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modifier L'acculturation est l'ensemble des phénomènes qui résultent d'un contact continu et direct entre des groupes d'individus de cultures différentes et qui entraîne des modifications dans les modèles culturels initiaux de l'un ou des deux groupes. Il faut bien distinguer « acculturation » et « assimilation ».
Pour Denys Cuche, le terme serait apparu en 1880 chez J.W. Powell pour désigner les « transformations des modes de vie et de pensée des immigrants au contact de la société américaine ». Il ne s'agit donc pas seulement de décrire la perte d'une culture d'origine (déculturation) mais aussi, et peut-être surtout, l'appropriation d'une nouvelle culture. On voit cependant que le phénomène concerne l'immigré confronté à une nouvelle culture et non les influences subies par une culture confrontée à l'immigration. Pour atteindre cette réciproque il faut attendre le Mémorandum pour l'étude de l'acculturation de Robert Redfield, Ralph Linton et Melville Herskovits.
Sommaire
Enjeux
Sous l'influence du courant culturaliste, la culture a été (notamment pendant et au début du XXe siècle) perçue comme une entité bien distincte des autres, bien délimitée par des « frontières ». Dès lors, tout contact d'une culture avec une autre risque d'en altérer la pureté. Dans ce cas, le processus d'acculturation est perçu comme une atteinte à la culture authentique.
En fait, les cultures se construisent au contact des autres et ne sont pas imperméables, isolées par des frontières bien étanches. Il n'y a donc pas de cultures pures et d'autres métissées. Toutes le sont plus ou moins à des degrés divers.
L'acculturation est donc un phénomène permanent, continu et non pas occasionnel. C'est même un phénomène universel et constitutif des cultures.
Les cultures dépendent des rapports sociaux qu'entretiennent les hommes entre eux. Or ceux-ci sont souvent des rapports de force. Les différentes cultures vont donc se trouver les unes par rapport aux autres en position de force ou de faiblesse. Mais les groupes socialement les plus forts n'arrivent pas toujours à s'imposer aux groupes les plus faibles. Les cultures sont donc des ensembles en construction permanente, avec des phénomènes de structuration, déstructuration. Il n'y a pas forcément une culture donneuse et une autre receveuse. L'acculturation n'est jamais à sens unique.
Dans ce contexte, comment les populations migrantes peuvent-elles s'intégrer ? Peuvent-elles garder leurs cultures d'origine ? En fait c'est impossible, toute culture transplantée ne peut rester identique à elle-même. Les populations immigrées inventent de nouveaux modèles culturels (comme les Noirs aux États-Unis). Il y a souvent dans un premier temps méfiance ou opposition face à la culture du pays d'accueil, puis adoption d'éléments de cette culture ou au contraire parfois rejet (on parle alors de contre acculturation) pour réaffirmer certains traits de la culture d'origine. Souvent le processus est complexe, fait à la fois de mélanges, réinterprétations assimilations etc...On parle alors de syncrétisme qui est le métissage de traits culturels.
Formes d'acculturation
Roger Bastide, sociologue français, distingue plusieurs types d'acculturation :
- une acculturation spontanée quand les cultures sont en contact libre,
- une acculturation forcée, organisée, imposée par un groupe comme lors de la colonisation ou de l'esclavage par exemple
- une acculturation planifiée, contrôlée, dans le but de construire à long terme une culture prolétarienne par exemple dans les ex pays socialistes ou une culture nationale.
Gilles Léothaud distingue plusieurs formes d’acculturation :
- L'acculturation, qui englobe les processus dynamiques par lesquels une société évolue au contact d'une autre, empruntant et adoptant des éléments de sa culture.
- L'enculturation, ou l'apprentissage par un individu de connaissances possédées par son propre groupe. Elle se manifeste notamment lorsqu'un pays enseigne à tous ses habitants, y compris les minorités ethniques, la langue et la culture majoritaire. On comprend ainsi le double danger qui guette les musiques de ces minorités lorsque le pays est lui-même soumis à un processus d'acculturation.
- L'endoculturation qui désigne la transmission du savoir aux jeunes par les anciens ou la famille. C'est à cette phase initiale de l'enculturation que s'opère souvent les premières phases de fractures entre générations. La tradition jugée dépassée s'oppose à l'attrait pour une culture dominante.
- La transculturation s'opère lorsque des changements se produisent sous l'effet de facteurs internes, sans l'influence notable de contacts extérieurs.
- La déculturation est une perte de toutes les valeurs de référence, sans assimilation en contre partie de celles des autres. Elle touche les sociétés les plus archaïques, les plus vulnérables, mises en contact brutal avec la culture occidentale.
