Confédération des nationalités indigènes de l'Équateur

Confédération des nationalités indigènes de l'Équateur
Manifestation de la CONAIE à Quito, en 2002. Le drapeau de la CONAIE inclut le soleil Inca.


La Confédération des nationalités indigènes de l'Équateur (Confederación de Nacionalidades Indígenas del Ecuador, ou CONAIE), est une organisation générale créée en 1986, dans le but de regrouper un nombre important de communautés et d’associations locales ou régionales de peuples indigènes, pour agir sur la scène politique nationale équatorienne en relayant avec ses représentants les aspirations légitimes historiques, économiques et socioculturelles de ceux-ci.

La CONAIE est composée des trois principales fédérations régionales :

  • Oriente : CONFENIAE – Confédération des Nationalités Indigènes de l’Amazonie Équatorienne (Confederación de Nacionalidades Indígenas de la Amazonía Ecuatoriana)
  • Sierra : ECUARUNARI – Confédération des Peuples de la Nationalité Quechua de l’Équateur (Confederación de Pueblos de la Nacionalidad Kichwas del Ecuador)
  • Costa : CONAICE – Coordination des Organisations Indigènes et Noires de la Côte Équatorienne (Coordinadora de Organizaciones Indígenas y Negras de la Costa Ecuatoriana)

Sommaire

Contexte historique

Les conséquences de la conquête espagnole (quelques décennies seulement après celle des Incas) ont été dramatiques pour les indigènes de l’actuel Équateur : décimés par la guerre et les maladies, déplacés pour servir de main-d’œuvre servile dans de vastes domaines agricoles qui évoluèrent dans les siècles suivants vers de grandes fermes connues sous le nom d’haciendas.

À partir de la fin du XIXe siècle, l’accélération de la croissance démographique devient formidable : de environ 150 000 habitants à la fin du XVIe siècle, 500 000 à la fin du XVIIIe, 1 000 000 en 1886, la population est multipliée par 10 et est évaluée à 10 500 000 habitants en 1989.

Face à la pression créée par cette situation et au mécontentement général, les gouvernements militaires de la moitié du XXe siècle accordent le droit de vote aux Amérindiens, puis en 1964 de proclamer une réforme agraire qui vise à abolir la servitude (« huasipungo ») auquel est toujours soumise la main d’œuvre des haciendas. Les grands propriétaires terriens se voient forcés de renoncer à une partie de leurs privilèges, et de céder une partie de leurs propriétés à de petits paysans, désormais libres et propriétaires de petites parcelles (« minifundio »). Les terrains ainsi cédés, sont généralement les moins fertiles, les haciendas conservant les meilleures terres.

Vers le milieu du XXe siècle eu lieu la création du premier syndicat agricole du pays qui organisa en 1944, la première grève paysanne. Parallèlement, furent fondées les premières écoles parallèles où pour la première fois, chose interdite, l’enseignement se faisait en langue Kichwa (Quechua). Ces initiatives, valurent à leurs auteurs d’être durement persécutés et emprisonnés par les autorités.

Naissance des mouvements indigènes

La Fédération Équatorienne des Indiens (FEI) est fondée en 1944, dans la région andine, sous l'impulsion du Parti communiste équatorien et avec la participation de leaders indigènes reconnus comme Tránsito Amaguaña ou Dolores Cacuango, avec pour buts principaux de fonder un système d'enseignement bilingue et d'améliorer les conditions de vie et de travail des travailleurs des haciendas, avec la fin du système du « huasipongo »[1]. Ce mouvement se poursuit dans la région andine avec l’aide des partis communiste et social-chrétien ainsi que d’une frange de l’église catholique progressiste, issue des changements suite à Vatican II et à la théologie de la libération. Après avoir constitué un nombre important d’organisations locales et provinciales, les kichwas de la région andine fondent en 1972 à la création du mouvement ECUARUNARI.

