Turc mécanique

Turc mécanique
Le Turc mécanique

Le Turc mécanique ou l'automate joueur d'échecs est un canular célèbre construit à la fin du XVIIIe siècle : il s’agissait d'un prétendu automate doté de la faculté de jouer aux échecs. Construit et dévoilé pour la première fois en 1770 par Johann Wolfgang von Kempelen, le mécanisme semble être en mesure de jouer contre un adversaire humain, ainsi que de résoudre le problème du cavalier, un puzzle qui exige de déplacer un cavalier afin d'occuper une fois seulement chaque case de l'échiquier. De 1770 jusqu'à sa destruction en 1854, il a été exposé par différents propriétaires en tant qu'automate, bien que le canular ait été expliqué, après bien des soupçons, au début des années 1820[1]. Extérieurement, il avait l’apparence d'un mannequin habillé d’une cape et d’un turban assis derrière un meuble d’érable. Le meuble possédait des portes pouvant s’ouvrir pour révéler une mécanique et des engrenages internes, qui, lors de l'activation de l'automate, s'animaient.

En réalité, le mécanisme n'était qu'une illusion permettant de masquer la profondeur réelle du meuble. Celui-ci possédait un autre compartiment secret dans lequel un vrai joueur pouvait se glisser, et manipuler le mannequin sans être vu de quiconque. L'automate était alors capable de jouer une vraie partie d'échecs contre un adversaire humain. Grâce au talent de ses joueurs cachés, le Turc mécanique remporta la plupart des parties d'échecs auxquelles il participa en Europe et en Amérique durant près de 84 ans, y compris contre certains hommes d'état tels que Napoléon Bonaparte,Catherine II de Russie et Benjamin Franklin.

Sommaire

Histoire

Origines

Kempelen a l'idée de construire son Turc mécanique après avoir assisté à un spectacle de magie de François Pelletier (en) à la cour de l'Impératrice d'Autriche Marie-Thérèse, au château de Schönbrunn. Après le spectacle, Kempelen promet à Pelletier de revenir au château avec une invention dépassant sa magie[2]

Il présente pour la première fois le Turc mécanique à la cour de Marie-Thérèse en 1770, et l'emmène avec lui pour une tournée à travers l'Europe qui dure plusieurs années. Pendant cette période, le Turc mécanique est exposé à Paris où il joue une partie contre Benjamin Franklin, et gagne. Par la suite, Kempelen considére que présenter son invention lui prend trop de temps, et la laisse au château autrichien pour se concentrer sur d'autres formes d'automates.

En 1789, Freiherr Joseph Friedrich zu Racknitz construit une réplique du Turc mécanique et écrit un livre où il propose un mode de fonctionnement qu'il estime probable. Toutefois, bien que ses explications soient en grande partie correctes, ses conclusions sont que le Turc mécanique ne peut être manipulé que par un enfant ou un nain, et les dimensions de son automate diffèrent de celles du Turc mécanique d'origine.

Célébrité

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Après la mort de Kempelen en 1804, son invention passa entre de nombreuses mains, pour finalement terminer dans celles de Johann Maelzel. Le secret de son fonctionnement demeurait toutefois bien gardé, et bien que de nombreuses personnes suspectassent le canular, il était difficile de le prouver, et il restait encore assez de mystère pour que le Turc mécanique continue ses tournées. En 1809, le Turc mécanique conduit par le maitre autrichien Johann Allgaier vainquit facilement Napoléon Bonaparte à Schönbrunn, durant la campagne de Wagram.

Maelzel fit jouer le Turc mécanique en France et en Angleterre, mais, face à une accumulation de dettes, s'enfuit d'Europe pour exposer le Turc mécanique aux États-Unis d'Amérique. En 1820, en Angleterre, Charles Babbage, un des précurseurs de l'informatique, joua une partie contre l'automate.

La tournée des États-Unis fut une réussite, et Maelzel décida d'emmener le Turc mécanique à Cuba en prévision d'une tournée sud-américaine. Toutefois, pendant leur séjour, son secrétaire et homme de confiance, William Schlumberger, mourut. De nombreux témoignages indiquent qu'il était l'homme à l'intérieur du Turc mécanique qui jouait réellement les parties ; il était un joueur d'échecs expérimenté. Sans que l'on sache si cela est vrai, après la mort de Schlumberger, l'équipe de Maelzel le déserta, et l'homme ruiné reprit la mer pour les États-Unis. À bord du navire, il prit l'habitude de boire seul dans sa cabine, et vers la fin du voyage, Maelzel fut retrouvé mort dans ses appartements, et son corps confié à l'océan.

