- Delta majuscule
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Notations delta en sciences
Les symboles Δ (lettre Delta majuscule), d (lettre d minuscule), δ (lettre delta minuscule) et (symbole d rond) sont très utilisés en sciences. Ils correspondent à une même notion de variations entre deux points ou plus particulièrement à la notion de différentielle. Cet article tente de résumer le rôle respectif et les différences entre chacune de ces notations. On rencontre également la lettre majuscule grecque Delta dans plusieurs autres situations en sciences (voir l'article spécifique).
Sommaire
Δ (delta majuscule)
Δ correspond à une variation au sens le plus général, c'est-à-dire à une différence entre deux quantités. Par exemple, si on mesure la taille (la hauteur H en cm) d'un enfant à deux âges différents, on pourrait constater qu'il est passé de 120 cm à 140 cm. On noterait alors : ΔH = 20 cm (l'unité est évidemment une distance comme la valeur qui a varié).
Par convention, le symbole Δ (la lettre grecque delta majuscule) représente un écart global. Par exemple, en mathématique, on noterait pour une fonction f(x) : Δf = f(b) - f(a), de sorte que Δf quantifie un écart entre deux valeurs de la fonction f. On définit souvent la notion de taux d'accroissement : que l'on peut également noter : T = Δf / Δx. Cette « pente moyenne » est utilisée dans quelques cas pratiques : par exemple, sur les routes, c'est la valeur en % indiquée les panneaux annonçant une côte (ou une descente) particulièrement marquée (le pourcentage est égal à la variation d'altitude pour une longueur horizontale parcourue donnée).
d (lettre d minuscule)
Une grandeur ne varie pas forcément à un rythme constant. Par exemple, un enfant grandit de moins en moins vite, puis sa taille se stabilise. De même, la pente d'une route n'est pas constante : il existe, tout au le long d'un trajet, une succession de côtes, de descentes et de plats ; par ailleurs, une même montée peut comporter différentes portions plus ou moins pentues ; etc.
La lettre d minuscule représente une petite variation, sur un court instant ou entre deux points proches. Il s'agit donc toujours d'exprimer un écart, une différence, une variation, mais cette fois de façon plus locale. Si on considère une fonction f appliquée à une variable x, pour expliciter une pente locale (c'est-à-dire un taux d'accroissement localisé), il ne faut pas considérer une variation Δx quelconque mais la prendre « la plus petite possible », ce qui en mathématiques revient à faire tendre cette variation vers zéro et à la noter alors dx (voir aussi la notion de limite et de dérivée).
Cette notion de variation locale possède également des applications concrètes. Physiquement, elle dépend beaucoup du contexte. Dans l'exemple précédent du code de la route, la pente indiquée par les panneaux routier indique la pente des prochains mètres et non la variation d'altitude sur tout un trajet. Cette information, prise à l'échelle du trajet tout entier, est donc considérée locale, car quelques mètres correspondent à une portion très petite de la distance totale parcourue.
Pour indiquer cette notion de « petite variation » ou de « variation infinitésimale », on modifie la notation en utilisant d au lieu de Δ. Et le choix de l'une ou l'autre des deux notations dépend de l'échelle. Ainsi, prenons un trajet d'une heure (Δt = 1 h) entre deux villes distantes de ΔL = 50 km. La vitesse moyenne (écart global de distance sur écart global de temps) aura été de ΔL/Δt = 50 km/h. Localement, toutefois, la vitesse n'aura pas nécessairement été constante : tout au long du trajet, le véhicule a accéléré, ralenti, etc. On peut alors s'intéresser à la vitesse instantanée à un instant précis du trajet, c'est-à-dire pendant un « court moment » : sur cet « écart infinitésimal » de temps, la vitesse pouvait être de 60 km/h au compteur, soit 1 km par minute (environ 17 m par seconde). On noterait alors : dL/dt = 17 m/s = 60 km/h. On retrouve le même rapport distance sur durée, mais à une échelle différente, ce qui donne une information différente.
∂ (symbole 'd' rond)
Une grandeur ne dépend pas nécessairement que d'une seule variable. Pour une grandeur multi-paramétrée, le symbole ∂ (prononcer « d rond ») représente une variation infinitésimale au sens du d, mais permet de souligner qu'il ne s'agit que d'une variation partielle, c'est-à-dire engendrée par la variation d'une seule des variables dont dépend la grandeur étudiée. En mathématiques, on associe à cette notation la notion de dérivée partielle. On pourra toujours par la suite s'intéresser à la dérivée totale, c'est-à-dire à la variation de la grandeur étudiée lorsque toutes les variables dont elle dépend connaissent une variation infinitésimale.
Prenons par exemple un récipient contenant de l'eau et exposé au Soleil. Disons qu'il perd par évaporation E = 10 mℓ/min. Cependant, on le remplit en même temps avec un débit de A = 30 mℓ/min. Le volume total dépend donc de deux variables, l'évaporation et l'ajout d'eau, qui ici varient à un rythme connu. Le volume total V en fonction du temps (« au cours du temps ») s'exprime mathématiquement par la relation : V = 30t - 10t = (A-E)t. Puisque les débits sont exprimés pour une minute, raisonnons sur cet intervalle de temps : en une minute, le débit équivalent D est donné par la relation : D = A-E = 30-10 = 20 mℓ/min.
