Gouttière (architecture)

Gouttière (architecture)
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Gouttière
Trois hirondelles sur la gouttière d'un toit d'ardoise.

Une gouttière est un ouvrage de collecte des eaux pluviales à l'égout d'un pan de toit. Elle diffère d'un chéneau par la nature discontinue de son support. Le chéneau est posé sur une fonçure faite généralement de voliges ou de frises jointives, quelquefois de plâtre. La gouttière est portée par des crochets dont les profils caractérisent des façons régionales.

La gouttière est dite pendante quand les crochets sont fixés à l'extrémité des chevrons en saillie, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un bandeau d'égout. Elle est dite rampante si les crochets sont fixés à la face supérieure des chevrons ou au voligeage de l'égout. On la pose aussi sur entablement à la façon anglaise, ou sur des crochets munis d'une chevillette fichée dans le mur gouttereau, à la façon du Nord.

On utilise pour façonner les gouttières divers métaux laminés assez rigides pour franchir sans risque de fluage la distance entre les chevrons: le zinc, le cuivre, le fer galvanisé, l'acier inoxydable et l'aluminium, et aussi le PVC.

Elles sont composées d'éléments de longueur standardisée, emboîtées et soudées (ou collées). Elles peuvent aussi être profilées en pleine longueur d'usage jusqu'à vingt mètres (système Dal'Alu), dans un atelier mobile amené sur le chantier. Les talons ferment les extrémités. Le fond est ouvert en bas de pente par une naissance ou moignon qui déverse l'eau dans la descente directement, par une volée de coudes ou par une cuvette.

Les gouttières en aluminium, sont elles profilées en continu sur le site de pose. Les parties droites sont sauf très grandes longueurs en une seule pièce, en cas de raccord « en angle » des pièces d'adaptation permettent une jonction par rivetage et jointoiement en silicone. Ce matériau est en outre revêtu d'une laque « époxy » dans une gamme de couleur contribuant a une meilleure esthétique des constructions[1].

Sommaire

Historique

Tuiles gouttières
En Finlande, gouttière en bois, elle protège le seuil du rideau de pluie.
En suisse, le fut recreusé est porté par des potences clouées.

La nécessité d'éloigner le ruissèlement du toit des fondations de l'édifice s'est avérée dès que l'homme sédentaire a voulu assurer la pérennité de son installation et la conservation de ses victuailles. On a eu recours, tout d'abord, à une large saillie de l'égout à l'aplomb duquel on aménageait un caniveau destiné à évacuer l'eau dans la pente du terrain ou vers un cours d'eau naturel. Cet usage garda sa pertinence autant que l'habitat resta peu groupé.

La densité d'occupation des cités, surtout quand elles se renfermèrent dans des murs, imposa un contrôle plus rigoureux de la destination des eaux pluviales. On en vint à concevoir une collecte par réseaux publics, intégrés à la voirie et composés de caniveaux de rue et d'égouts souterrains. L'adduction privée y aboutissait par des gargouilles au bas de la pente de chéneaux de pierre parfois revêtue de plomb, lesquels chéneaux courraient sur les murs gouttereaux.[2]

Viollet-le-Duc mentionne dans son dictionnaire, des tuiles gouttières utilisées depuis le XIIe siècle sur l'habitat bourgeois. Ce sont de longues tuiles de courant souvent vernissées et dont une rive est rabattue et prolongée en méplat pour former une queue qu'on scelle entre l'entablement et le rang de doublis[3]. L'usage en est encore vivant dans le Roussillon et en Catalogne.

En 1845 M. Toussaint de Sens définie la gouttière dans le vocabulaire qu'il annexe à son manuel d'architecture, puis il ajoute qu'« on en fait aussi en bois de chêne recreusé. »[4] Augustin Magné et Henri Somme signalent encore en 1947 des gouttières en bois: « …on en voit encore dans les campagnes composées simplement de deux planches clouées d'équerre et aboutissant à une descente formée d'une simple corde tendue par le poids d'une pierre qui conduit, tant bien que mal, l'eau dans un tonneau. »[5]

Avant le XIXe siècle, dans les Alpes où le bois abonde, on creusait des demi-futs de résineux minces qu'on fixait à l'aide de chevilles sous l'égout des toits de bardeaux. C'est une façon que l'on peut encore observer au début du XXIe siècle dans certaines vallées de Savoie[6], et dans d'autres pays où l'on construit en bois.

