Inégalité de revenu

Inégalité de revenu

Inégalités de revenu

Les inégalités de revenu évoquent la disparité des revenus entre les individus des différentes nations du globe, au sein d'un même pays (mesure de l'inégalité entre les individus riches et les individus pauvres dans un pays), et entre les pays.

Sommaire

Mesure des inégalités

Inégalité des revenus au sein des pays, mesuré par le coefficient de Gini. Le coefficient de Gini est un nombre compris entre 0 et 1, où 0 correspond à une égalité parfaite (toutes les personnes ont les mêmes richesses), et 1 à une inégalité totale (où une personne possèderait tout). Les pays en rouge sont plus inégalitaires que les pays en vert.

En toute rigueur, l'étude des inégalités passerait par une comparaison des distributions complètes de revenus ; en pratique les distributions se ressemblent toutes et peuvent être résumées par des indices.

Les indices les plus utilisés[1] sont le coefficient de Gini, l'indice de Theil, l'indice de Hoover, le rapport interquintile, le rapport interdécile, la variance logarithmique.

Dans la plupart des cas, ce ne sont pas les revenus bruts qui sont comparés, mais les revenus disponibles comprenant les transferts sociaux.

Inégalités de revenus au sein d'un même pays

On constate qu'un grand nombre des pays inégalitaires se trouvent en Amérique latine ou en Afrique.

Dans la moyenne, la Russie est plus inégalitaire que les États-Unis d'Amérique et la Chine, qui sont globalement plus inégalitaires que l'Europe.

Les pays les plus égalitaires sont essentiellement le Japon et les pays du nord de l'Europe : Finlande, Suède, Norvège, Danemark, Belgique et Allemagne.

Au sein des pays développés

Selon l'OCDE, « autour de l'année 2000, les inégalités ont été les moins prononcées dans certains pays nordiques, elles ont été moyennes en France, Belgique et Allemagne, et par contre plus prononcées au Mexique et en Turquie, puis en Pologne et États-Unis. »[2]

Les inégalités de revenus augmentent légèrement au sein des pays développés depuis les années 1980 : « En France, les inégalités sont restées relativement stables. Depuis le milieu des années 1980, on a observé, en France et moyenne dans l'OCDE, un léger glissement de la part des revenus, des revenus moyens vers les plus riches, des jeunes vers les plus âgés (notamment chez les seniors de 51 à 65 ans), et l’effet de l’intervention de l’État par les prestations sociales et l’impôt qui freine véritablement les inégalités. »[2] « Quant à l'évolution générale des inégalités depuis les dernières décennies, il n' y a eu d'accroissement généralisé, mais on a observé un accroissement pour certains groupes de pays, à certaines périodes : les pays anglo-saxons autour de 1980, certains pays d’Europe continentale autour de 1990, et récemment une forte croissance dans certains pays nordiques. »[2]

Aux États-Unis[3], les revenus du centième d'Américains les plus riches représentent 20 % de la somme des revenus, quand la moitié de la population ayant les revenus les plus faibles en représente 12,6 %[4]

Dynamique de l'inégalité

courbe de Kuznets : niveau d'inégalité en ordonnée, revenu en abscisse
Article détaillé : Courbe de Kuznets.

À long terme, de nombreux pays connaissent une évolution suivant une courbe en « U inversé » (augmentation des inégalités, puis stabilisation, puis diminution), proposée pour la première fois par Simon Kuznets. Ainsi, pour la France, le rapport de salaires P90/P10 était de 3,25 en 1950, 4,20 en 1966, et 3,20 en 1998[5].

Cependant, cette évolution est loin d'être universelle. En effet, un rapport de l'OCDE [6] trouve des évolutions divergentes pour dix pays depuis les années 1970 : diminution des inégalités pour quatre pays, stabilité pour trois, augmentation pour trois. Par ailleurs, l'évolution récente entre le milieu des années 1980 et le milieu des années 1990 montre une augmentation des inégalités dans onze pays sur vingt.

Facteurs influençant les inégalités

Plusieurs facteurs permettent d'expliquer l'évolution des inégalités. Dans le cas américain, Christian Broda de l'université de Chicago souligne le rôle du différentiel d'inflation et du libre-échange. Les produits consommés par les personnes aux revenus les plus élevés ont généralement une inflation plus forte que les produits consommés par les personnes aux revenus inférieurs. Cette différence explique un tiers de la hausse des inégalités aux États-Unis entre 1994 et 2005 selon les études de Broda. Il souligne en particulier le rôle du commerce international pour garder bas le prix des produits consommés par les plus pauvres, avec le rôle de la Chine[7].

