- Ile Feydeau
-
Île Feydeau
Pour les articles homonymes, voir Feydeau (homonymie).Véritable « vaisseau de pierre », l’île Feydeau est une ancienne île marécageuse du centre de Nantes, aménagée à partir de 1723.
Sommaire
Localisation
L'île Feydeau est aujourd'hui bordée par les allées (anciens quais) Turenne et Duguay-Trouin et est traversée par le cours Olivier de Clisson et la rue Kervégan. Elle est délimitée à l'ouest par le square Jean-Baptiste Daviais et la place de la Petite-Hollande, à l'est par la place Neptune.
Histoire
L'île était auparavant dénommée « grève de la Saulzaie ». Une chapelle, celle de Notre-Dame-de-Bon-Secours y est édifiée en 1443 (elle sera reconstruite en 1776-1780), ainsi qu'une nouvelle halle aux poissons quelques années plus tard. Le duc François II fortifie cette île en 1464 et en 1477. Elle doit son nom actuel à Paul Esprit Feydeau de Brou, intendant de Bretagne, de 1716 à 1727.
Si les premiers projets d'urbanisation datent de 1721, le terrain ne sera acquis par la ville de Nantes qu'un an plus tard. Les chantiers qui furent longtemps retardés par la présence de terrains instables et inondables, se prolongèrent jusqu’à la veille de la Révolution.
Dès leur édification, les immeubles se sont inclinés. La présence de pilotis ne suffit pas à stabiliser les fondations. Vers 1750, seuls quatre immeubles sont sortis de terre. Les chantiers s’accélèrent après 1755, lorsque l’architecte Pierre Rousseau imagine d’asseoir les fondations sur un radeau de bois, à la hollandaise. Les habitations prestigieuses, réalisées en tuffeau, marquent l'apogée des négociants et armateurs nantais.
Jean-Baptiste Carrier avait son bureau dans l'une des maisons de l'île sous la Terreur.
Dans la seconde moitié de XIXe siècle, elle accueillit également deux équipements publics d'importance : le marché couvert de la Petite-Hollande, sur sa pointe ouest (en lieu et place du square Jean-Baptiste-Daviais) et la poissonnerie municipale, sur sa pointe est (à l'emplacement de l'ancien immeuble "Neptune"). Ces deux bâtiments furent respectivement démolis en 1932 et 1940.
La maison natale de Jules Verne, le célèbre auteur, occupe l'angle du cours Olivier de Clisson et la rue Kervégan (une plaque commémorative y symbolise l'évènement).
L'île était autrefois encadrée par deux bras de Loire :
- Le "Bras de la Bourse" au nord, traversé par les ponts "de la Bourse" et "de la Poissonnerie"
- Le "Bras de l'Hôpital" au sud, qui le séparait de l'île Gloriette, à laquelle on accédait par les ponts "Maudit" et "de la Belle-Croix".
Ces bras ont été comblés dans la période d'entre-guerre, mais les Nantais ont gardé l'habitude d'appeler l'endroit l'île Feydeau.
Approche géographique
Dans son environnement le quai Turenne s'adapte merveilleusement bien. C'est un élément du paysage qui attire par son contraste avec le reste du bâti situé au Sud, dont l'architecture est beaucoup plus moderne, c'est également le prolongement des bâtiments situés Place du Commerce, un bâti ancien traditionnel du XVIIIe jusqu'au XIXe siècle. Mais ce quai marque également l'entrée dans le cœur commercial de Nantes. On passe d'un paysage relativement dégagé au Sud, à celui des ruelles éparpillées singulières du vieux centre nantais. On peut donc dire que cette façade marque une frontière entre le vieux cœur de Nantes et les bâtiments plus modernes tels que le CHU. Mais c'est aussi une porte d'entrée vers la place du Commerce, c'est-à-dire vers le centre-ville, car elle est à l'image des bâtiments que l'on peut observer une fois dans le centre. Autrement dit, elle conserve toujours sa situation de passage, mais également d'interface entre deux espaces qui ne sont plus la terre et le fleuve, mais bien le vieux et le moderne, le centre et les faubourgs.
Aujourd'hui le fleuve ne passe plus devant la façade, les différents bras de Loire qui passaient anciennement ici ont été comblés en 1930. Un des seuls aménagements récents rappelant l'eau qui s'écoulait autrefois, est une bande herbeuse très verte et homogène impeccablement entretenue. Entourée d'espaces couverts de béton, la bande herbeuse placée juste devant la façade est un espace très reposant, elle offre très certainement une sensation similaire à celle que l'on pouvait ressentir lorsque la Loire passait encore à cet endroit. Dans le même ordre d'idée un passage fait de pierre rappelant la structure d'un pont permet de joindre le quai à la route pour qui ne voudrait pas franchir l'espace herbacé. Il est étonnant de constater que cette bande herbeuse symbolisant la Loire, installée sur un talus, agit comme une sorte de tribune sur laquelle les gens viennent s'asseoir, discuter et contempler la magnifique architecture du quai Turenne. Sur le devant de la scène, certaines personnes s'assoient sur le bord de l'ancien quai, les pieds juste au dessus de l'herbe et agissent ainsi comme l'on pouvait le faire auparavant lorsque la Loire y coulait tout au long.