À Ouessant, où l'eau douce est rare, une ruellée de mortier biaise disposée à l'égout, dirige le ruissellement vers une citerne. On trouve aussi en pays Bigouden des ruellées rampantes en forme d'accent circonflexe au-dessus de la porte, pour protéger le seuil du rideau de pluie[7].

Les premières vraies gouttières étaient en cuivre et permettaient au mur gouttereau de devenir la façade du bâtiment. Pourtant, ce n'est que dans la deuxième moitié du XIXe siècle, avec l'essor de l'industrie du zinc laminé, que l'usage des gouttières se répandit dans les centres urbains. Les travaux haussmanniens favorisèrent l'élaboration et la diffusion de cette nouvelle technique qui se généralisa bientôt.

Les parties de la gouttière

À gauche, le dosseret à pince, un peu plus haut que l'ourlet, à droite.

La gouttière forme une rigole dont le fond est en pente, chacune de ses extrémités est fermée par un talon rapporté et soudé ou emboité. Le fond du bas de pente est ouvert par une naissance cylindrique ou conique dont le collet battu est soudé, et qui dirige le ruissellement vers un tuyau de descente ou vers un « jet de volée », d'où l'eau tombe directement au sol.

Elle est fabriquée industriellement en éléments de deux, quatre ou six mètres par profilage de bandes de métal, ou façonnée par le zingueur en atelier ou sur le chantier. La rive extérieure est ourlée d'un « boudin » pour améliorer la rigidité et l'aspect, la rive intérieure ou dosseret a le bord franc ou muni d'une pince[8] assez ouverte.

Les éléments peuvent être emboités à recouvrement, quelquefois rivetés, et collés ou soudés jusqu'à atteindre une longueur totale de dix à douze mètres pour le zinc et le PVC, et davantage pour l'aluminium, le cuivre et l'acier. La nécessité de ménager un jeu pour la dilatation interdit de dépasser des longueurs définies par les normes (en France, le DTU 40-41 pour le zinc). Au-delà de ces longueurs, on doit diviser la gouttière par un joint de dilatation. Les joints de dilatation sont de plusieurs sortes :

– les joints à besace dont les éléments sont emboités mais non soudés, chacun a son talon et les talons sont couverts d'une pièce de zinguerie: la besace qui protège du ruissèlement le pertuis qu'on a laissé entre eux et rejette l'eau de part et d'autre, dans les gouttières qu'on aboute ;
– les joints de néoprène qui sont posés au fond d'une jonction non soudée et soudés à chacun des éléments qu'ils joignent ;
– les joints coulissants de PVC, sans collage.

Les joints à besace ont l'inconvénient de diviser la pente et d'ajouter des descentes dont les architectes sont fort embarrassés.

Les éléments peuvent aussi être joints en retour d'angle lorsque la ligne d'égout est brisée par un arêtier ou par une noue. Les deux bouts à joindre sont coupés d'onglet et l'on façonne un bord, par étirage et rétreint, au côté qui recouvre, puis l'on soude. Des retours d'équerre sont emboutis en usine.

Les types de gouttières

La gouttière peut être suspendue sous un égout saillant ou posée sur un entablement par l'intermédiaire de crochets qui déterminent la pente. C'est alors une gouttière pendante, dont le dosseret est dans un plan vertical donc sécant au plan du rampant. Les gouttières pendantes ont souvent le profil demi-circulaire, on les appelle « demie-ronde ». Il y en a une variante, la gouttière lyonnaise, qui a l'ourlet plus gros. On en fait d'autres dont le profil est rectangulaire et certaines dont la face est ornée de moulures parfois même estampées de guirlandes florales. Sur entablement, on pose la gouttière anglaise, demie-ronde à gros ourlet, dont le développement latéral est inconstant pour que l'ourlet reste de niveau.

