Ordination des femmes dans l'Église catholique romaine

Ordination des femmes dans l'Église catholique romaine

Ministères féminins dans le christianisme

Les Ministères féminins dans le christianisme relèvent de réalités très différentes selon les églises chrétiennes. La question des ministères ne recouvre en effet pas une situation uniforme et peut prendre des formes variées : il peut s'agir de confier à une femme un ministère d'église, ou la responsabilité d'une communauté de fidèles (ce qui est généralement admis), ou spécifiquement de mandater ou d'ordonner des femmes comme ministre de plein titre.

Seules les églises de structure épiscopaliennes, c'est-à-dire connaissant un mode de gouvernement hiérarchique connaissent une ordination. Celle-ci suppose un sacrement de l'ordre (l'ordination) dans toutes les confessions chrétiennes ce qui n'est pas le cas.

Si on peut faire un rapprochement entre la compréhension d'un tel sacrement entre les églises byzantines et l'Église catholique romaine, on peut s'interroger sur l'acception différente qu'en ont les églises issues de la Réforme comme les églises de la Communion anglicane ou les églises luthériennes[1]. Ces conceptions diverses de l'ordre inaugurant le ministère sont issues de l'ecclésiologie propre à chacune de ces églises et, dans une certaine mesure, conditionnent l'accueil qui est fait ou non aux femmes.

L'ordination de femmes, dans les confessions chrétiennes est souvent un sujet polémique, qui a été l'objet de revendications et a suscité des affirmations doctrinales.

L'Église anglicane et les églises de l'Union catholique internationale d'Utrecht (ou Église vieille-catholique) admettent l'ordination sacerdotale de femmes. En revanche, cette pratique est considérée comme invalide (sans effet) et illicite (car non apostolique) dans l'Église catholique et les Églises orthodoxes. L'ordination (dans le luthéranisme) ou le mandat (dans les autres églises réformées) de femmes comme pasteurs est une pratique de nos jours répandue dans diverses confessions protestantes, principalement européennes.

Sommaire

Positions théologiques

Église catholique romaine

Les fondements théologiques de l'exclusion des femmes du ministère religieux catholiques sont exposées dans la déclaration Inter Insigniores de la congrégation pour la doctrine de la foi en 1976[2].

Selon la doctrine catholique romaine, le prêtre est un sacrificateur qui agit in persona Christi : dans la personne du Christ, « tenant le rôle du Christ, au point d’être son image même »[3]. Or, toujours selon la théologie catholique, « l’incarnation du Verbe [(Jésus)] s’est faite selon le sexe masculin : c’est bien une question de fait, (...) indissociable de l’économie du salut. »[4]. Les tenants de l'ordination des femmes arguent qu'un prêtre ne représente pas le Christ, agissant en son nom et non à sa place, soulignant que le sacrement du baptême est accessible aux femmes, sacrement qui se rend également in persona Christi[5].

La doctrine de l'humanité du Christ est mise à l'épreuve au profit de la gender theory qui abolit la distinction entre les hommes et femmes à laquelle le Catholicisme est attaché, ("Homme et femme Il les créa", Génèse) car elle entraîne la complémentarité des sexes, rend l'homme et la femme dépendant l'un de l'autre et donc aide à ce qu'ils soient attachés l'un à l'autre, prélude de l'amour qui doit unir toutes les créatures.

Église orthodoxe

  • Pour l'Église orthodoxe la rêgle est la même que pour l'Église catholique romaine : fidèle à la pratique et à la tradition séculaire, le sacerdoce (des prêtres ou des évêques) n'est pas un droit ni un pouvoir : il s'agit d'un service conféré par l'Église, à la suite des apôtres. La revendication ne semble pas avoir été soulevée dans ce contexte.

Églises protestantes

Les églises issues de la Réforme ne sont pas unanimes sur le fait d'accorder aux femmes l'accès aux ministères pastoraux de plein exercice.

