Marie-céleste

Marie-céleste

Mary Celeste

La Marie-Céleste, peinture d’un peintre inconnu (peut-être Honoré Pellegrin)

L’énigme de la Mary Celeste, un brick-goélette immatriculé à New York,[1] est une des plus fameuses du monde maritime.

Ayant commencé sa carrière sous le nom d’Amazon[2],[3] il fut retrouvé naviguant sous voilure réduite dans l’océan Atlantique, sans personne à bord le 4 décembre 1872 (en réalité le 5, le capitaine Morehouse n’ayant pas tenu compte des fuseaux horaires, qui n'étaient pas encore inventés).

L’équipage du bateau qui le retrouva, le Dei Gratia, commandé par le capitaine Morehouse, n’aurait trouvé aucune indication sur le livre de bord concernant les jours qui précédaient. Les dernières lignes situaient le navire à une centaine de miles des Açores (185,2 kilomètres) et étaient datées du 24 novembre. Toutefois, l’ardoise du navire indiquait qu’ils avaient atteint l’île de Santa Maria, le 25. Par contre, les instruments de navigation (loch, sextant, instructions maritimes, ...) manquaient à bord et une certaine quantité d’eau avait été embarquée dans les fonds. Des réserves de nourriture pour six mois étaient à bord. Seuls manquaient les deux canots mais un avait été détruit à New-York pendant le chargement de la cargaison et faute de temps n’avait pas été remplacé.

La disparition du capitaine Briggs, de sa femme, de sa fille et des sept hommes de l’équipage, le sort de la cargaison de 1 701 fûts d’alcool dénaturé et l’incompréhension de ce qui s’est réellement passé ont généré de la part des médias de l’époque un grand nombre d’hypothèses. On parla de mutinerie, d’attaque du navire pour récupérer sa cargaison, de rivalité amoureuse, de monstres marins, etc.

De plus, l’imaginaire des marins a excessivement brodé sur cette histoire de vaisseau fantôme, avec force détails inventés, du chat noir qui était seul à bord à la soupe fumante que l’équipage aurait retrouvée, comme si le navire avait été abandonné subitement (hypothèse d’une nouvelle de Conan Doyle), sans compter un harmonium qui jouait seul, etc.

En fait, tout laissait penser à un abandon trop hâtif par son équipage (canot et instruments de navigation manquants) d’un navire apparemment en difficulté, comme toutes les histoires de naufrage en regorgent.

C’est vraisemblablement la projection de ces nombreuses terreurs du monde maritime que la tradition orale des matelots a enjolivée, augmentée et modifiée au fur et à mesure des différentes escales (et des beuveries) des uns et des autres. Moby Dick, le Hollandais volant, les pirates et flibustiers au grand cœur en sont autant d’autres...

Le 26 mars 1873 le capitaine Morehouse reçut la somme de 1700 livres du tribunal maritime, soit 5% du prix du navire (36 000 £).

Sommaire

Les faits étrangers à l’histoire

Différents récits ont largement contribué à brouiller les pistes de ce drame. Certains faits relatés dans des articles de journaux, nouvelles ou romans (voire canulars) ont été repris sans discernement et se sont mêlés intimement à la réalité historique.[4]

Les faits erronés

  1. Il n’y avait aucun repas chaud sur la table de la cuisine
  2. Le piano de Mme Briggs (la femme du capitaine) n’a jamais été a bord
  3. Briggs étant protestant pratiquant, il ne tolérait aucun alcool à bord (l’alcool de la cargaison n’était pas buvable). Il lui aurait donc été dans l’impossibilité de se saoûler, de même que son équipage
  4. Briggs et Morehouse n’ont jamais été amarré à quai en même temps. Il n’y a aucune preuve qu’ils se connaissaient.
  5. Aucun survivant n’a jamais été retrouvé, John Pemberton étant une invention littéraire et Abel Fosdyk un canular

