- Roundup
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Roundup est une marque d'herbicides produits par la compagnie américaine Monsanto. La molécule active mentionnée sur le produit est le glyphosate. C'est un herbicide non-sélectif d'où le qualificatif d’« herbicide total », utilisé en épandage notamment. C'est un produit irritant et toxique, commercialisé depuis 1975. Son usage massif par les agriculteurs depuis la fin des années 1990 a conduit à l'apparition de mauvaises herbes résistantes au glyphosate[1].
Sommaire
Utilisation
Le Roundup est un herbicide systémique non sélectif. Il pénètre à travers les organes aériens de la plante, et migre de son point de pénétration jusqu’aux points de croissance (apex, méristèmes) à travers toute la plante (tige, feuilles, racines). Le glyphosate, son principe actif, bloque la synthèse des acides aminés aromatiques au niveau de tous les organes de réserve (feuille, rhizome, bulbe)[2]. Lors du traitement, le glyphosate est efficace même si la pulvérisation n’a atteint qu’une partie de la plante. Ce produit peut être utilisé associé à des cultures génétiquement modifiées (OGM) pour y résister, comme le soja « Roundup Ready ».
Sur des grandes surfaces de culture il peut être diffusé par épandage aérien. Il est aussi couramment utilisé comme désherbant domestique et urbain.
Toxicité
Les produits Roundup contiennent plusieurs substances : la substance active qui est le glyphosate, et des substances dites « inertes » telles que le POEA (polyethoxylated tallowamine), AMPA, ou l'isopropylamine ; ces substances peuvent varier suivant le produit commercial.
Une étude de l'université de Caen[3], publiée dans Chemical Research in Toxicology fin décembre 2008, met en évidence l'impact de diverses formulations et constituants de cet herbicide sur des lignées cellulaires humaines (cellules néonatales issues de sang de cordon, des cellules placentaires et de rein d'embryon). Les auteurs signalent diverses atteintes de ces cellules humaines (nécrose, asphyxie, dégradation de l'ADN...), induites soit par le glyphosate, soit par un produit de sa dégradation (AMPA), soit par un adjuvant (POEA) qui facilite son incorporation par les plantes cibles, soit par des formulations commerciales de l'herbicide[4],[5]. Cette étude a été critiquée par l'AFSSA notamment pour des raisons méthodologiques et pour l'interprétation des résultats fin mars 2009. L'agence estime que « les auteurs [de l'étude] sur-interprètent leurs résultats en matière de conséquences sanitaires potentielles pour l’homme, notamment fondées sur une extrapolation in vitro-in vivo non étayée[6] ».
Glyphosate
L'Agence américaine de protection de l’environnement (US Environmental Protection Agency, EPA) détaille les effets nocifs sur la santé que pourrait provoquer l’exposition à de fortes doses de cette substance : « Congestion des poumons, accélération du rythme de la respiration » à court terme, « endommagement des reins, effets sur la reproduction » à long terme[7].
Pollution
Le glyphosate et certains de ses métabolites secondaires (AMPA), se retrouvent dans les eaux de certaines régions françaises (55 % des nappes superficielles et 2,7 % des nappes souterraines)[8],[9].
Succès commercial
Les spécialités commerciales « Roundup » ont été popularisées et sont largement utilisées en agriculture car il est possible de semer ou de planter une zone désherbée sans délai. Il est utilisé en Colombie par le gouvernement, appuyé par les États-Unis, dans le plan Colombie, officiellement pour détruire les champs de coca, mais détruit en pratique beaucoup plus.
À partir de 1996, Monsanto a développé les cultures Roundup Ready dans lesquelles un gène a été introduit, qui leur permet de résister au Roundup, auquel elles doivent être associées. Beaucoup d'agriculteurs utilisent cette technique car elle est beaucoup plus simple pour le désherbage des cultures concernées: maïs, soja. L'attrait des paysans pour une culture présentée comme exigeant moins d'épandage de produits phytosanitaires, donc plus rentable s'est révélé, selon certaines personnes[10], catastrophique : problèmes sanitaires, érosion et asphyxie des sols, maladies humaines et animales, monoculture, dépendance vis-à-vis de Monsanto, etc.
