après avoir reçu la bénédiction de l'abbé, Louis XVI rejoint Antoine Joseph Santerre qui commande les gardes. Dans la seconde cour, une voiture verte attend. Louis XVI y prend place avec l'abbé et deux personnes de la milice qui s'installent face à eux. La voiture quitte le Temple vers 9h. Elle tourne à droite dans la rue du Temple, pour rejoindre les grands boulevards, tandis que le roi continue ses prières. Paris a alors 80 000 hommes en armes (Fédérés, Gardes nationaux, fusiliers) occupant les carrefours, les places et postés le long des rues[1].

Un cortège se forme avec la voiture, précédée de tambours, et escortée par une troupe de cavaliers sabres au clair. Il avance entre plusieurs rangs de gardes nationaux et de sans-culottes.

Aux environs de la rue de Cléry, le baron de Batz, soutien de la famille royale qui a financé la fuite à Varennes, a convoqué 300 royalistes pour faire évader le roi. Le roi devrait être caché dans une maison appartenant au comte de Marsan, rue de Cléry. Le baron de Batz s'élance : « Avec moi, mes amis, pour sauver le roi ! ». Mais ses compagnons ont été dénoncés, seuls quelques uns ont pu venir. Trois sont tués, mais le baron de Batz peut s'échapper.

Le cortège emmené par Santerre poursuit son trajet par les boulevards et la rue de la Révolution (actuelle rue Royale). Il débouche à 10 h sur la place de la Révolution et s'arrête au pied de l'échafaud installé entre les Champs Elysées et le piédestal de la statue de Louis XV qui vient d'être déboulonnée et situé à 2 mètres de haut. Peint en rouge, l'échafaud est placé au milieu d'un espace vide encadré de canons et d'une troupe de fédérés, le peuple étant tenu au loin. Le Roi, accueilli par le bourreau Charles-Henri Sanson à sa descente du carrosse, ôte sa redingote brune et son foulard-cravate, se fait lier les mains dans le dos par son propre mouchoir ; un assistant de Sanson découpe grossièrement son col puis le rabat et lui coupe les cheveux[2]. Le roi, assisté de l'abbé Edgeworth, monte sur l'escalier raide et rejoint les cinq bourreaux (Sanson et ses quatre assistants) sur la plate-forme[3] ,[4].

Les derniers instants

Dans Le Nouveau Paris, Louis Sébastien Mercier raconte l'exécution de Louis XVI en ces termes : « […] est-ce bien le même homme que je vois bousculé par quatre valets de bourreau, déshabillé de force, dont le tambour étouffe la voix, garrotté à une planche, se débattant encore, et recevant si mal le coup de la guillotine qu'il n'eut pas le col mais l'occiput et la mâchoire horriblement coupés ? »

Le général Berruyer, commandant en second de Paris, fait battre les tambours pour couvrir les paroles du roi qui est alors garrotté à la planche. À 10h23, la planche bascule, la lunette de bois se referme sur sa tête et le bourreau Charles-Henri Sanson actionne le couperet. Legros, l’assistant de l’exécuteur, saisit la tête sanguinolente et la présente au peuple. Les fédérés se précipitent sur l'échafaud ensanglanté pour recueillir le sang sur leurs mouchoirs, leurs piques ou leurs sabres, certains s'en maculent le visage, d'autres crient « Vive la Nation ! Vive la République ! ». Certains royalistes prennent des cheveux du roi en guise de souvenir. Le canon tonne et prévient la famille du Roi restée à la Tour du Temple que l'exécution a eu lieu[1].

Témoignages

Présentation de la tête du roi.
Louis XVI recevant le dernier sacrement de l'abbé Edgeworth.

Presse contemporaine

Le journal le Thermomètre du Jour du 13 février, un journal républicain modéré, décrit le Roi criant : « Je suis perdu ! », en citant comme une source le bourreau, Charles-Henri Sanson.

Sanson

Charles-Henri Sanson, le bourreau du roi réagit à la version du Thermomètre du Jour en consignant son propre témoignage de l'exécution dans une lettre datée du 20 février 1793[5],[2] : « Arrivé au pied de la guillotine, Louis XVI considéra un instant les instruments de son supplice et demanda à Sanson si les tambours s'arrêteraient de battre. Il s'avança pour parler. On cria aux bourreaux de faire leur devoir. Pendant qu'on lui mettait les sangles, il s'écria : "Peuple, je meurs innocent !". Ensuite, se tournant vers ses bourreaux, Louis XVI déclara: "Messieurs, je suis innocent de tout ce dont on m'inculpe. Je souhaite que mon sang puisse cimenter le bonheur des Français." Le couperet tomba. Il était 10 heures 22. L'un des assistants de Sanson présenta la tête de Louis XVI au peuple, cependant que s'élevait un immense cri de : "Vive la Nation ! Vive la République !" et que retentissait une salve d'artillerie qui parvint aux oreilles de la famille royale incarcérée. »

