Droit à la nature

Droit à la nature

Droit d'accès à la nature

Lallemansrätt suédois, lallemannsretten norvégien et le jokamiehenoikeus finlandais (aussi : jokamiehenoikeudet) ne sont que des déclinaisons nationales dun même « droit de tout un chacun » de profitersous certaines conditionsde la nature et de ses fruits, indépendamment des droits de propriété qui peuvent y être attachés, et sans le consentement préalable du propriétaire. En particulier, un droit général daccès public permet de pénétrer dans des propriétés privées, ce qui constitue une garantie légale tout à fait solide permettant à chacun de jouir de la nature et des paysages.

Pour aussi général et porteur de liberté quil puisse être, lexercice de ce « droit de tout un chacun » connaît évidemment des limites légales, que ce soit à légard dune nature quil ne faut pas saccager, ou à légard des propriétaires, quil ne faut pas importuner.

Brudeferden i Hardanger (voyages de noces sur le fjord de Hardanger), Norvège. Tableau de Adolph Tidemand et Hans Gude, 1848.

Sommaire

Une conception originale du droit de propriété

Accorder à chacun un droit général de profiter de la nature est un projet politique ambitieux qui suppose datténuer quelque peu le caractère absolu du droit de propriété.

Origines et enjeux actuels

Ce droit d'accès à la nature remonte à danciennes lois et coutumes médiévales qui ont traversé les siècles et ont laissé en héritage un droit coutumier tout à fait original.

Lémergence de lallemansrätt dans les pays nordiques sexplique :

  • par la grande proximité des peuples nordiques avec une nature omniprésente. Les films dIngmar Bergman témoignent de cette sensibilité pour la nature.[réfnécessaire]
  • par une vision communautaire des droits sur la nature : plutôt quun droit de propriété individuel, appliqué très strictement, il faut permettre à tous de profiter des richesses de la nature.
  • par des espaces naturels vastes, souvent peu peuplés, ce qui rend souvent lexercice dun droit daccès peu oppressant.

Aujourdhui, lallemansrätt est surtout très protecteur pour les adeptes de la randonnée et du tourisme vert, qui bénéficient de ce fait dune base juridique tout à fait solide et favorable au développement de cette forme de loisirs. Permettre à chacun de profiter de vastes forêts, de landes et de montagnes, de rivières et de lacs sans avoir à sinquiéter de laccord de chaque propriétaire est un atout touristique majeur pour la Suède, la Norvège et la Finlande.

Néanmoins, ce droit, à linstar de chaque atout touristique, peut constituer également une menace potentielle pour lenvironnement et une nuisance pour les populations locales. Il apparaît pourtant que les tentatives visant à instituer un encadrement plus strict sont restées lettre morte, la population étant farouchement attachée à ce droit séculaire.

Fondements juridiques

Droit coutumier fort ancien, jamais codifié mais toujours en vigueur, lallemansrätt a fait lobjet de confirmations législatives, surtout en ce qui concerne ses conditions dexercice.

La nature : un patrimoine commun à partager

Lidée de départ, qui nest dailleurs pas propre aux pays nordiques, est que la nature est un patrimoine commun qui doit rester accessible à tous. Cette idée est admise depuis longtemps par le droit coutumier, qui consacre depuis fort longtemps cette sorte dappropriation collective au profit de la nation dans son ensemble.

Ce droit pour chaque personne de se déplacer à travers tout le territoire peut sentendre comme une composante communautaire du droit de propriété. Les espaces naturels dans leur intégralité sont considérés comme des espaces ouverts au public.

Le développement de la législation environnementale, qui doit saffirmer face aux intérêts privés explique sa récente consécration législative et même constitutionnelle. Dès 1964, la loi suédoise relative à la protection de la nature précise bien que la nature est une ressource nationale à protéger et à entretenir, accessible à tous, et dont la préservation est du ressort de lÉtat et des collectivités locales. Les chapitres 2 et 7 du miljöbalken abordent également la question de lallemanrsätt. Et depuis 1994, la Constitution suédoise dispose : « Chacun doit disposer dun accès à la nature en vertu de lallemansrätt ». Le droit coutumier daccès général à la nature a donc valeur constitutionnelle.

