Acte De Langage

Acte De Langage

Acte de langage

Un acte de langage est un moyen mis en œuvre par un locuteur pour agir sur son environnement par ses mots : il cherche à informer, inciter, demander, convaincre, etc. son ou ses interlocuteurs par ce moyen. L'acte de langage désigne donc aussi l'objectif du locuteur au moment il formule son propos. Quelques traitements plus tôt peuvent être trouvés chez certains Pères de l'Église et philosophes scolastiques (dans le contexte de la théologie sacramentelle), aussi bien que chez Thomas Reid, et C. S. Peirce. Adolf Reinach peut être crédité pour avoir développé un compte assez complet des actes sociaux en tant qu'expressions performatives, bien que son travail n'ait eu que peu d'influence, peut-être en raison de sa mort prématurée. Roman Jakobson avait des idées similaires dans les années 60, sous la forme de ce qu'il appelle la fonction conative du langage.

Cette idée a été développée par John Langshaw Austin et son étudiant John Searle, qui expliquent qu'un individu s'adresse à un autre dans l'idée de faire quelque chose, à savoir de transformer les représentations de choses et de buts d'autrui, plutôt que de simplement dire quelque chose. On peut alors modéliser l'acte de langage comme n'importe quel autre type d'acte : il a un but (aussi appelée intention communicative), un pré-requis, un corps (c'est-à-dire une réalisation) et un effet.

Il existe différents types d'actes de langage, que l'on catégorise généralement selon leur but : citer, informer, conclure, donner un exemple, décréter, déplorer, objecter, réfuter, concéder, conseiller, distinguer, émouvoir, exagérer, ironiser, minimiser, railler, rassurer, rectifierL'identification de l'acte de langage conditionne largement l'interprétation du message délivré, au-delà de la compréhension de son contenu sémantique. Par exemple, la motivation de l'énoncé « J'ai appris que tu as obtenu ton diplôme » peut être de féliciter son destinataire, de s'excuser d'avoir douté de sa réussite, ou simplement de l'informer du fait rapporté.

Toutefois, certains chercheurs remettent en cause la nécessité de devoir toujours reconnaître l'acte de parole pour qu'il s'accomplisse avec succès. Sperber et Wilson illustrent cela par l'exemple des prédictions. Une prédiction est vue comme un type d'énoncé dans lequel une hypothèse possède une propriété qui porte sur un événement futur, lequel échappe, au moins en partie, au contrôle du locuteur. Selon cette théorie, la plupart des autres actes de langage pourraient être également définis par d'autres propriétés spécifiques de leur contenu.

Sommaire

Pragmatique et actes de langage

La pragmatique linguistique sest largement développée sur la base de la théorie des actes de langage, qui en a constitué historiquement le creuset. La théorie des actes de langage a pour thèse principale lidée que la fonction du langage, même dans les phrases déclaratives, nest pas tant de décrire le monde que daccomplir des actions. Cette thèse apparaît valide pour l'analyse d'énoncés comme les ordres, promesses, et conseils ou les actes institutionnels (baptême, mariage, etc). Son développement par Searle, à la suite dAustin, qui en a été le pionnier, a largement influencé le développement récent de la pragmatique linguistique. Néanmoins, la pragmatique cognitive, apparus avec les travaux de Dan Sperber et Deirdre Wilson dans les années 1990, remet fortement en cause la théorie des actes de langage. Selon Sperber et Wilson, qui ont proposé une catégorisation grandement simplifié des actes de langage, les énoncés performatifs sont peu fréquents, ou tout du moins linterprétation de nombre de ces énoncés ne reposent pas sur leur éventuel caractère performatif (c'est à dire que ces énoncés ont un sens indépendamment de l'intention communicative). La pragmatique cognitive limite donc grandement la portée de la théorie des actes de langage.

Les actes de langage : le fondement historique

On peut considérer que la pragmatique naît en 1955 à Harvard, lorsque John Austin y donne les conférences William James et introduit la notion nouvelle d’« actes de langage ». Ainsi, contrairement à ce que lon pourrait croire, la pragmatique prend racine dans les travaux dun philosophe qui sélève contre la tradition dans laquelle il a été éduqué et selon laquelle le langage sert principalement à décrire la réalité. Austin, en opposition avec cette conception « vericonditionnaliste » de la fonction du langage, quil appelle, de façon péjorative, lillusion descriptive, défend une vision beaucoup plus « opérationnaliste » selon laquelle le langage sert à accomplir des actes. Il fonde sa théorie du langage et de son usage sur lexamen de certains énoncés de forme affirmative, à la première personne du singulier de lindicatif présent, voix active, des énoncés qui, selon Austin, en dépit de leur forme grammaticale, ne décriraient rien (et ne seraient donc ni vrais ni faux) mais correspondraient plutôt à lexécution dune action.

