- Diptyque de Wilton
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Le diptyque de Wilton est un petit diptyque portable constitué de deux panneaux articulés peints des deux côtés, daté environ de 1395-99. C’est une des rares œuvres qui persistent aujourd’hui des peintures religieuse médiévales. Ce diptyque fut peint pour Richard II d’Angleterre, et le représente s’agenouillant devant la Vierge et l’Enfant. C’est un bon exemple d’art gothique. L’artiste, anonyme, était probablement français ou anglais. Le diptyque de Wilton est aujourd’hui la propriété de la National Gallery de Londres.
Sommaire
Description
Le diptyque de Wilton est peint sur deux panneaux en chêne, insérés dans un cadre du même matériau, et joints par deux charnières qui permettent de le fermer et ainsi protéger les peintures intérieures. Cette partie intérieure est d’ailleurs très bien conservée, alors que les panneaux externes ont vu la peinture détériorée par les manipulations qu’a subi l’œuvre[1].
L’artiste a utilisé la technique de la tempera, de l’œuf étant utilisé comme liant dans la peinture. L’arrière-plan et certains détails sont incrustés de feuilles d’or, et le panneau a par endroit été travaillé en dessous des dorures pour améliorer la qualité artistique de l’œuvre. Sur le panneau avec la Vierge et l’Enfant, les habits sont tous bleus, un pigment extrait du lapis lazuli une pierre semi-précieuse. La robe de Richard a été colorée au vermillon, un autre pigment très onéreux à l’époque.
Bien que les personnages des deux panneaux intérieurs se font face et interagissent par leurs gestes et leurs regards, ils s’insèrent dans différents arrière-plans. Les personnages humains marche sur des rochers nus, avec une forêt derrière eux et un ciel de feuilles d’or. Les personnages célestes se tiennent dans une prairie en fleur, avec un fond doré.
Sur le panneau intérieur gauche, Richard II s’agenouille devant trois saints : Jean le Baptiste, Édouard le Confesseur et Edmond le Martyr, chacun tenant ses attributs. Sur le panneau de gauche, la Vierge Marie avec Jésus dans ses bras est entourée de 11 anges[2].
Bien que de thèmes semblables, les deux images donnent des impressions différentes. La scène de Richard et les saints est assez calme, mais pleine de contrastes de couleurs et de texture. La scène de la Vierge et l’Enfant est elle plus énergique du fait des anges encerclant la mère et son enfant. Le bleu brillant prédominant donne un aspect précieux, symbolisant la nature divine de l’apparition. Le sol fleuri symbolise lui-même les jardins du Paradis.
Quand il est fermé, le diptyque révèle d’un côté un cerf blanc, emblème de Richard II, portant un collier doré autour de sa gorge, dans un pré bien enherbé et avec des branches de romarin, sous un ciel d’or. De l’autre côté se trouve un blason, sur lequel les armes d’Édouard le Confesseur sont mêlées à celle des rois d’Angleterre. Ces armes furent adoptées par Richard en 1395. Les armes d’Édouard sont en fait une invention ultérieure, les blasons n’existant pas quand il vécut au XIe siècle[3].
Iconographie
L’identité du roi s’agenouillant est clairement établie, les anges entourant la Vierge portant des écussons avec la livrée de Richard, le White Hart, qui apparaît également sur le panneau de gauche et à l’extérieur. L’enseigne placée entre Richard et l’enfant Jésus est le symbole de la royauté de Richard et du royaume d’Angleterre plus généralement. Il comprend la croix de saint Georges, symbole de l’Angleterre, et est surmontée d’un minuscule carte de l’Angleterre ou de l’Irlande, où Richard était en campagne entre 1394 et 1395[4]. .
Les trois saints qui présentent Richard agenouillé à la Vierge et l’Enfant sont probablement eux-mêmes vénérés par le roi, chacun d’eux ayant sa propre chapelle à l’abbaye de Westminster. Chaque saint porte un attribut le rendant reconnaissable. Edmond le Martyr, à gauche, porte la flèche qui l’a tué en 869, tandis qu’Édouard le Confesseur, au centre, porte l’anneau qu’il donna à un pèlerin qui se révéla être Jean. Jean le Baptiste, à droite, porte son symbole, l’Agneau de Dieu.