Hypothèses

  1. Un poulpe aurait attaqué le navire et enlevé l’équipage.
  2. Un tremblement de terre sous-marin aurait effrayé l’équipage.
  3. Une île serait apparue et aurait disparu aussi vite alors que l’équipage serait descendu du navire pour marcher sur elle.
  4. Une tempête aurait effrayé l’équipage et une vague gigantesque l’aurait emporté du pont.
  5. Un concours de nage entre le capitaine et son second aurait eu lieu et le reste de l’équipage aurait regardé la course sur une plate-forme qui aurait cédé, précipitant ses occupants à la mer.
  6. Le cuisinier serait devenu fou et aurait empoisonné tout le monde avant de se suicider.
  7. Mme Briggs aurait été tuée par son piano, mal arrimé (après une tentative du second, exaspéré, de le jeter à la mer). Cela aurait plongé le capitaine dans la dépression et celui-ci se serait mis à boire pendant plusieurs jours. Le second aurait fini par lui confisquer son alcool, et ce serait l’équipage qui l’aurait bu en deux jours. Revenu à lui, le capitaine aurait fait savoir qu’il avait condamné le piano à mort. Le piano aurait été jeté à la mer mais n’aurait pas coulé et aurait été récupéré par un autre navire. Puis le capitaine serait disparu, tombé à la mer ou peut-être poussé. Pour éviter une enquête sous une accusation de mutinerie, les hommes auraient quitté le navire avec la complicité du Dei Gratia.[5]
  8. Les hommes, prêtés par le "Dei Gratias " avant le départ des deux navires, qui aurait accosté au même port, auraient supprimé le capitaine. Pour ne pas être accusés de mutinerie, ils auraient attendu le "Dei Gratias" avec le reste de l'équipage. Puis, les hommes du "Dei Gratias" auraient emmené les hommes de la "Mary-Celeste" et fait semblant de découvrir le bateau afin de toucher la récompense de son armateur (c'est ce que raconta E.W.Head -le cuisinier- à un journaliste menant l'enquête).
  9. Un des fûts d’alcool, imbuvable, du méthanol précisément, pas assez étanche, aurait commencé à exhaler des vapeurs à l’approche des Açores, puis aurait explosé du fait des propriétés chimiques du méthanol, ignorées par les hommes de science de l’époque (température propice à la combustion de 13°C), suite aux infimes étincelles causées par les cerclages en fer, sans toutefois causer de dégâts conséquents. Seule la porte menant dans la cale se serait littéralement envolée par le souffle de l’explosion, créant la panique à bord. L’équipage se serait réfugié sur une chaloupe. Bien que rattachée au bateau par la drisse, celle-ci céda puisque l’équipage aurait laissé hissées les voiles. (C’est cette hypothèse qui est retenue par la plupart des chercheurs)

Équipage

Nom Statut Nationalité Age
Benjamin S. Briggs Capitaine Américain 38
Albert C. Richardson 1er matelot Américain 28
Andrew Gilling 2ème matelot Danois 25
Edward W. Head Steward & Cuisinier Américain 23
Volkert Lorenson Marin Allemand 29
Arian Martens Marin Allemand 35
Boy Lorenson Marin Allemand 23
Gottlieb Gondeschall Marin Allemand 23

Passagers

Nom Statut Nationalité Age
Sarah Elizabeth Briggs Femme du Capitaine Américaine 30
Sophia Matilda Briggs Fille du Capitaine Américaine 2

Galerie photo

Voir aussi

Références

  1. Ce nom est souvent orthographié Marie-Céleste, l’invention littéraire de Conan Doyle s’étant superposée à la réalité.
  2. Malgré les écrits de Laurence J. Keating auteur d’un roman considéré par erreur en France comme une enquête documentaire, il n’existe aucune trace des noms supposés de Mary Sellar et John B. Matthews qui lui aurait été donnés temporairement.
  3. "Amazon-1867" Maritime Museum of the Atlantic On the Rocks Shipwreck Database
  4. Liste des écrits les plus significatifs s’étant mêlés à la réalité historique :
    1. (en) J. Habakuk Jephson’s Statement, par Conan Doyle
    2. (en) Abel Fosdyk, Strand Magazine
    3. Le voilier "Mary Celeste" - Révélations définitives sur le plus grand mystère de l’Atlantique, par Laurence J. Keating, Payot, 1929.
  • Malgré toutes ses invraisemblances (hommes prêtés par le Dei Gratia au départ de New York, Briggs se soûlant alors qu’il interdisait l’alcool à bord, cuisinier inventé par Laurence J. Keating, le sort de la petite Sophia-Matilda inexpliqué, ce récit a été retenu comme le plus vraisemblable par les historiens Alain Decaux et André Castellot, associés à Stellio Lorenzi au cours d’une émission télévisée de 1956 consacrée à la Mary Celeste. Quelques années plus tard, avec de nouveaux éléments en sa possession, Alain Decaux revint sur cette idée.

Bibliographie

  1. Les Grands Mystères du passé, Alain Decaux, Éditions de Trevise, Paris, 1964
  2. The Story of the "Mary Celeste" de Charles Edey Fay
  3. Histoire de la piraterie, de Robert de La Croix, publié par Ancre de Marine Éditions, 1995, ISBN 2905970995, 9782905970992, 388 pages
  4. Les drames de la mer, de Jean Merrien, publié par Ancre de Marine Éditions, 1995, ISBN 2905970782, 9782905970787, 269 pages
  5. Les derniers grands voiliers : histoire des long-courriers nantais de 1893 à 1931, de Louis Lacroix, publié par Éditions maritimes et d’outre-mer, 1967, 507 pages

Liens

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