- Compilations de Justinien en droit
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Corpus juris civilis
Le Code de Justinien, aussi connu sous son nom latin de corpus juris civilis est la plus grande compilation de droit romain antique.
Ce code est issu de l'ambition de Justinien Ier, empereur de l'Empire romain d'Orient. Celui-ci souhaitait disposer d'un code de droit utile à son empire et fidèle à la tradition romaine. L'œuvre est à mi-chemin entre codification et compilation. Bien qu'ils aient repris les textes classiques, les auteurs ont su adapter des textes d'époques très différentes (théoriquement toute l'histoire romaine !), de la Loi des Douze Tables aux constitutions impériales du Bas-empire, pour constituer un ensemble cohérent, assez différent du droit romain classique, car accordé au christianisme.
Cette œuvre législative prend une importance fondamentale en Occident car c'est sous cette forme reçue de Justinien que l'Occident médiéval, à partir du XIIe siècle adopte le droit romain, ancêtre de notre temps.
Justinien était tellement sûr de la pérennité du corpus qu'il abrogea tout le droit antérieur, conféra une autorité équivalente à l'ensemble de l'œuvre, et interdit même tout commentaire du Digeste, « clair comme de l'eau de roche ».
Vers 900, l'empereur Léon le Sage commanda la traduction de l'ensemble en grec, pour le rendre compréhensible aux juristes byzantins. Cette version grecque fut intitulée Basilica.
Sommaire
Composition
Le Code de Justinien est composé de quatre éléments :
- le Codex Iustiniani,
- le Digeste,
- les Institutes,
- les Novelles.
Le Digeste est encore aujourd'hui la principale source de notre connaissance du droit romain.
Codex Iustinianus
Promulgué en 529, le code de Justinien (codex Iustinianus ou codex legum) fut rédigé par une commission de fonctionnaires impériaux et de professeurs des écoles de droit, présidée par le juriste Tribonien ; il s'agit d'un recueil de Constitutions impériales (leges) publiées depuis Hadrien. Il ne s'agit au fond que d'une mise à jour du code de Théodose.
L'activité législative étant demeurée intense pendant la rédaction du Digeste, une seconde édition fut promulguée en 534 sous les noms Codex juris civilis ou Novus Iustinianius. Le Code de Justinien s'articule autour d'un plan cohérent :
- livre I : droit ecclésiastique ;
- livre II : procédure judiciaire ;
- livres III à VIII : droit privé ;
- livre IX : droit pénal ;
- livre X : droit fiscal ;
- livres XI et XII : droit administratif : ces dispositions renforcent la puissance de l'État et son organisation hiérachique.
Par rapport aux règles précédentes, le Code de Justinien se caractérise par le fait que l'Empereur devient la source unique du droit : l'Empereur est seul investi du droit d'imposer les règles du droit comme des injonctions ou des commandements, ce droit étant retiré aux magistrats.
Égalité des personnes
La principale innovation concerne l'affirmation des droits dont les hommes doivent bénéficier et qui constituent une forme embryonnaire de « droits de l'homme » : la distinction romaine entre le droit civil des citoyens et le droit des gens est abolie au profit du droit des gens, qui s'oppose au droit naturel.
Cette innovation se marquera par une protection accrue du droit des faibles : simplification des procédures d'affranchissement des esclaves, qui deviennent alors immédiatement citoyens, égalité entre tous les citoyens et suppression de la distinction entre les dediticii, les latins juniens et les autres citoyens romains.
Droit familial
Puissance paternelle. Justinien fait abolir la noxae datio, permettant au père de famille de livrer son enfant en réparation des dommages qu'il avait commis. Il supprime également la règle par laquelle le père conservait la propriété des biens de ses enfants : cette propriété est limitée à un simple usufruit. Les procédures d'émancipation des enfants sont également simplifiées.
Puissance maritale. Les divorces sans raison légitime, les remariages sont sanctionnés. L'adultère de la femme voit sa sanction allégée. Les femmes pauvres qui se marient sans dot se voient reconnaître un droit dans la succession de leur époux ; les femmes se mariant avec dot conservent la propriété de celle-ci.
Droit successoral
Si l'acceptation et la renonciation à succession sont conservées, les héritiers se voient accorder le droit d'inventaire, limitant leur contribution au passif successoral à concurrence de l'actif (cette règle figure aujourd'hui encore dans le droit successoral français).
Les enfants naturels se voient également reconnaître un droit de succession (cette règle ne sera introduite en droit français qu'en 1972 et parfaite en 2001).
Droit pénal
Justinien réduit la rigueur des mutilations, interdisant ainsi de faire couper les deux mains et les deux pieds aux criminels et en interdisant la mutilation pour les voleurs.