Dans la région amazonienne, le processus commence dans les années 1960 avec les organisations shuars sous l’impulsion des missionnaires salésiens et évangéliques, qui furent ensuite imités par les autres nationalités régionales pour aboutir en 1980 à la création de la CONFENAIE (Confédération des Nationalités Indigènes de l’Amazonie Équatorienne). Le programme de la CONFENAIE associa, dès le début, la récupération des territoires traditionnels, la défense de la culture, l’éducation bilingue et la santé, ainsi que le concept de « nationalités » et d’« État plurinational ». L'organisation participa également à la création de la COICA qui regroupe les populations de tout le bassin amazonien.

À partir de 1980, (marche indigène et paysanne sur Quito, qui fut durement réprimée) la CONFENAIE aux revendications plus ethniques et ECUARUNARI plus sensible à la lutte des classes, entamèrent leur rapprochement avec la création du Conseil de coordination des Nationalités Indigènes de l’Équateur d’où naîtra la CONAIE en 1986.

Revendications

Le programme de celle-ci se trouve résumé en 16 revendications :

  • Reconnaissance publique de la dimension plurinationale de l’Équateur (à ratifier par la constitution).
  • Cession par le gouvernement de territoires et des titres qui s’y rapportent aux nationalités.
  • Résolution des problèmes d’eau et d’irrigation.
  • Annulation des dettes indigènes à la FODERUMA et la Banque Nationale de développement.
  • Gel des prix des biens de consommation
  • Finalisation des projets prioritaires dans les communautés indiennes.
  • Le non payement des taxes rurales
  • Expulsion du Summer Institute of Linguistics.
  • Liberté commerciale pour les activités artisanales
  • Protection par la CONAIE des sites archéologiques
  • Officialisation de la médecine indienne
  • Annulation du décret gouvernemental de réforme agraire
  • Octroi immédiat par le gouvernement de fonds aux nationalités.
  • Octroi de fonds par le gouvernement pour l’enseignement bilingue.
  • Respect des droits de l’enfant.
  • Fixation de prix équitable pour la production agricole.

Histoire

  • En 1990 la CONAIE organisa le plus grande soulèvement que l’Équateur aie connu jusqu’alors : grèves, manifestations, occupations de grandes propriétés et d’administrations, blocus agricole. Malgré les affrontements violents et la répression, cette date marque le début de l’entrée du mouvement indigène sur la scène politique moderne et l’annonce de dix années de lutte qui provoquèrent la chute de plusieurs gouvernement et aboutirent à la révision de la constitution de 1998 et la participation au gouvernement de personnalités indigènes.
  • En 1994 : la CONAIE convoqua la mobilisation pour la vie et la réforme agraire, laquelle paralysa la capitale durant deux semaines et conduisit à l’état d’urgence. Cet affrontement provoqua un débat public et une négociation entre le gouvernement et les représentants indigènes, ces derniers obtenant l’annulation d’un projet de loi néo-libérale visant à mettre en cause la propriété publique des terres vierges au profit de la propriété privée pour permettre leur exploitation, ainsi que la privatisation des secteur pétrolier et des ressources en eau. La diffusion quotidienne de débats télévisés apportant une audience nationale au mouvement indien.
  • 1996 : Le mouvement indien, qui avait jusqu’alors manifesté une certaine méfiance face à l’engagement politique électoral, participe au côté d’organisations paysannes à la création du parti PACHAKUTIK qui devait remporter un nombre non négligeable de sièges au niveau local ainsi qu’au congrès, mais échoua à l’élection présidentielle.

Un troisième soulèvement contre le gouvernement populiste du président Bucarám, aboutit à la destitution de celui-ci au début de l’année 1997 et à la création, en remplacement du Ministère Ethnique, du Fonds National pour le Développement des Peuples Indigènes.