- La contre-acculturation est le fait de groupes plus solides qui de façon plus ou moins violente, manifestent un sentiment de rejet, voire d'hostilité envers la culture qui cherche à les dominer. Elle se manifeste parfois par un repli sur soi.
- La reculturation, enfin, qui se voit dans des sociétés déjà fortement acculturées, et qui entraîne un mouvement inverse de retour aux sources, de recherche et de reconstruction d'un patrimoine perdu. Le processus conduit à des résultats plus ou moins "authentiques".
Confusions
Confusion entre acculturation et assimilation : Cette dernière ne constitue qu'un cas extrême d'acculturation. L'assimilation est la disparition totale de la culture d'un groupe qui assimile et intériorise la culture de l'autre groupe avec lequel il est en contact. On compte d'ailleurs trois autres types d'acculturation, en plus de l'assimilation : la syncrétisation (combinaison entre la culture d'origine et la nouvelle), le multiculturalisme (cohabitation de plusieurs cultures sans qu'il y ait de combinaison ou d'assimilation, c'est le métissage culturel) et la contre-acculturation, qui est le rejet et le refus de la nouvelle culture donc le retour à la culture d'origine.
Confusion entre acculturation et ethnocide : L’ethnocide est la destruction systématique de la culture d'un groupe c'est-à-dire l'élimination par tous les moyens non seulement de ses modes de vie, mais aussi de ses modes de pensée. L'ethnocide est donc une déculturation volontaire et programmée. L'acculturation est quant à elle un phénomène consenti. (Denys Cuche).
Exemples
Ces processus ne sont pas propres à l'ethnomusicologie, certes, mais celle-ci en est un témoin direct. Beaucoup d'études actuelles rendent compte de ces changements induits par la présence de plus en plus marquée de l'influence occidentale à travers le monde. Musicalement, l'évolution se fait dans le sens de l'occidentalisation du langage (harmonisation, mise au tempérament égal, etc.), non pas pour une supposée "supériorité" de ce langage occidental, mais plutôt par la puissance des médias qui le véhiculent. Ces processus rencontrés par les chercheurs sur leur terrain leur font se poser la question même du sens de leur travail et renvoient à la question de "l'authenticité". (cf. le chapitre sur "que reste-t-il à étudier, à collecter").
Face à une évidente transformation des répertoires, l'école de "l'ethnomusicologie d'urgence" préconisée par Gilbert Rouget en France (in Le Monde du mardi 30 sept.1997) s'oppose à l'école des "métissages".
La question des contacts entre groupes ethniques ou sociétés diverses, des interactions et des conséquences de ces échanges est traitée dans de nombreux ouvrages d'anthropologie. L'idée que la diversité et l'authenticité culturelle d'un groupe ethnique serait la conséquence de son isolement s'oppose à celle qui défend l'existence naturelle des échanges ; échanges qui renforceraient même la "culturation".
Fredrik Barth, anthropologue norvégien (in "ethnics groupes and bondaries", Oslo), distingue 3 types de réactions de la part de sociétés confrontées à la domination d'une autre :
- Le groupe essaie de s'incorporer au modèle industriel et culturel, tout en essayant de sauvegarder ce qui peut l'être. C'est l'intégration et souvent la disparition de ses particularismes culturels.
- Le groupe cherche à s'intégrer économiquement mais cherche à conserver de façon énergique son identité culturelle.
- Le groupe essaie d'accentuer sa différence en se développant, pour mieux se protéger, et participe à des échanges.
Sources
- La Notion de culture dans les sciences sociales Denys Cuche (La Découverte, 1996, 2001. ISBN 2-7071-3443-0)
Parmi les très nombreux articles, on pourra lire celui de Margaret J. Kartomi "the processes and results of musical culture : a discussion of terminology and concepts" (in ethnomusicology, may 1981). Kartomi analyse clairement les termes et les concepts.
- Il est important de compléter le concept classique d'acculturation par celui d'acculturation antagoniste mis en évidence par Georges Devereux. Ce concept a d'ailleurs été repris au plan socio historique par Jacques Demorgon qui a montré qu'il conduisait au concept plus englobant et plus opératoire d'interculturation. On pourra se référer, en particulier à l'interculturation du monde (2000) et à L'histoire interculturelle des sociétés. Une information monde (2002). Ou encore à Complexité des cultures et de l'interculturel. Contre les pensées (2004). Ou enfin à Critique de l'interculturel. L'horizon de la sociologie (2005). Ces quatre ouvrages parus chez Anthropos Economica, Paris.
Voir aussi
Articles connexes
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