- Cycles de Milankovitch
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Paramètres de Milanković
Pour les articles homonymes, voir Paramètre (homonymie).Les paramètres de Milanković ou cycles de Milanković[1] correspondent à trois phénomènes astronomiques affectant certaines planètes au moins du système solaire : l'excentricité, l'obliquité et la précession. La terminologie de « paramètres de Milankovitch » est surtout utilisée dans le cadre de la théorie astronomique des paléoclimats.
Joseph-Alphonse Adhémar, James Croll et Milutin Milanković sont les principaux scientifiques ayant avancé l'idée que ces trois paramètres interviennent dans les variations climatiques naturelles, en particulier sur Terre. Cette hypothèse n'a été soutenue par des données expérimentales cohérentes qu'en 1976, avec l'article fondamental de Hays, Imbrie et Shackleton[2].
Ces changements climatiques naturels ont pour principale conséquence les périodes glaciaires et interglaciaires. Leur étude en termes de phénomènes périodiques est du ressort la cyclostratigraphie.
Sommaire
Les paramètres sur Terre
Nous considérons tout d'abord que le Soleil ne se déplace pas (nous n'avons pas à prendre en compte le déplacement du Soleil dans l'espace).
NB : Lorsque cela n'est pas précisé, l'hémisphère nord est pris en exemple pour les étés ou les hivers.
L'excentricité de l'orbite terrestre
La Terre décrit dans l'espace une ellipse dont le Soleil occupe l'un des foyers, mais cette ellipse se déforme (jusqu'à une excentricité maximum de 0,06) et se déplace dans l'espace (comme si elle oscillait de gauche à droite). En effet, au cours du temps, la distance Terre/Soleil varie entre 129 000 000 et 187 100 000 km. Actuellement, la distance Terre/Soleil admise est de 149 597 870,691 km, soit un aplatissement de 1,67%.
Cette excentricité est due aux attractions gravitationnelles exercées entre la Terre et les autres planètes du système solaire ainsi que le Soleil. Chaque planète attirant la Terre selon les lois de Newton, et les forces qu'elles lui appliquent n'étant pas les mêmes, l'excentricité de l'orbite terrestre peut varier d'un facteur 10 (en gros de 0.005 à 0.06). Le phénomène se présente comme somme de solutions périodiques (20 termes pour La2004) dont voici les cinq premiers :
e(t) = 0,027 557 9 + 0,010 739 cos(3,199 279 kt + 170,739 b) + 0,008 147 cos(13,651 920 kt + 109,891 b) + 0,006 222 cos(10,456 224 kt - 60,044 b) +0,005 287 cos(13,109 803 kt - 86,140 b) +0,004 492 cos(9,909 679 kt + 100,224 b).
[Ici, k = 2π/1 296 000 et b = π/180]. La figure est présentée ci-dessous.L'obliquité terrestre
L'inclinaison terrestre varie entre 21,8° et 24,4°. Actuellement, elle est de 23°26,5'. Cette obliquité est due elle aussi aux interactions gravitationnelles que la Terre subit de la part des planètes.
La périodicité de ce phénomène est essentiellement de 41 000 ans.
Cette variation est faible : par comparaison, l'obliquité martienne varie entre 20° et 60°. En fait, c'est la présence de la lune qui agit sur le bourrelet équatorial de la terre et lui donne la rapide précession d'Hipparque de 26000 ans, et de ce fait, la Lune place la Terre pour son obliquité actuelle dans une zone de faible perturbation (Laskar & Robutel(1993)).
Néanmoins, les faibles variations de cette obliquité ont de larges conséquences sur l'insolation à la latitude de 65°, que l'on considère comme le critère le plus fiable de fonte des inlandsis.
La précession terrestre
La Terre ne tourne pas sur elle-même comme un ballon parfaitement sphérique mais plutôt comme une toupie car elle est soumise à la précession. Cette précession provient du fait que les attractions du Soleil et de la Lune ne sont pas uniformes sur Terre à cause du bourrelet équatorial de la Terre. Ceci a deux conséquences différentes.
D'un côté, cela va influer sur l'indication du Pôle Nord céleste (quelle étoile nous indique le nord). Reprenons pour cela notre toupie
- La toupie tourne dans un premier temps droite puis en perdant sa vitesse, sa tige va commencer à dessiner une sorte de cercle.
Cette tige sur Terre est en réalité l'axe nord-sud (passant par les deux pôles géographiques), cet axe dessine dans l'espace un cercle par rapport au pôle Nord céleste (qui ne varie pas). L'axe nord-sud effectue le cercle complet en 25 760 ans. Aujourd'hui, α Ursae Minoris, appelée étoile polaire, se situe à 0,8° du pôle Nord céleste.