Enfin Sanson souligne dans sa lettre, publiée avec ses fautes de français, dans Le Thermomètre du jeudi 21 février 1793, que le roi « a soutenu tout cela avec un sang froid et une fermeté qui nous a (sic) tous étonnés. Je reste très convaincu qu'il avait puisé cette fermeté dans les principes de la religion dont personne plus que lui ne paraissait pénétré ni persuadé »[6].

Sanson fils

Alexandre Dumas père dans ses Causeries raconte une rencontre vers 1830 avec le fils de l'exécuteur, alors présent:

« Eh bien, vous disiez que vous désiriez quelque chose, monsieur Dumas ?
- Vous savez combien les auteurs dramatiques ont besoin de renseignements précis, monsieur Sanson. Il se peut qu'il arrive un moment où j'aie à mettre Louis XVI en scène. Qu'y a-t-il de vrai dans la lutte qui s'engagea entre lui et les aides de votre père, au pied de l'échafaud ?
- Oh ! je puis vous le dire, monsieur, j'y étais.
- Je le sais, et c'est pour cela que je m'adresse à vous.
- Eh bien, voici : le roi avait été conduit à l'échafaud dans son propre carrosse et avait les mains libres. Au pied de l'échafaud, on pensa qu'il fallait lui lier les mains, moins parce qu'on craignait qu'il ne se défendît que parce que, dans un mouvement involontaire, il pouvait entraver son supplice ou le rendre plus douloureux. Un des aides attendait donc avec une corde, tandis qu'un autre lui disait : "Il est nécessaire de vous lier les mains." À cette proposition inattendue, à la vue inopinée de cette corde, Louis XVI eut un mouvement de répulsion involontaire. "Jamais ! s'écria-t-il, jamais !" Et il repoussa l'homme qui tenait la corde. Les trois autres aides, croyant à une lutte, s'élancèrent vivement. De là, le moment de confusion interprété à leur manière par les historiens. Alors, mon père s'approcha, et, du ton le plus respectueux : "Avec un mouchoir, Sire" dit-il. À ce mot, Sire, qu'il n'avait pas entendu depuis si longtemps, Louis XVI tressaillit ; et, comme au même moment son confesseur[7] lui adressait quelques mots du carrosse : "Eh bien, soit; encore cela, mon Dieu !" dit-il. Et il tendit les mains. »

Madame de Staël et l'exécution de Louis XVI

« Cet homme qui manqua de la force nécessaire pour préserver son pouvoir, et fit douter de son courage tant qu’il en eut besoin pour repousser ses ennemis ; cet homme dont l’esprit naturellement timide ne sut ni croire à ses propres idées, ni même adopter celles d’un autre, s’est montré tout à fait capable de la plus étonnante des résolutions, celle de souffrir et de mourir. »

(Considérations sur les principaux événements de la Révolution française)

Inhumation de Louis XVI au cimetière de la Madeleine

Le cadavre de Louis XVI est immédiatement transporté à l'ancienne église de la Madeleine. La Convention a en effet refusé que les restes de Louis XVI soient inhumés auprès de son père, Louis de France, le Dauphin, à Sens. Ce sont deux vicaires assermentés, fidèles à la Révolution, qui officient pour le court service funèbre célébré à l'église de la Madeleine. Le vicaire Damoureau témoigne : « Arrivé au cimetière, je fis faire le plus grand silence. Un détachement de gendarmes nous fit voir le corps. Il était vêtu d'un gilet blanc, d'une culotte de soie grise, les bas pareils. Nous psalmodiâmes les vêpres, les prières du service des morts. Le corps mis à découvert dans la bière, fut d'après les ordres du pouvoir exécutif, jeté au fond de la fosse, sur un lit de chaux, puis d'un lit de terre, le tout fortement battu et à plusieurs reprises. La tête de Louis XVI fut mise à ses pieds ».

Le 21 janvier 1815, les restes de Louis XVI furent inhumés à la basilique Saint-Denis. En 1816, son frère le roi Louis XVIII fit élever un monument funéraire réalisé par Edme Gaulle.

