Bataille de Jengland

Bataille de Jengland

47°4326N 1°4355O / 47.72389, -1.73194

Bataille de Jengland
Informations générales
Date 22 août 851
Lieu Jengland-Beslé
Issue Victoire bretonne
Belligérants
Bretons Francs, mercenaires saxons
Commandants
Erispoë Charles le Chauve
Forces en présence
peut-être 1000 hommes peut-être 4000 à 6000 hommes

Le 22 août 851, la bataille de Jengland-Beslé, ou bataille du Grand-Fougeray opposa les troupes franques de Charles le Chauve aux Bretons dErispoë, et fut remportée par ce dernier. Cette victoire bretonne déboucha sur le traité d'Angers signé en septembre 851.

Sommaire

Prémices

Limite de la Neustrie franque jusqu'au Traité d'Angers de 851

Après avoir respecté la paix conclue avec Charles le Chauve en 846, Nominoë, à la tête des Bretons, reprend loffensive en 849. Il semble désormais chercher à établir lindépendance totale de son royaume, comme en témoigne sa déposition des évêques en placefidèles à Landran II, archevêque métropolitain de Tourssous des accusations de simonie et leur remplacement par des fidèles (par exemple : Gislard nommé évêque à Nantes, puis à Guérande et Courantgwen à Vannes).

En 850, Charles le Chauve lève une armée pour défendre l'intégrité de la Neustrie, mais laffrontement na pas lieu et le roi se contente de renforcer les comtés de la Neustrie limitrophes de la Bretagne.

En 851, les garnisons laissées lannée précédente à Rennes et Nantes capitulent devant Nominoë, qui pousse ses dévastations profondément vers lest (il ravage Le Mans). Voulant pousser à son avantage ses conquêtes nouvelles, Nominoë décide d'avancer sur Chartres, mais meurt subitement en montant à cheval, près de Vendôme. Erispoë, son fils, reprend le commandement de larmée bretonne et poursuit loffensive en compagnie de Lambert, un Franc dépossédé du comté de Nantes par Charles le Chauve.

Devant la menace, Charles conclut une entente daide réciproque avec ses frères, obtenant un contingent de Saxons de Louis le Germanique. Lost est convoqué dans louest du royaume à la fin de lété.

Les forces en présence

Faute de données précises, les effectifs des deux camps doivent être estimés sous toutes réserves. Il faut se garder de répéter les évaluations fantaisistes dautrefois, qui accordent jusquà 40 000 hommes à Charles, alors que Charlemagne lui-même nen a sans doute jamais conduit autant au champ de bataille, à une époque lempire était encore entier.

On peut néanmoins supposer quaprès son échec cuisant à Ballon, Charles cherche à éviter de commettre deux fois la même erreur en se présentant avec trop peu dhommes, même sil sait les Bretons peu nombreux. Une mobilisation massive en Francie occidentale pourrait représenter de quatre à six mille hommes, 30 à 50% du maximum théorique du royaume, car le roi doit alterner les régions convoquées à lost dune année à lautre pour éviter lépuisement des ressources et des hommes. Sur ce nombre, il faut compter peut-être 10% de cavaliers lourds, leurs écuyers, sils sont eux-mêmes montés, pouvant éventuellement former une cavalerie légère. Quant au contingent de mercenaires saxons, on peut se hasarder à lui accorder un nombre de 500 à 800 hommes, soit à peu près les effectifs dune bande de guerre germanique (par analogie avec les bandes de guerres scandinaves).

Chez les Bretons, larmée étant apparemment constituée dune seule cavalerie légère, seuls les hommes dun certain rang social, cest-à-dire ayant les moyens de posséder un cheval, pouvaient y participer. Malgré tout, la proportion dhommes possédant des chevaux pourrait être supérieure à ce quelle est en Francie à la même époque. En effet, lélevage tient une place prépondérante dans les activités de production de la société celtique de lépoque, du moins chez la classe libre, à en croire les relations contemporaines et l'analogie avec les autres nations celtiques du haut Moyen Âge. La culture des champs, peu valorisée, est laffaire de la classe servile, exclue du privilège de porter les armes. La richesse et le pouvoir se calculent en têtes de bétail et en peaux.

Ainsi, la population de la Bretagne dalorsmoins de 150 000 âmes, sans compter la population romane acquise dans les comtés de Rennes et de Nantesmène à une estimation de 500 à 800 cavaliers pour une région gallo-franque, la petite noblesse, qui a le quasi-monopole du cheval, représente de 2 à 2,5% de la population. On peut supposer la proportion supérieure chez les Bretons. Un seul point de repère historiographique : en 873, Charles convoque Salomon, successeur dÉrispoë, pour venir faire conjointement le siège dAngers se sont retranchés des Vikings ; selon les sources de lépoque, le roi breton sy rend avec 1 000 hommes.

La bataille

En août 851, Charles le Chauve quitte le Maine pour pénétrer en Bretagne par la voie romaine de Nantes à Corseul. Au pont de Beslé, larmée bretonne lui barre la route. D'après l'historien Pierre Riché, la bataille a lieu à « Juvardeil, près de Segré »[1].

