- Radhia Haddad
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Radhia Haddad Naissance 17 mars 1922
Tunis, TunisieDécès 20 octobre 2003 (à 81 ans)
Carthage, TunisieNationalité tunisienne Diplôme Certificat d'études primaires Activité principale Présidente de l’UNFT Autres activités Députée de Tunis Famille Hassib Ben Ammar, frère Radhia Haddad (راضية الحداد), née le 17 mars 1922 à Tunis et morte le 20 octobre 2003 à Carthage, est une militante féministe tunisienne.
Elle préside notamment l’Union nationale des femmes de Tunisie durant quinze ans.
Sommaire
Biographie
Jeunesse
Née Radhia Ben Ammar (راضية بن عمار) le 17 mars 1922, fille de Salah Ben Ammar[1], elle grandit dans une famille de la bourgeoisie traditionnelle tunisoise intellectuellement ouverte[2],[3]. Elle fait des études primaires brillantes, en français, à l’école française de Franceville. Mais, en tant que fille, elle se voit obligée par ses parents de quitter l’école à douze ans[3], après avoir obtenu le certificat d'études primaires[2]; elle se plaindra plus tard « qu’aucun sacrifice n’était jugé trop grand pour faciliter les études de mes frères »[2]. Elle poursuit néanmoins des cours de langue arabe à domicile et apprend beaucoup de son frère, le futur homme politique et militant des droits de l’homme Hassib Ben Ammar[4], avec qui elle discute souvent en lisant ses livres de collège[3]. Radhia Haddad, forcée de porter le voile (sefseri), se révolte et refuse de quitter la maison. Elle profite de la visite du docteur Abderrahmen Mami, quand quelqu’un tombe malade dans son foyer, pour discuter avec lui du Vieux et du Néo-Destour[5].
Engagement militant et politique
Radhia Haddad se marie à 18 ans avec son cousin maternel[3]. C’est donc voilée qu’elle fait ses premiers pas de militante[6] et commence à participer à la vie associative et politique[3]. Elle adhère à l'Union des femmes musulmanes de Tunisie et participe au mouvement national en assistant les Tunisiens contre le protectorat français[7]. Elle participe également aux campagnes de solidarité et de collecte de dons au profit des étudiants à l'étranger[7]. En 1946, son beau-père, engagé en politique, lui propose de prendre part à une réunion tenue dans leur maison et à laquelle participent deux membres du Néo-Destour, Salah Ben Youssef et Allala Belhaouane. Après avoir assisté à cette réunion d'hommes, avec le consentement de ses hommes les plus proches (son beau-père et son mari), elle décide de retirer le voile, persuadée que personne n'y tient[8]. En 1947, elle crée et préside l'organisation féminine Les Amies des Scouts[7]. Elle écrit aussi une pièce de théâtre où elle joue un rôle[7].
Après l'indépendance de la Tunisie en 1956, avec la promulgation le 13 août du Code du statut personnel (CSP) donnant à la femme une place inédite dans la société, elle devient rapidement l'une des premières femmes parlementaires[3] en Afrique et dans le monde arabe en siégeant comme députée de la circonscription de Tunis entre 1959 et 1974[9].
Présidente de l'UNFT
Membre du Néo-Destour puis du Parti socialiste destourien (PSD) entre 1952 et 1972[9], elle fait partie en 1956 de l'assemblée constitutive de l'Union nationale des femmes de Tunisie (UNFT)[7]. Elle préside cette organisation durant quinze ans, de 1958 à 1972[9], après sa désignation lors du premier congrès de l'UNFT, tenu du 7 au 9 avril 1958 à la Bourse du travail. Une fois le congrès terminé, le président Habib Bourguiba charge le directeur du Néo-Destour, Abdelmajid Chaker, de remplacer la présidente Aïcha Bellagha (présidente sortante choisie consensuellement lors de la réunion constitutive de l'UNFT tenue le 26 janvier 1956) par Radhia Haddad[10] en fournissant un résultat de vote donnant à Haddad, avec Fethia Mzali, une avance sur Asma Rebaï, Saïda Sassi (nièce de Bourguiba) et Aïcha Bellagha[11]. Asma Rebaï déclare alors :
« Notre déception était grande, non pas de la personne de Radhia Haddad, mais de la manière dont l'affaire a été traitée. Mais à ce moment, déception et désaccord ne mènent pas automatiquement vers l'opposition. Et qui, à cette époque, s'opposerait-il à Bourguiba[12] ? »
Elle milite à l'UNFT pour que les femmes apprennent à lire et écrire en poursuivant des études, puis travaillent pour assurer leur autonomie financière[3]. Par sa force de convaincre, les hommes « écrans » puis les femmes, et par son comportement, elle parvient à transformer en profondeur la société « d'une façon harmonieuse, dans le calme et l'entente sans heurts ni « retours de manivelle » »[3]. Elle fonde et dirige la revue trimestrielle La Femme, publiée par l'organisation[7]. Au regard de son action, Bourguiba lui déclare même : « Je suis le président des hommes et vous la présidente des femmes »[9].
