- Monique Canto-Sperber
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Monique Canto-Sperber, née le 14 mai 1954[1], est une philosophe française. Elle s'intéresse à la philosophie antique (Platon notamment), à l’histoire des idées morales et à la philosophie morale et politique contemporaines. Elle a publié de nombreux ouvrages traduits en plusieurs langues.
Depuis 2005, elle dirige l’École normale supérieure.
Sommaire
Biographie
Née en Algérie, Monique Canto-Sperber a vécu en France à partir de 1964. Elle a fait ses études au lycée Racine, au lycée Condorcet, puis à l'École normale supérieure de jeunes filles en 1974. Elle est agrégée de philosophie et docteur en philosophie. Elle a enseigné à l’université de Rouen, puis à l’université d’Amiens, avant d’entrer au CNRS comme directrice de recherche en 1993. Elle a été membre du Comité consultatif national d’éthique de 2001 à 2004, puis en est devenue vice-présidente jusqu’en 2007.
Elle a participé à l’émission Bibliothèque Médicis sur Public Sénat entre 2000 et 2008 et est productrice de Questions d’éthique sur la chaîne France Culture depuis 2006, chaque lundi de 21 h à 22 h.
Elle est officier de la Légion d’honneur[2],[3], officier de l’ordre du Mérite et chevalier des Arts et Lettres.
Ses travaux de philosophie grecque (consacrés à la théorie éthique et à la théorie de la connaissance) ont été accompagnés par plusieurs traductions commentées de Platon (Gorgias, Ion, Euthydème, Ménon) et ont fait l’objet de plusieurs ouvrages. Elle a participé au renouveau de la philosophie morale en France, avec la création en 1993 de la collection « Philosophie morale » (bientôt suivie de « Questions d’éthique », en 2000) aux Presses Universitaires de France. Elle a publié plusieurs ouvrages dans ce domaine. Elle a aussi travaillé sur l’éthique des relations internationales et consacré deux livres à cette question. Elle a contribué avec plusieurs ouvrages à l’étude historique et conceptuelle du libéralisme à gauche. La plupart de ses livres sont traduits dans plusieurs langues.
Direction de l’ENS
En 2005, Monique Canto-Sperber est nommée à la direction de l’École normale supérieure en proposant un projet pour l’École normale opposé à celui défendu par le directeur sortant, Gabriel Ruget, qui demandait son renouvellement. Elle succède à Gabriel Ruget en novembre 2005. Sa nomination provoqua la démission du président du Conseil d’administration et du président du Conseil scientifique, solidaires de l’ancien directeur.
À son arrivée, Monique Canto-Sperber déclara trouver une situation financière catastrophique, puisque les factures ne pouvaient plus être honorées. Monique Canto-Sperber a demandé une inspection des finances qui a recommandé plusieurs mesures de restriction des dépenses et d’augmentation des recettes. L’application de ces mesures et en particulier le projet d’instaurer des frais de bibliothèques (de l’ordre de 20 à 50 euros par an) pour les anciens élèves salariés qui disposent à vie d’un droit de consultation et d’emprunt provoqua cependant une très vive opposition.
Après quelques semaines de crise (novembre et décembre 2006), aggravée par la démission des directeurs des départements littéraires, le projet de frais d'entrée à la Bibliothèque fut retiré et un accord fut trouvé. Selon Monique Canto-Sperber, son action a permis de rétablir progressivement la situation financière de l’ENS, développer la recherche en lettres, introduire des conseils scientifiques dans les départements littéraires, créer un Conseil d’Orientation Stratégique international de l’établissement, renforcer la valeur du diplôme de l’École normale supérieure préparé aussi par des étudiants admis sur dossier, encourager la pratique d’inscription des étudiants à l’instar des autres écoles normales supérieures, et amorcer une politique de remise à niveau progressive et de réhabilitation des surfaces de recherche[4]. Selon Monique Canto-Sperber, l’École normale supérieure, qui se définit aujourd’hui comme une grande école de recherche universitaire, s’est développée, et son rayonnement s’est accru de 2005 à 2009[5]. Elle est devenue un établissement autonome pour sa gestion en 2010. Elle est membre fondateur du groupement Paris Sciences et Lettres - Quartier latin, qui regroupe aussi le Collège de France, l’Observatoire, l’ESPCI et l’École de chimie. Dans ce groupement, l’ENS sera candidate aux appels d’offre lancés dans le cadre du grand emprunt.
