- Damnatio memoriae
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La damnatio memoriæ est un ensemble de condamnations post mortem à l'oubli votées par le Sénat romain à l'encontre d'un personnage politique. Elles consistent par exemple en l'annulation de ses honneurs, l'effacement de son nom des monuments publics, la déclaration de son anniversaire comme jour néfaste ou le renversement de ses statues.
Ont été frappés de la damnatio memoriæ les personnages suivants :
- Marc Antoine[1],[2] ;
- Livie Julie, dite Livilla, nièce et bru de Tibère[3] ;
- Caligula (de fait, mais non de droit)[4] ;
- Messaline ;
- Néron (de fait, mais non de droit)[5] ;
- Domitien[6],[7],[8] ;
- Commode (mais il a été partiellement réhabilité par Septime Sévère) ;
- Héliogabale ;
- Maximin le Thrace ;
- Maximien ;
- Aurélien, Empereur Romain (mais divinisé par la suite);
- peut-être Caius Cornelius Gallus, le premier préfet d'Égypte[9].
Une damnatio memoriæ peut être révoquée par la suite. Ainsi, le consul Virius Nicomachus Flavianus est frappé d'une telle mesure en 394 pour avoir soutenu l'usurpateur Eugène ; en 431, son fils Flavius Nicomachus obtient un rescrit impérial révoquant la damnatio[10].
Extension
Le terme a été forgé à l'époque moderne sur la base de memoria damnata, qui désigne la condamnation post mortem pour haute trahison. Par exemple, le Fribourgeois Pierre-Nicolas Chenaux (1740-1781) a été condamné à cette peine.
Par extension moderne à des contextes non romains, on utilise l'expression pour désigner des mesures comparables :
- l’effacement des cartouches du pharaon hérétique Akhénaton par ses successeurs[11] ;
- l'interdiction à Éphèse de citer le nom d'Érostrate, incendiaire de l'Artémision[12],[13] ;
- le recouvrement du portrait du doge de Venise Marino Faliero, après son coup d'État manqué ;
- la dure condamnation de Jan Hus, duquel on a dit « de Jan Hus, il ne doit rien rester »[réf. nécessaire] ;
- l'oubli dans lequel furent rejetés, par ordre de Napoléon Bonaparte, les héros de la Révolution française comme le général Dumas et le chevalier de Saint-George. Cet oubli fut motivé par le fait que ces officiers supérieurs d'origine servile se sont opposés à un moment ou un autre au rétablissement de l'esclavage dans les colonies françaises des Amériques (Saint-Domingue, Guadeloupe)[réf. nécessaire] ;
- la suppression des documents officiels des opposants à Staline après leur élimination.
Notes et références
- Plutarque, Vies parallèles [détail des éditions] [lire en ligne] (Cicéron, XLIX, 6 ; Antoine, LXXXVI, 9)
- Dion Cassius, Histoire romaine [lire en ligne] (LI, 19).
- Tacite, Annales 6.2 [lire en ligne] (Tacite, Annales, livre VI, chapitre II)
- Dion Cassius (LX, 4, 5-6).
- Suétone, Vie des douze Césars [lire en ligne] (Néron, XLIX, 2).
- Suétone, Domitien, XXIII, 1.
- Pline le Jeune, Panégyrique de Trajan [lire en ligne] (52, 3-5)
- Lactance, Sur la mort des persécuteurs (3).
- Jean-Paul Boucher, Caius Cornelius Gallus, Paris, Les Belles Lettres, 1966, pages 56 et 57.
- forum de Trajan ; CIL, VI, 1783. Inscription sur le
- Dimitri Laboury, Akhenaton, p. 9 et p. 15, Collection Pygmalion, Flammarion, Paris, 2010, (ISBN 978-2-7564-0043-3).
- Valère Maxime, Dits et faits mémorables [lire en ligne] (VIII, 14, 5).
- Alain Nadaud, La mémoire d'Érostrate, Le Seuil, 1992
Catégorie :- Politique de la Rome antique
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