La méthode scientifique en philosophie et notre connaissance du monde

La méthode scientifique en philosophie et notre connaissance du monde

La Méthode scientifique en philosophie

La Méthode scientifique en philosophie (Our Knowledge of the External World as a Field for Scientific Method in Philosophy) est un livre de Bertrand Russell de 1914. La traduction française a été sous-titrée Notre connaissance du monde extérieur.

Bertrand Russell est sans doute lun des derniers à prôner le passage de la philosophie au statut de science. Son ambition principale fut de délester la philosophie de tous ses fardeaux moraux et métaphysiques pour ne laisser subsister que laspect formel. Bien quen un sens plus modestement que ses prédécesseurs (Descartes, Spinoza, Kant, etc.), cette conception tend à assimiler philosophie et logique, la logique étant sa compétence première.

Sommaire

Première conférence : La philosophie officielle

Depuis longtemps "la philosophie a eu le plus d'ambition et atteint le moins de résultats [...] Je crois le moment venu de mettre fin à cet état de chose déplorable." Russell tente de montrer en quoi les prétentions des philosophes sont excessives et pourquoi leurs travaux n'ont pas eu plus de succès. "Les méthodes et problèmes philosophiques furent, je crois, mal conçus par toutes les écoles."

Russell distingue trois types de philosophie :

  1. La philosophie classique : (Kant, Hegel)
  2. La philosophie évolutionniste de Herbert Spencer en tant que représentant philosophique de Darwin, Bergson, William James.
  3. L'atomisme logique, considéré comme une révolution à l'égal de celle de Galilée.

"La substitution de résultats partiels et de détails, mais vérifiables, à de vastes généralités sans fondement, se recommandant uniquement d'un certain appel à l'imagination."

Critique de la tradition classique

Il s'agit à l'origine de cette croyance naïve des philosophes grecs à la toute-puissance du raisonnement. Il faut en chercher la cause dans la découverte de la géométrie. Ils croyaient que seule la pensée suffisait à établir la vérité même si les résultats sont bizarres (on pense ici à leur [Qui ?] conception de la réalité sensible comme pure illusion [réfnécessaire] ). On aboutit à "la croyance que la réalité différait complètement de ce qu'elle semblait être à l'observation immédiate". Cette croyance est le trait distinctif de la tradition classique, et ce sera le principal obstacle à une attitude scientifique en philosophie.

Par des arguments ardus et abstraits, les philosophes classiques tentent de montrer des choses contraires à ce que nous observons. Aujourd'hui de tels arguments ne portent plus. Avant, ils jouaient sur la confusion qu'opère l'argument. Aujourd'hui, nous qui avons une longue tradition des erreurs a priori réfutées par des méthodes expérimentales et d'observation, nous nous méfions d'emblée des arguments qui semblent contredire les faits les plus évidents. C'est une attitude proprement empirique.

"Et, c'est cela même, plus que tout autre argument défini, qui a diminué l'emprise de la tradition classique sur les étudiants de philosophie, et plus généralement sur les gens éclairés." Le rôle de la logique en philosophie n'est pas ce qu'en fait la tradition classique. En effet, pour la tradition classique, le monde est construit par logique sans appel à l'expérience. La logique moderne n'est plus constructive mais analytique ; elle s'attache à montrer la possibilité d'alternatives insoupçonnées : "Ainsi, tandis qu'elle offre à l'imagination ce que le monde peut être, elle se refuse de légiférer sur ce que le monde est." C'est donc une révolution, un rejet total des grandes constructions métaphysiques. La tradition classique des grandes constructions métaphysiques baignait dans un Moyen Âge torturé par les fléaux, la guerre, les maladies. Une certaine envie d'ordre, de sécurité se reflètait dans leurs systèmes. Ce n'est que pauvreté de l'imagination.

Critique de l'évolutionnisme

En conséquence, on assiste à un rejet, dans le domaine des idées philosophiques, de lidée dunité. (Nietzsche, Bergson...) Lévolutionnisme devient une nouvelle école philosophique. Elle correspond à la jeunesse ardente de la pensée philosophique. La science a cassé les frontières entre le règne animal et humain, entre la Terre et les planètes... « Mais si lamour-propre de lhomme fut un instant troublé par sa parenté avec le singe, il trouva aussitôt un moyen de saffirmer à nouveau et ce moyen fut laphilosophiede lévolution. Une lignée allant de lamibe à lhomme apparaissait aux yeux des philosophes comme un progrès évidenton ignore dailleurs lavis de lamibe. » Il sagit ici dun détournement de la science par la philosophie, dun détournement des travaux de Darwin par Spencer. Ceci correspond à un retour au finalisme (Hegel, Bergson...).