Une servitude opposable

Pour quil soit effectif, ce droit très général pour tout un chacun de profiter de la nature, doit être opposable à la propriété privée. Cette liberté constitutionnelle doit être garantie sur le terrain.

La nature de ce « droit de tout un chacun » reste ambiguë. Il ne repose sur aucune loi, puisque cest un droit coutumier. La loi nen spécifie donc pas précisément létendue matérielle. Il nest pas non plus un droit absolu dans la mesure il doit sexercer sans préjudice des intérêts des propriétaires et sans préjudice environnemental. Sa consécration constitutionnelle ne fait quau mieux consacrer une pratique qui existait auparavant, sans pour autant spécifier le champ de sa portée dans chaque cas de figure.

Certains considèremnt lallemansrätt comme une simple tolérance limitée permettant à chacun, dans le cadre des lois et règlements, et sans préjudice des intérêts des tiers et de lenvironnement, de profiter pleinement de la nature. Mais il sagit en vérité plus quune simple tolérance : exercé dans des conditions normales, ce droit de tout un chacun ne peut être écarté par le propriétaire, qui, par exemple, ne pourra interdire la marche à pied sur ses chemins privés (notamment en installant des clôtures). Quand lusager exerce son droit dans des conditions normales, les conséquences juridiques sont donc bien réelles et il pourra exiger de lAdministration quelle prenne toutes les mesures visant à rétablir le plein exercice de lallemansrätt.

Par certains aspects, lallemansrätt sapparente donc plutôt à une véritable servitude dutilité générale au profit du public. Des obligations simposent donc aux propriétaires, qui sont tenus de tolérer de plein droit lexercice régulier de lallemansrätt (et leur consentement préalable nest pas requis). Ce nest que lorsque les conditions dexercice apparaissent « anormales » que lon sort du cadre de lallemansrätt et liberté est rendue au propriétaire pour disposer librement de son fonds : ainsi il ne sera pas tenu de tolérer le passage de véhicules motorisés sur ses chemins.

Les propriétés concernées par lallemansrätt doivent ainsi supporter certaines servitudes : en particulier, il nest pas possible denclore son terrain si cela devait compromettre lexercice du droit daccès à chacun (voir la législation environnementale suédoise - 'Miljöbalken 26 kap. 11 §'). Les propriétaires ne sont pas plus fondés à restreindre lexercice de ce droit (par des panneaux dissuasifs, en soumettant lexercice du droit à redevance). Pour que ce droit daccès soit garanti, la législation permet lenlèvement par les autorités compétentes de clôtures qui compromettraient lexercice de ce droit.

En Suède, lexercice de lallemansrätt est contrôlé par lAgence suédoise de la protection environnementale.

Un exercice encadré

Le droit daccès au public est, comme le dit son étymologie, un « droit commun ». Il sappliquera donc par défaut, cest-à-dire tant que la législation nationale ou les réglementations nauront pas édicté de restrictions particulières modifiant son contenu en partie ou en totalité. Ce droit sexerce dans les limites définies par la loi.

Ainsi, la loi peut définir des zones spéciales de protection (monuments historiques, sites naturels, parcs nationaux, réserves naturelles) qui restreignent le droit daccès et de séjour au titre de la protection du patrimoine, des sites naturels et de la protection de la vie sauvage. De même, les réglementations locales peuvent en modifier la teneur (réglementation du camping, du cyclisme). La législation environnementale pose un cadre négatif à lexercice de ce droit, et définit sarrête cette liberté, qui reste soigneusement conditionnée.

Lallemansrätt donne des droits coutumiers mais saccompagne de devoirs pour chacun envers la nature et les propriétaires. Cette liberté encadrée fait aussi appel à la responsabilité civique et au bon sens de chacun.