Acte de décès de Louis XVI dans l'état civil de Paris

L'acte de décès de Louis XVI est rédigé le 18 mars 1793. L'original de l'acte a disparu lors de la destruction des archives de Paris en 1871 mais il avait été recopié par des archivistes. Voici ce que dit le texte :

" Du lundi 18 mars 1793, l'an Second de la République française.
Acte de décès de Louis CAPET, du 21 janvier dernier, dix heures vingt-deux minutes du matin ; profession, dernier Roy des Français, âgé de trente-neuf ans, natif de Versailles, paroisse Notre-Dame, domicilié à Paris, tour du Temple ; marié à Marie-Antoinette d'Autriche, ledit Louis Capet exécuté sur la Place de la Révolution en vertu des décrets de la Convention nationale des quinze, seize et dix-neuf dudit mois de janvier, en présence 1° de Jean-Antoine Lefèvre, suppléant du procureur général sindic du département de Paris, et d'Antoine Momoro, tous deux membres du directoire dudit département et commissaires en cette partie du conseil général du même département ; 2° de François-Pierre Salais et de François-Germain Isabeau, commissaires nommés par le conseil exécutif provisoire, à l'effet d'assister à ladite exécution et d'en dresser procès-verbal, ce qu'ils ont fait ; et 3° de Jacques-Claude Bernard et de Jacques Roux, tous deux commissaires de la municipalité de Paris, nommés par elle pour assister à cette exécution ; vu le procès-verbal de ladite exécution dudit jour 21 janvier dernier, signé Grouville, secrétaire du conseil exécutif provisoire, envoyé aux officiers publics de la municipalité de Paris cejourd'huy, sur la demande qu'ils en avaient précédemment faite au ministère de la justice, ledit procès-verbal déposé aux Archives de l'état civil ;
Pierre-Jacques Legrand, officier public (signé) Le Grand.
"[8]

Aujourd'hui

L'endroit où fut inhumé Louis XVI et plus tard Marie-Antoinette d'Autriche (16 octobre 1793) au cimetière de la Madeleine est aujourd'hui le square Louis-XVI. L'autel de la crypte y marque l'endroit exact où Louis XVI fut inhumé.

Des messes catholiques sont organisées chaque année, le 21 janvier, en commémoration de la mort du roi Louis XVI[9].

Liens internes

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Bibliographie

Paul et Pierrette Girault de Coursac ont écrit un ensemble d'ouvrages sur Louis XVI dont :

  • Louis XVI, Roi Martyr. Tequi 1982,
  • Louis XVI, un visage retrouvé. O.E.I.L. 1990.
  • La mort du Roi;G.Lenotre,André Castelot "les grandes heures de la Révolution Française" L.A.P

Liens externes

Notes

  1. a et b L'après-Varennes émission La Fabrique de l'Histoire, France Culture, 19 janvier 2011
  2. a et b Témoignage de Charles-Henri Sanson : exemplaire conservé à la BNF dont la consultation en ligne est possible via le site Gallica : [1]
  3. Anne Thoraval, Promenades sur les lieux de l'histoire, Parigramme, novembre 2004, 205 p. (ISBN 978-2-84096-323-X)  Chapitre "L'exécution de Louis XVI" p. 60 à 69
  4. Philippe Krief, Paris Rive Droite, Paris, Massin, coll. « Petites histoires et grands secrets », 2004, 213 p. (ISBN 2-7072-0488-9)  p. 86 à 101
  5. L'existence de la lettre est attestée par Chateaubriand à qui elle fut montrée par son ami royaliste le baron Jean-Guillaume Hyde de Neuville, et décrite (et transcrite) par lui dans Essai sur les Révolutions (1797). Une autre transcription, du XIXe siècle, moins exacte que celle de Chateaubriand, est à la Bibliothèque Nationale (Mss Fr. 10, 268). Le 7 juin 2006, cette lettre manuscrite a été adjugée 120 000 euros lors d’une vente aux enchères à Londres par la maison Christie's.
  6. François-René de Chateaubriand, Essai historique, politique et moral sur les révolutions anciennes et modernes considérées dans leurs rapports avec la révolution française, dans les Œuvres complètes de M. le vicomte de Chateaubriand, Pourrat Frères, 1834, tome 2, p. 97.
  7. En fait, c'est l'abbé Edgeworth son confesseur qui convainc le roi de se faire lier les mains et couper les cheveux, lui rappelant que Jésus-Christ sur le chemin de Croix a accepté tous les sacrifices.
  8. Texte cité notamment par l'archiviste Auguste Jal dans son Dictionnaire critique de biographie et d'histoire, Paris, Henri Plon, 1867, page 806.
  9. Association Louis XVI. [2]

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