Le premier jour, le roi dispose ses troupes sur deux lignes : les Francs derrière, les mercenaires saxons devant pour briser la charge de la cavalerie bretonne, dont il connaît la mobilité et la ténacité.

Aux premiers instants de lengagement, canardés de javelots, les Saxons se replient derrière la ligne franque. Les Francs sont pris au dépourvu par la tactique de lennemi. Au lieu dengager le corps à corps, les Bretons harcèlent à distance larmée lourde des Francs, un peu à la façon des peuples nomades dAsie centrale, larc et la flèche étant remplacés par le javelot. Ils alternent charges furieuses, débandades soudaines et feintes incitant les Francs à la poursuite, les Bretons étant entraînés à viser aussi bien devant eux que derrière. Dès que quelques Francs se détachent dune colonne, les Bretons se regroupent pour les encercler.

Après deux jours de combat, les pertes en hommes et en montures sont catastrophiques chez les Francs, minimes chez les Bretons. La frayeur gagne le roi, qui fuit à la faveur de la nuit, abandonnant tout son vestiaire. Lorsque sa disparition est remarquée au petit jour, la panique sempare des soldats et tous ne songent plus quà sauver leur peau. Les Bretons ne tardent pas à sen apercevoir et fondent sur le camp à grand cri, semparant des trésors et des armes, massacrant autant de fuyards quils le peuvent.

Les conséquences : la paix d'Angers

À lissue de cette bataille, les relations entre Francs et Bretons sont redéfinies. Charles le Chauve accepte de rencontrer Érispoé à Angers ville située aux limites de l'avancée bretonne.

Selon les Annales de Saint-Bertin : « Erispoé, fils de Nominoé, venant à Charles, dans la Cité dAngers se commanda à lui (= se soumet) et reçut en don aussi bien les symboles de la royauté que les ressorts de son père, étant ajoutés le Rennais, le Nantais et le Retz. »[2]

Par cet accord d'Angers, Charles le Chauve reconnaissait Erispoë pour roi de Bretagne et s'engageait à ne plus jamais contester que les pays de Rennes, Nantes et de Retz sont terre bretonne. En contrepartie, Erispoë se contenta de rendre son siège épiscopal à l'évêque Actard. L'accord d'Angers délimite les frontières du futur duché de Bretagne et de la Bretagne. Il marque aussi un tournant dans les relations entre la Francie occidentale et la Bretagne : les Vikings attaquant la Neustrie et la Bretagne, une paix intérieure, faute d'une alliance solide et volontaire, est nécessaire pour contrer ces incursions (à partir de 799) de plus en plus pressantes.

Les limites de la paix d'Angers

La paix d'Angers vole en éclat quelques années plus tard sous Salomon de Bretagne qui repart en guerre en 863 contre Charles le Chauve. Salomon pousse ses troupes jusqu'à Orléans et par le traité d'Entrammes, il acquiert en échange de la paix le territoire d' Entre deux rivières, c'est-à-dire entre sarthe et mayenne. En 868, le traité de Compiègne lui concède le Cotentin, l'Avranchin ainsi que les îles Anglo-Normandes. La Bretagne atteint alors son extension géographique maximale. Mais le royaume de Bretagne est déstabilisé par la mort d'Alain le Grand, et la Bretagne perdit à nouveau son unité. En effet celui-ci n'eut pas de successeur et le comte de Cornouaille, Gourmaëlon, qui hérita de la couronne, mais ne parvint pas à imposer son autorité et le royaume s'émietta entre les divers comtes et Mac'htierns, plus ou moins rivaux les uns des autres. Les incursions des Vikings en 908, puis le traité de Saint-Clair-sur-Epte en 911 par lequel Charles le Simple concèdent la Bretagne aux Normands de la Loire (alors qu'il n'avait aucune souveraineté sur celle-ci) ce qui les encouragea et on assiste alors à une invasion générale : toute la Bretagne est submergée, ravagée, et une partie des habitants vendus ou expulsé.

Ainsi, La Bretagne perd ses dernières conquêtes sur le Cotentin, l'Avranchin et les îles Anglo-Normandes que Guillaume longue épée enleva aux bretons en 933, alors que le Maine et l'Anjou sont pris par les francs. Reconstituée par le duc Alain II de Bretagne et ses suivants, mais affaiblie, la Bretagne reprend globalement les limites du traité d'Angers. A partir des Montfort, les ducs tenteront dexercer de plus en plus des prérogatives royales et maintiendront des alliances avec le pouvoir central français par des mariages le plus souvent avec des princesses issues de la noblesse française.

Note et références

  1. Pierre Riché - Les Carolingiens, une famille qui fit l'Europe - p.218
  2. Annales de Saint-Bertin, in Histoire de la Bretagne, tome 1, Des Mégalithes aux Cathédrales, collectif, éditions Skol Vreizh

Sources


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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Bataille de Jengland de Wikipédia en français (auteurs)

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