Une atteinte à la propriété privée

Lallemansrätt sapparente à une servitude dutilité publique, et, à ce titre, il atténue donc fortement le caractère absolu du droit de propriété. Présenté parfois comme un droit de propriété de nature communautaire, dans la mesure chaque individu possède des droits à légard du territoire, lallemansrätt soppose en tous cas à la conception absolutiste et strictement individuelle du droit de propriété, issue de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, présentée comme « un droit inviolable et sacré, naturel et imprescriptible dont nul individu ne peut être privé ».

Cette conception nordique des rapports entre les individus et le territoire montre que, même en Europe, le contenu du droit de propriété peut être extrêmement varié et que la propriété comme droit de lindividu nest quune configuration parmi dautres.

Similitudes avec dautres pays

À peu près inconnu hors de la Suède, de la Finlande et de la Norvège, du moins pas sous une forme aussi absolue, le « droit de tout un chacun » de profiter de la nature reste essentiellement une spécificité nordique, il y est bien plus étendu que dans la plupart des autres pays. De ce fait, ce qui ne peut sembler quune simple curiosité juridique quelque peu archaïque revêt pourtant un caractère particulièrement attrayant, ce qui explique que certaines législations aientà leur manièreconcrétisé un tel droit daccès du public aux espaces naturels.

Depuis quelques années, dans certains pays, sous certaines formes, des régimes juridiques semblables rappellent ce droit. On en retrouve certains éléments dans la législation française et britannique, ce qui ne signifie pas toutefois que le modèle nordique ait été pris consciemment en exemple. On constate seulement quune telle législation sur la nature peut être appelée à sétendre à lavenir, laccès aux espaces naturels étant une aspiration forte.

En Alsace (France)

Le droit local hérité de l'ancien droit allemand, prévoit que, dans le domaine de l'eau, de l'exploitation forestière et de la chasse, les ressources sont à gérer en commun, indépendamment de la propriété privée.

Pour le reste, l'intégration aux règles françaises s'appliquent traditionnellement de la sorte :

Caravanes et véhicules motorisés
  • Le stationnement des caravanes, camping-cars et autres véhicules motorisés peuvent être soumis à interdiction ou réglementation qui est généralement indiquée ou qui nécessite une autorisation de la mairie pour les communes qui mentionnent un stationnement réglementé à l'entrée de la ville.
  • Les véhicules motorisés, y compris les quads et deux-roues motorisés, sont la plupart du temps interdits dans les espaces naturels.
Circulation pédestre, bivouac, camping et cueillette

Les activités non-motorisées sont traitées d'une manière beaucoup plus souple.

  • La cueillette et le ramassage de fruits comestibles (pommes, châtaignes, mûres...) sauvages dans les bois et espaces naturels du domaine public sont des pratiques courantes et parfaitement tolérée.
  • Possibilité de traverser à pied ou de camper (y compris bivouac) sur tout terrain naturel, non clos et sur lequel il n'y a pas d'indication marquant la propriété ou mentionnant explicitement l'interdiction. Le propriétaire peut toutefois vous demander de quitter son terrain si celui-ci est privé mais que cela n'est pas mentionné.
  • Le bivouac est largement pratiqué et permis presque partout sur les espaces naturels publics, il se définit comme le fait de camper, avec ou sans tente, durant une nuit (coucher au lever du soleil). Le bivouac est souvent pratiqué lors de treks ou grandes randonnées ou tout simplement pour passer une nuit à la belle étoile.
  • Le camping de plus d'une nuit est souvent permis sauf dans les parcs naturels. Ces derniers tolèrent généralement les bivouacs.
  • De manière générale il est interdit de camper : sur les routes et voies publiques, à moins de 500 m d'un monument historique classé ou inscrit, dans un rayon de 200 m autour d'un point d'eau capté pour la consommation et dans toute autre zone cela est explicitement mentionné (panneau indicatif).