La théorie des actes de langage se fonde donc sur une opposition à « lillusion descriptiviste » qui veut que le langage ait pour fonction première de décrire la réalité et que les énoncés affirmatifs soient toujours vrais ou faux. Selon la théorie des actes de langage, au contraire, la fonction du langage est tout autant dagir sur la réalité et de permettre a celui qui produit un énoncé daccomplir, ce faisant, une réaction. Dans cette optique, les énoncés ne sont ni vrai ni faux.

Performatif vs constatif

La thèse dAustin, dans sa première version tout au moins, sappuie sur une distinction parmi les énoncés affirmatifs entre ceux qui décrivent le monde et ceux qui accomplissent une action.

  • (1) Le chat est sur le paillasson.
  • (2) Je te promets que je temmènerai au cinéma demain.

Les premiers sont dits constatifs, alors que les seconds sont performatifs. Les premiers peuvent recevoir une valeur de vérité : ainsi (1) est vrai si et seulement si le chat est sur le paillasson. Les seconds ne peuvent pas recevoir de valeur de vérité. Toutefois, ils peuvent être heureux ou malheureux, lacte peut réussir ou échouer et, de même que les valeurs de vérité attribuées aux énoncés constatifs dépendent des conditions de vérité qui leur sont attachées, la félicité dun énoncé performatif dépend de ses conditions de félicité.

Les conditions de félicité dépendent de lexistence de procédures conventionnelles (parfois institutionnelles : mariage, baptême, etc.) et de leur application correcte et complète, des états mentaux appropriés ou inappropriés du locuteur, du fait que la conduite ultérieure du locuteur et de linterlocuteur soit conforme aux prescriptions liées à lacte de langage accompli. Plus généralement, il y a deux conditions de succès primitives :

  • le locuteur doit sadresser à quelquun,
  • son interlocuteur doit avoir compris ce qui lui a été dit dans lénoncé correspondant à lacte de parole.

Limites de la distinction performatif/constatif

La distinction performatif/constatif, basée comme elle lest sur la distinction entre condition de félicité et conditions de vérité, na pas résisté à lexamen sévère auquel Austin la soumis. Il a notamment remarqué qua côté de performatifs explicites comme (2), il y a des performatifs implicites comme (3), qui peut aussi correspondre à une promesse, mais le verbe « promettre » nest pas explicitement employé :

  • (3) Je temmènerai au cinéma demain.

De plus, les constatifs correspondent à des actes de langage implicites, des actes dassertion sont donc soumis à des conditions de félicité, comme le sont les performatifs. Enfin, ils peuvent être comparés à leur correspondant performatif explicite, comme (4), ce qui ruine définitivement la distinction performatif/constatif :

  • (4) Jaffirme que le chat est sur le paillasson.

Lopposition entre conditions de félicité et conditions de vérité nest donc pas complète (elles peuvent se combiner sur le même énoncé), et par contrecoup, lopposition entre performatifs et constatifs nest pas aussi tranchée quil y a paraissait à un premier examen. Austin abandonne l'opposition énoncés constatifs et énoncés performatifs et bâtit une nouvelle classification des actes de langage en 3 catégories :

  • Les actes locutoires que lon accomplit dès lors que lon dit quelque chose et indépendamment du sens que lon communique ;
  • Les actes illocutoires que lon accomplit en disant quelque chose et à cause de la signification de ce que lon dit ;
  • Les actes perlocutoires que lon accomplit par le fait davoir dit quelque chose et qui relèvent des conséquences de ce que lon a dit.

Si lon en revient à lexemple (2), le simple fait davoir énoncé la phrase correspondante, même en labsence dun destinataire, suffit à laccomplissement dun acte locutionnaire. En revanche, on a accompli par lénoncé de (2) un acte illocutionnaire de promesse si et seulement si lon a prononcé (2) en sadressant à un destinataire susceptible de comprendre la signification de (2) et cet acte illocutionnaire ne sera heureux que si les conditions de félicité qui lui sont attachées sont remplies. Enfin, on aura par lénonciation de (2) accompli un acte perlocutionnaire uniquement si la compréhension de la signification de (2) par le destinataire a pour conséquence un changement dans ses croyances : par exemple, il peut être persuadé, grâce à lénonciation de (2), que le locuteur a une certaine bienveillance à son égard.