D'un autre côté, cela influe sur ce que l'on appelle la précession des équinoxes (ce qui détermine les « changements de saisons » astronomiquement parlant).
Le point vernal rétrograde (se déplace vers l'ouest) de 50,38'' par an, mais la précession due aux autres planètes du système solaire (donc hors Soleil et Lune) est de 0,12'' dans le sens inverse ; donc la précession se fait de 50,26'' par an vers l'ouest.La nutation
Nous avons dit plus haut que la rotation terrestre sur elle même était responsable de la précession terrestre qui se remarque par un cercle (fictif dans l'espace). En fait, dire que ce cercle est parfait, c'est oublier l'attraction de la Lune (et du Soleil mais dans un rôle mineur) et la nutation (qui est une conséquence de cette attraction). En effet, la Lune attire la Terre (nous pouvons d'ailleurs le voir avec le phénomène des marées) et cette attraction se remarque par une légère oscillation (ressemblant à une sinusoïde) du cercle de précession. Le motif de ce phénomène dure 18,6 ans.
Le phénomène résulte du fait que l'influence de la Lune n'est pas toujours identique au cours du temps : elle est minimale lorsque la distance angulaire entre la Lune et l'équateur est la plus petite, elle est maximale lorsque la distance est la plus grande. Comme ce phénomène n'est pas très influent pour le sujet, nous allons l'ignorer pour les conséquences des paramètres de Milanković.Les conséquences sur Terre
Les conséquences de l'excentricité terrestre
L'excentricité est l'un des facteurs les plus importants dans les changements climatiques naturels puisque la Terre au périhélie peut recevoir de 20 à 30% d'énergie (émise par le Soleil) de plus qu'à l'aphélie. Étant donné que l'excentricité n'est pas liée aux changements de saisons, cela peut avoir deux conséquences différentes :
- Si l'été correspond au périhélie et l'hiver à l'aphélie alors la Terre reçoit beaucoup d'énergie en été et moins en hiver, donc il y a des étés «chauds» et des hivers «froids».
- Si par contre l'été correspond à l'aphélie et l'hiver au périhélie (comme «plus ou moins» actuellement dans l'hémisphère nord), la Terre reçoit peu d'énergie en été mais plus en hiver, donc les étés sont «frais» et les hivers sont «doux».
Les conséquences de l'obliquité terrestre
L'obliquité possède une influence sur les saisons. En effet, si la Terre est dans une période de forte inclinaison par rapport au Soleil, alors les saisons seront très marquées (différences importantes entre été et hiver) et à l'inverse une faible inclinaison homogénéise les saisons (peu de différences entre l'été et l'hiver).
Cependant, il faut préciser que ces différences se sentent seulement lorsque l'on s'éloigne de l'équateur, où l'obliquité a peu d'influence (dans un climat équatorial on trouve 2 périodes très chaudes et très humides aux équinoxes et 2 périodes relativement froides et sèches aux solstices, dont l'intensité varie avec l'obliquité).Les conséquences de la précession terrestre
La précession a deux conséquences. La première n'a aucune influence sur les changements climatiques, (elle est indiquée pour information), l'étoile qui pointe le pôle nord céleste change avec le temps. En effet, aujourd'hui il s'agit de α Ursae Minoris mais dans 12 000 ans, ce sera Véga.
Plus intéressant, la précession des équinoxes n'influence pas directement les changements de température ; en fait la précession est responsable de la date du changement de saisons (printemps/été par exemple). Il faut savoir que les saisons sont délimitées par ce que l'on appelle la ligne des solstices et la ligne des équinoxes.
- Exemple simple : lorsque la Terre dépasse la ligne des solstices le jour du solstice d'été, la Terre rentre dans l'été.
La précession agit donc sur la croix formée par ces lignes, elle la fait tourner autour du Soleil. En d'autres termes, le 21 juin n'est pas (astronomiquement parlant) toujours le jour du solstice d'été.
De cela, nous pouvons donc dire qu'une année selon le calendrier n'équivaut pas à une année astronomique.- Plus simplement, les 365,25 jours ne correspondent pas à un tour (parfait) de la Terre autour du Soleil.
Cet effet est donc indirect, mais pour les scientifiques, il est important.
Les conséquences de ces trois facteurs
Ces trois facteurs combinés ont donc différentes conséquences:
- La variation d'énergie solaire reçue sous les hautes latitudes au cours de l'année.