Elle est reconduite en novembre 2010 pour un second mandat[6].
Comme directrice de l'École normale supérieure, Monique Canto-Sperber annule, le 18 janvier 2011, un débat sur le Proche-Orient qui devait réunir, à l'initiative du collectif Palestine ENS, plusieurs personnalités politiques et intellectuelles, dont Leïla Shahid, le résistant Stéphane Hessel, le journaliste israélien Michel Warschawski et le professeur de littérature Nurit Peled, ou encore la député socialiste Elisabeth Guigou. Le secrétaire général adjoint du Syndicat de la magistrature Benoit Hurel devait également participer à cette conférence. S'ensuit une vive polémique ravivée un mois plus tard par un refus de réservation de salle de l'ENS pour la tenue d'un débat sur la question israélo-palestinienne, décision de refus annulée en référé par le tribunal administratif de Paris le 26 février 2011[7]. L'École normale supérieure fait appel, le 2 mars 2011, auprès du Conseil d'État qui, par une ordonnance du 7 mars 2011, infirme l'ordonnance du tribunal administratif et rejette la demande de suspension[8].
Dans le même temps, un mouvement social se déroule à l'ENS : une dizaine d'employés de la cantine, employés en CDD, se mettent en grève au mois de janvier pour obtenir des titularisations dans la Fonction Publique et une amélioration de leurs conditions de travail. Le 22 mars 2011, les salons de la Direction sont occupés pour protester contre le refus de Monique Canto-Sperber d'accepter un protocole d'accord proposé par le Secrétaire d'État à la Fonction publique, Georges Tron, qui conduirait à la titularisation de tous les grévistes[9] ; ils sont évacués par la police le 19 avril 2011[10]. Monique Canto-Sperber fait alors l'objet de vives critiques pour sa gestion du conflit[11], qui voit la victoire des protestataires le 26 mai 2011 après que tous les employés grévistes ont obtenu un CDI[12]. Le 12 juillet 2011 pendant les vacances scolaires, Monique Canto-Sperber prononce contre six élèves-fonctionnaires de l'ENS, après avis du conseil de discipline, des sanctions, 8 avertissements et 1 blâme et les confirme plus tard (le 6 octobre 2011[13]). Une manifestation de 100 personnes a protesté le jour même contre ce qui est alors considéré comme « une volonté de la direction de réprimer le mouvement social et syndical »[14].
Travaux
Éthiques
Dans son ouvrage Éthiques grecques, Monique Canto-Sperber défend l'idée que la vision contemporaine de la philosophie morale grecque est un artefact qui ne correspond pas à la réalité des éthiques de cette époque. Les éthiques grecques, aujourd'hui remobilisées par des courants critiques de la modernité (comme le « néo-aristotélisme »), ne sont pas, contrairement à l'image commune, plus ou moins toutes des formes d'eudémonisme. Il existe au sein de la pensée morale grecque des positions extrêmement diverses, mais dont certaines seulement sont l'objet de reprises dans les débats contemporains. L'image vulgaire de l'éthique grecque qui en fait un « mixte à tonalité aristotélicienne » est une création de l'époque moderne, création qui vise à aller chercher chez les anciens des solutions aux défaillances que certains constatent dans la modernité. La perception courante de l'éthique grecque n'est donc pas simplement tronquée, elle est biaisée.
Contre les préjugés concernant la morale antique, Éthiques grecques cherche à montrer la diversité des formes de philosophie morale grecques et à mettre en avant certaines pensées généralement occultées. Au travers une série d'essais, l'ouvrage veut présenter une vision plus fidèle des éthiques grecques, tout s'arrêtant sur certaines philosophies morales méconnues (ou peu l'objet de reprises) comme celle de Platon.
Philosophie politique
Monique Canto-Sperber développe une analyse du libéralisme visant à lui redonner une légitimité dans le cadre de la pensée politique socialiste[15].