Lévolutionnisme veut répondre au problème de la destinée humaine. « Ces préoccupations morales et eudémonismes lemportent en intérêt sur lintérêt de la connaissance elle-même [...] mais si la philosophie doit devenir scientifique [...] il est nécessaire dabord et avant tout que les philosophes acquièrent la curiosité intellectuelle désintéressée qui caractérise le savant. » Reconnaître dabord que la connaissance de lavenir nest possible que dans un avenir proche. « La philosophie nest pas un chemin raccourci pour atteindre aux mêmes résultats que ceux que lon poursuit dans dautres sciences. » Le domaine de la philosophie doit lui être exclusif, un domaine les autres sciences ne peuvent pas intervenir.

Or les philosophes ne peuvent répondre à des questions empiriquement vérifiables : trop souvent ils connaissent des échecs. « Nous devons donc renoncer à lespoir que la philosophie puisse promettre satisfaction à nos désirs pratiques. Ce quelle peut lorsquelle en est complètement purifiée, cest nous aider à comprendre les aspects généraux du monde et lanalyse logique des choses familières mais complexes. En exécutant ce plan, en suggérant de fécondes hypothèses, elle peut être immédiatement utile aux sciences. »

Russell offre une critique serrée de lintuitionnisme de Bergson. La philosophie nest paspratique’. Russell rejette la philosophie morale comme une erreur. Il lui compare à cet effet lévolution de lastronomie : lastrologie, en se débarrassant de notions morales est devenue astronomie. La philosophie na malheureusement pas encore fait ce choix. « Tous les problèmes spécifiquement philosophiques se réduisent à des problèmes de logique. » Et ceci nest pas accidentel étant donné que tout problème philosophique se trouve ou bien nêtre pas philosophique du tout (la philosophie est générale, si on parle de faits, ce nest plus de la philosophie), ou bien logique. »

Deuxième conférence : L'essence de la philosophie : la Logique

Quest-ce que la logique ?

Celle-ci a été pendant longtemps assimilée à la scolastique du moyen âge, héritée dAristote. Ce na été quabsurdité et charlatanisme. Mais depuis le XVIIe siècle, la tradition médiévale est abandonnée et lobjet logique est élargi. « La logique traditionnelle considérait les deux propositionsSocrate est mortelettous les hommes sont mortelscomme des propositions de même forme. Peano et Frege montrèrent leur profonde différence de forme. Et limportance philosophique de la logique trouve une illustration dans le fait que cette confusion a obscurci non seulement létude entière des formes de jugement et de linférence, mais également létude des relations des choses à leur qualité, de lexistence concrète aux concepts abstraits, du monde sensible au monde intelligible de Platon. »

La logique traditionnelle tient quil existe une seule forme de proposition : Sujet-prédicat. « La conviction avec la croyance inconsciente quil ny a pour toute proposition que la forme sujet-prédicat, en dautres termes, que tout fait constate la possession dune qualité par une chose, a rendu la plupart des philosophes incapables de justifier la science ou la vie quotidienne. Sils avaient sincèrement été pressés den rendre compte, ils eussent sans doute découvert très rapidement leur erreur mais la plupart dentre eux étaient moins pressés de comprendre la science que de convaincre celle-ci au profit dun monderéelsupra-sensible. »

La croyance à lirréalité du monde provient irrésistiblement de certaines dispositions desprit. Cette conviction est source de mysticisme et de métaphysique ; Platon, Spinoza, Hegel nont-ils pas été de grands mystiques à leur façon ? Convaincus de leur intuition mystique, ils ont développé leur logique dans cette voie. Leur doctrine sen ressent pourtant : « Elle avait, comme dit Santayana, quelque chose de malveillant à légard du sens commun et de la science. Cest la seule explication de la complaisance avec laquelle ces philosophes acceptèrent lincompatibilité de leur doctrine avec les faits que la science et le sens commun considèrent comme les mieux établis et les plus valides. »

Aborder la nature, convaincu quelle est un tissu dillusions, nest rien moins que ce quil faut pour la comprendre. La logique moderne « fait accomplir le même progrès à la philosophie que Galilée à la physique, montrant du moins le genre de problème susceptible de recevoir une solution et ceux dont la solution doit être abandonnée parce quelle dépasse les forces humaines. »

Troisième conférence : Notre connaissance du monde extérieur

Lanalyse philosophique repose sur les données fournies par la connaissance commune.