Dans le reste de la France : le littoral uniquement

En France, la législation prévoit un droit daccès aux espaces naturels circonscrit à la frange littorale, qui consacre aussi dune certaine façon un droit à profiter de la nature. La servitude de passage des piétons en bordure du littoral maritime repose sur :

  • La loi du 31 décembre 1976 portant réforme de lurbanisme, qui instaure une servitude dutilité publique dite servitude longitudinale, encore appelée sentier du littoral. Créée en 1681 par lOrdonnance de la Marine édictée par Colbert, elle grève les propriétés côtières sur une assiette de trois mètres de largeur à compter de la bordure du domaine public maritime dune servitude de passage au profit des piétons. Ce sentier doit normalement être laissé praticable et les propriétaires ne peuvent en restreindre laccès.
  • La loi du 3 janvier 1986 dite loi littoral créée une seconde servitude dutilité publique dite servitude transversale. Instaurée facultativement, elle permet aux piétons daccéder au rivage en traversant les chemins privés.

Royaume-Uni : une législation récente

Si lon excepte la tradition écossaise tolérant un accès raisonnable et responsable aux zones naturelles, le Royaume-Uni, ne disposait pas formellement jusquà une époque récente dun régime juridique semblable. Cest chose faite depuis peu :

  • En Angleterre et au pays de Galles, le Countryside and Rights of Way Act du 30 novembre 2000 institue un cadre général à lexercice dun droit daccès aux zones sauvages, souhaité vivement par les randonneurs. Ce droit est limité à certaines zones, contrairement à lallemansrätt, qui, lui, sapplique en labsence de toute prescription particulière.
  • En Écosse, le Land Reform Act de 2003 reprend la loi précédente et consacre donc formellement un droit qui nétait jusqualors que coutumier.
La forêt boréale de Laponie en hiver

Lexercice du droit et ses conséquences

Il y a peu de différences dans la portée et le contenu de ce droit dun pays à un autre. Signalons néanmoins à toutes fins utiles que lessentiel de notre documentation portait sur létat du droit en Suède.

La substance des droits et obligations peut en outre varier en fonction des réglementations communales. Chacun est censé senquérir préalablement des obligations qui lui incombent, ce qui vaut tout aussi bien pour les randonneurs étrangers que nationaux. Les offices de tourisme fournissent généralement toutes les informations juridiques nécessaires.

Champ dapplication du droit

Les personnes concernées

Le droit de profiter de la nature peut être exercé aussi bien par les nationaux que les étrangers. Il peut sexercer vis-à-vis dun individu ou dun groupe. Mais les organisations touristiques et plus largement toutes les entreprises commerciales ne peuvent légitimement opposer ce droit pour développer leurs activités dans les espaces naturels. La législation environnementale suédoise est très stricte avec les demandes émanant dorganisateurs dactivités organisées dans la nature.

Champ géographique et matériel

Quelles zones sont soumises à lallemansrätt ?

Le droit daccès au public est un « droit commun » et sapplique donc par défaut, cest-à-dire tant que la réglementation nationale et locale naura pas édicté de restrictions particulières latténuant totalement ou en partie. Ainsi, les parcs nationaux, les réserves naturelles, les sites naturels, les espaces côtiers, les réserves militaires et autres zones de protection peuvent atténuer sévèrement la portée de droit à la nature : laccès public, les campements, la cueillette, le mouillage des bateaux, la possibilité de faire du feu peuvent être soumis à interdiction ou à des prescriptions spéciales. La récente consécration constitutionnelle de lallemansrätt en Suède semble néanmoins signifier assez clairement que les autorités ne peuvent édicter de règles qui restreindraient de façon trop sévère lexercice du droit daccès à la nature.

