Droit de preemption

Droit de preemption

Droit de préemption

Le droit de préemption (ou droit de préférence) est un droit légal ou contractuel accordé à certaines personnes privées (locataire, fermier, indivisaire, SAFER…) ou publiques (collectivités territoriales, mairies…) d'acquérir un bien par priorité à toute autre personne, lorsque le propriétaire manifeste sa volonté de le vendre.

Sommaire

Utilisation

La création d'un droit de préemption résulte soit de la loi, soit d'un contrat entre les intéressés. Il n'est par exemple pas rare, en droit des affaires, que les statuts d'une société prévoient un droit de préemption sur les parts sociales ou actions de l'entreprise au profit des associés ou des actionnaires, afin d'éviter qu'une personne non agréée puisse acheter une partie du capital social.

En pratique, lorsqu'un droit de préemption existe, le propriétaire doit notifier, préalablement à la vente, son projet de vente au titulaire du droit de préemption.

Le titulaire du droit de préemption a généralement entre un et deux mois pour faire connaitre sa réponse. A défaut de réponse dans ce délai, il est réputé avoir renoncé à son droit de préemption et le propriétaire peut alors vendre son bien librement, mais aux mêmes conditions.

Si le bénéficiaire décide de préempter, il le fait aux conditions financières demandées par le vendeur. Toutefois, certains droits de préemption publics permettent au bénéficiaire d'offrir un prix inférieur à celui demandé par le vendeur. En cas de désaccord persistant, le "juste prix" est alors déterminé par une autorité impartiale. En France, il s'agit du juge de l'expropriation.

Expropriation et préemption

La différence fondamentale entre un droit de préemption et une expropriation est que,

  • dans le premier cas, le propriétaire prend l'initiative de vendre (mais le bénéficiaire du droit de préemption se substitue à l'acheteur)
  • alors que dans le cas d'une expropriation, le propriétaire n'est pas vendeur, et sa dépossession est effectuée d'autorité par l'expropriant.

Également, peut exister dans certains cas un droit de délaissement. Il s'agit de la possibilité offerte à un propriétaire d'exiger d'un organisme, généralement de droit public, d'acheter son bien. Ce droit est généralement instauré pour compenser des servitudes d'utilité publiques imposées à une propriété. Ce droit est destiné à garantir à un propriétaire la possibilité de vendre son bien dans des conditions acceptables, lorsque les contraintes qui le grèvent réduiraient sa valeur marchande, voire compromettraient la possibilité de le vendre.

En France, les droits de préemption publics

Le Droit de préemption urbain (DPU)

Article détaillé : Droit de préemption urbain.

Une commune ou un établissement public de coopération intercommunale peut instaurer sur son territoire le droit de préemption urbain (DPU) lorsque la commune est dotée d'un PLU (Plan local d'urbanisme ou d'un POS (Plan d'occupation des sols). La loi "Urbanisme et Habitat" de 2003, permet également aux communes dotées de cartes communales d'instituer un droit de préemption.

Ce droit de préemption peut être « simple » ou « renforcé ».

Le droit de préemption simple, donne la possibilité à la commune ou à son délégataire d'être prioritaire sur l'achat d'un bien mis en vente. Le droit de préemption dit « renforcé » permet d'étendre son application à des biens qui en étaient normalement exclus, en particulier, aux ventes de lots de copropriété et aux immeubles construits il y a moins de dix ans.

Toutes les ventes de biens immobiliers situées dans les zones où un DPU est instauré doivent préalablement faire l'objet d'une Déclaration d'intention d'aliéner (« DIA ») ce qui permet à la mairie d'être informée des transactions en cours et d'indiquer si elle souhaite ou non exercer son droit de préemption.

Cependant, ce droit ne peut désormais être appliqué que s'il est associé à un véritable projet d'intérêt général, par exemple dans le cadre de la renovation de quartiers ou de la construction de logements sociaux aidés. Le caractère architectural d'un bâtiment, quel que soit son intérêt, ne peut justifier à lui seul, l'application d'un droit de préemption par la mairie.

Le montant de la préemption est fixé par le bénéficiaire du droit de préemption, après avis de France Domaine (service de l'État), contrairement à l'avis souvent répandu, la mairie n'a pas obligation de suivre l'information du prix du marché.

Si ce prix n'est pas celui demandé par le vendeur, celui-ci peut, dans un délai de deux mois, accepter ce prix, refuser de vendre, ou demander que le prix soit fixé par le Juge. ( Attention procédure complexe, il est préférable d'être assisté par un avocat)

Bien évidemment, une commune peut également acquérir un bien à l'amiable, sans faire usage d'un droit de préemption.

La Zone d'aménagement différé (ZAD)

Article détaillé : Zone d'aménagement différé.

L'Espace naturel sensible (ENS)

Article détaillé : Espace naturel sensible.

Espace à valeur patrimoniale forte (écologique, paysager), à propriété des conseils généraux qui assurent la gestion et la conservation de ces sites.

Le financement des Espaces naturels sensibles est assuré par la « taxe ENS » qui est annexée à la Taxe locale d'équipement, et est, comme elle, due à l'occasion de la délivrance d'un permis de construire ou d'une procédure comparable

Le droit de préemption des baux commerciaux

La loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises dite "loi Duteil" a instauré un droit de préemption[1] permettant aux communes de préempter des baux commerciaux.

