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Phrénologie
La phrénologie prétendait que les bosses du crâne d'un être humain reflètent son caractère. En 1843, François Magendie qualifia la phrénologie de pseudoscience. Cette conception, bien ancrée dans son temps, est un exemple de méthode expérimentée biaisée dans le cadre de l'étude de l'histoire de la médecine.
Sommaire
La théorie
La phrénologie est la théorie du neurologue allemand Franz Joseph Gall (1757-1828) concernant la localisation des fonctions cérébrales dans le cerveau. Il l'énonça dans son ouvrage majeur, publié en 1820 à Paris : Anatomie et physiologie du système nerveux en général et du cerveau en particulier avec des observations sur la possibilité de reconnaître plusieurs dispositions intellectuelles et morales de l'homme et des animaux par la configuration de leur tête.
Cette théorie, restée dans la mémoire populaire avec l'expression « avoir la bosse des maths », localise les fonctions cérébrales dans des régions précises du cerveau. Or le développement du cerveau influe sur la forme du crâne. Une capacité particulièrement développée (gaieté, causalité, bienveillance, etc.) inscrirait donc sa trace sur la « carte » qui apparaît sur le crâne phrénologique de Gall.
Gall en eut l'intuition en observant les bosses que nous avons tous au niveau de la voûte crânienne. En fait, elles se forment au moment de la petite enfance, en fonction de la façon dont l'enfant est couché.
Il s'attacha à valider scientifiquement son hypothèse, en constituant notamment une collection de centaines de bustes en plâtre, moulés directement sur des sujets particuliers : microcéphales, « idiots », etc. Ses élèves et lui-même proposèrent des séries statistiques pour corréler les traits de caractère à la forme de la voûte crânienne. Ces études furent toutefois entachées de biais de sélection ou d'interprétation, que l'on peut attribuer à l'imperfection de la méthodologie de l'époque.
De la phrénologie à la théorie du criminel né
Dans cette époque où la systématique est reine, et dans le mouvement de la phrénologie, Cesare Lombroso (1835-1909) cherche à trouver une association statistique entre le faciès et les mœurs, en particulier lorsqu'elles sont douteuses. Dans L'Homme criminel (1876), il évoque les formes « primitives » censées caractériser le vagabondage et la criminalité.
Les théories de Gall comme de Lombroso furent rapidement abandonnées, mais les techniques de mesure du corps humain (anthropométrie) en matière de médecine légale se développèrent dans un but d'identification.
Une grande partie des collections de Gall est la propriété de la Société nationale de médecine de Lyon, et est exposée au Musée Testut Latarjet d'anatomie de Lyon.
Conclusion : l'héritage de la phrénologie
Paul Broca (1824-1880) reprit à son compte la théorie des localisations fonctionnelles, notamment en étudiant l'aphasie éponyme dans des contextes traumatiques.
Certes, la phrénologie est une erreur dans son ensemble, mais la contribution de Gall à la physiologie nerveuse a été de premier ordre. Cela illustre d'ailleurs la réalité de la science, qui tâtonne par hypothèses, lesquelles peuvent à tout moment être affirmées ou infirmées, selon le principe cher à Popper. Aujourd'hui, les techniques d'imagerie par résonance magnétique nucléaire (IRM fonctionnelle) ont confirmé son intuition géniale : le cerveau est constitué de zones fonctionnelles (centres de la parole, de la vue, etc.).
La phrénologie a eu de grandes répercussions sur les personnages du romantisme et particulièrement sur les longues descriptions balzaciennes où l'on retrouve les traits de caractère associé à leurs traits phrénologiques.
Il faut également retenir de la phrénologie qu'elle ouvrit la voie à la psychiatrie moderne, en ancrant l'esprit dans le corps.
Voir aussi
Articles connexes
Bibliographie
- (en) James P. Browne, Phrenology: and its application to education, insanity, and prison discipline, Londres, 1869
- (en) Orson Squire Fowler, Phrenology: a practical guide to your head, Chelsea House, New York, 1980 (ISBN 0877541434)
- (fr) François Joseph Victor Broussais, Cours de phrénologie, Baillière, Paris, 1836
- (fr) Hippolyte Bruyères, La phrénologie, le geste et la physionomie, Aubert, Paris, 1847, 516 p.
- (fr) Pierre-Marie-Jean Flourens, De la phrénologie et des études vraies sur le cerveau, Garnier, Paris, 1863, 304 p.
- (fr) L. Forichon (abbé), Le matérialisme et la phrénologie : combattus dans leurs fondements ; et l'intelligence étudiée dans son état normal et ses aberrations, Loss, Paris, 1840, 383 p.
- (fr) Franz Joseph Gall, Crâniologie, ou découvertes nouvelles concernant le cerveau, le crâne, et les organes (ouvrage traduit de l'allemand), Paris, 1807.
- (fr) Marc Renneville, Le langage des crânes, Le Plessis-Robinson, Les Empêcheurs de penser en rond, 2000, 354 p. (ISBN 284324143X)
- (fr) Loïc Rignol, « La phrénologie et le déchiffrement des races : savoir, pouvoir et progrès de l’Humanité », dans Sarga Moussa (dir.), L'idée de "race" dans les sciences humaines et la littérature (XVIIIe - XIXe siècles) : actes du colloque international de Lyon, (16-18 novembre 2000), L'Harmattan, 2003, p. 225-238 (ISBN 2-7475-4350-1)
- (fr) Johann Gaspar Spurzheim, Observations sur la phrænologie, ou, La connaissance de l'homme moral et intellectuel, fondée sur les fonctions du système nerveux, Treuttel et Würtz, Paris, Strasbourg, Londres, 1818, réédité L'Harmattan, 2005
- (fr) Victor Frédéric Alexandre Ysabeau, Lavater et Gall. Physiognomonie et phrénologie rendues intelligibles pour tout le monde. Exposé du sens moral, des traits de la physionomie humaine et de la signification des protobérances de la surface du crâne relativement aux facultés equalites de l'home. Ouvrage accompagné de 150 figures dans le texte, Garnier, Paris, 1862?
Liens externes
- Musée Testut Latarjet d'anatomie et d'histoire naturelle médicale (Lyon)
- Joseph Vimont: Traité de phrénologie humaine et comparée, Paris, 1832-1835 (extraits, US National Library of Medicine)
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