Lallemansrätt consacre des droits daccès et dusage pour chacun uniquement dans des zones naturelles (privées ou publiques) et la campagne, et quil ne joue pas dans lenvironnement urbain, les jardins, les champs cultivés, les terrains privés bâtis, les parcs

Par ailleurs, lusage de ce droit doit être réalisé sans préjudice du droit des tiers, d la définition de zones privatives, plus restreintes que la propriété privée. Si lallemansrätt est valable sur les propriétés privées, il sarrête les parties privatives commencent (jardins, maisons) et ne sapplique clairement pas aux plantations, terrains proches des maisons, terres cultivées et plantations. Les propriétaires ont alors tout à fait le droit de signaler par des panneaux que lentrée dans de telles zones est interdite.

Lexercice du droit et ses conséquences

Chacun peut bénéficier de droits dusage et daccès dans les propriétés privées. Mais lexercice de ces droits saccompagne pour ses usagers dune obligation de respecter la nature sans porter préjudice aux habitants. Ce droit sarrête commencent la réglementation environnementale et le respect des propriétaires.

Les servitudes imposées aux propriétaires

Lallemansrätt implique linstitution dune servitude de passage et dusage au profit de tous sur les propriétés privées. Exercé dans les conditions normales, ce droit ne requiert pas le consentement préalable du propriétaire.

Servitude daccès
  • Chacun peut traverser à pied, à cheval, à ski ou à vélo toute propriété (bois, prairies, toutes terres non cultivés, le long des côtes…) et emprunter tout chemin privé. On peut emmener son chien. Mais en Suède, de nombreux chemins de randonnée existent par ailleurs.
  • Pareillement, la baignade et la navigation dans des lacs et cours deau naturels, même privés, sont possibles. On peut amarrer son bateau dans ces eaux et accoster sur les rives appartenant à autrui.
  • On peut passer par les portes à bétail et par-dessus des clôtures pour rejoindre les zones soumises à lallemansrätt.

La servitude générale daccès ne joue pas au profit des véhicules à moteur, pour lesquels le propriétaire retrouve sa liberté pour les autoriser. Mais il ne pourra rien dire à celui qui traverse à pied, qui sera dans son bon droit puisquil respecte la loi coutumière.

Servitudes de séjour et dusage
  • Il est possible de camper sur une propriété privée : le camping « sauvage » est donc de fait admis (mais de nombreux terrains spécialement aménagés existent par ailleurs). Cette occupation doit être temporaire et réduite : en Suède, cette durée est de 24 heures et dans les zones peu densément peuplées, on admet une durée de plusieurs nuits. En tout état de cause, le groupe de campeurs doit être réduit. On peut aussi mouiller son bateau dans des eaux privées pour y passer la nuit.
  • On peut y ramasser des fruits sauvages (baies, myrtilles, framboises…), des champignons, des fleurs sauvages, les produits de la forêt tombés à terre (pommes de pin, faînes). On peut faire du feu avec le bois mort ainsi ramassé.
  • On peut employer de leau des lacs et des sources.
  • On peut amarrer temporairement son bateau à un ponton privé et sur la côte.
  • Pour quiconque dispose dune licence, le droit de pêcher dans des eaux naturelles privées est entier (mais il nexiste pas en revanche de droit de chasser). On peut donc de fait pêcher à peu près partout.

Ces droits dusage sur les propriétés privées sont exclusifs de toute exploitation commerciale. Ainsi, on ne peut employer des ouvriers pour cueillir des baies ou des champignons (sauf à moins dun accord du propriétaire). De même, les organisations touristiques ne peuvent invoquer ce droit pour développer leurs activités sur les propriétés privées.

Un droit garanti

Toutes ces prérogatives des usagers, exercées dans les conditions normales, ne peuvent être écartées par le propriétaire, qui ne peut pas non plus installer des clôtures et poser des panneaux pour interdire ou dissuader de lexercice de lallemansrätt il doit normalement sappliquer.

Lexercice de la servitude par les usagers est encadré

La liberté duser de cette prérogative saccompagne dun code de responsabilité et de garanties pour les propriétaires. Il ne serait en effet pas acceptable que les propriétaires, la faune et la flore doivent pâtir de la servitude.