Analyse des actes illocutionnaires

Conformément à ses doutes quant à la distinction constatif/performatif, Austin admet que toute énonciation dune phrase grammaticale complète dans des conditions normales correspond de ce fait même à laccomplissement dun acte illocutionnaire. Cet acte peut prendre des valeurs différentes selon le type dacte accompli et Austin distingue cinq grandes classes dactes illocutionnaires :

  • Les verdictifs ou actes juridiques (acquitter, condamner, décréter…) ;
  • Les exercitifs (dégrader, commander, ordonner, pardonner, léguer…) ;
  • Les promissifs (promettre, faire vœu de, garantir, parier, jurer de…) ;
  • Les comportatifs (sexcuser, remercier, déplorer, critiquer…) ;
  • Les expositifs (affirmer, nier, postuler, remarquer…).

La mort dAustin la empêché de poursuivre ses travaux et le développement de la théorie des actes de langage a été poursuivi par la suite par John Searle.

Searle commence par ajouter à la théorie des actes de langage un principe fort, le « principe dexprimabilité », selon lequel tout ce que lon veut dire peut être dit : pour toute signification X, et pour tout locuteur L, chaque fois que L veut signifier (à lintention de transmettre, désire communiquer…) X, alors il est possible quexiste une expression E, telle que E soit lexpression exacte ou la formulation exacte de X. Ce principe implique une vision de la théorie des actes de langage selon laquelle les deux notions centrales sont lintention et la convention : le locuteur qui sadresse à son interlocuteur a lintention de lui communiquer un certain contenu, et le lui communique grâce à la signification conventionnellement associée aux expressions linguistiques quil énonce pour ce faire. La centralité des notions dintention et de convention ne constitue pas réellement une rupture par rapport à la théorie austinienne des actes de langage : plutôt, Searle se contente dindiquer explicitement des notions qui étaient restées davantage implicites chez Austin. Linnovation principale de Searle consiste à distinguer deux parties dans un énoncé : le marqueur de contenu propositionnel et le marqueur de force illocutionnaire. Si lon revient à lexemple (2), on voit quil est facile dy distinguer, comme dans la plupart des performatifs explicites, le marqueur de contenu propositionnel : « je temmènerai au cinéma demain », et le marqueur de force illocutionnaire : « je te promets ». Si cette distinction est plus facile à appliquer aux performatifs explicites comme (2), le principe dexprimabilité suppose néanmoins que les performatifs implicites, comme (3), sont équivalents aux performatifs explicites et que, dans cette mesure, la distinction entre marqueur de force illocutionnaire et marqueur de contenu propositionnel peut sy appliquer.

Searle a également donné sa version des règles sappliquant aux différents types dactes de langage et sa propre taxinomie de ces différents types dactes de langage. Cette taxinomie sappuie sur un certain nombre de critères :

  • le but de lacte illocutionnaire ;
  • la direction dajustement entre les mots et le mondesoit les mots « sajustent » au monde, comme dans une assertion, soit le monde « sajuste » aux mots, comme dans une promesse ;
  • les différences dans le contenu propositionnel qui sont déterminées par des mécanismes liés à la force illocutionnaire : une promesse, p. ex., déterminera le contenu propositionnel de l'énoncé de telle manière que ce contenu portera sur le futur, et sur quelque chose qui est en mon pouvoir ; une excuse déterminera le contenu de sorte à ce qu'il porte sur un événement passé, et qui a été sous mon contrôle ;
  • la force avec laquelle le but illocutionnaire est représenté, qui dépend du degré dexplication de lacte ;
  • les statuts respectifs du locuteur et de linterlocuteur et leur influence sur la force illocutionnaire de lénoncé ;
  • les relations de lénoncé avec les intérêts du locuteur et de linterlocuteur ;
  • les relations au reste du discours ;
  • les différences entre les actes qui passent nécessairement par le langage (prêter serment) et ceux qui peuvent saccomplir avec ou sans le langage (décider) ;
  • la différence entre les actes institutionnels ;
  • lexistence ou non dun verbe performatif correspondant à lacte illocutionnaire ;
  • le style de laccomplissement de lacte.