La scène fait référence à la naissance de Richard le 6 janvier, jour de l’épiphanie, quand le Christ reçu la visite de trois rois. On dit également qu’à la naissance de Richard à Bordeaux, il fut visité par les rois d’Espagne, de Navarre et du Portugal.
La date à laquelle aurait été réalisée l’œuvre est un sujet de désaccord dans le monde des historiens d’arts[5]. La National Gallery a adopté un consensus courant datant le Wilton Diptych des cinq dernières années de règne de Richard II, mais des dates variant entre 1377 et 1413 ont été avancées[6]. Richard est né en 1367, et le portrait est celui d’un plus jeune homme que celui qu’il était en 1395. La présence des anges pourrait également représenté la réception de Richard au paradis après sa mort en 1399, bien qu’en tenant compte des circonstances de sa déposition, il est difficile à imaginer, qui aurait pu commander un tel travail[7].
Auteur
L’artiste, auquel on se réfère parfois comme le « Wilton Master », n’a jamais pu être identifié, ou associé à d’autres panneaux peints à cette époque, et les œuvres les plus ressemblantes à son style sont issues de manuscrits enluminés des années 1410. À cette période, il est commun dans le Nord de l’Europe que de tels panneaux, encore rares, soient réalisés par des artistes habitués aux enluminures. À la date à laquelle a été réalisée l’œuvre, l’art gothique est sensiblement le même dans plusieurs cours d’Europe, et il est donc difficile d’identifier la nationalité de l’artiste. Il est possible qu’il soit anglais, mais à part le portrait de Westminster de Richard II, peu d’œuvres autres que le Diptych peuvent permettre d’établir le style gothique des peintres anglais de l’époque.
L’artiste pourrait venir de « n’importe quelle nation »[6], mais la France semble être une origine probable, une autre possibilité étant l’Italie, ou bien la Bohême, d’où l’auteur aurait pu être amené par la première femme de Richard II, Anne de Bohême[8],[9]. La très bonne qualité de la peinture signifie pour beaucoup d’historien de l’art que l’artiste venait probablement du nord de la France. Le diptyque montre des similarités avec le manuscrit peint de Pol de Limbourg, mais comme l’autre portrait de Richard qui nous est parvenu, à l’abbaye de Westminster, on peut le rapprocher de peintures réalisées à Prague pour le père d’Anne, Charles IV, et son frère, Wenceslas[10].
Provenance
On fait pour la première fois référence à l’œuvre en 1649 dans l’inventaire de la collection d’art de Charles I d'Angleterre. Elle passe ensuite dans les mains des comtes de Pembroke qui la conserve à Wilton House, d’où elle tient son nom, jusqu’à ce qu’elle soit vendue à la National Gallery en 1929. Il est assez remarquable que le diptyque de Wilton ait survécu à l’iconoclasme puritain qui a suivi l’exécution de Charles I.
Références
- Richard II's Treasure the other most detailed description online
- (en)National Gallery website [1]
- (en)Richard II's Treasure [2]
- (en)Langmuir:96
- (en)Résumé par Laurence Scharfe
- (en)Tudor-Craig:134
- (en)Levey (1971):21-22
- (en)Le débat résumé par Laurence Scharfe
- (en)Wilton Diptych, Guardian unlimited [3]
- Levey (1971):22-31
Bibliographie
- (fr) Germ, Martin, « Les onze anges du Diptyque Wilton et le symbolisme médiéval des nombres », Revue de l'Art, 140, 2003-2, pp. 13-17.
- (en) Langmuir, Erica, The National Gallery companion guide, 1997 revised edition, National Gallery, London, ISBN 1-85709-218-X
- (en)Levey (1971) : Michael Levey, Painting at Court, Weidenfeld and Nicholson, London, 1971.
- (en)Levey (1987) : Levey, Michael, The National Gallery Collection, 1987, National Gallery Publications, ISBN 0-947645-34-9
- (en) Pamela Tudor-Craig, « Panel Painting », in Jonathan Alexander & Paul Binski (éd.), Age of Chivalry, Art in Plantagenet England, 1200-1400, cat. d'exp., Royal Academy/Weidenfeld & Nicholson, Londres, 1987, pp. 131-136.
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