- Cyrille et Méthode
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Cyrille ou Constantin le Philosophe, (né vers 827-828 à Thessalonique et décédé le 14 février 869 à Rome) et son frère Méthode, évêque de Sirmium (né vers 815-820 à Thessalonique et décédé le 6 avril 885 en Grande Moravie probablement à Velehrad), sont connus comme les Apôtres des Slaves, c'est-à-dire ceux qui ont évangélisé les peuples slaves de l'Europe centrale. L'Église catholique fête les deux saints le 14 février. L'Église orthodoxe fête la natalice de Cyrille le 14 février, celle de Méthode le 6 avril et la synaxe des deux saints Égaux aux apôtres le 11 mai, mais le calendrier traditionnel catholique (forme extraordinaire) ainsi que l'Église catholique de République tchèque et de Slovaquie les fêtent le 5 juillet. Le 2 juin 1985, le pape Jean-Paul II les a proclamés co-patrons de l’Europe, avec saint Benoît.
Constantin n'a pris le nom de Cyrille que juste avant sa mort.
Sommaire
Évangélisation des Khazars
Selon l'encyclopédie catholique de 1908, Constantin et Méthode naissent à Thessalonique d'une famille sénatoriale et deviennent prêtres. Ils résident dans un monastère donnant sur le Bosphore lorsque les Khazars, peuple des steppes établis en Crimée et qui aurait embrassé le judaïsme au IXe siècle, demandent à Byzance de leur envoyer quelqu'un pour leur enseigner le christianisme. C'est Constantin qui est choisi, et il part en Crimée accompagné de son frère. Selon l'encyclopédie catholique, après avoir appris le Khazar, ils convertissent beaucoup de monde. C'est après leur mission chez les Khazars qu'ils sont envoyés en Moravie à la suite d'une requête du prince Rastislav de Grande Moravie[1].
Christianisation de la Bohême-Moravie avant Cyrille et Méthode
En 843, en vertu du Traité de Verdun, l'empire franc est divisé en trois États distincts. La Francie orientale, qui deviendra plus tard le Saint-Empire romain germanique se considère comme l'héritière de l'empire de Charlemagne et de son ambition d'une expansion de l'empire et de l'Église catholique en Europe centrale. Dans la première moitié du IXe siècle, à partir des évêchés de Salzbourg, de Ratisbonne et de Passau, des missionnaires francs pénètrent en Bohême, Moravie et dans la région qui s'étend de la Slovaquie à la Carinthie. Les aristocrates moraves et tchèques adoptent le style de vie et la religion des aristocrates francs. Rastislav (ou Rostislav) qui prend le pouvoir en Grande Moravie en 846 est sans nul doute chrétien, et il a prêté serment de fidélité au roi de Francie orientale Louis II le Germanique. Il étend rapidement son influence à la Bohême et rentre alors en conflit avec Louis le Germanique[2].
Vers 860, l'entourage de Rostislav se décide à demander l'appui du pape pour renforcer à la fois son État et la chrétienté. En 863, il effectue le même type de requête à Byzance : Une ambassade est envoyée auprès des deux chefs, spirituel et temporel, de la chrétienté orientale: Le patriarche Photius et l'empereur Michel III[2].
Évangélisation de la Bohême-Moravie par Cyrille et Méthode
Michel III délègue alors en Moravie une mission dirigée par les deux frères[3] pour y créer une Église de rite oriental et d'entretenir avec la Grande Moravie des relations durables[2]. Constantin et Méthode qui parlent le dialecte slave de Macédoine ont des facilités pour évangéliser ces peuples slaves à qui ils enseignent une liturgie en langue slave[4]. La mission byzantine étend vite son action à la Pannonie[5], provoquant ainsi l'opposition de l'évêque de Bavière qui considère que ses droits sont violés. Mais à partir de 867, le plus grand désordre règne à Constantinople où Michel III a été assassiné et le parti de Photius écrasé. Pour faire ordonner prêtres leurs disciples, Constantin et Méthode s'adressent alors au pape de Rome[2]. Le problème le plus délicat est, en cette circonstance, l'usage comme langue liturgique du vieux slave, créé artificiellement par Constantin sur la base du parler macédonien qu'il connaissait, mais le pape Adrien II donne son accord et nomme Constantin évêque. Peu de temps après, en 869, survient la mort de ce dernier, après qu'il fut devenu moine à Rome sous le nom de Cyrille. Adrien II nomme alors Méthode archevêque de Sirmium, en Pannonie, évêque missionnaire pour les Slaves, chargé d'organiser une province ecclésiastique dans les régions à l'est de Salzbourg[2].
En 870, Méthode sera emprisonné par les évêques germaniques qui contestent sa juridiction et n'admettent pas sa liturgie. Appelé à Rome pour se justifier, en 879-880, il est approuvé par le pape Jean VIII et nommé évêque du royaume de Moravie, il repart pour la Moravie et meurt en 885[6].