Digeste
Il fut suivi d'un second recueil, beaucoup plus ambitieux, le Digeste (Pandectes en grec, digesta iustiniani ou codex iuris en latin), compilation des consultations des jurisconsultes d'époques diverses (les jura), de la République ou de l'Empire. L'élaboration de ce recueil fut décidée par Justinien, aux termes de la constitution Deo auctore du 15 décembre 530.
Cette anthologie fait la part belle aux cinq principaux juristes de la Loi des citations, principalement Ulpien et Paul. D'autres extraits proviennent de juristes antérieurs, parfois même de la fin de la République romaine.
Les compilateurs ont supprimé les divergences d'opinion entre jurisconsultes, et ont repris souvent textuellement leurs écrits, en citant leur source. Le classement est établi par matières. Ansi, on peut par exemple trouver sur un sujet donné, l'extrait d'un texte d'Ulpien, coupé en son milieu par une phrase de Labéon qui apporte une précision sur un point, et suivi de quelques phrases de Gaius.
Selon Justinien, l'ensemble fait une fois et demi la taille de la Bible, mais seulement un vingtième de la masse des écrits dépouillés par les auteurs.
Institutes
Les Institutes, le manuel d'enseignement du code, fut également rédigé par une nouvelle commission pour accompagner la promulgation du code et du Digeste. Ce manuel est inspiré en grande partie de celui de Gaius, datant du milieu du IIe siècle, et qui était très utilisé. Il en reprend pour l'essentiel le plan, en séparant les personnes et les biens, séparation qui est encore celle du Code civil français et de beaucoup de textes juridiques contemporains.
Novelles
Une quatrième partie, officieuse, fut ajoutée par la suite : les Novelles (Novellae) à la fin du règne de Justinien (565). Elles sont formées de trois compilations successives de constitutions impériales postérieures au code. Elles sont écrites en grec, la langue de l'empire d'Orient, contrairement au code.
Imperfections
Justinien admet lui-même que son Corpus n'est pas exempt d'imperfections, comme par exemple de répétitions et d'omissions. De nombreux spécialistes y ont, de plus, relevé de nombreuses incohérences qui trahissant à la fois la rapidité avec laquelle le code a été élaboré et le manque d'unité de travail entre les diverses commissions. Il semble aussi qu'en condensant de nombreux textes, les membres de la commission de rédaction du Code aient procédé à des mutilations et à des altérations causant de véritables changements de sens.
Ces défauts seront aggravés par l'interdiction, faite par Justinien lui-même, de procéder à tout commentaire du Corpus: l'Empereur n'autorise que les traductions littérales, sans sommaires ni résumés. Cette interdiction ne fut cependant pas respectée et de nombreux commentaires explicatifs, appelés Indices, apparurent sous la plume des auteurs mêmes du Code.
Diffusion
De nombreux obstacles s'opposèrent à la diffusion du Code de Justinien : le plus important était qu'il était rédigé en latin, alors que la langue de la majorité de la population de l'Empire était le grec. Par ailleurs, il s'opposait violemment aux coutumes locales.
Un autre obstacle se manifesta en Occident : malgré la Pragmatique sanction Pro petitione du pape Vigile, les juristes demeurèrent fidèles au Code de Théodose. Seules les Institutes furent introduites en Italie ; en Gaule, le Code fut connu au travers d'un résumé célèbre, le Bréviaire d'Alaric, qui ne subsista lui-même que sous la forme de résumés de plus en plus succincts.
Les Novelles furent enfin traduites en latin dans l'Epitome Iulani, diffusé en Gaule dès le IXe siècle mais sans exercer une grande influence.
Ce n'est qu'à la fin du XIe siècle que le Codex Iustiniani fut redécouvert à l'Université de Bologne, en Italie. De cette redécouverte s'engagea la renaissance du droit romain.
Burgundio ayant séjourné à Constantinople de 1135 à 1140, donna à son retours en Italie, le manuscrit des Pandectes à la ville de Pise ; manuscrit considéré comme "le plus précieux au monde après la Bible" qui fut conservé jalousement par les magistrats de la cité jusqu'à ce que deux cents ans plus tard les Médicis s'en emparent pour le placer dans leur Biblioteca Lorenziana.¹
La dernière traduction française officielle du Codex fut effectuée sous le Premier Empire.Bibliographie
- G Tate : « Justinien », Fayard
- Jacques Heers : « Le Moyen Age une imposture », Tempus ¹
Liens internes
Liens externes
- Ed. Mommsen, Krueger, Schoell & Kroll Site The Roman Law Library
- Texte latin du Digeste sur IntraText
- Texte latin du Digeste sur le site de l'université des Sciences sociales de Grenoble.
Une reproduction de l'intégralité du CIC sur Internet en accès libre: http://www.gmu.edu/departments/fld/CLASSICS/justinian.html et http://web.upmf-grenoble.fr/Haiti/Cours/Ak/index.htm (Digeste)
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