Cet ensemble un peu hétéroclite de critères permet à Searle de dégager cinq classes majeures dactes de langage, classification basée principalement sur les quatre premiers critères :

  • les assertifs [représentatifs] (assertion, affirmation…) ; les mots s'ajustent au monde ;
  • les directifs (ordre, demande, conseil…) ; le monde s'ajuste aux mots ;
  • les promissifs (promesse, offre, invitation…) ; le monde s'ajuste aux mots ;
  • les expressifs (félicitation, remerciement…) ; pas de direction d'ajustement ;
  • les déclaratifs (déclaration de guerre, nomination, baptême…) ; direction d'ajustement double (mots - monde / monde - mots).

Pour en finir avec limpact de la théorie searlienne des actes de langage, les tentatives actuelles de formalisation de la théorie des actes de langage sappuient sur les travaux de Searle.

Critique de la pragmatique linguistique

hypothèse performative et perfomadoxe

Sur la base du principe dexprimabilité, un linguiste du courant de la sémantique générative, John R. Ross, a proposé en 1970 une hypothèse qui a rencontré une fortune certaine sous lappellation dhypothèse performative. Lhypothèse performative consiste à traiter les performatifs implicites, comme (3), comme équivalents aux performatifs explicites, comme (2)

  • (2) Je te promets que je temmènerai au cinéma demain.
  • (3) Je temmènerai au cinéma demain.

Plus précisément, dans le cadre de la distinction générativiste entre structure de surface et structure profonde, lhypothèse performative consiste à supposer quun énoncé qui a (3) comme structure de surface partage néanmoins la même structure profonde quun énoncé qui a (2) comme structure de surface. En dautres termes, tout énoncé a dans sa structure profonde une préface performative (je promets que, jordonne que, jasserte que…), que cette préface performative soit explicitement exprimée (quelle appartienne à sa structure de surface) ou quelle ne le soit pas. Cette hypothèse avait lavantage, ce qui explique le retentissement quelle a eu, de donner une base plus sûre à la distinction searlienne entre marqueur de force illocutionnaire et marqueur de contenu propositionnel : la préface performative, présente dans tous les énoncés par hypothèse, correspondait au marqueur de force illocutionnaire.

Cependant lhypothèse performative sest heurté à une objection de fond, le perfomadoxe. Il consiste à faire remarquer que, dans la mesure la structure profonde dune phrase correspond à son analyse sémantique (sa forme logique) et aux conditions de vérité de la phrase en question, lhypothèse performative conduit à un paradoxe pour la plupart des assertions. Selon lhypothèse performative en effet, une phrase comme (1) a la même structure profonde quune phrase comme (4), elles seraient donc identiques. En dautres termes, on ne pourrait plus dire que (1) est vraie si et seulement si le chat est sur le paillasson, mais on devrait dire que (1) est vraie si et seulement si jaffirme que le chat est sur le paillasson. Or, il va de soi que la vérité de (1) ne dépend pas du fait que le locuteur affirme quoi que ce soit, mais dépend bien du fait que le chat soit sur le paillasson. Lhypothèse performative a donc pour conséquence dimposer pour tous les énoncés une préface performative qui :

  • soit ne doit pas être interprétée sémantiquement (pour ne pas générer de conditions de vérité incorrectes), mais dès lors la phrase nest pas interprétable ;
  • soit doit être interprétée sémantiquement (pour que la phrase soit interprétable), mais dès lors la phrase se voit attribuer des conditions de vérité incorrectes.

Ces deux conséquences étant inacceptables, lauteur du performadoxe, William G. Lycan, en conclut que lhypothèse performative doit être abandonnée.