Le décret d'application[2] n'est paru que fin 2007, et le régime, codifié aux articles L 214-1 et suivants et R 214-1 et suivants du code de l'urbanisme, se met en place.

Le droit de préemption en faveur des jardins familiaux

Le code rural prévoit que les collectivités locales ou les EPCI compétents peuvent exercer un droit de préemption en vue de l’acquisition de terrains destinés à la création ou à l’aménagement de jardins familiaux [3].

Le droit de préemption des résidences principales saisies par un créancier

L'article L 616 du Code de la construction et de l'habitation[4] permet à la commune de préempter un logement constituant la résidence principale d'une personne qui remplit les conditions de ressources pour l'attribution d'un logement à loyer modéré, lorsque ce logement fait l'objet d'une saisie immobilière.

Ce droit de préemption, qui peut être délégué à un un office public de l'habitat, s'exerce dans le mois de l'adjudication du logement, et est exclusivement destiné à assurer le maintien dans les lieux de l'ancien propriétaire.

En France, les droits de préemption privés

Le droit de préemption des indivisaires

En vertu de l’article 815-14 du code civil, « l’indivisaire qui entend céder, à titre onéreux, à une personne étrangère à l’indivision, tout ou partie de ses droits dans les biens indivis ou dans un ou plusieurs de ces biens est tenu de notifier par acte extrajudiciaire aux autres indivisaires le prix et les conditions de la cession projetée […]. Tout indivisaire peut, dans le délai d’un mois qui suit cette notification, faire connaître au cédant, par acte extrajudiciaire, qu’il exerce un droit de préemption aux prix et conditions qui lui ont été notifiés ». Lorsqu’un indivisaire exerce son droit de préemption, il dispose d’un délai de deux mois pour la réalisation de la vente à compter de la date d’envoi de sa réponse au vendeur. Si l’indivisaire n’a pas réalisé la vente à l’issue de ce délai de deux mois, il sera mis en demeure de le faire dans un délai de quinze jours. Si la mise en demeure est restée sans effet à l’issue de ce délai de quinze jours, la déclaration de préemption est nulle de plein droit. Dans le cas d’une vente qui aurait été opérée au mépris des dispositions précitées, l’action en nullité peut être intentée dans les cinq ans à compter de la réalisation de la vente « frauduleuse » et seulement par ceux à qui les notifications auraient dû être faites ou par leurs héritiers.

Le droit de préemption des locataires d'habitation

Tout propriétaire peut vendre librement en cours de bail un logement loué. Le nouveau propriétaire reprend le contrat de location à son compte. Mais si un congé pour vendre [5] est adressé au locataire, celui-ci est titulaire d'un droit de préemption aux mêmes conditions notamment de prix que celles spécifiées dans le document donnant congé. Ce congé ne peut être donné que pour l'échéance du bail.

Dans certains cas de vente à la découpe ou de mise en copropriété, le locataire dispose également d'un droit de préemption

Le droit de préemption des SAFER

Les SAFER disposent d'un droit de préemption défini à l'article L. 143-1 du code rural, qui s'applique de manière subsidiaire au droit de préemption urbain au au droit de préemption des ZAD, lors des ventes de terrains et biens immobiliers à vocation agricole.

Ce droit de préemption est destiné à permettre :

  1. L’installation, la réinstallation ou le maintien des agriculteurs :
  2. L’agrandissement et l’amélioration de la répartition parcellaire des exploitations existantes ;
  3. La préservation de l’équilibre des exploitations lorsqu’il est compromis par l’emprise de travaux d’intérêt public ;
  4. La sauvegarde du caractère familial de l’exploitation ;
  5. La lutte contre la spéculation foncière ;
  6. La conservation d’exploitations viables existantes lorsqu’elle est compromise par la cession séparée des terres et de bâtiments d’habitation ou d’exploitation ;
  7. La mise en valeur et la protection de la forêt ainsi que l'amélioration des structures sylvicoles dans le cadre des conventions passées avec l'État ;
  8. La réalisation des projets de mise en valeur des paysages et de protection de l’environnement approuvés par l’État ou les collectivités locales et leurs établissements publics.
  9. Dans les conditions prévues par le chapitre III du titre IV du livre Ier du code de l'urbanisme, la protection et la mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains [6].

Notes et références

  1. Ce droit de préemption des fonds de commerce est codifié aux articles L. 214-1 et suivant du code de l'urbanisme
  2. Décret N° 2007-1827 du 26 décembre 2007 relatif au droit de préemption des communes sur les fonds de commerce, les fonds artisanaux et les baux commerciaux
  3. SOURCE : code rural, art R. 562-2 et suivants, code de l'urbanisme, art L 216-1 et R 216-1.
  4. dans sa rédaction issue de l'rdonnance n°2007-137 du 1 février 2007 relative aux offices publics de l'habitat
  5. Congé pour vente
  6. Source : code rural (nouveau), article L.143-2.


Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • René Hostiou et J.-F. Struillou, « Les droits de préemption des collectivités publiques », dans Études foncières, N°135 (septembre-octobre 2008) (ISSN 0183-5912) 

Liens externes

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