Résistance et retraite
Après la crise sociale de 1969-1970, elle rejoint Ahmed Mestiri qui constitue un groupe de « démocrates » au sein du PSD et du gouvernement[9]. Radhia Haddad démissionne de l'UNFT et du PSD le 8 mars 1972[13], même si Catherine Mayeur-Jaouen avance qu'elle est exclue de ce dernier[14]. Elle est alors « maltraitée en public et traînée devant les tribunaux sous des prétextes futiles »[9]. Elle est notamment condamnée le 9 mai 1974 à quatre mois de prison avec sursis et une amende de cent dinars lors d'un « curieux procès »[15]. Elle y est notamment défendue par vingt avocats, dont les anciens ministres Mestiri et Béji Caïd Essebsi mais aussi Me Chtourou[16] et Me Arezki Bouzida, bâtonnier d'Alger et grand militant du FLN[17]. Haddad en souffre beaucoup et finit par se retirer de la vie politique[9]. Elle vit une paisible retraite et s'occupe de sa petite maison d'édition, Elyssa, de l'autre nom de Didon, reine phénicienne et fondatrice légendaire de Carthage[9].
Elle publie en 1995 une autobiographie intitulée Parole de femme[2]. À propos du CSP, elle y écrit que, sans l'action d'Habib Bourguiba, « aucune réforme radicale n'aurait pu réussir. Je crois que ce sera son plus grand mérite devant l'Histoire, car si tous les pays ont fini, un jour ou l'autre, par se débarrasser de la domination étrangère, aucun, et surtout aucun pays arabo-musulman, n'a osé une révolution sociale d'une telle ampleur »[2].
Morte le 20 octobre 2003 à Carthage[9], elle est enterrée au cimetière du Djellaz[18]. Le Rassemblement constitutionnel démocratique lui rend alors un vibrant hommage[9]. En 2011, la rue de Yougoslavie à Tunis est rebaptisée en son honneur[19].
Publications
- Parole de femme, éd. Elyssa, Tunis, 1995 (ISBN 9973775007)
Références
- ISBN 9780950612218) Sayed Mohamed Mahdi al Tajir, The International who's who of the Arab world, éd. International Who's Who of the Arab World Ltd., Londres, 1978, vol. 1, p. 107 (
- (fr) Ridha Kéfi, « Et Bourguiba libéra la femme », Jeune Afrique, 27 août 2006
- (fr) Raed Marrakchi, « Le courage au féminin : Radhia Haddad », Divergences, 21 décembre 2003
- (fr) « Hommage à Hassib Ben Ammar », Leaders, 16 décembre 2008
- ISBN 9973775007) Radhia Haddad, Parole de femme, éd. Elyssa, Tunis, 1995, p. 84 (
- Radhia Haddad, op. cit., p. 88
- (fr) Biographie de Radhia Haddad (Site commémorant la promulgation du Code du statut personnel)
- Radhia Haddad, op. cit., p. 87
- (fr) Ridha Kéfi, « La « présidente des femmes » n'est plus », Jeune Afrique, 27 octobre 2003
- ISBN 2845865066) Michel Camau et Vincent Geisser, Habib Bourguiba. La trace et l'héritage, éd. Karthala, Paris, 2004, p. 336 (
- ISBN 9973991834) Habib Kazdaghli [sous la dir. de], Mémoire de femmes. Tunisiennes dans la vie publique, éd. Media Com, Tunis, 1993, p. 84 (
- Habib Kazdaghli, op. cit., p. 37
- Radhia Haddad, op. cit., p. 189
- ISBN 9782706816499) Catherine Mayeur-Jaouen, Saints et héros du Moyen-Orient contemporain, éd. Maisonneuve et Larose, Paris, 2003, p. 113 (
- Revue française d'études politiques africaines, n°97-102, éd. Société africaine d'édition, Dakar, 1974, p. 16
- Colin Legum, John Gordon et Stewart Drysdale, Africa contemporary record: annual survey and documents, éd. Africa Research Limited, Exeter, vol. 7, 1975, p. 126
- Radhia Haddad, op. cit., p. 214
- (fr) « Obsèques de la militante Radhia Haddad : hommage posthume à un engagement sans faille », La Presse de Tunisie, 22 octobre 2003
- (fr) « Hommage posthume de la municipalité de Tunis à quatre tunisiens illustres », Leaders, 13 septembre 2011
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