Cependant, certains problèmes étaient déjà très présents avant l'introduction du soja RR : la surface était déjà de 6M d'hectares (contre 15 aujourd'hui), la répartition était déjà inégale, la monoculture intensive, les traitements sans précaution exposaient déjà les travailleurs et les riverains à des doses massives de produits phytopharmaceutiques. De plus la dépendance à Monsanto est relative : la plupart des producteurs argentins achètent des semences de contrebande et Monsanto récupère peu de royalties en Argentine, à tel point qu'ils avaient réduit leur investissement en 2004, quand le marché noir représentait 60 % des semences vendues en Argentine[11]. Par ailleurs, le glyphosate est libre de droit, de nombreuses préparations concurrentes au Round Up sont disponibles sur le marché[12].
Le prix du Roundup a augmenté ces dernières années, il devrait rapporter 1,7 à 1,8 milliard de dollars à Monsanto en 2008[13]. L'entreprise semble avoir des problèmes de capacité de production, et elle a aussi fait face à l'augmentation des cours du pétrole qui a globalement fait augmenter le coût des intrants, aussi bien des engrais que des produits de traitement.
Selon Le Canard enchaîné, l'autorisation de mise sur le marché français pourrait être entachée d'illégalité faute d'avoir mentionné le POEA, un autre composant essentiel, augmentant la pénétration du pesticide dans les cellules de la plante[14]. Monsanto déclare ne pas utiliser cet adjuvant, qui n'est pas clairement défini par Gilles-Éric Séralini[15] et rappelle au passage que seules les formulations commerciales sont homologuées. Le 18 novembre 2009, le Mouvement pour les droits et le respect des générations futures et un agriculteur bio « demandent au ministère de l'Agriculture le « retrait immédiat » de deux herbicides Roundup (Monsanto), dénonçant une différence entre les produits testés et les formules déclarées dans le cadre des autorisations de mise sur le marché[16] ». Le rapport de l'AFSSA (voir section toxicité) considère que l'effet du POEA n'est pas suffisant pour justifier un changement de législation (voir l'analogie avec le chlorure de benzalkonium qui provoque des effets comparable in vitro mais qui est largement utilisé comme désinfectant et conservateur de solution médicamenteuse depuis 1935).
Biodégradabilité, risque pour l'environnement et publicité mensongère
En janvier 2007, la société Monsanto fut condamnée par le tribunal correctionnel de Lyon pour publicité mensongère relativement au produit Roundup. Quelques années auparavant, la firme avait déjà fait l'objet d'une condamnation aux États-Unis pour le même motif[17]. Depuis, il n'est plus possible pour Monsanto d'indiquer que le Roundup est un produit sans risques pour l'environnement. Le terme biodégradable sur l'étiquette des produits est fortement limité par le jugement américain. La condamnation a été confirmée en appel le 29 octobre 2008 et Monsanto a été condamnée à verser une amende de 15 000 euros[18].
En effet, bien que biodégradable, l'État de New York a jugé que cette mention ne pouvait être utilisée sans preuve que ce processus soit effectué dans des délais raisonnables (« a reasonably short period of time »)[17].
Le fait est que si le glyphosate est effectivement rapidement dégradé[19] (des bactéries du genre Pseudomonas peuvent dégrader le glyphosate en glycine, en passant par un intermédiaire, la sarcosine CH3 - NH - CH2 -CO2-[20]) , ses produits de dégradation dont l'AMPA s'accumulent en cas d'usage excessif dans les nappes phréatiques.
Sélection de végétaux résistants
L’utilisation intensive du Roundup par les fermiers américains a mené à la sélection rapide d'une dizaine de nouvelles variétés de mauvaises herbes - Vergerette, grande herbe à poux - (Ambrosia trifida), amarante[21] (Amaranthus palmeri)- résistantes à cet herbicide[22], par sélection naturelle.
Notes et références
- (en) « Farmers Cope With Roundup-Resistant Weeds », The New York Times, 3 mai 2010.
- ACME
- (en) N. Benachour, H. Sipahutar, S. Moslemi, C. Gasnier, C. Travert et Gilles-Éric Séralini, « Time- and Dose-Dependent Effects of Roundup on Human Embryonic and Placental Cells », Archives of Environmental Contamination and Toxicology, vol. 53, p. 126–133, 2007.