Dans la théologie protestante, selon la doctrine du sacerdoce universel rien n'interdit en principe aux femmes de se faire entendre, Luther affirmant : « nous sommes tous prêtres, autant de chrétiens que nous sommes », désacralisant le rôle du prêtre, le sacerdoce n'étant rien d'autre qu'un ministère, un service. Le débat se fait en particulier par rapport aux Épîtres de Paul, qui envisagent la femme dans sa place traditionnelle[6].

Luther affirmera également en 1521 : « L'ordre, la bienséance, l'honneur exigent que les femmes se taisent lorsque les hommes parlent ; mais lorsque aucun homme ne parle, il devient nécessaire que les femmes prêchent ». C'est ainsi pour faire face à la pénurie d'hommes, consécutive à la guerre que les femmes vont progressivement accéder à la fonction pastorale.

Dans les protestantismes européens

Les pasteurs occupent une fonction ministérielle, tout comme le conseil presbytéral ou les diacres. Ils ne se prévalent d'aucune spécificité sacerdotale ; le protestantisme revendique que tout baptisé soit prophète, prêtre et roi; ils peuvent être élus ou ordonnés indifféremment femme ou homme.

Leur fonction est d'abord celle d'un théologien, c'est à dire d'un expert ayant eu la chance d'étudier[7].

Protestantismes américains

Dans les protestantismes américains les positions sont plus partagées, y compris, parfois, dans une même dénomination.

  • Certaines confessions, par exemple dans les églises conservatrices, tel le Baptisme américain[8] ne permettent pas aux femmes l'accession à l'office de pasteur.
  • D'autres encore ne l'autorisent que si la femme pasteur reste sous l'autorité d'un pasteur de sexe masculin.
  • Quelques unes, dans des confessions qui, d'un point de vue fédéral, ouvrent tous les ministères aux femmes, sont revenues localement sur cette décision. C'est le cas des églises Luthériennes "synode du Missouri" en 1998 ; dans ces églises toutes les femmes exerçant une fonction d'autorité (y compris l'enseignement universitaire de la théologie) se sont trouvées licenciées. Cette décision fut une occasion de départ massif de fidèles vers des confessions plus ouvertes à cette question.
  • Toutes les autres pratiquent la même discipline qu'en Europe.

Église Vieille-Catholique

  • Dans l'Église vieille-catholique il y a des règlements différents : Les églises de l'Europe de l'Ouest ont des femmes-prêtres ; les autres ne consacrent pas des femmes, mais acceptent l'ordination des femmes dans les autres églises de l'union.

Églises anglicanes

  • Dans beaucoup des Églises anglicanes, il est possible pour des femmes d'être ordonnées prêtres et même évêque dans quinze Églises de cette confession - aux États-Unis, en Écosse, au Canada ou en Nouvelle-Zélande notamment[9]. Le Synode Général de York en juillet 2008 a décidé par vote d'étendre cette capacité à l'ensemble des communions anglicane[10]. Cette décision ne devrait toutefois pas être opérante avant 2014 en Angleterre[11]. Cependant, le débat demeure un sujet de vives controverses entre libéraux et conservateurs au sein de l'Église anglicane.

Ordinations et ministères féminins

Église catholique romaine

Diaconesses

La doctrine et la discipline catholique romaine ne conçoit pas d'ordination sacramentelle de femmes à quelques degrés que ce soit.

Le titre de diaconesse a existé par le passé au sein de l'Église : sainte Geneviève est appelée ainsi. Les diaconesses étaient des veuves et des vierges chargées de catéchèse, assistance, baptème, animation de prières, etc).[12]. Ce rôle n'était jamais sacerdotal et conférait un rôle strictement laïc aux femmes. Toutefois, le mensuel Golias[réf. nécessaire] indiquait dans le courant de l'année 2007 des textes et des trouvailles archéologiques montrant que cette interdictions n'avaient pas toujours été telle dans le Christianisme ancien.