Les dernières années

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Le Turc mécanique fut alors mis aux enchères, et son acquéreur le vendit au Docteur John Mitchell, un professeur de médecine et de chirurgie, qui avait fondé un club dans le but unique d'acheter le Turc. En échange d'une participation financière, il révèlerait le secret du Turc mécanique aux membres du club. Bien que Mitchell eût rencontré un succès modéré durant les premiers temps, il lui manquait les capacités d'homme de scène de Maelzel, et il finit par faire don de l'automate à un musée de Philadelphie. En 1854, 85 ans après sa construction, le Turc mécanique fut détruit dans le grand incendie qui ravagea la ville. Le fils de son dernier propriétaire, Silas Mitchell, publia un livre dans lequel il révélait la vérité sur le Turc mécanique et expliquait ses secrets.

Au moins quinze experts et maîtres d'échecs avaient fait fonctionner le Turc mécanique durant son existence. De nombreux livres et pamphlets furent publiés, mais aucun ne devina la vérité totale à son sujet avant sa destruction.

Edgar Allan Poe décrivit l'automate dans son essai Maelzel's Chess-Player (en), publié en 1836[3].

Le secret du Turc mécanique

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Le secret du Turc découlait de la nature pliable des compartiments intérieurs du meuble, et du fait que la « machinerie » à l'intérieur du meuble n'en remplissait pas la totalité, créant un double-fond. À l'intérieur du meuble se trouvait un second plateau d'échecs, dont l'opérateur se servait pour suivre le jeu. Le dessous du plateau principal où jouait le Turc lui-même possédait un ressort sous toutes les cases, et chaque pièce contenait un aimant. Ce système compliqué était destiné à indiquer à l'opérateur quelle pièce avait été jouée, et où elle avait été déplacée. Il pouvait alors jouer à son tour en utilisant un dispositif spécial pouvant être inséré dans des trous du plateau secondaire, indiquant ainsi au Turc mécanique quelles pièces déplacer.

Le Turc mécanique dans la culture

Les légendes

De nombreuses légendes liées au Turc mécanique subsistent encore aujourd'hui. Kempelen n'était pas un baron. Il n'était pas non plus connu sous le nom de Farkas, du moins pas avant que des nationalistes hongrois n'aient réécrit sa biographie après sa mort. Le Turc mécanique ne fut jamais contrôlé par un vétéran cul-de-jatte, et pouvait recevoir un homme de taille moyenne. Enfin, le Turc mécanique ne joua jamais contre Frédéric le Grand.

Références

  • Amazon Mechanical Turk (en) est un service en ligne proposé par Amazon, proposant à des travailleurs d'accomplir des tâches trop difficiles pour l'informatique.
  • Le film de Raymond Bernard, Le Joueur d'échecs, est construit à partir d'éléments de l'histoire du Turc mécanique.

Notes et références

  1. SCHAFFER, Simon (1999), "Enlightened Automata", dans le livre The Sciences in Enlightened Europe, CLARK et al. (Eds), The University of Chicago Press, p. 126-165.
  2. Ricky Jay, « The Automaton Chess Player, the Invisible Girl, and the Telephone, » Jay's Journal of Anomalies, vol. 4 no. 4, 2000.
  3. « Upon beating the game, he waves his head with an air of triumph, looks round complacently upon the spectators, and drawing his left arm farther back than usual, suffers his fingers alone to rest upon the cushion. »

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Bibliographie

Sur les autres projets Wikimedia :

  • Karl Friedrich Hindenburg, Ueber den Schachspieler des Herrn von Kempelen. Nebst einer Abbildung und Beschreibung seiner Sprechmaschine, Leipzig, 1784.
  • Gerald M. Levitt, The Turk, Chess Automaton, McFarland & Company, Incorporated Publishers, 2000. ISBN 0-7864-0778-6.
  • Robert Löhr, Le Secret de l'Automate, Éditions Robert Laffont, Paris, 2007.
  • Joseph Friedrich Freyherr zu Racknitz, Ueber den Schachspieler des Herrn von Kempelen und dessen Nachbildung. Mit sieben Kupfertafeln, Leipzig und Dresden, 1789.
  • Tom Standage, The Turk: The Life and Times of the Famous Eighteenth-Century Chess-Playing Machine, Berkley Publishing Group, 2003. ISBN 0-425-19039-0.
  • Tom Standage, The Mechanical Turk: The True Story of the Chess Playing Machine That Fooled the World, Penguin Books, 2003. ISBN 0-14-029919-X.
  • Robert Willis, An attempt to analyse the automation chess player of Mr. Kempelen, J. Booth, London, 1821.
  • Karl Gottlieb von Windisch, Briefe über den Schachspieler des Hrn. von Kempelen, nebst drey Kupferstichen die diese berühmte Maschine vorstellen, Basel, Schweiz, 1783.
  • Der Schachautomat des Baron von Kempelen, Mit einem Nachwort von Marion Faber, Harenberg Kommunikation, Dortmund, 1983. ISBN 3-88379-367-1.
  • (en) Maelzel's chess player d'Edgar Allan Poe (texte intégral)



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