Le vieillissement de la population peut également augmenter mécaniquement les inégalités de revenu.

Distribution des revenus à l'échelle mondiale

Les conclusions sont différentes selon que l'on s'intéresse aux différences entre pays ou aux différences entre hommes indépendamment de leur nationalité.

Entre pays

L'écart de revenus entre les pays les plus riches et les pays les plus pauvres est très important.

Selon des estimations du PNUD, le ratio entre le revenu moyen par habitant dans les 20 % pays les plus riches et les 20 % les plus pauvres est passé de 30 en 1960 à 74 en 1997[8]. Pour Surjit Bhalla, ce ratio est passé de 23 à 36 sur la même période. En suivant les mêmes pays entre ces deux dates, les inégalités entre ces pays ont diminué[9].

L'économiste espagnol Xavier Sala-i-Martin a remis en cause les calculs du PNUD, en montrant que les taux de pauvreté du rapport ont été calculés en prenant les taux de change courants et ont ainsi selon lui éludé le fait que le coût de la vie est beaucoup plus faible dans les pays pauvres. En intégrant ce paramètre, il constate qu'« au lieu de passer de 20 à 74, le taux utilisé par le PNUD pour mesurer les inégalités entre pays a augmenté de 11 en 1960 à 16 en 1980 et qu'il a ensuite lentement décru, pour atteindre 15 en 1988 »[10]. Reprenant ces chiffres, l'essayiste libéral Johan Norberg considère que cette évolution à la baisse des inégalités entre pays est à mettre au crédit de la mondialisation[11]

Entre hommes

Xavier Sala-i-Martin a proposé[12] une distribution de revenus mondiale à partir des distributions nationales. Cette distribution ne tient ainsi plus compte des frontières, et permet par exemple de calculer un coefficient de Gini mondial. En utilisant sept critères d'inégalité différents, il parvient systématiquement à la même conclusion : les inégalités entre hommes ont diminué entre 1980 et 1998. La contradiction apparente avec l'augmentation des écarts entre pays s'explique par la pondération : en comparant simplement les pays les plus riches et les plus pauvres, on ignore l'évolution des pays d'Asie, en particulier Inde et Chine, dont la progression a été très importante. En excluant ces deux pays (qui représentent toutefois 40% de l'humanité), on arrive à des conclusions bien différentes, notamment en Afrique, où la pauvreté et les inégalités ont augmenté de façon importante[13].

De même, le PNUD estime que le nombre de personnes vivant avec moins de l'équivalent d'un dollar US par jour a diminué de près de 250 millions entre 1990 et 2001[14]. Cela correspond à une réduction d'un quart de la part de la population vivant sous ce seuil de revenu dans les pays en développement (de 27,9% à 21,3%).

Malgré cette baisse, il restait en 1999 selon le PNUD plus d'un milliard de personnes vivant encore avec moins de 1$ par jour, et près d'un milliard d'individus n'étant pas en mesure de satisfaire leurs besoins de consommation élémentaires[réf. nécessaire]. En 2005, ce même organisme estimait que 2,5 milliards de personnes vivent encore avec moins de 2 dollars par jour[15].

En 2006, la part dans le revenu total des 20% de la population mondiale aux revenus les plus faibles est d’environ 1,5 %. En parallèle, les 500 personnes aux revenus les plus élevés ont un revenu de 100 milliards de dollars, équivalent aux revenus des 416 millions de personnes aux revenus les plus faibles. Les 2,5 milliards d'individus vivant avec moins de 2 dollars par jour, soit 40 % de la population mondiale, représentent 5 % du revenu mondial[16].

Selon la majorité des études, les inégalités de revenus, mesurées par le coefficient de Gini, ont diminué depuis les années 1980[17],[18].

De même la pauvreté absolue diminue fortement depuis 1820 : 84 % de la population mondiale est alors pauvre, en valeur absolue, contre un cinquième aujourd'hui[19]. Il existe des inégalités des revenus entre les hommes et les femmes dans les entreprises à niveau de qualification et de responsabilité égal.

