- Quentovic
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Quentovic est un ancien port de commerce du VIIe au IXe siècle. Il était situé à l'embouchure de la Canche, entre la Morinie et le Ponthieu, à l'emplacement du village de La Caloterie. C'était un des ports de mer principaux des Carolingiens. Comme Dorestad, Quentovic est une possession personnelle de Charlemagne.
Histoire
La ville est citée, la première fois par Eddius Stephanus dans sa Vita Wilfridi, et de Bède le Vénérable dans son histoire ecclésiastique au début du VIIe siècle. Celui-ci note que Théodore de Tarse, évêque désigné de Canterbury, passe en 669 par Quentovic. La présence d'un atelier monétaire atteste de son existence. Le commerce de la laine anglaise, de l'ambre de la Baltique et de l'étain de l'île de Wight semble confirmé. À l'époque, cette partie de la vallée de la Canche était totalement immergée à marée haute. Elle a enfin reçu une partie de la flotte romaine, la Classis Sambrica, fin IIIe début IVe siècle.
Le rôle spirituel de Quentovic s'appuie sur une fondation monastique, placée en aval sur la même rive à une lieue du port en mémoire de saint Josse le moine breton fondateur.
Quentovic était aussi une ville portuaire au commerce prospère, célèbre sous Dagobert II (652-679), et qui disposait d'un hôtel de monnaie et de bureaux de péage[1].
Elle devint le centre principal des échanges commerciaux entre les Îles britanniques et le monde carolingien. Ce port, appelé Vicus par les Carolingiens, faisait partie des nouveaux établissements commerciaux qui sont apparus par cette époque dans la zone de la mer du Nord et la Baltique, avec Ribe, Hedeby (actuelle Schleswig), Dorestad, Birka et Hamwic (actuelle Southampton). Sa fonction semble avoir été uniquement commerciale, administrative et financière.
À partir du VIIe siècle, Alcuin, abbé de Ferrières-en-Gâtinais et familier de Charlemagne, gère la fondation.
L'aire occupée par Quentovic serait supérieur de 35 Ha et proches de Dorestad et Southampton qui comptent 40 Ha et 45 Ha.
Quentovic est en relation foncière avec les monastères de Fontenelle Saint-Wandrille, Saint-Germain des Prés, Centula Saint-Riquier, Saint-Vaast d'Arras, Saint Bertin Saint-Omer, Villemeult, Combs-la-ville, Ferrières-en-Gâtinais.
Le paysage maritime ressemble à celui de la Frise ou de la Saxe. Ces peuples germaniques ont diffusé un type de navire à faible tirant d'eau, doté d'une quille rudimentaire mais à fond plat et arrondi de type houque, qui figurent sur les deniers frappés par Charlemagne et Louis le Pieux à Quentovic comme à Dorestad.
Dans ces deux villes, les droits de péage étaient considérables et que le « tonlieu teloneum », impôt sur le transport des marchandises d'origine romaine, s'élevait à 10 % ad valorem. Aussi, un très haut fonctionnaire qualifié de praefectus ou de dux résidait-il dans le port. La frappe des monnaies représentait, elle aussi, une source d'importants bénéfices pour le pouvoir.
Quentovic devient l'aboutissement normal de plusieurs routes de navigation côtière et le point de départ idéal de traversée de la Manche, véritable lieu géométrique d'un monde maritime commercial actif doté d'une langue commune, le nordsee-germanisch.
Ce vicus disposant d'un monopole monétaire et commercial, devient une zone de transit internationale, essentiellement entre la Gaule continentale et l'Angleterre.
Une telle prospérité explique la fréquence des invasions normandes qui ravagèrent le pays. On a aussi la preuve de la présence à Quentovic dans les toutes dernières années du IXe siècle et les premières du Xe siècle, des rois vikings, d'origine danoise de l'Est de l'Angleterre (Northumbrie) Knut et Siefred qui occupèrent bien le grand port vers 898, époque où se situe précisément le siège de Montreuil-sur-Mer par les mêmes rois précités.
Des objets de parure des Ve et VIe siècles d'origine anglo-saxonne et certaines types de céramiques en provenance du Jutland, des embouchures de l'Elbe, de la Weser ont été découvertes sur le site.
La puissance du port vient aussi de la volonté politique des rois francs qui contrôlent la Neustrie : ils donnent le saltus, domaine public, aux établissements ecclésiastiques, comme l'abbaye de Ferrières-en-Gâtinais. Des contacts se nouent dès 550 entre le Kent, l'East Anglia et la Neustrie. Quentovic devient l'une des grandes douanes de ces rivages et l'un des principaux ateliers monétaires des premiers Caroligiens. Son procurator ou prefectus est l'ambassadeur désigné des rois anglo-saxons.
Longtemps, les historiens de Quentovic ont pensé que son atelier monétaire avait disparu définitivement à la suite d'une destruction présumée du port par les Vikings. La découverte à Fécamp en 1963 d'un important trésor dont 8584 pièces ont pu être récupérées, infirme de façon indiscutable cette prétendue disparition et apporte la preuve irréfutable que Quentovic, avec des fortunes diverses continua d'exister dans les deux premiers tiers du Xe siècle et que son atelier monétaire fonctionna jusqu'à une date voisine de 980, date du rattachement de Montreuil-sur-Mer au domaine d'Hugues Capet, alors simple duc de France et qui devait, en 987, être élu roi et fonder la dynastie capétienne. Les villes de Montreuil-sur-mer et Quentovic ont cependant cohabité comme l'atteste l'existence à Montreuil de fours à poterie et d'un atelier monétaire.
Cette ville champignon, que Vicus célèbre, a disparu aussi rapidement qu'elle avait prospéré, et a vraisemblablement succombé aux nombreuses incursions pirates et normandes en 842, 840, (844?), 864, 881, 890, et 894. Boulogne-sur-Mer puis Montreuil-sur-Mer ont récupéré ensuite cette fonction de centre commercial. La disparition de ce port est probablement provoquées conjointement par ces raids normands mais aussi à cause de la fragilité de ses infrastructures en bois soumises aux aléas maritimes .
Localisation
En 2004, pour la première fois, des vestiges ont été localisés à La Calotterie, entre Montreuil-sur-Mer et Étaples-sur-Mer, au mont de Beck, Visemaretz.
Auparavant, on situait Quentovic soit à Montreuil-sur-Mer ou à Étaples-sur-Mer. L'implantation de départ serait donc très ancienne de par la très grande proximité d'un four gallo-romain. On émet ainsi l'hypothèse d'un port des Morins à l'origine.
Références
Catégories :- Site archéologique de France
- Histoire du Nord-Pas-de-Calais
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