Le concile de Vatican II a rétabli le diaconat comme un état permanent, les diacres étant spécifiquement chargés « d'administrer solennellement le baptême, de conserver et de distribuer l'eucharistie, d'assister au mariage au nom de l'Église et de le bénir, de porter le viatique aux mourants, de lire aux fidèles la Sainte Ecriture, d'instruire et d'exhorter le peuple, de présider le culte et la prière des fidèles, d'administrer les sacramentaux, de présider au rite des funérailles et de la sépulture. »[13] Ce rôle du diacre permanent est semblable à celui que tiennent les pasteurs protestants dans leur communauté[14]

En l'état actuel du droit canon, l'ordination de diaconesses est impossible dans l'Église romaine.

Abbesses

Pour le catholicisme, il n'y a pas d'obstacle de principe à confier à une femme la responsabilité pastorale d'une communauté, mais ce n'est pratiqué que dans un cas précis : celui d'une mère abbesse d'une communauté religieuse féminine.

Une mère abbesse est instituée à ce rôle par la bénédiction abbatiale (ce n'est pas une ordination, idem pour les abbés hommes) et a sur sa communauté une autorité ordinaire comparable à celle de l'évêque sur son diocèse.

Toutefois, les abbesses n'ont pas la faculté de célébrer pleinement l'Eucharistie, n'étant par ordonnée, elles ne font que diriger les prières.

Les catholiques partisans de l'ordination des femmes

Les partisans de l'ordination des femmes[réf. nécessaire] dans l'Église catholique évoquent le fait que Jésus ait apparu ressuscité la première fois à trois femmes, leur demandant d'annoncer la nouvelle de la résurrection aux apôtres. Il serait donc faux de croire que Jésus n'aurait choisi que des hommes pour la prédication.

Affaires d'ordinations illicites

Le 25 juillet 2005 sur le fleuve Saint-Laurent, deux femmes revendiquant la qualité d'évêque, membres de l'organisation américaine Women's Ordination Conference (« Conférence pour l'ordination des femmes »), elles-mêmes non reconnues par l'Église catholique, ont accompli le rituel d'ordination à la prêtrise et au diaconat sur deux Canadiennes et sept Américaines :

Passant des paroles aux actes, les évêques Gisela Forster et Marie-Christine Mayr-Lumetzberger ont ordonné quatre femmes prêtres et cinq femmes diacres à l'occasion d'une cérémonie calquée sur le modèle catholique romain dont elles se réclament. [15]

Ces ordinations ne sont pas valides, souligne Mgr Anthony Meagher (archevêque de Kingston - Ontario, Canada), car «les personnes qui proposent de conférer ces « ordinations » n'ont pas l'autorité de le faire et les personnes voulant être « ordonnées » ne sont pas éligibles». Le geste de ces femmes entraîne l'excommunication latae sententiae, c'est-à-dire que leur excommunication découle directement de leur consentement à l'ordination et que le Vatican n'a pas besoin de la prononcer pour qu'elle soit effective.

Protestantismes

On note une pasteur luthérienne dès 1873 en Allemagne[16], à la suite de la guerre de 1870. En France, les Églises luthérienne et réformée d'Alsace admettront les femmes plus tôt que celles de France[17] et, dès 1930, une femme fut consacrée dans l'Église réformée d'Alsace et de Lorraine[18]. Suite à la deuxième guerre mondiale, il y eut en Alsace quelques veuves de pasteur faisant fonction de pasteur après le décès de leur mari. La chose ne fut décidée, pour l'ERF, qu'au synode de 1961 ; Mademoiselle Élisabeth Schmidt, la première femme mandatée de plein droit en France, à la demande de sa paroisse, dût s'engager au célibat quoique ce principe fut résolument étranger à la Réforme[19].

