- Générateur Thermoélectrique À Radioisotope
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Générateur thermoélectrique à radioisotope
Un générateur thermoélectrique à radioisotope, (en anglais RTG : Radioisotope thermoelectric generator) est un générateur électrique de conception simple, produisant de l'énergie électrique par la chaleur émise par désintégration radioactive.
De tels systèmes utilisent des matériaux radioactifs (comme le plutonium 238), qui génèrent de la chaleur en rayonnant dans des matériaux non radioactifs. La chaleur est alors convertie en électricité par des modules thermoélectriques en utilisant l'effet thermoélectrique. Les radioisotopes les plus performants pour ce type d'applications sont ceux qui émettent toute leur énergie de désintégration sous forme de particules α, ces dernières étant les plus facilement absorbées par des matériaux denses — leur énergie cinétique est alors convertie en chaleur — tandis que les électrons (particules β-) sont moins efficaces et les rayons γ n'interagissent pas suffisamment avec les matériaux pour que leur énergie soit efficacement convertie en chaleur.
La principale application des générateurs à radioisotope est l'alimentation des sondes spatiales, ainsi que des équipements d'accès difficile ou impossible requérant une source d'énergie fiable sur une longue période de temps. On a ainsi conçu des générateurs miniatures pour stimulateurs cardiaques à base de plutonium 238 aujourd'hui remplacés par des technologies plus « vertes » reposant sur des batteries lithium-ion, et de tels générateurs de conception plus simple à base de strontium 90 ont été utilisés par le passé pour l'éclairage de certains phares isolés sur les côtes d'URSS.
Sommaire
Conception
En comparaison d'autres équipements nucléaires, le principe de fonctionnement d'un générateur à radioisotope est simple. Il est constitué d'un conteneur blindé rempli de matière radioactive, percé de trous où sont disposés des thermocouples, l'autre extrémité des thermocouples étant reliée à un radiateur. Les calories traversant les thermocouples sont transformées en électricité. Un module thermoélectrique est un dispositif constitué de deux sortes de métaux conducteurs, qui sont connectés en boucle fermée. Si les deux jonctions sont à des températures différentes, un courant électrique est généré dans la boucle.
Le radioisotope retenu doit avoir une demi-vie assez courte, afin de pouvoir produire suffisamment d'énergie. On choisit des demi-vies de l'ordre de quelques dizaines d'années. Il s'agit le plus souvent de plutonium 238, sous forme de dioxyde de plutonium 238PuO2, un puissant émetteur α dont la période radioactive est de 87,74 ans (32 046 jours). Le premier radioisotope utilisé a été le polonium 210 en raison de sa période plus courte (seulement 138,38 jours) et donc de sa très grande puissance de rayonnement, tandis que l'américium 241 offre une alternative moins puissante mais cinq fois plus pérenne en raison de sa période de 432,2 années (environ 157 850 jours) :
Décroissance calculée de trois radioisotopes pour GTR Radioisotope 241Am 238Pu 210Po Période radioactive 432,2 ans 87,74 ans 138,38 jours Puissance spécifique 106 W/kg 567 W/kg 140 000 W/kg Matériau radioactif 141AmO2 PuO2 à 75 % de 238Pu Po à 95 % de 210Po Puissance initiale 97,0 W/kg 390,0 W/kg 133 000 W/kg Après 1 mois 97,0 W/kg 389,7 W/kg 114 190 W/kg Après 2 mois 97,0 W/kg 389,5 W/kg 98 050 W/kg Après 6 mois 96,9 W/kg 388,5 W/kg 53 280 W/kg Après 1 an 96,8 W/kg 386,9 W/kg 21 340 W/kg Après 2 ans 96,7 W/kg 383,9 W/kg 3 430 W/kg Après 5 ans 96,2 W/kg 374,9 W/kg 14 W/kg Après 10 ans 95,5 W/kg 360,4 W/kg 0 W/kg Après 20 ans 93,2 W/kg 333,0 W/kg 0 W/kg Après 50 ans 89,5 W/kg 262,7 W/kg 0 W/kg Les isotopes 242Cm et 244Cm ont également été proposés sous forme Cm2O3 en raison de leurs propriétés particulières :
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- Le curium 242 donne du plutonium 238 par désintégration α avec une période radioactive de 162,79 jours, ce qui en fait potentiellement un radioisotope à « double détente » puisque son produit de désintégration est à son tour utilisable comme source d'énergie pour RTG.
- Le curium 244 donne du plutonium 240 par désintégration α avec une période de 18,10 ans.
Avec une puissance spécifique respectivement de 98 kW/kg pour le 242Cm2O3 et de 2,27 kW/kg pour le 244Cm2O3, ces céramiques présentent néanmoins l'inconvénient d'émettre un flux important de neutrons en raison d'un taux de fission spontanée respectivement de 6,2 × 10-6 et 1,4 × 10-6 par désintégration α, ce qui nécessite un blindage plusieurs dizaines de fois plus lourd qu'avec le 238PuO2.