Lexercice de ce droit reste avant tout une liberté appelant la responsabilité et le bon sens de chacun. Il sera donc fait appel à lesprit écologique et au sens civique le plus élémentaire. Lexercice raisonnable de la servitude est souvent résumé par une formule simple : « ne pas déranger, ne pas détruire », que ce soit la nature ou les intérêts des propriétaires.

La protection des propriétaires
Habitation traditionnelle de la campagne suédoise

Dès lors que lusage qui est fait de sa propriété devient abusif (campement prolongé, ramassage de baies à but commercial, accès avec un véhicule motorisé), le propriétaire bénéficie de garanties. La protection juridique conférée aux visiteurs ne joue alors plus de plein droit, le propriétaire retrouve alors sa liberté dautoriser ou pas lutilisation de son fonds, et il peut aussi en appeler aux autorités.

Sans être exhaustif, voici une liste dexemples la servitude est utilisée anormalement, dans la mesure elle cause des troubles et dégâts. Il ny a que de bon sens et de civisme basique, mais en cas de doute, il est toujours préférable de consulter le propriétaire ou les autorités.

  • Sinstaller avec sa tente, amarrer un bateau à un ponton privé ou mouiller dans des eaux privées doit rester temporaire. On ne peut rester au même endroit plus de 24 heures, au-delà la permission du propriétaire est requise. Les campements en grands groupes doivent toujours demander la permission, même pour moins de 24 heures.
  • Le propriétaire peut légitimement sopposer à la circulation des véhicules motorisés sur les routes et chemins qui lui appartiennent et apposer à cette fin un panneau dinterdiction. Le propriétaire ne peut toutefois décréter une telle interdiction sil reçoit une subvention publique pour lentretien de sa voie et son ouverture à la circulation. Sil nest pas obligé de supporter les véhicules motorisés sur son chemin, le propriétaire ne peut en revanche interdire les piétons et vélos. Dans tous les cas, garer une voiture ou une caravane sur une route privée, même pour moins de 24 h, requiert lautorisation du propriétaire.
  • Si lon amarre son bateau à un ponton privé, cela ne doit pas causer de gêne à son propriétaire.
  • On ne peut abattre darbres, arbrisseaux et buissons et couper de branches darbres vivants. On ne peut prendre lécorce, les feuilles, glands, noix et la résine des arbres et buissons vivants. Plus généralement, on ne peut endommager les arbres. La commune de Enontekiö (Finlande) soumet toute cueillette de baies sauvages à lautorisation du propriétaire, cette activité ayant une importance commerciale notable dans cette municipalité.
  • On doit le plus possible respecter lintimité et la tranquillité des propriétaires. On na pas le droit de traverser ou doccuper les parties « privatives » de leur propriété, qui se définissent comme les alentours immédiats de lhabitation, le jardin et la maison en elle-mêmeen bref tous les endroits depuis lesquels on risque dêtre visible ou audible. Il est à bien noter que les parties privatives ne sont pas nécessairement encloses. De même, on ne doit pas amarrer ou mouiller son bateau, débarquer, se baigner dans le voisinage immédiat dune habitation. On doit installer sa tente discrètement, et se tenir à une distance respectable des habitations dans toutes les activités que lon pratique (pêche, cueillette…). Si lon doit sinstaller plus près dune habitation, il vaut mieux se renseigner auprès du propriétaire et demander son accord.
  • Il est entendu quil ne faut rien détériorer lors de son passage ou son séjour (cultures, pousses darbres, clôtures). On ne peut traverser ou sinstaller sur une parcelle cultivée ou des plantations. On peut traverser les pâturages mais il faudra bien veiller à refermer derrière soi les barrières à bétail (il est dailleurs toujours conseillé de les refermer même si elles étaient ouvertes).
  • Sefforcer du mieux que lon peut de laisser le terrain occupé comme on la trouvé en arrivant : ne pas laisser de traces ou peu, ne pas laisser ses déchets, faire ses besoins dans un trou que lon prendra soin de reboucher après usage. On ne doit pas endommager les propriétés en passant à cheval ou en VTT ; en pratique, si lon reste sur les chemins existants, il ne doit pas y avoir de souci.
  • On doit tenir son chien en laisse ou bien le garder sous contrôle immédiat. Il ne doit pas vagabonder et doit être tenu en laisse si lon pénètre dans des réserves de chasse privées.
Glacier du lac Darfáljávri, en Suède
La protection environnementale