« On pourrait objecter quil est du devoir du philosophe de mettre en question les croyances éventuellement erronées de la vie quotidienne et de les remplacer par quelque chose de plus solide et dincontestable. Et cest vrai en un sens, et cest ce qui seffectue au cours de lanalyse. Mais dans un autre sens, essentiel, cest totalement impossible. En admettant quil soit possible de mettre en doute toute notre connaissance du monde, nous ne devons pas moins accepter cette connaissance dans son ensemble, sans quoi il ny aurait plus de philosophie possible du tout. Le philosophe natteint pas une quintessence de connaissance d il puisse procéder pour critiquer lensemble de la connaissance quotidienne. [...] La philosophie ne peut pas se vanter davoir atteint un tel degré de perfection dans la certitude quelle ait autorité pour prononcer la condamnation des faits de lexpérience et des lois scientifiques. »

Descartes na été quune plaisanterie de mauvais goût : « Non que la connaissance commune doive être vraie, mais nous ne possédons aucun genre de connaissance radicalement différent, qui nous viendrait dune autre source. Le scepticisme universel, logiquement irréfutable, est pratiquement stérile. »

Russell examine ensuite les différents types de connaissance.

Lévidence sensible : elle est logiquement primitive ou psychologiquement primitive et s'appuie sur :

  1. Les données floues : de plus en plus douteuses au fur et à mesure quon y réfléchit.
  2. Les données solides : ces certitudes résistent à la réflexion critique : ce sont soit des faits sensibles particuliers, soit des vérités générales de la logique.

« Nos données primitives sont donc les faits sensibles et les lois logiques. »

On rejoint Descartes : « le monde sur lequel nous devons reconstruire reste fragmentaire. » Le problème de la connaissance du monde extérieur sénonce donc ainsi :

« Peut-on déduire de lexistence de nos données solides quoi que ce soit dautre que lexistence de ces données ? »

Quatrième conférence : Monde physique et monde sensible

Il sagit de deux mondes distincts :

  1. Le monde sensible : données immédiates de la sensation. Rien de permanent. « Même les montagnes que nous croyons être pour ainsi dire permanentes ne deviennent des données que lorsque nous les voyons, et leur existence à dautres moment ne nous est pas immédiatement donnée. »
  2. Le monde physique : il existe quelque chose de permanent. (cf. atomisme)

Or, dans les données sensibles, nous ne rencontrons jamais linfini. D nous vient cette idée de linfini ?

Cinquième conférence

Sixième conférence : historique du problème de linfini

« On se souvient que, lorsque nous avons énuméré les arguments au nom desquels on avait mis la réalité du monde sensible en question, nous avons mentionné, entre autres, la prétendue impossibilité de linfini et du continu... Toutes les difficultés touchant le continu découlant du fait quune série continue doit avoir un nombre infini de termes, et ne sont en fait que des difficultés concernant linfini. » (cf. Kant, les deux premières Antinomies.)

Russell va critiquer largumentation de Kant « pour sauver le monde sensible, il suffit de ruiner une des deux preuves de lAntinomie ».

Pour le problème de linfini, toutes les solutions des philosophes se sont révélées inacceptables. (Cf. Pythagore, Zénon, Parménide, Kant, Bergson...)

« La véritable solution, découverte par des mathématiciens, mais qui nappartient pas moins à la philosophie. »

Septième conférence : La théorie positive de linfini

« La théorie positive de linfini et la théorie générale des nombres qui en dérive est un des triomphes de la méthode scientifique en philosophie, et conviennent donc spécialement à lillustration du caractère analytico-logique de cette méthode. La tâche en cette matière a été accomplie par des mathématiciens et les résultats peuvent sexprimer au moyen du symbolisme mathématique. Comment alors, dira-t-on, la question pourrait-elle être plutôt philosophique que mathématique ? Ceci soulève une question difficile, touchant en partie lusage des mots, en partie la fonction de la philosophie, et dune réelle importance, si lon veut comprendre cette fonction. »

« La différence entre philosophie et mathématique se manifeste, dans le problème actuel, notamment au sujet de la nature des nombres. Toutes deux partent de certains faits relatifs aux nombres, faits évidents à la réflexion. Mais les mathématiques utilisent ces faits pour en déduire des théorèmes de plus en plus compliqués, tandis que la philosophie cherche par lanalyse à passer de ces faits à dautres, plus simples, plus fondamentaux.[...] La questionquest-ce quun nombre ?’ est la question philosophique capitale en cette matière, mais les mathématiciens ne se la posent pas. »

Aussi, posons-nous donc cette question du philosophe : Quest-ce quun nombre ?