- « Le désherbant le plus vendu au monde mis en accusation », LeMonde.Fr, 9 janvier 2009
- (en) Nora Benachour et Gilles-Éric Séralini, « Glyphosate formulations induce apoptosis and necrosis in human umbilical, embryonic, and placental cells », Chemical research in toxicology, vol. 22, p. 97–105, 2009.
- Afssa – saisine n°2008-SA-0034 - Glyphosate, 26 mars 2009. [PDF]
- Consumer Factsheet on: Glyphosate
- DDASS ou des SAGE. Voir les rapports d'analyse des
- [1]Le glyphosate seul oblige très rarement à opérer des traitements de l'eau, mais l'addition des concentrations de différents produits phytopharmaceutiques, notamment d'herbicides interdits et très rémanents, contraint à un traitement de l'eau dans certains cas (si la concentration cumulée est supérieure à 0,5 μg/l).
- « Les transnationales mettent le vivant en coupe réglée : Argentine, un cas d’école » de Pierre-Ludovic Viollat, dans Le Monde diplomatique d'avril 2006 Argentine, le soja de la faim, de Marie-Monique Robin, Guillaume Martin et Françoise Boulègue, ARTE GEIE/Galaxie Presse–France, 2005 ou l'article
- http://www.infogm.org/spip.php?breve225
- http://www.infogm.org/spip.php?article962 Le brevet est tombé dans le domaine public en 2000.
- Betapolitique - Inflation mondiale des produits agricoles : le prix du Roundup explose
- « La patate chaude de Barnier », dans Le Canard enchaîné, 24 juin 2009, p. 5.
- http://www.monsanto.fr/actualites/idees_recues/idees_recues27.asp
- « Deux herbicides Roundup mis à l'index par des agriculteurs », LePoint.fr, 18 novembre 2009.
- (en)« False Advertising by Monsanto Regarding the Safety of Roundup Herbicide (Glyphosate) »Attorney General of the State of New York. Consumer Frauds and Protection Bureau. Environmental Protection Bureau. 1996.
- (fr) Monsanto condamné en appel sur Enviro2B.com, le 10 octobre 2008.
- (en) Melvin L. Rueppel, Blanche B. Brightwell, Jacob Schaefer et John T. Marvel, « Metabolism and degradation of glyphosphate in soil and water », dans J. Agric. Food Chem, vol. 25, no 3, mai 1977, p. 517-528 [texte intégral (page consultée le 12 août 2009)]
- (en) Ganesh M. Kishore et Gary S. Jacob, « Degradation of glyphosate by Pseudomonas sp. PG2982 via a sarcosine intermediate », dans THE JOURNAL OF BIOLOGICAL CHEMISTRY, vol. 252, no 25, 5 septembre 1987, p. 12164-8 [texte intégral (page consultée le 12 août 2009)]
« From the Monsanto Company, Biological Sciences, AA31, St. Louis, Missouri 63198 »
- Mieux que les arracheurs volontaires : l’Amarante
- Farmers Cope With Roundup-Resistant WeedsNew York Times, 3 mai 2010
Voir aussi
Bibliographie
- Eau polluée au Danemark - Extrait de presse de 2003
- Charles M. Benbrook, Troubled times amid commercial success for roundup ready soybeans. Glyphosate efficacy is slipping and unstable transgene expression erodes plant defenses and yields, Northwest Science and Environmental Policy Center, Sandpoint (Idaho, USA), mai 2001.
- Caroline Cox, « Glyphosate (Roundup) », Global Pesticide Campaigner, vol. 9, p. 12–19, 1999. (ISSN 1055-548X)
- KemI 2000 « Sweden limits use of herbicides in home gardens » KemI Press Release June 22, Global Pesticide Campaigner vol. 11, April 2001
Articles connexes
- SmartStax
- Comité de recherche et d'information indépendantes sur le génie génétique
- Le Monde selon Monsanto, film documentaire réalisé par Marie-Monique Robin
Liens externes
- Site de Roundup (France)
- OGM : le glyphosate est toxique et le « Roundup » est encore plus mauvais sur le site du Institute of Science in Society
- Roundup et glyphosate : multiple toxicité mortelle
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