Si maintenant, les débits d'évaporation (E) et d'ajout (A) ne sont plus constants, mais varient au cours du temps, alors le débit équivalent va nécessairement varier. Par exemple, si A augmente de 1 mℓ/min tandis que E reste constant, alors D augmentera de 1 mℓ/min. On note alors ∂D/∂A = 1 car l'augmentation de D est égale à l'augmentation de A, ce qui se note dD = 1·dA = (∂D/∂A)·dA. Dans cette dernière écriture, le facteur 1 représente bien ∂D/∂A. De même, si c'est cette fois E qui augmente de 1 mℓ/min tandis que A reste constant, alors D diminue de 1 mℓ/min. On noterait alors : ∂D/∂E = -1 et dD = -1·dE. On a ici définit des variations partielles de D : selon la variation de A d'une part et la variation de E d'autre part.
Si maintenant, A et E varient tous deux en même temps sur un tout petit instant, la variation totale de D (toujours noté dD) est évidemment la somme des deux effets :
.La notation ∂D signale une variation infinitésimale et partielle de la fonction D, engendrée par l'évolution d'une seule des variables dont dépend D. Cela par opposition à dD qui représente la variation infinitésimale totale de D, engendrée par toutes les évolutions de toutes ses variables.
Si la différentielle dD peut se manipuler seule comme ci-dessus, cela n'est plus possible pour la différentielle partielle ∂. Elle se présente toujours sous la forme de deux termes (par exemple ∂D/∂A) : ce n'est pas à proprement parler une fraction puisqu'on ne peut en séparer les deux éléments. On ne peut non plus simplifier par 1/∂A dans une équation. Rappelons qu'il existe autant de dérivées partielles ∂D que de variables pour D. La notation ∂D seule n'aurait donc aucun sens.
δ (delta minuscule)
Une variation peut s'étudier comme résultant de l'accumulation successive de plusieurs petits apports. Chacun de ces apports n'est pas considéré comme une variation à proprement parler, mais comme une quantité élémentaire. On utilise la lettre grecque delta minuscule δ pour indiquer une telle petite quantité n'étant pas une variation. Cependant la variation (Δ, d ou ) d'une grandeur peut dépendre de cet apport δ.
Par exemple, considérons un compte bancaire en euros sur lequel sont effectués plusieurs petits prélèvements P d'argent (petits par rapport au total de tout ce qui sera prélevé). Si P vaut 10 euros, on peut noter cette quantité δP = 10. Le compte subit une variation de valeur − δP (retrait de 10 euros), si bien qu'on peut parler de la variation du montant total T du compte. Pour autant, le montant δP n'est pas, lui, une variation (un billet de 10 a la valeur qu'il a, c'est une quantité, pas une variation). Si on voyait les comptes (débité et destinataire) comme deux récipients reliés par un tuyau, on pourrait parler de la variation de niveau d'un des récipients. Mais on ne parlerait pas de variation de niveau d'eau dans le tuyau. L'eau y circule mais le tuyau est toujours plein. C'est aussi le cas de notre δP : c'est une quantité créée ou déplacée, pas une variation.
On peut toutefois noter que dT = − δP (la variation du compte dépend directement de la quantité transférée). La notation dT sous-entend une variation donc qu'on regarde l'évolution de T avant/après transfert, donc entre deux situations.
On retrouve souvent cette distinction en physique. Par exemple, considérons le travail d'une force F sur un petit déplacement dL : on note δW un travail élémentaire sur un court déplacement et on démontre la relation — on fait généralement le bilan énergétique d'un système, dont on étudie par exemple l'évolution d'énergie interne. Ce travail élémentaire étant « hors système » δW n'est pas la variation d'une grandeur mais un prélèvement ou dépôt élémentaire d'énergie. C'est une manière de voir les choses, car on pourrait dans un autre contexte décider de s'intéresser à une fonction f représentant l'énergie totale apportée par le travail de cette force F : on noterait alors df comme précédemment. De façon générale, pour le travail d'une force, on n'écrit pas ΔW mais W : on ne le voit pas comme la variation d'une grandeur mais comme une quantité d'énergie. Et δW est donc un des apports élémentaires en cours de route, une partie de la quantité totale.
En résumé
L'usage des notations delta se rapporte à chaque fois à l'expression soit d'une variation, soit d'une petite quantité locale ou élémentaire. Ceci peut se faire à grande ou petite échelle (variation et quantité infinitésimales) et une ou plusieurs variables peuvent intervenir dans la détermination des variations d'une grandeur. Les différentes notations utilisées permettent de garder à l'esprit ce que représente dans un certain contexte ces différents éléments : considère t-on une variation ? partielle ou totale, globale ou locale ? ou bien une quantité élémentaire ?
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