- Les différences de température entre les continents et les océans à cause de l'albédo.
- Les variations sur les changements de saison (plus élevées aux hautes latitudes).
- Les différences de température entre les hémisphères dues à l'inclinaison.
- Par contre, ces paramètres n'ont aucune influence sur la quantité totale annuelle d'énergie solaire reçue par la Terre.
Confirmation de cette théorie
Il s'agit ici bien sûr d'une théorie parmi d'autres, mais les scientifiques pensent qu'elle est la plus probable pour expliquer les changements climatiques naturels. Suite au forage de Vostok (Antarctique), les chercheurs ont pu étudier le rapport 18O/ 16O (qui est noté δ 18O) dans la glace extraite.
En effet, ils se sont aperçus que la courbe représentant le rapport 18O/ 16O avait des similitudes avec la courbe issue des cycles de Milanković. Et étant donné que la correspondance température / δ 18O est fermement établie, on peut alors penser que les paramètres de Milanković peuvent être la cause des changements climatiques naturels.Depuis que ces variations orbitales sont établies, les scientifiques tentent de trouver un modèle capable de relier insolation à 65° et δ18O marqueur des variations passées du climat. Ce n'est pas évident à trouver car la fonte d'un inlandsis est mal cernée. Dans le passé récent (-1 Myr), la périodicité est de l'ordre de 100 000 ans avec environ 90 000 ans d'englacement et 10 000 de dégel ; mais au-delà , le forçage est plutôt à une période de 41 000 ans (c'est la transition du Pléistocène moyen), correspondant à un forçage plus direct par l'obliquité. Les forages benthiques permettent de remonter jusqu'au Néogène, ce qui a permis de fonder la nouvelle échelle de temps géologique (ATNTS 2004).
Le futur
Premièrement, le réchauffement climatique dû à l'activité humaine doit être mieux compris et ses effets sur le court et moyen terme doivent être mieux évalués. Deuxièmement, les mécanismes qui lient les variations orbitales et leurs conséquences sur le climat doivent être étudiés avec plus d'attention parce qu'ils restent encore assez incompris.
Le futur sur un siècle est déjà étudié par le GIEC (Groupe international d'études du climat). Au dela d'un siècle, cela dépendra fortement de ce que fera l'humanité.
On peut penser que la future période sera une période glaciaire, mais pour pouvoir la prédire, il faut comprendre les phénomènes qui interagissent de manière positive (vers le refroidissement) ou de manière négative (vers le réchauffement) et aussi ceux qui agissent de l'une des deux manières suivant les rétroactions des autres phénomènes (ils dépendent directement ou indirectement d'autres phénomènes).
Les travaux effectués par André Berger et Marie-France Loutre amènent la conclusion que le passage vers cette future période glaciaire se ferait dans un peu plus de 50 000 ans[3].
Généralisation aux autres planètes
Les paramètres de Milanković ne sont pas des particularités terrestres ; toutes les planètes (satellites, etc.) subissent des contraintes similaires. Mars est celle dont le climat est le plus étudié (cf. la théorie astronomique des paléoclimats).
Notes
- ↑ On trouvera couramment l'orthographe « Milankovitch » dans la littérature.
- ↑ (en) Jim Hays, John Imbrie et Nicholas Shackleton, « Variations in the Earth’s orbit : pacemaker of the ice ages. », dans Science, vol. 194, 10 décembre 1976, p. 1121–1132 (ISSN 0036-8075) [résumé, [pdf] texte intégral (pages consultées le 6 août 2009)]
- ↑ André Berger et Marie-France Loutre, « À quand la prochaine glaciation ? », dans La Recherche, no 368, octobre 2003 (ISSN 0029-5671) [résumé (page consultée le 6 août 2009)]
Voir aussi
Liens internes
- Milutin Milankovitch
- Changements climatiques
- Théorie astronomique des paléoclimats
- Cyclostratigraphie
Liens externes et bibliographie
- André Berger, Le climat de la terre, Un passé pour quel avenir ?, Bruxelles : De Boeck université, 1992 - 479 p. ISBN 2-8041-1497-X.
- (fr) ens-lyon.fr Articles de l'ENS Lyon à ce sujet.
- (fr) educnet.education.fr Site de l'éducation nationale française montrant un exemple de TP pour des élèves faisant une spécialité SVT (classes secondaires).
- (en) nasa.gov Site comprenant les images.
- Gradstein,Ogg,Smith : geological time scale 2004 ,CUP,ISBN 0-521-78673-8
- Solution La2004 pour l'insolation de la Terre [1]
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