Gestion Culturelle

Gestion Culturelle

Gestion culturelle

La gestion culturelle recouvre l'ensemble des savoirs et des pratiques de gestion dans les domaines des arts et de la culture.

En tant que science, la gestion renvoie elle-même à un corpus de théories, de connaissances et de méthodes empruntées à l'économie, aux sciences humaines et sociales, au marketing, à la science administrative, à la finance, etc. La spécificité de la gestion du "culturel" au sens le plus large renvoie à la spécificité d'un champ (ou d'un système d'activités) et de produits (matériels et immatériels) ainsi que de services "qui ne sont pas des marchandises ou des services comme les autres" (UNESCO).

Sommaire

Un champ d'activités différencié

Comme le souligne Mario d'Angelo (voir "La musique au diapason de la gestion", article cité dans la bibliographie), trois sous-systèmes doivent être distingués pour comprendre, d'une part, les mécanismes de fonctionnement de l'offre et de la demande et, d'autre part, les organisations qui rendent des offres disponibles sur les marchés culturels:

  • le sous-système des arts, du spectacle vivant et du patrimoine culturel. Il est caractérisé par une économie du prototype et par une communication "en présentiel", dans le sens où celle-ci nécessite la présence simultanée d'un émetteur (par exemple un groupe de musiciens jouant sur scène) et d'un récepteur (le public de cette même salle de spectacle);
  • le sous-système des industries culturelles (notamment le livre, la presse, le cinéma, la musique enregistrée). Il est, d'une part, régi par la loi dite des économies d'échelle (baisse des coûts unitaires lorsque augmentent les quantités produites) et, d'autre part, il est libéré de la contrainte d'espace/temps : le groupe de musiciens de l'exemple précédent aura enregistré sa musique que les auditeurs peuvent écouter sur un support, par exemple chez eux ou dans leur voiture, etc. Musiciens et auditeurs n'ont plus l'obligation d'être présents simultanément pour qu'il y ait communication de cette musique. Pour qu'il y ait cette communication entre un émetteur et un récepteur autour d'un contenu, un intermédiaire doit toutefois mettre en oeuvre une technologie beaucoup plus élaborée que dans le sous-système caractérisé par le présentiel, ;
  • le secteur des médias audiovisuels et du média Internet: il est caractérisé par la loi des économies d'échelle (taille des bassins de diffusion), tandis que l'immatérialité des ondes ou du web libère l'échange de la contrainte de la distribution physique des produits industriels. L'intermédiaire doit pouvoir s'appuyer là encore sur une technologie permettant la communication de masse. Certes, pendant plusieurs décennies, les médias audiovisuels ont fonctionné avec des proportions importantes de "direct" dans leurs programmes, nécessitant la présence simultanée des émetteurs des contenus des messages et des récepteurs (auditoires). Depuis les années 1970 se sont progressivement développés les programmes reprenant en boucle les mêmes contenus stockés (les chaînes de télévision thématiques par exemple)

La différenciation des modèles de gestion (publique ou privée)

En partant de cette différenciation en 3 sous-systèmes proposée par Mario d'Angelo - présentiel, industries culturelles -que cet auteur appelle "le sous-système éditorial", et médiatique - on peut aisément observer que cette différenciation trouve son pendant dans les modèles de gestion présents dans le secteur de la culture.

Dans le présentiel, c'est la prépondérance de la gestion publique ou de sa logique. Dans des pays comme la France, l'Allemagne, l'Italie ou encore la Belgique et l'Espagne, cette prépondérance se traduit en particulier par la proportion élevée d'institutions culturelles nationales, régionales ou locales, gérées en régies, établissements publics ou assimilés) ou qui ont un statut d'organisations non lucratives privées (associations), mais restent fortement dépendantes des pouvoirs publics. C'est le cas de la plupart des grands orchestres, des opéras, des grands théâtres ou encore des grands festivals tout comme des institutions chargées de l'enseignement artistique. A l'inverse, des pays comme les États-Unis d'Amérique, l'Australie, le Canada ou encore les Pays-Bas, la Suisse et le Royaume Uni, se caractérisent quant à eux par une proportion plus élevée, voire très forte, d'organisations et d'institutions culturelles autonomes des pouvoirs publics et gérées dans une logique privée non lucrative. En tout cas, la gestion privée commerciale reste peu développée sauf dans certaines activités comme par exemple les variétés internationales pop et rock (par exemple une grande tournée internationale d'une rock-star).

Le sous-système éditorial (industries culturelles) présente, quant à lui, une certaine homogénéité de modèle économique avec des marchés, généralement caractérisés par des oligopoles à frange, où s'affrontent des entreprises privées. La gestion publique y est marginale mais, dans beaucoup de pays, la question du soutien public aux entreprises privées commerciales offrant des biens culturels éditoriaux est posée, en particulier pour les entreprises de production audiovisuelle et cinématographique.