Certaines gouttières sont posées sur le bas du rampant, leur dosseret est dans le plan du rampant, ce sont les gouttières rampantes. Il en existe quelques variantes régionales dont l'ourlet se relève par une courbure tangente ou par un pli. Un pli de cent dix degrés fait un relevé de huit ou dix centimètres à la gouttière nantaise, dite aussi gouttière Laval. La gouttière ardennaise, dite aussi gouttière havraise, est roulée selon un rayon de cinq centimètres environ sur cent quarante degrés.

Chaque type régional peut être façonné en plusieurs dimensions selon le débit d'eau qu'on attend qu'il aura. La dimension, définie par la largeur développée en centimètre, est de dix-sept, vingt-cinq, trente-trois ou quarante : les divisions entières par douze, huit, six et cinq de la feuille de deux mètres qu'on fabriquait exclusivement au XIXe siècle. Les gouttières rampantes peuvent aussi être façonnées à développement variable; on règle alors le dosseret de niveau pour éviter le tranchis d'égout biais.

La pose

Le débit d'une gouttière dépend de sa pente, de la surface, et de la forme de la section de son écoulement. On admet que la pente ne doit pas être inférieure à cinq millimètres par mètre, mais la dénivellation des extrémités d'une gouttière de douze mètres atteint six centimètres qui ne peuvent guère être dépassés sans désordres techniques et esthétiques. Aussi s'en tient-on souvent à cette pente raisonnable.

La section d'écoulement doit être considérée la gouttière étant en place, avec le dosseret plus haut que l'ourlet de dix millimètres au moins, pour tourner à l'extérieur d'éventuels débordements. Sa surface est en proportion du carré de la largeur développée de la gouttière. Le DTU 60.11 donne un tableau qui permet d'évaluer la section minimale nécessaire à desservir une toiture mesurée en plan. Les sections rectangulaires et triangulaires doivent être majorées respectivement de dix et de vingt pour cent. Ainsi une gouttière demi-ronde de vingt-cinq permet de traiter l'égout d'un pan de couverture (ou d'un ensemble de pans) dont la surface en plan égale trente sept mètres carrés, tandis que celle de trente trois traite une surface en plan de quatre-vingt cinq mètres carrés[9].

Nature des matériaux utilisés

Voir aussi

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Bibliographie

  • Mémento du couvreur zingueur, édité par le Centre du Zinc (13e éd. 1989)
  • Le mémento du couvreur zingueur, VMZinc, édition 2010.

Notes et références

  1. Site Dal'alu
  2. Cf Georges Doyon et Robert Hubrecht, L'Architecture rurale et bourgeoise en France, éditions Vincent, Fréal et Cie, Paris (1969), ISBN 978-2707200785, (p. 460 à 464).
  3. Cf l'article « Tuile » du Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle sur Wikisource.
  4. Cf M. Toussaint de Sens, Nouveau manuel complet d'architecture ou traité de l'art de bâtir, Librairie Encyclopédique Roret, 1845.
  5. Cf A. Magné et H. Somme, Traité pratique de couverture : Ardoise, tuile, zinc, plomb, cuivre et autres matériaux, éditions Garnier frères, Paris, 1947, (p. 247).
  6. Cf Marie-Thérèse Hermann, Architecture et vie traditionnelle en Savoie, La fontaine de Siloé, ISBN 2-84206-122-5, (p. 177).
  7. Cf Patrick Hervé, Maisons paysannes en Bretagne,Skol vreizh,1991, ISBN 2 903313 42 3, (p. 45).
  8. En zinguerie, une pince est un bord plié à plus de 135 degrés. La pince donne de la tenue à la rive, permet l'agrafure de pattes ou de la pince d'agrafage inversée d'une autre pièce et s'oppose à la remontée de l'eau par dépression.
  9. Cf Le mémento du couvreur zingueur, Vmzinc, 2010, page 52.

Articles connexes

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