Approche cognitiviste de Sperber et Wilson

La pragmatique linguistique sest développée sur la base du rejet par Austin de « lillusion descriptive », la thèse - admise par le sens commun - selon laquelle le langage sert à décrire la réalité. Austin, et Searle à sa suite, lui ont substitué une autre thèse, celle selon laquelle la fonction principale du langage est dagir sur le monde plutôt que de le décrire. Lidée selon laquelle tout énoncé dune phrase grammaticale complète correspond de ce fait même à un acte illocutionnaire a pour corollaire la nécessité didentifier, pour chaque énoncé, sa force illocutionnaire, qui est une partie indispensable de son interprétation. La pragmatique linguistique, qui partait de la théorie des actes de langage, a eu tendance à insister sur « laspect conventionnel et codique du langage » et à ignorer sa « sous-détermination ». Face à un énoncé, en effet, la théorie des actes de langage, à cause notamment du principe dexprimabilité, admet que linterprétation se fait essentiellement de façon conventionnelle. Les dix à quinze dernières années ont cependant vu lémergence dun courant pragmatique cognitiviste, qui, à la suite de lécole générative, voit dans le langage dabord un moyen de description de la réalité (et seulement accessoirement un moyen daction), et qui insiste sur la sous-détermination langagière et sur limportance de processus inférentiels dans linterprétation des énoncés. Cette nouvelle approche des problèmes pragmatiques, la théorie de la pertinence, a maintenant largement droit de cité et ses auteurs, Dan Sperber et Deirdre Wilson, ont mis en cause un certain nombre des principes sous-jacents à la théorie des actes de langage.

Outre le principe dexprimabilité, dont les difficultés rencontrées par lhypothèse performative indiquent les limites, Sperber et Wilson mettent en cause la pertinence même des classifications des actes de langage proposées par Austin et par Searle. Ils remarquent, à juste titre, que si la détermination dune force illocutionnaire précise est tout à la fois possible (et nécessaire) dans certain cas, dans de nombreux autres cas, elle est très difficile, pour ne pas dire impossible, et ne paraît pas indispensable à linterprétation dun énoncé. Ainsi, dans lexemple (5), on ne sait pas très bien si cet énoncé correspond à un acte de promesse, de prédication ou de menace et il ne semble effectivement pas que déterminer sil sagit de lun ou de lautre soit indispensable à linterprétation de (5:

  • (5) Il pleuvra demain

La suggestion de Sperber et Wilson est de réduire drastiquement les classes dactes de langage à trois classes qui peuvent être repérées linguistiquement (via la lexique ou la syntaxe) à savoir les actes de « ‘dire que’, dedire deet dedemander si’ » :

  • les actes dedire quecorrespondent grossièrement aux phrases déclaratives et notamment aux assertions, aux promesses, aux prédictions… ;
  • les actes dedire decorrespondent grossièrement aux phrases impératives, aux ordres, aux conseils… ;
  • les actes dedemander sicorrespondent aux phrases interrogatives et plus généralement aux questions et aux demandes dinformation.

On pourrait objecter à cette approche quelle ne prend pas en compte les actes institutionnels. Sperber et Wilson anticipent cette objection et y répondent par avance en soulignant que les règles qui régissent les actes institutionnels (le baptême, le mariage, la condamnation, louverture de séance, les annonces au bridge…) ne sont ni des règles linguistiques, ni des règles cognitives, mais relèvent davantage dune étude sociologique et que les actes institutionnels peuvent entrer dans la première grande classe, celle dedire que’. Reste une objection possible à cette approche : on pourrait penser quelle implique une nouvelle version du performadoxe. Si, en effet, on admet quun énoncé comme (1) est équivalent àJe dis que le chat est sur la paillasson’, il est bien évident que cette interprétation aura les mêmes conséquences que lhypothèse performative, celle de produire des conditions de vérité incorrectes pour (1). Pour éviter cette objection, il faut admettre que lattribution de la force illocutionnaire passe par un processus pragmatique qui livre, non linterprétation sémantique complète de lénoncé, mais un enrichissement de cette interprétation qui nintervient pas dans la détermination des conditions de vérité de lénoncé.

Bibliographie

  • John Langshaw Austin: How to Do Things with Words. Cambridge (Mass.) 1962 - Paperback: Harvard University Press, 2e ed., 2005, (ISBN 0674411528) - en français: Quand dire, c'est faire, Seuil, (ISBN 2020125692)
  • Judith Butler, Excitable Speech. A Politics of the Performative, Routledge 1997 - Austin rencontre Althusser - en français: Le pouvoir des mots : Politique du performatif, Editions Amsterdam 2004, (ISBN 2915547033)
  • Jacques Derrida, Limited Inc, Northwestern University Press 1988, (ISBN 0810107880) - une vive critique de Searle - en français: Limited Inc, Éditions Galilée 1990, (ISBN 271860364X)
  • John Searle, Speech Acts, Cambridge University Press 1969,(ISBN 052109626X) - en français: Les actes de langage, Hermann 1972, (ISBN 2705657274)
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