Europe fédérale

Europe fédérale

Fédéralisme européen

On désigne par fédéralisme européen le courant politique visant la construction d'une Europe fédérale. Il se distingue des courants confédéralistes (appelés parfois "unionistes"), partisans d'une simple coopération inter-étatique, en cela qu'il considère que l'union de l'Europe n'a de sens que par l'exercice en commun de la souveraineté au niveau européen et par la création d'une autorité politique européenne issue d'un processus démocratique.

Les organisations se réclamant du fédéralisme européen ont eu une influence significative entre 1945 et la création des Communautés européennes, et moindre depuis.

Sommaire

Origines

Les premières initiatives

Voir aussi l'article Histoire de l'Union européenne

Le fédéralisme européen dans la Résistance

  • 1941 : Altiero Spinelli et Ernesto Rossi écrivent à Ventotene le Manifeste pour une Europe libre et unie[1] où ils attribuent à l’État national la cause de la guerre et déclarent comme priorité stratégique pour l'après-guerre la lutte pour la fédération européenne plutôt que la transformation de l’État national.
  • En Allemagne, à Munich, les étudiants du mouvement « La Rose blanche » prennent position pour une fédération européenne après la guerre. Ses dirigeants seront exécutés.
  • 1943 : fondation du Mouvement fédéraliste européen à Milan. Il adopte le manifeste de Ventotene comme programme.
  • 1944 : fondation à Lyon du Comité français pour la fédération européenne[2].
  • Printemps 1944 : réunion à Genève des délégués des mouvements de résistance de plusieurs pays européens pour discuter du projet de fédéralisme européen.
  • 7 juillet 1944 : Déclaration des résistances européennes issue de ce projet.

Fondation des mouvements fédéralistes dans l'après-guerre

Représentant un E vert, ce drapeau a été longtemps utilisé par le Mouvement européen. Il reste aujourd'hui en usage chez les fédéralistes européens.

Historique

Naissance des Communautés européennes et bataille de la CED

  • La naissance de la CECA suite à la déclaration Schuman, laquelle mentionnait l'objectif de « la Fédération européenne »[4], puis en 1957 la création de la CEE suscitera au sein des fédéralistes un clivage entre constitutionalistes et fonctionnalistes. Les premiers souhaitent la création d'une fédération européenne suite à un processus démocratique où une assemblée élue rédigerait une constitution pour l'Europe. Les seconds acceptent que les progrès vers le fédéralisme se fassent progressivement à travers les institutions supranationales existantes, en s'assurant d'abord du succès des Communautés européennes, même si celles-ci sont limitées à des aspects économiques.
  • La "bataille" pour la Communauté européenne de défense laisse entrevoir la possibilité de voir les deux approches aboutir puisque l'intégration dans un domaine limité, la défense, implique la création d'une autorité politique. Un projet de traité de Communauté politique européenne sera d'ailleurs élaboré par une assemblée ad-hoc[5] mais partagera l'échec du projet CED.

La division des fédéralistes

  • 1956 : Scission des Néerlandais et des Allemands de Europa Union et création du centre d’Action européenne fédéraliste (AEF). En France : La Fédération (Mouvement fédéraliste français) s'y rattache.
  • L’UEF prends le nom de Mouvement fédéraliste européen en 1959.
  • Le Congrès du peuple européen : l'UEF mène alors cette action qui vise à la contestation du processus communautaire et à la revendication d’une assemblée constituante. Il s'agit de faire élire par les citoyens sollicités lors d'actions de rue une assemblée constituante officieuse. L'action se poursuit de 1957 (72 000 électeurs) à 1960 (500 000 électeurs) mais cessera faute de moyens.
  • Trois orientations partagent le MFE (ex-UEF) dans les années 1960, marquées par l'arrivée au pouvoir en France du régime gaulliste très hostile aux thèses fédéralistes. Mario Albertini fonde le courant Autonomie fédéraliste qui refuse tout partenariat extérieur. Un second courant prône la coopération avec les autres forces pro-européennes notamment le Mouvement Européen. Enfin, Altiero Spinelli souhaite la fin de la neutralité et virage à gauche, orientation qui s'avérera majoritaire.

La réunification des fédéralistes

Les deux organisations continuent malgré la scission à mener des actions communes. Les membres de l'AEF participeront donc à la préparation d'une « Charte fédéraliste » qui sera adoptée lors du Congrès de Montreux de 1964 du MFE. Ce texte est nettement influencé par le fédéralisme intégral d'Alexandre Marc (les fédéralistes opposent, au fédéralisme intégral ou « global » qui s'intéresse à l'ensemble des questions politiques et sociale, le fédéralisme dit « hamiltonien » qui ne s'intéresse qu'à l'organisation des institutions politiques).

Mario Albertini, minoritaire, lance hors du MFE une action intitulée le « Recensement du peuple fédéral européen » sur un principe proche du Congrès du peuple européen.

AEF et MFE fusionnent dans l’Union des fédéralistes européens en 1972-1973. Les Jeunes Européens Fédéralistes, organisation de jeunesse autonome est fondée à la même époque. L'UEF se réoriente sur la réforme de la CEE et l’élection au suffrage universel direct du Parlement européen.