Le nombre a souvent été défini comme le résultat de lopération de compter.

« Mais une collection de trois choses nest pas le nombre trois. Le nombre trois est quelque chose quont en commun toutes les collections de trois choses. Cest pourquoi la définition natteint pas le degré dabstraction nécessaire : le nombre trois est quelque chose de plus abstrait que toute collection de trois choses. [...] Cest cette vision du nombre, qui a été le principal obstacle psychologique à lintelligence des nombres finis. »

On a souvent dit : les nombres infinis ne sont pas des nombres parce quon ne peut pas les atteindre en comptant. Cela présuppose une conception du nombre qui tient que le nombre est le résultat dun comptage. Les nombres infinis sont donc restés problématiques.

Jusquici le problème était : « étant donné une collection infinie dobjets, tout nombre fini dobjets peut être soustrait ou ajouté sans diminuer ou accroître le nombre de la collection. »

Georg Cantor résout le semblant de contradiction ainsi :

Si on a une suite :

0, 1, 2, 3, ……………………n

on ajoute +1 ce qui donne :

0, 1, 2, 3………………………n
1, 2, 3, 4………………………n+1

La définition logique des nombres fut proposée par Frege en 1884 dans Die Grundlagen der Arithmetik. Lauteur initie alors la théorie logique de larithmétique. « Frege a montré linadéquation des théories philosophiques précédentes, surtout de la théorie "synthétique a priori" de Kant, et de la théorie empiriste de Mill. » Il posait la question : "à quel genre dobjets attribuer proprement le nombre ?"

Remarque 1 : « Le nombre nest pas seulement un prédicat quon attribue à un sujet. »
Remarque 2 : « Le nombre est autant un objet psychologique que la mer du Nord »

Frege refuse lidée que le nombre soit quelque chose de subjectif. Il sagit de quelque chose dobjectif. « Je distingue ce qui est objectif de ce qui est palpable, spatial, réel. Laxe de la Terre, le centre de la masse du système solaire sont objectifs mais je ne les qualifierai pas de réels comme la Terre elle-même. » (Frege, Fondements logique des mathématiques)

Il conclut que le nombre nest pas spatial, ni physique, ni subjectif, mais non-sensible et objectif, alors que la philosophie séparait radicalement ces deux mondes (sensibles/objectifs et insensibles/subjectifs).

Lunité, dont les philosophes ont le sentiment légitime quelle est nécessaire pour affirmer un nombre, est lunité du terme général, et cest le terme général qui est le sujet propre du nombre. Ex : en France, le nombre dhommes mariés est égal au nombre de femmes mariées. Ces deux collections ont le même nombre.

Nous pouvons maintenant dire ce que nous entendons par nombre de termes dune collection donnée. Ex : "les deux collections sont semblables" signifie "elles ont le même nombre de termes". Ceci nous amène à définir le nombre dune collection donnée comme la classe de toutes les collections semblables à celles-ci.

Cest-à-dire que nous posons la définition formelle suivante :

Définition formelle du nombre :

« Le nombre de termes dune classe donnée se définit comme la classe de toutes les classes semblables à la classe donnée. »

Cette définition, comme le montre Frege, donne les propriétés arithmétiques usuelles des nombres. Elle sapplique également aux nombres finis et infinis et nexige aucune sorte dentité métaphysique nouvelle et mystérieuse. Elle montre que ce nest pas un objet physique mais des classes ou des termes généraux qui les définissent, auxquels on attribue positivement des nombres. Elle sapplique à 0 et 1, sans les difficultés que ces cas particuliers donnent aux autres théories.