Le « slavon » et le « cyrillique »
L'œuvre de Cyrille et Méthode est de longue durée. Les Slaves leur doivent une culture exprimée en langue vernaculaire, le slavon, et un accès à la culture byzantine. L'œuvre missionnaire de saint Cyrille et saint Méthode date d'une époque où, malgré la tension qui s'accroît entre l'Orient et l'Occident, la chrétienté a encore le sentiment de former un seul corps[4].
Avec Cyrille et Méthode les Slaves ont été dotés de leur premier alphabet et de leurs premiers textes religieux : évangile, psautier, épîtres, offices. Il semble que l'alphabet inventé par Cyrille ne soit pas l’alphabet connu sous le nom de « cyrillique » mais l’alphabet « glagolitique ». Le dialecte slave dans lequel les premiers textes ont été rédigés avec l'alphabet de Cyrille est celui de la région de Thessalonique. À cette époque, le slave présente encore une unité suffisante pour qu’un dialecte du littoral méditerranéen soit compris par des Slaves de l’Europe centrale.
La poursuite de l'œuvre de Cyrille et Méthode
L'œuvre de Cyrille et Méthode se maintient jusqu'en 894 sous le règne de Svatopluk, neveu de Rostislav, qui constitua un empire de la Grande Moravie incluant, en plus de la Moravie, la Slovaquie, la Bohême, une partie du territoire des Serbes prolabes, la Silésie, la région de Cracovie et celle du lac Balaton en Pannonie. Mais ensuite, les compagnons des deux frères doivent quitter la région, et le christianisme original qu'ils y avaient implanté tombe sous les coups du clergé germanique: l'évêque allemand Wiching prend sa succession et rétablit le latin comme langue d'Eglise.
Cette dispersion des disciples, accélérée par la destruction du royaume de Moravie par les Magyars ruine en apparence l'œuvre de Méthode mais permet en fait d'essaimer la liturgie et le nouvel alphabet dans les pays voisins, Macédoine et Bulgarie, chez les Serbes et les Russes[7]. La Grande Moravie est remplacée par la Bohême où subsistent des monastères fidèles à la tradition de Méthode, et un double culte en latin ou en vieux-slovène[8]. En Croatie blanche, c'est autour du monastère de Tynce à Cracovie que le rite vieux-slovène se diffuse. Malgré son mariage avec la princesse de Bohème Dubravka, le roi de Pologne nouvellement converti, Mieszko Ier opte pour le rituel latin. Deux métropolites coexistent pourtant, l'un à Gniezno en rituel latin et l'autre à Sandomir, sans doute en rite vieux-slovène[9] qui disparut au moment où le schisme fut officiel (1054)
Peu à peu se précise ainsi en travers de l'Europe, une frontière, non pas politique, mais bien réelle qui sépare le christianisme latin et le christianisme grec[4].
Notes et références
- Ladislas Abraham, article Cyrille et Méthode de la catholic encyclopedia, Tome IV, 1908 Que Constantin ait été dans un monastère avant sa mission est un fait à confirmer, car Jacques Le Goff signale par ailleurs qu'il n'a pris le nom de Cyrille que lorsqu'il est devenu moine, juste avant sa mort en
- Pavel Bělina, Petr Čornej, Jiří Pokorný, Histoire des Pays tchèques, Seuil, Paris, 1995, p.16-18
- Selon Jacques Le Goff, le christianisme médiéval dans Histoire des religions, tome 2, Gallimard coll La Pléïade, p.801, c'est Constantin qui part en premier, Méthode ne venant que consolider sa mission.
- Jacques Le Goff, le christianisme médiéval dans Histoire des religions, tome 2, Gallimard collection La Pléiade, p.801-803
- La Pannonie, limitée au Nord par le Danube est située à l'emplacement de l'actuelle Hongrie, et partiellement de la Croatie et de la Serbie.
- article Méthode ans le Grand Larousse encyclopédique en dix volumes, tome VII, 1963
- DERJAVIN, Die Slaven im Altertum, 1948
- Dvornik, The Slavs, p171 et Trautmann, Die slavischen Völker und Sprachen, p81
- Ketrzynski; Paszkiewicz, The Origins of Russia, p89 et 389
Sources
Dans sa forme du 16 mai 2008, cet article est une adaptation de l'article Cyrille et Méthode, de WikiKto sous GFDL.
Voir aussi
Bibliographie
Ouvrages citées par Roger Bernard
- F.Dvornik, Les Slaves, Byzance et Rome au IXe siècle, Paris, 1926
- F.Dvornik, Les Légendes de Constantin et de Méthode, vues de Byzance, Paris, 1933
- A.Vaillant, Textes vieux slaves, Paris, 1968.
Articles connexes
- Expansion du christianisme du Ve siècle au XVe siècle
- Histoire de l'Église catholique
- Université Saints-Cyrille-et-Méthode de Skopje
- Koch, C. Zur Entstehungsgeschichte der slavischen Schriften. - Europa Orientalis, XXVI (2007), 7-46
Liens externes
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