Notes et références

  1. Les églises luthériennes ne connaissent que deux sacrements comme toutes les églises protestantes mais pratiquent cependant un rituel d'ordination tandis que les églises de la Communion anglicane se reconnaissent issues de la Réforme mais connaissent 7 sacrements
  2. Inter Insigniores : Déclaration de la sacrée Congrégation de la Doctrine de la Foi sur la question de l’admission des femmes au sacerdoce ministériel, texte sur le site womenpriests.org
  3. Inter Insigniores,§ 25, particulièrement note 16
  4. Inter Insigniores,§ 28, Site womenpriests.org
  5. Suzanne Tunc, Des femmes aussi suivaient Jésus. Essai d'interprétation de quelques versets des évangiles, Desclée de Brouwer, 1998, extrait sur womenpriests.org
  6. Le rôle des femmes protestantes au XXe siècle : Les femmes pasteurs de 1900 à 1960, in Musée virtuel du protestantisme français en ligne
  7. Pierre-Yves Ruff, prédication d'inauguration de ministère à l'Oratoire du Louvre, en 1997. Editions sonores de l'Oratoire du Louvre
  8. Au contraire du baptisme européen qui mandate des femmes depuis 2007
  9. Les futures femmes évêques anglaises sèment le trouble dans l'Église, in Top Chrétien d'après Belga, 09/07/2008
  10. L'Eglise anglicane approuve le principe de l'ordination des femmes évêques, in Le Monde d'après les agences AFP et AP, le 08/07/2008, article en ligne
  11. Top Chrétien, op. cit.
  12. Théo, Encyclopédie catholique, Fayard - Article « Diaconesse ».
  13. Constitution dogmatique sur l'Église Lumen gentium, n°29.
  14. « La doctrine catholique, exprimée dans la liturgie, le Magistère et la pratique constante de l'Église, reconnaît qu'il existe deux degrés de participation ministérielle au sacerdoce du Christ: l'épiscopat et le presbytériat. Le diaconat est destiné à les aider et à les servir. C'est pourquoi le terme sacerdos désigne, dans l'usage actuel, les évêques et les prêtres, mais non pas les diacres. Néanmoins, la doctrine catholique enseigne que les degrés de participation sacerdotale (épiscopat et presbytériat) et le degré de service (diaconat) sont tous les trois conférés par un acte sacramentel appelé "ordination", c'est à dire par le sacrement de l'Ordre. » in Catéchisme de l'Église Catholique, § 1554.
  15. Voir l'article complet du Devoir.
  16. Article de Vincens Hubac dans un dossier spécial de Evangile et Liberté
  17. à l'exception de Montbéliard où Geneviève Jonte est ordonnée dès 1937
  18. Berthe Bertsch
  19. On évoque souvent des raisons fort subjectives comme le fait qu'elles ne parleraient pas assez fort, qu'elles n'aurait pas assez d'autorité et ne pourraient dès lors ni présider un Conseil presbytéral ni coordonner des actions. (cf Le rôle des femmes protestantes au XXe siècle, op. cit.). par ailleurs André Gounelle, en octobre 1998 à l'occasion du premier colloque de Théolib, évoque l'appréhension de voir une femme pasteur enceinte officiant dans le cadre du culte dominical

Bibliographie

  • Janine Hourcade, La Femme dans l’Église. Étude anthropologique et théologique des ministères féminins, éd. Tequi, 1986
  • Claudette Marquet, Femme et homme il les créa…, éd. Les Bergers et les Mages, 1984
  • Suzanne Tunc, Brève histoire des femmes chrétiennes, éd. Cerf, 1989
  • Suzanne Tunc, Des femmes aussi suivaient Jésus. Essai d'interprétation de quelques versets des évangiles, éd. Desclée de Brouwer, 1998
  • John Wijngaards, L'ordination des femmes dans l'Église catholique, éd. Association Chrétiens autrement, 2005

Voir aussi

Liens internes

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