- Postulat de Bertrand
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En mathématiques, le postulat de Bertrand, aussi appelé théorème de Tchebychev, affirme qu'entre un entier et son double existe toujours un nombre premier. Plus formellement, si n est un entier naturel supérieur ou égal à 2, alors il existe toujours au moins un nombre premier p tel que
- n < p < 2n
Bien que démontré, il a gardé son nom de postulat, c'est-à-dire une conjecture.
Sommaire
Historique
Cette affirmation fut pour la première fois conjecturée en 1845 par Joseph Bertrand qui la vérifia lui-même pour tous les nombres de l'intervalle . La conjecture fut complètement démontrée en 1850 par Pafnouti Tchebychev, qui utilisa dans sa démonstration la formule de Stirling.
Ramanujan donna une démonstration plus simple et Paul Erdős en 1932 publia une preuve très simple dans laquelle il utilisa les coefficients binomiaux et la fonction θ, définie par:
où p parcourt les nombres premiers inférieurs ou égaux à x.
Théorème de Sylvester
Le postulat de Bertrand fut avancé en vue d'applications au groupe des permutations. James Joseph Sylvester le généralisa avec la proposition suivante : le produit de k entiers consécutifs supérieurs à k est divisible par un nombre premier plus grand que k.
Une conjecture similaire, appelée conjecture de Legendre, mais non encore résolue affirme l'existence, pour tout entier naturel non nul n, d'un nombre premier p tel que n2 < p < (n + 1)2. Elle touche à l'hypothèse de Riemann.
Démonstration
Notons l'ensemble des nombres premiers et définissons :
Voici le plan de la démonstration :
- lemme de majoration de θ(x),
- vérification explicite de la propriété pour n ≤ 630,
- démonstration de la propriété pour n > 630 (en utilisant le lemme).
Lemme de majoration de θ(x)
Pour tout entier .
Démonstration du lemme, par récurrence
- La propriété est vraie pour n = 1 :
- Soit N>1. Supposons la majoration vraie pour tous les entiers positifs n<N et montrons-la pour n=N.
- Si N=2 :
- Si N > 2 et N est pair :
- (parce que N, étant pair et différent de 2, n'est pas premier, donc il y a autant de nombres premiers entre 1 et N qu'entre 1 et N-1).
-
- Si N est impair. Soit N = 2m+1 avec m > 0. Par la formule du binôme de Newton,
- Chaque nombre premier p tel que m+1 < p ≤ 2m+1 divise , ce qui nous donne :
- Par hypothèse de récurrence, , donc :
Vérification pour n ≤ 630
Si 2 ≤ n ≤ 630, on utilise le procédé de Landau :
considérons la suite de onze nombres premiers 2, 3, 5, 7, 13, 23, 43, 83, 163, 317 et 631, chacun étant strictement inférieur au double de son prédécesseur.
Il existe deux nombres consécutifs de cette liste, q et p, tels que
- , donc et
De plus, par construction de cette liste, , ce qui, joint à , donne . On a donc bien
Preuve pour n > 630
- Mise en place de la stratégie
Par la formule du binôme,
Puisque est le plus grand terme de la somme, on en déduit :
Appelons R(p,n) le plus grand nombre x tel que px divise . On a donc
avec
Pour minorer P4 (afin de montrer que P4 > 1), on va majorer . Il nous faut pour cela majorer les R(p,n).
- Calcul des R(p,n)
On désigne par la partie entière de X, et par sa partie fractionnaire.
Puisque (d'après un théorème de Legendre) n! possède facteurs égaux à p, nous obtenons :
- Majoration de P1
Puisque chaque terme vaut soit 0 (lorsque ) soit 1 (lorsque ) et que tous les termes avec sont nuls, on obtient :
donc , donc
- Majoration de P2
Pour , la somme dans R(p,n) est réduite à son premier terme, qui, comme déjà mentionné, vaut 0 ou 1. On a donc , d'où
la dernière inégalité venant du lemme.
- Majoration de P3
En fait, P3 = 1 (c'est le point clé de la preuve d'Erdös) car si alors
- .
- Synthèse
On aboutit à
On obtient un minorant plus commode en remarquant que 2n + 1 < (2n)2 et que (car n > 578), d'où l'inégalité
qui se réécrit
En prenant les logarithmes et en remplaçant 2n par 22t :
Or 2n > 1024 = 210 donc t > 5, d'où , si bien que ln(P4) > 0, ce qui achève la preuve.
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