- Théorème de Lie-Kolchin
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Le Théorème de Lie-Kolchin est un résultat de trigonalisabilité des sous-groupes connexes et résolubles du groupe des matrices complexes inversibles
.
Définition — On dit que
est trigonalisable s'il existe une base commune de trigonalisation à tout élément de E.
Théorème de Lie-Kolchin — Tout sous groupe connexe résoluble de
est trigonalisable.
La preuve repose sur les deux lemmes suivants :
Lemme 1 — Soit
une famille de matrices qui commutent de
indexée par I un ensemble quelconque, alors
est trigonalisable.
Preuve du lemme 1On raisonne par récurrence sur la dimension de l'espace : n.
- Pour n = 1, le résultat est trivial.
- Soit
et supposons le résultat vrai pour tout
.
Soit G une famille de matrices qui commutent de
Notons V = ker(M − μId) : on a. Si toutes les matrices de G sont des matrices d'homothéties, le résultat est vrai. Supposons alors que ce ne soit pas le cas. Soit
qui ne soit pas une matrice d'homothétie. Notons μ une valeur propre associée à M (toute matrice complexe admet une valeur propre car est trigonalisable).
car M n'est pas une matrice d'homothétie. Notons H un supplémentaire de V dans
: on a
avec
.
Notons d la dimension de V.
Soit
une base de
adaptée à la décomposition en somme directe
. Comme tous les éléments de G commutent, V est G-stable.
Ainsi dans la base
toute matrice N de G s'écrit :
avec,
et
.
On vérifie que pour N' une matrice de G telle que
NN' = N'N entraine que,
.
Ainsi, par hypothèse de récurrence, il existe une base
de V dans laquelle toutes les matrices vN sont triangulaires supérieures. Toujours par hypothèse de récurrence, il existe une base
de H telle que les matrices hN soient triangulaires supérieures.
Si on pose
on a le résultat au rang n + 1.
La récurrence est donc établie et le lemme démontré.
Lemme 2 — Si G est un sous-groupe connexe de
alors son groupe dérivé
est connexe.
Preuve du lemme 2Soit S l'ensemble des commutateurs et
.
est connexe et Φ est continue donc
est connexe. Soit
et Sm l'ensemble des produits
avec s
. C'est l'image par l'application continue
de Sm qui est connexe car S l'est. Ainsi, Sm est connexe. Or,
, comme
pour tout
,
est connexe.
Vient enfin la démonstration du théorème.Démonstration du théorèmeMontrons d'abord par récurrence sur n que s'il existe un sous-espace vectoriel propre
, c'est-à-dire que
et
, qui est G-stable alors, on a le résultat.
- n = 1 : le résultat est vrai.
- Supposons la propriété démontrée pour tout sous-groupe G connexe et résoluble de
et ce, pour tout
. Soit G un groupe connexe résoluble de
.
Soit V un sous-espace vectoriel propre de
G-stable.
Notons W un supplémentaire de V dans
. On a bien sûr
Dans une base adaptée à la décomposition en somme directe, un élément M de G a pour forme :
De plus, si d est la dimension de V, les applications :
sont continues en tant que projections et sont des morphismes de groupes. Or l'image d'un groupe résoluble par un morphisme de groupe est résoluble. L'image d'un connexe par une application continue étant connexe on peut appliquer l'hypothèse de récurrence à V et W, à savoir qu'il existe une base commune de trigonalisation pour chaque sous espace et en concaténant les deux bases obtenues, on a le résultat pour n + 1.
Ceci achève la démonstration dans le cas où il existe des sous-espaces propres G-stable.
On va maintenant prouver que dans le cas où il n'existe pas de sous-espace propre G-stable, alors G est commutatif, ce qui grâce au lemme démontrera le résultat.Supposons par l'absurde qu'il existe m > 1 tel que
Soit
. Par définition H est commutatif. Donc il existe une base de trigonalisation commune de H.
On va montrer qu'en fait l'ensemble H est diagonalisable. Notons
soit vecteur propre commun à tous les éléments de
, c'est un sous-espace vectoriel de
. On va montrer que V n'est pas réduit au vecteur nul et qu'il est G-stable. Le fait que V ne soit pas réduit à {0} est dû au fait que H soit trigonalisable (il existe un vecteur propre commun à tous les éléments de H) donc
.
Soit
,
et
, on a : NMv = M(M − 1NM)v. Donc
(car H est distingué dans G) d'où, il existe
tel que M − 1NMv = λv (car v est commun à tous les éléments de H).
Ainsi, NMv = λMv donc
donc V est G-stable : par hypothèse
.
Les éléments de H sont donc diagonalisable dans une base commune.
Montrons alors que
.
Fixons
et observons l'application
.
car H est distingué dans G.
Φ est continue donc Φ(G) est connexe.
De plus, MNM − 1 est diagonalisable car N l'est et a les mêmes valeurs propres que N. Φ(G) a donc un nombre fini d'éléments. Comme Φ(G) est connexe, il n'y en a qu'un d'où Φ(G) = {Φ(Id)} = {N}, ainsi
.
On montre alors que tous les éléments de H sont des homothéties c'est-à-dire que N = λNH. Soit
et W un espace propre de N. Comme N commute avec tout élément de G, W est G-stable donc
.
Or
car m > 1 donc comme le déterminant d'un commutateur est 1 on a
et donc pour tout
: H est nécessairement fini.
De plus d'après le lemme 2 H est connexe donc H est réduit à un élément donc nécessairement H = {Id}, ce qui est contradictoire. G est donc commutatif, ce qui démontre le théorème.
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