Explications avancées

Pour les altermondialistes, ce constat s'expliquait notamment il y a quelques années par la dégradation des termes de l'échange, c’est-à-dire la baisse des prix des matières premières importées des pays du tiers-monde, surtout en Afrique, par rapport aux prix des produits manufacturés des pays développés. Le journaliste et économiste de formation François-Xavier Verschave soutient la thèse du pillage occidental du pétrole africain, par des réseaux d'influence français.

Cette thèse est mise en cause par deux éléments. D'une part, par la hausse des revenus des matières premières qui n'a pas entrainé de réel développement économique. D'autre part et de façon plus générale, disposer de richesses naturelles nombreuses qui procurent des ressources importantes en devises n'a que très rarement un effet sensible sur le développement d'un pays. Ainsi, Philippe Chalmin, spécialiste français des matières premières, écrit-il que les matières premières sont une malédiction. Ce sont les pays apparemment les plus défavorisés par la nature qui s'en sortent le mieux[20].

Les altermondialistes soutiennent également que les économies des pays africains sont déstabilisées par les importations de produits agricoles subventionnées par les économies occidentales, et que les intérêts de la dette extérieure de ces pays les empêchent de développer des politiques sociales[21].

Cette vision tend à occulter des causes liées aux différences de comportements politiques locaux vis-à-vis du développement économique. Il attribue la responsabilité des disparités économiques et sociales aux pays historiquement développés et à ceux ayant choisi plus récemment la voie de l'intégration à l'économie mondiale. Elle n'explique pas que certains pays aient pu émerger puis devenir à leur tour des pays développés (p. ex. la Corée du Sud).

Inégalités de richesse

Il ne faut pas confondre inégalités de revenus (qui mesurent un flux) et inégalités de richesse (qui mesurent un stock). Les inégalités de richesse sont plus accentuées que les inégalités de revenu.

Références

  1. La feuille de calcul au tableur pour le coefficient de Gini, l'indice de Theil, l'indice de Hoover (en anglais)
  2. a , b  et c [pdf] (en) Income Distribution and Poverty in OECD Countries in the Second Half of the 1990s, working paper, et résumé de L’évolution des inégalités de revenus en France et dans les pays de l'OCDE. source: OCDE, 2005.
  3. Voir aussi : (en) en:Income inequality in the United States
  4. Le Monde, 18 janvier 2008
  5. Thomas Piketty, Income Inequality in France 1901-98, Centre for Economic Policy Resarch, juillet 2001
  6. Rapport de l'OCDE: Distribution des revenus et pauvreté dans la zone de l'OCDE: tendance et déterminants, mai 2001[1]
  7. "Inequality and Prices: Does China Benefit the Poor in America?", Christian Broda et John Romalis, mars 2008
  8. (en) Human development report 1999, PNUD p. 36 et 38.
  9. (en) Surjit Bhalla, Imagine There's No Country: Poverty, Inequality, and Growth in the Era of Globalization, chapitre 2, p. 24 à 26 , cité également par Sudhir Anand et Paul Segal, « What do we know about global income inequality? », p. 8
  10. Xavier Sala-i-Martin, The Disturbing « Rise » of Global Income Inequality, NBER Working Paper W8904, avril 2002.
  11. Johan Norberg, Plaidoyer pour la mondialisation capitaliste, Plon, 2003, chap.1, p.46
  12. Xavier Sala-i-Martin, The Disturbing “Rise” of Global Income Inequality
  13. Source: Banque Mondiale, indicateurs 2005
  14. (en)PNUD, The Millennium Development Goals Report, 2005, disponible en ligne
  15. Rapport mondial sur le développement humain du PNUD présenté aux dirigeants mondiaux à la veille du Sommet mondial 2005 du 14 au 16 septembre disponible en ligne
  16. (en) Human Development Report 2006 du PNUD p. 269.
  17. (en) Imagine There's No Country: Poverty, Inequality, and Growth in the Era of Globalization, chapitre 11, p. 174
  18. Sudhir Anand et Paul Segal, « What do we know about global income inequality? », p. 61
  19. (en) Imagine There's No Country: Poverty, Inequality, and Growth in the Era of Globalization, chapitre 9, p. 144 et 145.
  20. [2]
  21. Afrique : abolir la dette pour libérer le développement par Éric Toussaint et Arnaud Zaccharie, 2001. ed. Syllepse

Voir aussi

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