Huitième conférence : Conclusion

La méthode analytique en philosophie

Partant dun corps de connaissances communes vagues, le philosophe le réduit à ses prémisses, dont il étudie dans un deuxième temps le degré de certitude. Lanalyse philosophique nest ainsi pas seulement logique, elle permet une estimation de la valeur des connaissances. Appliquons cette méthode analytique à la notion de « cause ».

I. les lois causales

« Toute proposition générale en vertu de laquelle il est possible dinférer lexistence dune chose ou dun événement de lexistence dune autre chose ou dun autre événement, en excluant les objets logiques tels que les nombres ou classes ou propriétés abstraites ou relations, et en y comprenant les données sensibles et tout ce qui est du même type logique quelles ». Mais lélément particulier inféré dune loi causale est sujet à la précision de sa description, une loi causale ne peut donc établir que lexistence dune chose dune catégorie implique lexistence dune autre chose dune catégorie.

II. De la certitude des lois causales

D nous vient cette croyance en des lois causales ? La conception humienne de la causalité comme croyance animale ne nous permet pas daffirmer la réalité dune causalité ou uniformité, se maintenant dans tout le passé observé. Ce que montre lexpérience scientifique, cest que semble manquer une uniformité observable, on se ramène à une uniformité plus large pour « sauver » la causalité.

III. Les raisons de croire aux lois causales valables pour linobservé

A part le fait que lexpérience empirique est compatible avec la causalité, avons-nous dautres raisons dy croire ? Derrière le principe de causalité, trop compliqué pour être a priori, il ne reste que le principe dinduction : « Si, dans un grand nombre dexemples, une chose dun certain genre est associé, dune certaine manière, à une chose dun certain autre genre, il est probable quune chose du premier genre soit toujours pareillement associée à une autre chose de lautre genre ; et à mesure que croit le nombre dexemples, la probabilité se rapproche indéfiniment de la certitude. » Ce principe est le fondement de toute inférence relative à lexistence des choses . Il ne peut sans circularité être prouvé inductivement !

IV. Causalité scientifique et sens commun

Historiquement, la notion de cause a été associée à celle de volition humaine, on suppose la cause active, leffet passif. De , il est aisé de suggérer quune cause vraie doit contenir une fin. Contre ces superstitions anthropomorphiques se sont érigés les scientifiques en insistant sur le fait que la science dit le « comment » des événements, et non leur « pourquoi », qui est de lordre de la métaphysique.

V. La notion de « cause » et la question du libre-arbitre

La causalité scientifique na rien à voir avec lidée de volition et donc le désir de liberté nest pas incompatible avec le déterminisme scientifique. En effet, sil est clair quil y a corrélation entre le cerveau et lesprit, et même si nous admettons le déterminisme le plus fort, les conséquences incompatibles avec le libre arbitre nen découlent pas. Le sentiment de liberté que nous avons quand nous délibérons nest que celui de « pouvoir choisir », il ne requiert pas labsence de connexion causale entre ce que nous choisissons et notre passé. Lincompatibilité imaginée vient de la confusion entre causes et volitions. Imaginons des êtres qui connaissent lensemble de leur futur avec une certitude absolue. Leur libre arbitre ne serait en rien entamé : la liberté exige seulement que nos volitions soient (ce quelles sont) le produit de nos désirs (au sens large).

Conclusion

La philosophie ne devient pas scientifique en faisant usage des autres sciences (cf. critique de Spencer), elle est une étude à part des autres sciences. Elle sapplique à douter de ce qui est familier, ce qui a pour effet de réduire létendue de nos connaissances certaines. Elle est un effort dimagination pour découvrir une possibilité jamais conçue auparavant, qui se justifie par sa capacité énorme à absorber les conflits.

La philosophie nest pas la science ; elle aspire à dautres résultats. Cest une discipline particulière qui, malheureusement, se laisse souvent obscurcir par le besoin de système, lenvie de trouver une réponse rapidement...

« Il faut acquérir une imagination fertile en hypothèses abstraites. Cest, je crois, ce qui a le plus manqué en philosophie. Lappareil logique était si maigre que toutes les hypothèses que pouvaient imaginer les philosophes se trouvaient incompatibles avec les faits. » Aujourdhui, la logique sest enfin développée. Cependant, en dépit des possibilités nouvelles de progrès en philosophie, le premier effet de cette attitude, cest, comme en physique, de diminuer fortement létendue de ce que lon croit connaître. Avec Galilée, lastrologie a été perdue, pour le simple calcul trivial de la chute des corps !

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