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Girsu
Girsu est une ancienne cité de Mésopotamie du sud, dont les ruines se trouvent de nos jours sur le site archéologique de Tello, dans le sud-est de l’Iraq, entre le Tigre et le Shatt el-Haï, site ovale d’environ 4 km sur 3. Elle était située dans l'État sumérien de Lagash, dont elle était la capitale religieuse, résidence du dieu dynastique Ningirsu, et probablement aussi la capitale politique, pour l'époque qui nous est bien documentée (à partir du Dynastique archaïque III, c. 2500 av. J.-C.). On a d’ailleurs longtemps cru que Tello correspondait à la ville de Lagash, Girsu n’étant alors considéré que comme un des ses quartiers, avant que Thorkild Jacobsen n’établisse la vérité.
Tello est fouillé à partir de 1877 par Ernest Choquin de Sarzec, vice-consul de France à Bassorah. La découverte de ce site et surtout des tablettes qui y reposaient a permis d’établir avec certitude l’existence de la civilisation sumérienne, dont certains (avant tout François Thureau-Dangin) supposaient déjà l’existence à la lumière des découvertes effectuées sur les sites datant des époques ultérieures. Les premières campagnes de fouilles sont souvent interrompues (en particulier de 1881 à 1888), notamment par la violence endémique dans la région de Bassorah. Pendant les arrêts des recherches, des clandestins exhument des objets et tablettes pour les revendre sur les marchés locaux. Cela, ajouté à la faible expérience des bâtiments en briques crues qu’ont les archéologues de l’époque, fait que les ruines du site de Tello ont été rapidement très dégradées, et sont de ce fait mal connues. C’est avant tout l’impressionnante masse d’objets d’arts et de tablettes qui fait de ce site un des plus importants de l’histoire de la redécouverte de la Mésopotamie antique. À partir de 1903, Gaston Cros, officier de l’armée française, prend la direction des fouilles, jusqu’en 1909. Après une longue interruption, l’abbé Henri de Genouillac fouille le site de 1928 à 1931, avant d’être relayé par André Parrot pour deux campagnes, en 1932 et 1933. En tout, Tello a connu vingt campagnes de fouilles.
Un sondage effectué sous la direction de H. de Genouillac a révélé que le site était habité depuis l'époque d'Obeid, et encore à la période d'Uruk, dont on n’a cependant dégagé aucun édifice. La période suivante, celle des Dynasties archaïques (abrégé en DA, 2900-2334 av. J.-C.) est beaucoup mieux connue, tant par l’archéologie que par les textes. Au DA II et III, le cœur du site se trouve sur le « Tell K », au centre du tell. S’y trouve le temple du dieu local, Ningirsu (le « Seigneur de Girsu »), qui est la divinité tutélaire de l’État de Lagash, dont Girsu était donc également la capitale religieuse dès l’origine, avant d’en devenir en plus la capitale politique. Le niveau le plus ancien du temple remonte au DA I : le temple est construit en briques planoconvexes typiques de la période, et est constitué de deux petites salles. Il est remanié par la suite, sans doute vers la fin du DA II, en étant enchâssé dans un massif en briques cuites. L’édifice est reconstruit par le roi Ur-Nanshe vers 2500 av. J.-C., toujours selon la même organisation, autour de deux salles, et reste de taille réduite (10,80 x 7,30 m). Il est le premier à y laisser des briques inscrites commémorant son œuvre de construction. Plusieurs reliefs perforés à son nom, à vocation votive, ont été retrouvés. Ses successeurs aménagèrent les alentours du temple : construction de puits, de canalisations, bassins, ainsi qu’un « massif » construit par Enmetena, où on a exhumé un vase en argent au nom de ce souverain ainsi qu’un relief perforé voué par le prêtre Dudu, haut personnage du royaume de Lagash. Les premiers textes historiques importants de l’histoire mésopotamienne sont de ces périodes : la Stèle des vautours d’Eannatum, les cônes d’Entemena et d’Urukagina. Le règne de ce dernier marque la fin de la période des Dynasties archaïques. C’est de ces années-là que datent la plupart des archives administratives nous informant sur la vie économique et sociale du premier royaume de Lagash, dont environ 2 000 tablettes des archives du temple de Bau.
Vers 2350, Lagash passe sous la domination du roi Lugal-zagesi d'Umma, l’ennemi héréditaire ; ce dernier est ensuite vaincu par Sargon d'Akkad, qui fonde un royaume dominant toute la Mésopotamie. C’est la fin de l’indépendance de Lagash, mais Girsu reste la capitale de la région, reléguée au rang de province. Si on a retrouvé des tablettes de cette période, aucun monument n’a été identifié comme spécifique à celle-ci. Quelques objets ont été exhumés, notamment un relief perforé au nom d’une fille de Naram-Sîn d'Akkad.
Après la chute de l'Empire d'Akkad vers 2200, Ur-Bau rend son indépendance à Lagash. Vers le milieu du XXIIe siècle av. J.-C., le roi Gudea entreprend une série d’importantes constructions, qui nous sont connues par un grand nombre de textes les commémorant. Ce souverain est avant tout connu par la vingtaine de statues en diorite le représentant exhumées à Tello, ainsi que des stèles en calcaire. Sa plus grande construction, le temple de Ningirsu, l’E.NINNU, est à situer sur le « Tell du Palais », au nord de l’ancien temple. Néanmoins, l’édifice n’a pas survécu à l’épreuve du temps, de même que le reste des constructions de Gudea. Son successeur Ur-Ningirsu II édifie un bâtiment d’abord identifié comme étant un « hypogée » monumental, en briques cuites, composé de deux ensembles, chacun organisé autour d’une grande salle rectangulaire, séparés par un long couloir pavé de briques ; il s’agit en fait peut-être d’un aménagement hydraulique.
Cette phase marque la dernière indépendance de Lagash. Vers 2100, la région passe sous le contrôle des rois de la Troisième dynastie d'Ur. Ceux-ci restaurent les temples de Girsu. La région est très importante économiquement pour cet État, comme on le voit dans les nombreuses tablettes administratives retrouvées à Tello datant de cette époque. Le début du IIe millénaire av. J.-C. (période paléo-babylonienne) voit un lent déclin de la cité, finalement désertée vers le XVIIe siècle, quand elle fait partie du royaume de Babylone.
Girsu connaît un renouveau au IIe siècle av. J.-C., en même temps que tout l’extrême sud de la Mésopotamie. Un petit potentat local, Adad-nadin-ahhe, y construit un petit palais, encore utilisé au début de notre ère (au moins jusqu’à l’époque des expéditions de Trajan), et le commémore par des inscriptions en alphabet araméen.
Voir aussi
Bibliographie
- A. Parrot, Tello, vingt campagnes de fouilles (1877-1933), Paris, 1948 ;
- (en) T. Jacobsen, « Girsu », dans Revue d’assyriologie et d’archéologie orientale 52, 1958.
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