- Intuition
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L'intuition (du latin intuitio, désignant l'action de voir une image dans une glace) désigne :
- un mode de connaissance, c'est-à-dire une certaine faculté de l'esprit, ou
- une proposition résultant d'une telle faculté.
L'intuition semble être un mode de connaissance immédiat, ne faisant pas appel à la raison.
Une intuition n'est pas « inférentielle » : elle n'est jamais la conclusion d'un raisonnement conscient. Elle prend la forme d'un sentiment d'évidence quant à la vérité ou la fausseté d'une proposition, qu'on ne peut pas toujours justifier. On parlera ainsi d'intuition pour désigner une proposition proto-théorique concernant un sujet quelconque. On aura par exemple l'intuition que telle action est juste, sans savoir pourquoi elle est juste.Sommaire
L’intuition en philosophie
Pour Platon, l'intuition est la saisie immédiate de la vérité de l'idée par l'âme indépendamment du corps.
Au contraire pour Epicure, l'intuition est la saisie immédiate de la réalité du monde par le corps indépendamment de l'âme.
Pour Descartes, l'intuition est la connaissance immédiate et certaine de la vérité d'une idée par sa nécessité intrinsèque, comme on le saisit dans les mathématiques et plus encore dans l'intuition que la conscience a d'elle-même d'être une "chose pensante" à travers l'expérience du cogito. « Il n’y a pas d’autres voies qui s’offrent aux hommes, pour arriver à une connaissance certaine de la vérité, que l’intuition évidente et la déduction nécessaire »[1].
Pour Spinoza, l’intuition est la connaissance immédiate et certaine de l'essence des choses à partir de la compréhension nécessaire de leur cause par la raison (Spinoza, Ethique, II, 40), c'est l'unique source de vérité qui s'oppose à la connaissance vague par le langage ou l'expérience corporelle.
Exemples :
- Dieu est l'être infini cause de soi et de toute chose
- Un cercle est la rotation d’un demi segment de droite
- L’amour est la joie associée à l’idée de sa cause
- L’homme est un mode de la Nature, c’est-à-dire de Dieu
Pour Bergson, c'est la saisie de l'esprit par lui-même au sein de la durée, qu'il définit comme "La sympathie intellectuelle ou spirituelle par laquelle on se transporte à l’intérieur d’un être pour coïncider avec ce qu’il a d’unique et par conséquent d’inexprimable".
Pour la phénoménologie, à travers Husserl, Scheller et Hartmann, c'est la saisie immédiate du réel pour ce qu'il est à travers ce qu'il apparaît être, le "phénomène".
L'intuition, comme mode de dévoilement de l'indicible, est un phénomène mystique. La vouloir exprimer (traduire) conduit à l'aporie.
Pour Jean Paul Sartre ; « Il n’est d’autre connaissance qu’intuitive. La déduction et le discours, improprement appelés connaissance, ne sont que des instruments qui conduisent à l’intuition. » On a du mal à imaginer ce que vaudrait une théorie de la justice qui rentrerait en contradiction avec nos intuitions concernant ce qui nous semble juste ou injuste. L'intuition est ainsi au début comme à la fin de toute entreprise philosophique car c'est par elle qu'en dernière instance, nous donnons notre assentiment à une thèse plutôt qu'à une autre.
Pour Henry, l'intuition est la propriété que possède la vie de se sentir elle-même hors de toute idée, représentation (phénoménologie matérielle)
Intuitionisme mathématique
L'intuitionisme, avec un seul "n", est un néologisme anglophone ; Il désigne la doctrine défendue par Brouwer et son disciple Heyting, en opposition au formalisme de Hilbert, et d'après laquelle les mathématiques sont intuitives et ne peuvent pas être purement hypothético-déductives.
Intuitionnisme psychologique sur laquelle s'appuie une partie de la Parapsychologie
Théorie d'après laquelle l'esprit peut percevoir directement les objets extérieurs ("voyance"). C'est l'impression de sentir les choses indépendamment du temps telle une prémonition de l'avenir ; ou sans contact médiatisé physiquement (télépathie);
On attribue à l'intuition des pouvoirs prédictifs. C'est pourquoi la veille et l'intelligence économique font appel en partie à des qualités d'intuition. Toutefois, l'« intuition évidente et la déduction nécessaire » (Descartes, XIIe règle) ne sont pas toujours suffisantes. Toute intuition n'est pas évidente pour tout le monde tant qu'elle n'est pas partagée, et l'induction est également une forme de raisonnement admise en logique générale.
Mécanismes de l'intuition
Elle est généralement perçue comme immédiate, c'est-à-dire sans médiation et ne faisant pas appel à l'Empirisme bien qu'elle puisse en réalité puiser sa pertinence dans des souvenirs enfouis dans l'inconscient ou le subconscient ; les intuitions pourraient être des sortes de synthèses résultant d'informations que nous mémorisons et de perceptions que nous n'avons pas conscience d'enregistrer.
Ces synthèses s'effectueraient préférentiellement dans le cerveau droit, réputé plus apte au fonctionnement « empirique » tandis que le cerveau gauche (siège du langage) travaillerait selon un mode sensiblement plus logique et rationnel.L’intuition heuristique
On trouve dans l'histoire des sciences de nombreux exemples de découvertes apparemment surgies de nulle part. Ce type d'intuition semble résulter d’un travail non conscient de l’esprit.
L’intuition délirante
Le psychiatre peut être confronté à un patient annonçant triomphalement qu’il a tout compris ! Certains états psychotiques peuvent nous faire croire que nous accédons à la « vérité » sans possibilité d'erreur ni d'aval par autrui.
C.G. Jung a fait de l'intuition un des quatre types de sa psychologie différentielle.Notes
- René Descartes, Règles pour la direction de l'esprit, XII° règle.
Bibliographie
- Jean Largeault Intuitionisme et théorie de la démonstration éd. VRIN, 1992, Paris.
- Claude Darche " Développer son intuition " éd EYROLLES, 2009. Paris.
Voir aussi
Liens externes
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