L'autre aménagement est un mur illustré rappelant le reflet que devait projeter autrefois la façade sur le fleuve. Un mur de béton vertical imageant un fleuve vertical symbole d'un espace extrêmement aménagé. Cet aménagement est un des rares qui permet de se souvenir que cet espace était autrefois fluvial, ce qui peut d'ailleurs paraitre surprenant. On peut se demander pourquoi la ville de Nantes ne met pas d'avantage cet aspect en évidence.
Un espace donc de repos, de détente, mais également un espace d'hommage à cet ancien chantier qui demanda tellement de travail et de réflexion. La façade continue de vivre grâce à une reconversion dans un domaine complètement différent qui est celui du tourisme et de la détente qui s'oppose singulièrement au rythme effréné de l'ancien port.
Reconversion dans le domaine touristique
Comment un espace ayant subi une altération dans le temps l'utilise dans sa reconversion et parvient à redevenir un point de repère de la ville ?
Dans un premier temps l'architecture de la façade confère au monument un rang de patrimoine. Symbole du vieux centre et de l'ancienne fonction de la ville (commerce triangulaire) la façade participe à l'entretien du souvenir, mais est également une représentation singulière de modernisation et de développement qu'est en train de connaitre la ville de Nantes. De par sa singularité causée par la fragilité de sa base, elle devient l'emblème des autres constructions ayant cette distorsion, mais elle est également à l'image du paysage embellie par l'architecture du XVIIIe siècle dont une grande partie de l'espace insulaire est pourvue. De plus la façade du quai Turenne, à l'inverse de ce que l'on pourrait croire, utilise sa singularité pour devenir un espace de détente et pourquoi pas redevenir un espace moderne à l'architecture “souple” et au design contemporain. L'espace largement ouvert qui se situe juste devant le quai semble avoir pour fonction d'attirer l'intention des passants et de leur offrir le meilleur spectacle que nous donne la façade, car il est vrai malheureusement, qu'il y a très peu d'endroits où l'on peut prendre pareil recul pour admirer l'architecture particulière et « naturellement modernisée » de l'ensemble du bâti de l'île Feydeau.
Aujourd'hui le rez-de-chaussée de la façade rassemble une petite quantité de magasins, la majeure partie des immeubles n'étant destinée qu'à l'habitat. Aux enseignes timides respectant les voûtes de l'édifice selon la loi instaurée en 1962, ces magasins appellent à la détente et au voyage (sauna, agence de voyage et bar-brasserie). Aux étages se situent des habitations dans lesquelles il est difficile d'y voir quelque chose, on y distingue à peine quelquefois des personnes plutôt de classe aisée vaquer à leur occupations personnelles. L'entrée la plus fréquentée des habitations est curieusement située sur le côté ou bien à l'arrière des immeubles, constituée de large portail en bois elle amène directement à un escalier de marbre, sombre et très ancien. À l'intérieur on peut sentir une odeur de vieux bâtiment humide et la décoration murale plutôt épurée contraste de ce fait avec l'extérieure de l'édifice.
Sur certaines photos on peut se rendre compte de l'activité que connaissait le quai lorsqu'il avait encore pour fonction d'être un port. On note le nombre plus important qu'aujourd'hui de magasins. Ceci peut être révélateur d'une certaine décadence du rôle et de l'importance du quai, ainsi que de sa façade. En effet lorsqu'il y avait encore une activité portuaire autour de l'île, la façade agissait alors comme démonstration de la puissance de la ville. On peut deviner qu'elle devait avoir un effet assez surprenant pour les marins qui venaient accoster ici, ces derniers allaient surement diffuser alors à travers le monde l'image qu'ils avaient de Nantes, une image très largement influencée par cette imposante, mais non moins splendide, construction qu'est la façade du quai Turenne. Mais peut-on pour autant parler de décadence ? Cette fonction d'image de la ville n'est pas entièrement disparue, même si elle a beaucoup changé, elle est encore la principale fonction de cette façade. Lorsqu'on regarde ce vieux bâtiment, on peut lire que Nantes est une ville chargée d'histoire, un passé certes très lourd puisqu'aujourd'hui très discrédité (l'esclavage n'étant pas un argument très positif), mais un passé toutefois glorieux au vu de la taille et de la finesse de la construction. Mais bien plus que cela, cette façade véhicule l'image d'une ville en constante modernisation qui n'hésite pas à s'appuyer sur son passé pour bâtir son avenir.
On regrette quand même que la mise en valeur du monument par la commune de Nantes soit plutôt légère et pas suffisamment directe pour avoir un effet évident sur le touriste ou même sur le simple passant. La question est de savoir pourquoi ne se développe pas ici un site touristique digne de cette façade extraordinaire qui serait aussi surprenant qu'impressionnant, mettant en scène le caractère insulaire, cette singularité qui provient de sa distorsion et enfin la magnifique architecture très représentative du vieux centre de Nantes ?
Voir aussi
- Portail de Nantes
- Portail de l’architecture et de l’urbanisme
Catégories : Ancienne île | Eau à Nantes
Wikimedia Foundation. 2010.