Publications
- Les paradoxes de la connaissance. Essais sur le Ménon de Platon, 1991
- La philosophie morale britannique, 1994
- Direction du Dictionnaire d’éthique et de philosophie morale, Presses universitaires de France, Paris, 1996 (ISBN 2-13-047729-1) ; 4e édition, coll. Quadrige/Dicos poche, 2004 (ISBN 2-13-053828-2) [présentation en ligne]
- (dir.) Philosophie grecque, en collaboration avec J. Barnes, L. Brisson, J. Brunschwig, et G. Vlastos, Paris, Presses universitaires de France, coll. Premier cycle, 1997.
- Éthiques grecques, Presses universitaires de France, coll. Quadrige/Essai, Paris, 2001 (ISBN 2-13-050646-1) [présentation en ligne]
- L’Inquiétude morale et la Vie humaine, Presses universitaires de France, Paris, 2001 (ISBN 2-13-051641-6) ; 2e édition, 2002, (ISBN 2-13-052390-0) [présentation en ligne]
- Le Socialisme libéral. Une anthologie (Europe - États-Unis), Éditions Esprit, Paris, 2003 (ISBN 2-909210-29-4) [présentation en ligne] (payant)
- Les Règles de la liberté, Plon, Paris, 2003 (ISBN 2-259-19839-2) [présentation en ligne]
- Le Bien, la Guerre et la Terreur. Pour une morale internationale, Plon, Paris, 2005 (ISBN 2-259-20005-2) [présentation en ligne]
- Faut-il sauver le libéralisme ?, avec Nicolas Tenzer, Grasset, Paris, 2006, (ISBN 2-246-69171-0)
- Le Libéralisme et la gauche, 2008
Notes et références
- Monique Canto-Sperber par elle-même, sur le site des PUF.
- « Légion d'honneur : Bolloré, Varda, la mode et l'édition pour la promotion de Pâques », AFP, 11 avril 2009.
- Décret de promotion
- ENS, Projet stratégique global, Lettre d’intention 2010-2013.
- Monique Canto-Sperber, « L’École normale supérieure et son avenir », communication présentée le lundi 15 juin 2009 devant l’Académie des sciences morales et politiques.
- « Décret du 23 novembre 2010 portant nomination de la directrice de l'École normale supérieure (enseignements supérieurs) - Mme Canto-Sperber (Monique) », Journal officiel de la République française, no 0273, 25 novembre 2010, p. 21030, texte no 32.
- « Débat sur Israël : l'ENS condamnée pour entrave à la liberté d'expression », Le Monde, 1er mars 2011 ; texte de l'ordonnance du TA de Paris
- CE, ord. réf., 7 mars 2011, no 347171
- « Les non-titulaires de l'ENS durcissent le ton », L'Humanité, 24 mars 2011.
- « Les occupants de Normale-Sup évacués », Le Monde, 19 avril 2011.
- « Lutte contre la précarité à l'ENS : rassemblement contre la répression vendredi 6 avril 11 h 14 », site de la tendance CLAIRE du NPA, brève du 7 avril 2011.
- « Sortie de conflit à l'ENS : une immense victoire pour les salariés », L'Humanité.fr, 27 mai 2011.
- Communiqué de la CGT du 27 octobre 2011
- « ENS/précaires: 6 élèves sanctionnés », dans [Le Figaro], 12 juillet 2011 [texte intégral (page consultée le 13/07/2011)]
- Monique Canto-Sperber, Nadia Urbinati, Le socialisme libéral : une anthologie : Europe-États-Unis, Esprit, 2003
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- Le site de Monique Canto-Sperber
- Questions d'éthique sur le site de France Culture
- Sur la polémique de l'automne 2006 : La République des Lettres, Article « Monique Canto-Sperber doit partir », Le Monde, 20 janvier 2007
- Sur la polémique de janvier 2011 suite à l'annulation d'un débat à l'ENS sur le Proche-Orient avec Stéphane Hessel [1]
- Sur la décision du Tribunal Administratif de Paris du 26 février 2011 [2]
Précédé par Monique Canto-Sperber Suivi par Gabriel Ruget 28e directrice de l'École normale supérieure depuis 2005 - Catégories :- Historien de la philosophie ancienne
- Philosophe français du XXe siècle
- Philosophe français du XXIe siècle
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