Efficacité énergétique
Les thermocouples utilisés pour convertir en électricité le gradient de température généré par la désintégration des radioisotopes sont particulièrement peu efficaces : entre 3 et 7 % seulement, n'atteignant jamais 10 %. Ces thermocouples sont constitués d'alliages de silicium et de germanium, de tellurure de plomb et de tellurures d'antimoine, de germanium et d'argent (appelés TAGS). Des technologies plus novatrices reposant sur les convertisseurs thermioniques permettraient d'atteindre une efficacité énergétique comprise entre 10 et 20 %, tandis que des expériences recourant à des cellules thermophotovoltaïques, disposées à l'extérieur du RTG classique équipé de thermocouples, pourraient théoriquement permettre d'atteindre des rendements proches de 30 %.
Les générateurs Stirling à radioisotopes (SRG), utilisant un moteur Stirling pour générer le courant électrique, permettraient d'atteindre une efficacité de 23 %, voire davantage en amplifiant le gradient thermique. Le principal inconvénient de ce dispositif est cependant d'avoir des pièces mécaniques en mouvement, ce qui implique de devoir gérer l'usure et les vibrations de ce système.
Utilisation
La puissance reçue du soleil décroît rapidement — selon une loi en 1/r2 — à mesure qu'on s'éloigne du centre du système solaire[1], ce qui rend très insuffisants les panneaux solaires sur les sondes spatiales destinées à explorer les planètes lointaines : ces sondes sont donc équipées de générateurs à radioisotope afin de prendre le relai des panneaux solaires au-delà de l'orbite de Mars, comme par exemple les sondes Pioneer 10, Pioneer 11, Voyager 1, Voyager 2, Galileo, Ulysses, Cassini, ou encore New Horizons. Ces générateurs permettent également aux robots déposés en surface des planètes de fonctionner la nuit, lorsque les panneaux solaires sont dans l'obscurité : les six Apollo Lunar Surface Experiments Packages déposés sur la Lune utilisent des GTR, tout comme les deux sondes martiennes Viking 1 et 2.
Un générateur thermoélectrique à radioisotope est particulièrement bien adapté à la production d'une alimentation électrique stable, sur une longue durée, et pour maintenir opérationnels pendant plusieurs années les instruments embarqués dans les sondes interplanétaires. Ainsi, le générateur embarqué sur la sonde New Horizons est capable de fournir une alimentation électrique stable de 200 Watts sur plus de 50 ans. Au bout de deux siècles, la puissance tombe à 100 Watts. Cependant, en raison du plutonium présent dans un GTR spatial, tout échec au décollage des lanceurs utilisés pour propulser la sonde présente un risque environnemental.
Les générateurs à isotope ont été principalement conçus pour l'exploration spatiale, mais l'Union soviétique les a utilisés pour alimenter des phares isolés à l'aide de générateurs au strontium 90. Ce dernier est sensiblement moins cher que les autres radioisotopes traditionnels, mais émet presque exclusivement des radiations β, à l'origine d'un fort rayonnement X par Bremsstrahlung. Cela ne posait pas de problème majeur compte tenu du fait que ces installations étaient destinées aux endroits isolés et peu accessibles, où elles fournissaient une source d'énergie très fiable, mais présentait tout de même des risques potentiels en cas d'incident ou de dégradation de ces matériels sans surveillance rapprochée. Du millier de générateurs de ce type, plus aucun n'est aujourd'hui en état de fonctionner suite à l'épuisement du radioisotope.
Sécurité
Les générateurs à isotope ne fonctionnent pas comme les centrales nucléaires. Les centrales créent l'énergie à partir d'une réaction en chaîne dans laquelle la fission nucléaire d'un atome libère des neutrons, qui à leur tour entraînent la fission d'autres atomes. Cette réaction, si elle n'est pas contrôlée, peut rapidement croître de façon exponentielle et causer de graves accidents, notamment par la fonte du réacteur.
À l'intérieur d'un générateur à isotope, on utilise seulement le rayonnement « naturel » du matériau radioactif, c'est à dire sans réaction en chaîne, ce qui exclut a priori tout scénario catastrophe. Le carburant est de fait consommé de façon lente, cela produit moins d'énergie mais cette production se fait sur une longue période.
Même si le risque de catastrophe majeure est quasi nul, on n'est cependant pas à l'abri d'une contamination radioactive : si le lancement d'une sonde spatiale échoue à basse altitude, il y a un risque de contamination localisée, tout comme dans la haute atmosphère, une désintégration de la sonde pourrait engendrer une dissémination de particules radioactives. On dénombre plusieurs accidents de ce type, dont trois (le satellite américain Transit 5BN-3 et 2 sondes russes dont la mission Cosmos 305) ayant conduit à la libération de particules radioactives dans l'atmosphère. Dans les autres cas, aucune contamination n'a pu être détectée, et certains générateurs à isotopes ont été récupérés intacts, ayant résisté à la retombée dans l'atmosphère[2].
Notes et références
Liens externes (en anglais)
- Basic Elements of Static RTG's Une compilation de tables et de graphiques rassemblant des données sur la conception des GTR.
- Article sur la sécurité du générateur utilisé pour la mission Cassini-Huygens.
- Un rapport sur l'utilisation des générateurs à isotope dans les phares.
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