  • 1998 : Adoption, non sans opposition de la nouvelle constitution, reconnaissant l’existence des peuples et nationalités indigènes et afroéquatoriens, ainsi que les circonscriptions territoriales indigènes. Création de la CODENPE (COnsejo de DEsarrollo de las Nacionalidades y Pueblos de Ecuador - Conseil National de Développement des Nationalités et Peuples de l’Équateur).
  • 2000 : Suite à la grave crise économique, l’inflation galopante la corruption et la dollarisation de l’économie, est lancée une nouvelle insurrection avec le soutien d’une partie des forces armées progressistes en rébellion et d’autres mouvements sociaux. Le président Mahuad est destitué et remplacé par une « Junte » formée par le colonel Luis Gutierrez, l’ex-président de la Cour suprême, Carlos Solorzano et le président de la CONAIE, Antonio Vargas. Ils seront eux-mêmes arrêtés quelques heures plus tard sur les ordres du chef des forces armées, le Général Mendoza qui avait pourtant accepté la veille d’intégrer la Junte. Ce dernier sera accusé d’avoir trahi la population et d’avoir cédé aux pressions internationale notamment de l’Organisation des États américains[non neutre].
  • 2002 : Le populiste et ex-colonel Lucio Gutierrez remporte l’élection présidentielle avec le soutien de PACHAKUTIK qui obtient deux postes ministériels dans son gouvernement. L’alliance est de courte durée, les deux ministres (Nina Pacari et Luis Macas) s’opposent à la politique néolibérale du président et à son alignement sur Washington et quittent le gouvernement en juin 2003.

La CONAIE est en crise, De nombreux désaccords divisent ses composantes. Le passage de la démocratie participative des débuts au système de représentation coupe la base de ses dirigeants obligés de se rapprocher des lieux de pouvoir. Le mouvement social contestataire et mobilisateur peine à intégrer une logique de participation politique. Le gouvernement joue la carte de la division, appelant Antonio Vargas, devenu dissident, au ministère du Bien-être social et en se rapprochant des organisations locales et effectuant des donations directes aux communautés. Malgré les avancées importantes réalisées grâce à l’action des mouvements représentants les indigènes, la proportion de ceux-ci vivant sous le seuil de pauvreté (2 $ par jour) est évaluée à plus de 80 %.

La confusion règne, les dirigeants s’accusent mutuellement de corruption et le mouvement perd sa capacité de mobilisation, la tentative de soulèvement de juin 2004 est un échec. En décembre 2004, la convocation du 2e congrès de la CONAIE représente la nécessité de régénérer le mouvement. Il est indispensable de renouer avec la base. C’est dans ces buts qu’il est fait appel pour présider le mouvement à Luis Macas, figure historique, il a occupé cette fonction de 1990 à 1996. Il s’agit d’un retour aux sources, choisi pour trois ans tant par les bases que par les dirigeants Luis Macas a pour mission de redresser la barque.

« La survie de la Confédération des nationalités indigènes d’Équateur est menacée. L’objectif de ma présidence est d’organiser un repli pour consolider la base du mouvement. »

Dès son entrée en fonction le nouveau président prend position contre le Plan Colombie (plan financé par Washington et dirigé à partir de l'Équateur contre la guérilla colombienne, sous prétexte de lutte contre le trafic de drogue), le maintien de la base militaire américaine de Manta en Équateur et appelle à lutter contre la signature du Traité de Libre Échange (TLC) avec les États-Unis. Il annonce pour les deux années à venir, la mise en place de cours d’alphabétisation, la lutte contre les entreprises pétrolières transnationales et la privatisation de l’eau , la défense des ressources naturelles et de la biodiversité, l’action pour la redistribution des terres.

  • En 2005, suite à plusieurs mois de soulèvement populaires, le président Gutierrez est contraint de quitter le pouvoir et de s’exiler. Il est remplacé par Alfredo Palacio

Annexes

Voir aussi

Liens externes

Sites des organisations

Notes et références



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