- Vernon Sullivan
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Vernon Sullivan est un écrivain américain imaginaire. Le patronyme fut inventé par Boris Vian qui prétendait, dans les premières éditions, avoir traduit les romans de Vernon Sullivan, de l’américain.
Vian met au point ce pseudonyme à un moment où les thrillers américains connaissent un grand succès en France (Pas d'orchidées pour miss Blandish est un best-seller de la Série noire en 1946). L'invention de Vernon Sullivan intervient à un moment (été 1946) où Vian se sent très déçu d'avoir manqué le prix de la Pléiade et espère obtenir un réel profit de la publication d'un roman noir.
Cet écrivain imaginaire permit à Boris Vian de publier certains de ces romans, d'un style très différent de ceux publiés sous son nom, et qui furent très controversés. On estima que J’irai cracher sur vos tombes portait outrage aux bonnes mœurs et ce livre fut même attaqué en justice (la même année qu'Henry Miller et par le même "Cartel d'action sociale et morale" dirigé par Daniel Parker[1]).
Cette notoriété de scandale fut préjudiciable à la réception de l'œuvre de Boris Vian qui connut, de ce fait, une forme d'étouffement dans les années 1950-1960.
Les romans de Vernon Sullivan ont une trame apparemment policière, et sont prétextes à de nombreuses scènes sexuelles et violentes qui ont choqué. Même si l'on reconnaît l'espièglerie de Vian derrière cette écriture, l'aspect « polar américain » dépasse la simple parodie.
Les romans de Sullivan méritent d’être abordés aujourd'hui de façon moins passionnelle pour que, au moins en tant que pastiches de romans noirs américains, leurs qualités apparaissent. Il s’agit particulièrement de prendre en compte un aspect sur lequel on s’attarde rarement, à savoir les implications de la position de « traducteur » adoptée par Vian pour les Sullivan, en fait une position de « pseudo-traducteur » puisqu'il ne traduit pas les romans mais les écrit en français dans le but de faire croire à l’existence d'une œuvre originale initiale. Or, Vian devint par la suite, grâce à cette première fausse traduction qu’on trouva à l’époque très honorable – et pour cause – le véritable traducteur de romans noirs de Raymond Chandler, Peter Cheyney et James Cain notamment. Vian maîtrisait assez les thèmes et techniques du roman noir ainsi que la langue américaine pour parvenir à réaliser des pastiches non identifiables et des traductions de qualité[2]…
La création originale de cet écrivain imaginaire inspira Raymond Queneau qui, à son tour, put écrire plusieurs ouvrages sans se soucier de son propre nom, sous la plume de Sally Mara.
Ce pseudonyme, dans lequel on peut presque lire une anagramme de « Boris Vian », a été rattaché à celui de Paul Vernon, un ami de Vian, saxophoniste (et dentiste), de Vernon Story (autre saxophoniste américain) et de Joe Sullivan, un pianiste américain que Vian admirait [3].
Notes
- Gilbert Pestureau, Préface à J'irai cracher sur vos tombes, dans Boris Vian, Œuvres, tome premier, éd. établie sous l’autorité d’Ursula Vian Kübler, Fayard, 1999 [DL]
- Isabelle Fakra, « Vernon Sullivan ou les pseudo-traductions de Boris Vian », L'art d'aimer, Revue d'Essais Critiques
- Pour ces questions, voir les travaux de N. Arnaud, Les Vies parallèles de Boris Vian (1981), M. Rybalka, Boris Vian (1984) ; M. Lapprand, Boris Vian/La vie contre (1993) et G. Pestureau, Dictionnaire Vian (1984)
Œuvres
- J'irai cracher sur vos tombes 1946
- Les morts ont tous la même peau 1947
- Et on tuera tous les affreux 1948
- Elles se rendent pas compte 1950
Lien externe
Catégories :- Pseudonyme hétéronyme
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