Campagnes

Cette campagne avait été lancée en février 1967 par le MFE. Elle consistait notamment en des pétitions auprès des parlementaires. Le projet est soutenu en France avec une proposition de loi de François Mitterrand en 1968. Une loi d’initiative populaire en est initiée en Italie en 1969. La décision est prise en décembre 1974 lors d'un sommet des chefs d'État et de gouvernement qui crée aussi le Conseil européen et l'acte juridique signé le 20 septembre 1976. L'UEF mène alors une action auprès des partis pour un programme européen. Les fédéralistes espèrent alors que la légitimité nouvelle donnée au Parlement européen lui permettra de relancer la construction européenne. Cet espoir est aussi la crainte de leurs adversaires exprimée notamment dans l'appel de Cochin. De fait, le Parlement européen adoptera le projet Spinelli en 1984.

Les campagnes suivantes menées par les mouvements fédéralistes porteront d'une part sur l'adoption d'une monnaie unique, qui sera retenue avec le traité de Maastricht et deviendra l'euro puis une campagne pour une constitution européenne marquée par une grande manifestation lors du Conseil européen de Nice en décembre 2000.

Adversaires et débats

Nationalisme, euroscepticisme et souverainisme

Les fédéralistes européens se définissent avant tout en opposition au nationalisme, c'est-à-dire l'idéologie des partisans de l'État-nation. Les fédéralistes les plus radicaux considèrent l'unionisme ou l'intergouvernementalisme comme des formes de nationalisme. Le fédéralisme implique aussi une opposition au centralisme.

En ce qui concerne plus spécifiquement la construction européenne, les fédéralistes se sont opposés au mouvement de l'euroscepticisme lequel se fait aujourd'hui appeler souverainisme, appellation que contestent les fédéralistes qui opposent la souveraineté théorique exercée dans la cadre de l'État-nation, dont l'impact est limité par la mondialisation et la possibilité de retrouver une souveraineté concrète en la partageant au niveau européen (on parle d'"exercice en commun" de la souveraineté).

Les fédéralistes européens et le traité constitutionnel européen

Les organisations se réclamant du fédéralisme ont apporté un soutien critique au traité constitutionnel. Même si celui-ci n'est pas la Constitution qu'elles appellent de leurs vœux, elles considèrent que les progrès institutionnels du texte étaient significatifs et que l'utilisation du terme de constitution donne une visibilité au pouvoir politique européen existant et constitue donc une étape importante dans la reconnaissance d'une communauté politique démocratique des Européens.

Certains fédéralistes se sont cependant opposés au traité en retenant avant tout ses insuffisances et le maintien d'une part importante d'intergouvernementalisme dans les institutions européennes. Le chef de file de cette opposition interne est Claudio d'Alelio, membre du Comité d'arbitrage et co-secrétaire du Groupe Europe (la section de l'UEF dans les institutions européennes, présidé par Jacques Santer), lequel a animé le débat parmi les fonctionnaires européens et les députés européens dans le but d'attirer leur attention sur des parties du traité constitutionnel dont les anomalies ne pouvaient leur échapper[réf. nécessaire].

La critique fédéraliste du traité a été aussi souvent utilisée par certains des adversaires du traité lors du débat français sur le traité constitutionnel européen.

Le fédéralisme européen et les partis politiques

De nombreux élus se sont prononcés en faveur du fédéralisme européen sans nécessairement participer aux mouvements qui s'en réclament. L'UEF est cependant dirigé généralement par un élu. Le Mouvement européen, plus proche du monde politique, se prononce aussi aujourd'hui en faveur du fédéralisme, quoique de manière moins prononcée. Les organisations fédéralistes tentent généralement de maintenir une certaine neutralité afin de pouvoir influencer les élus de droite comme de gauche. Le Parlement européen compte souvent dans ses rangs un intergroupe fédéraliste qui rassemble les eurodéputés au-delà des clivages partisans.

Devant la lenteur de la construction européenne et déçus par la faible adhésion des gouvernements à leurs thèses, des fédéralistes ont cependant souhaité s'engager en politique et tenter d'influencer le cours des choses en se présentant aux élections. En 1974, deux candidats se réclamant du fédéralisme se présentent : Jean-Claude Sebag (42 007 voix) et Guy Héraud (19 255 voix).

Il existe en France un Parti fédéraliste.

En Italie, Alliance pour les États-Unis d'Europe est le groupe politique européen fédéraliste qui a été fondé en 1996, lors des élections législatives italiennes, dont le président est Claudio d'Alelio.

Parmi les politiques qui se sont prononcés en faveur du fédéralisme européen on peut noter Joschka Fischer alors ministre des affaires étrangères d'Allemagne et Guy Verhofstadt, Premier ministre de la Belgique.

Le fédéralisme européen et le mondialisme

La perspective à terme d'un gouvernement fédéral mondial est parfois évoquée dans les écrits fédéralistes. Elle était déjà évoquée dans certains discours du Congrès de La Haye. La critique de l'État-national et les valeurs qui fondent le fédéralisme européen ne peuvent en effet se limiter au niveau continental. En cela on peut rapprocher la pensée fédéraliste du mondialisme. Il existe ainsi un World Federalist Movement (mouvement fédéraliste mondial) auquel certaines organisations de fédéralistes européens sont rattachés. Un partenariat existe également avec le Mouvement fédéraliste africain. Si les questions relatives à la gouvernance mondiale sont parfois évoquées, elles ne sont cependant généralement pas perçues comme une priorité stratégique. Des mobilisations ponctuelles ont pu être observées, par exemple par une participation des fédéralistes européens à la campagne pour la mise en place du Tribunal pénal international.

Voir aussi

Liens internes

Liens externes

Notes et références de l'article

  • Portail de l’Union européenne Portail de l’Union européenne
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