Les règles édictées au titre de la protection environnementale ne sont pas directement liées à lexercice de lallemansrätt, et sont totalement étrangères au droit de propriété. Néanmoins, dans la mesure laccès à la nature est rendu possible de façon générale, les risques pour sa préservation de la nature en deviennent accrus et il est faut donc rappeler expressément quelles responsabilités incombent à chacun lorsquil se trouve dans la nature.

  • Bien respecter la législation sur les milieux protégés : sanctuaires pour oiseaux, côtes protégées, parcs nationaux, réserves naturelles peuvent apporter des restrictions daccès, de faire du feu, de planter une tente. Des panneaux précisent fréquemment les règles à respecter. Même en labsence de milieu protégé, le bon sens commande de respecter la nature dans tous les cas de figure.
  • De façon générale, ne pas détériorer la nature, le paysage, la vie végétale et animale sur les îles et le long des côtes par son passage ou en installant sa tente. On ne doit pas abandonner de déchets dans la nature, que ce soit dans des propriétés privées ou partout ailleurs. On ne doit pas laisser des cas de déchets à côté dune poubelle pleine.
  • Ne déranger en aucun cas les animaux, ne pas les approcher de trop prèssurtout en période de nidification –, ne pas toucher leurs œufs ou leurs petits. Faire particulièrement attention à ne pas troubler la vie sauvage sur les îles et les côtes, en passant par voie deau et ne pas débarquer sur un site naturel protégé.
  • Sil est possible de faire du feu dans une propriété avec le bois mort ramassé, la réglementation encadre de toutes façons très sévèrement les feux de forêt. Il est ainsi interdit de faire du feu en période estivale, le risque dincendie est grand. En toute période de lannée, toujours veiller à ce que le feu ne se propage pas (choisir un terrain couvert de gravier, avec un accès à leau, après usage asperger soigneusement deau). Les réchauds sont autorisés toute lannée durant. On ne doit pas faire de feu sur des rochers, ce qui peut les faire éclater et occasionner des dégâts irrémédiables. Toujours veiller à ne pas déclencher de feux qui détérioreraient la nature. Dans certaines zones (parcs nationaux, zones de protection), le droit de faire du feu est réglementé toute lannée.
  • La cueillette des fleurs sauvages nest pas possible sil sagit despèces protégées (comme les orchidées).
  • Quand bien même le propriétaire autoriserait des véhicules motorisés, cela ne dispense pas de respecter la législation : il existe des lois encadrant lusage des voitures « tout-terrain ». Conduire des autos et des caravanes, des camping-cars, motos et motocyclettes hors des routes est interdit. Les motoneiges ne doivent pas causer de dommages.
  • Si la pêche est possible dans des eaux privées, lexercice du droit est conditionné par la détention dun permis de pêche.
  • Pour enrayer la propagation dune maladie affectant les écrevisses, les kayaks et canoës et leurs équipements doivent sécher totalement avant leur transfert vers un autre plan deau. encore, des panneaux rappellent cette obligation.
  • Tous les chiens doivent être tenus en laisse du 1er mars au 20 août et lon doit en toute période de lannée sassurer quils ne perturberont pas la faune.

En cas de doute, il est toujours préférable de consulter les offices de tourisme, les autorités locales, qui fourniront de plus amples informations.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Bibliographie

  • Frédérique von Plauten, Laccès à la nature : droit virtuel ou droit réel ? Étude comparative en droit français et en droit suédois. Actualité juridique Droit administratif (AJDA), 21 octobre 2005. Revue n°36, pp. 1984 à 1989.
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