Le sous-système médiatique, lié à la diffusion audiovisuelle et par internet, se caractérise par une très forte évolution depuis les années 1990. D'un côté, le secteur des médias audiovisuels publics, présentant un modèle de gestion croisant le financement par la redevance et les ressources tirées de la publicité et du parrainage. Ce modèle de gestion est présent dans la quasi-totalité des pays européens (à l'exception de l'Espagne où il n'existe pas de redevance) avec des organismes publics ou para-publics aux formes juridiques les plus variées . De l'autre côté, un secteur composé de médias audiovisuels privés qui se finance principalement par la publicité et de plus en plus par des services complémentaires et des produits dérivés. C'est aussi dans ce second modèle de gestion que se situent les entreprises liées au médium Internet.

L'enseignement de la gestion dans le secteur de la culture

L'enseignement de la gestion du culturel a d'abord été introduite dans les universités américaines, du fait de l'importance qu'a pris dans ce pays, dans le sous-système des arts, du spectacle vivant et du patrimoine culturel, la gestion privée d'organisations productives de biens et services, d'une part à but non lucratif (non-profit making system) et d'autre part, complètement autonomes des pouvoirs publics. Ces organisations bénéficient certes de financements publics, mais de façon très marginale. Elles sont surtout soutenues par des donateurs individuels et par le mécénat et le sponsoring des entreprises. Leur marketing opérationnel doit par conséquent s'appuyer sur des stratégies de recherche de partenariats avec des donateurs, des mécènes et des sponsors ainsi que de développement de services annexes à leurs offres artistiques et culturelles centrales (événementiel, restaurant, location d'espaces, etc.) ainsi que de produits dérivés.

En France, la formation à la gestion culturelle a commencé à se développer à partir de 1982. L'impulsion a été donnée par Jack Lang, alors ministre de la Culture et de la Communication, avec les premières orientations sur la relation économie et culture et le concept d'entreprise culturelle. En 1984, l'AGECIF est créée par Denis Thévenin et en 1990 était fondée par Mario d'Angelo et le Groupe ESC Dijon Bourgogne avec l'appui du ministère de la Culture et de la Communication une formation faisant pour la première fois référence au management des entreprises culturelles. Il n'est pas rare à présent de voir dans les grandes écoles de gestion françaises des programmes de spécialisation ("mineure" ou "majeure" en 2ème et 3ème année) à HEC (Ecole des Hautes études commerciales), à Toulouse Business School (ESC Toulouse) et au Groupe ESC Dijon Bourgogne.

Le cadre de la gestion culturelle intègre des approches de plus en plus différenciées parce que la problématique porte soit sur des métiers spécifiques (la musique, le patrimoine, le tourisme culturel, etc.), soit sur des contextes particuliers (par exemple les collectivités territoriales ou la coopération culturelle internationale), soit encore sur des cadres d'action (la gestion de projets, les organisations culturelles, etc.). Il n'est pas étonnant dans ces conditions de voir toute cette diversité d'approches et de spécialisations dans l'offre de formation des universités notamment au niveau de diplôme Master 2 (Paris IV en Administration et gestion de la musique, Paris VIII-Saint Denis, IEP de Lyon, L'Observatoire des Politiques culturelles de Grenoble). Les ressources en expertise, en enseignants et en documentation sont de plus en plus conséquentes et ceci non seulement en France mais dans toute l'Europe où la dynamique culturelle (d'après un rapport EUROSTAT de 2006 le secteur de la culture représente environ 4% des emplois) est accompagnée d'une dynamique de la formation aux métiers de la culture et en particulier ceux liés à la gestion culturelle.

Fondé en 1992 sous l'égide du Conseil de l'Europe, le réseau européen ENCATC (European Network of Cultural Administration Training Centres) regroupe environ 140 membres, universités, écoles de gestion et autres organismes de formation diplômante en Europe.

Voir aussi

Bibliographie

  • Françoise Benhamou, L'économie du star système, Odile Jacob, 2001.
  • Mario d'Angelo, "La musique au diapason de la gestion", Musicologies, n° 2, OMF, Université Paris-Sorbonne, 2005, p. 5-21.
  • Mario d'Angelo, " The Governance of Classical Music Institutions in West Europe", Cahiers du CEREN, n° 17, 2007, ESC Dijon.
  • Yves Evrard, Alain Busson et alii, Le management des entreprises artistiques et culturelles, Economica, 2000.
  • Pierre François, Le monde de la musique ancienne. Socio-économie d'une innovation esthétique, Economica, 2005.
  • Robert Lacombe, Le spectacle vivant en Europe, modèles d'organisation et politiques de soutien, La Documentation Française, Paris, 2004.
  • Frédéric Martel, De la culture en Amérique, Gallimard, 2006.
  • J-M Schuster, "Neither Public nor Private: The Hybridation of Museums", Journal of Cultural Economics, Vol. 22, n° 2-3, 1998, p. 127-150.
  • KEA, L'économie de la Culture en Europe, rapport commandité par la Commission européenne, Bruxelles, 2006.

Liens connexes

Liens externes


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