- Cavitation
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On appelle cavitation (du latin cavus, « trou ») la naissance et l'oscillation radiale de bulles de gaz et de vapeur dans un liquide soumis à une dépression. Si cette dépression est suffisamment élevée, la pression peut devenir inférieure à la pression de vapeur saturante, et une bulle de vapeur est susceptible de se former.
Les origines de la dépression sont de deux sortes:
- écoulement fluide ;
- onde acoustique entrainant des variations de la densité du liquide.
Sommaire
Origine de la dépression
La dépression peut avoir deux origines différentes :
- elle peut être liée à un écoulement de liquide à forte vitesse, par exemple dans un venturi, ou bien au voisinage d'une pale dans une pompe ou encore sur une hélice de bateau ou de sous-marin. En effet, une zone de forte vitesse dans un fluide correspond à une faible pression (Cf. le théorème de Bernoulli). On parle de cavitation hydrodynamique, découverte en 1917 par Lord Rayleigh. Cela se traduit par exemple par un sillage de bulles, ainsi que par l'apparition d'une couche de vapeur accrochée à une pale (là où la dépression est la plus forte, c'est-à-dire à l'extrados. Attention toutefois, la bulle souvent observée n'est généralement que de l'air entraîné depuis la surface, et non de la cavitation : c'est le phénomène de ventilation, quand l'hélice est proche de la surface).
- elle peut être liée aux variations de densité d'un liquide soumis à une onde acoustique, en général des ultrasons de puissance. On parle alors de cavitation acoustique.
Différents types de cavitation
- cavitation à haut nombre de Reynolds : l'inertie du liquide (sa mise en mouvement) ralentit l'expansion du gaz.
- cavitation à faible nombre de Reynolds : la viscosité du liquide limite la vitesse d'expansion.
- cavitation élastique : la résistance élastique du milieu et la tension de surface limitent la dilatation du gaz.
Lien entre pression et rayon de la bulle
Dans tous les cas, c'est la dépression qui fait grandir la bulle. Pour étudier ce phénomène, il est donc nécessaire d'étudier la relation qui lie la pression du fluide (loin de la bulle), et le rayon de la bulle (considérée comme sphérique). Pour cela, on s'appuie sur la nature du gaz, de la pression de Laplace, et éventuellement du module d'élasticité du fluide.
Cavitation à grand nombre de Reynolds
Effets
Quelle qu'en soit l'origine, la cavitation a deux effets différents :
- Les bulles de vapeur changent complètement le comportement du liquide. La cavitation hydrodynamique détruit le rendement de l'hélice ou de la pompe. L'énergie n'est plus transformée en mouvement (par exemple), mais soit elle reste dans l'engin moteur (qui peut ne pas supporter de sortir ainsi des conditions normales de travail), soit elle est diffusée sous une forme incontrôlée et donc probablement nuisible.
- Le plus souvent la bulle de vapeur est transitoire : son apparition élimine instantanément les conditions qui lui ont donné naissance. Il se produit donc une implosion de la bulle. Cette dernière peut-être si violente que les pression et température à l'intérieur de la bulle peuvent prendre des valeurs très élevées (plusieurs milliers de bar, plusieurs milliers de Kelvin). En implosant, la bulle peut émettre une onde de choc dans le liquide, qui permet de casser des gouttes (émulsification), de disperser, désagglomérer ou briser des particules solides, ou encore de nettoyer ou éroder des surfaces solides .
C'est pourquoi le contrôle du phénomène de cavitation est essentiel en hydrodynamique : il représente une limite, à cause de la perte de rendement voire de la destruction (des hélices et pompes) qu'il peut provoquer. Les impacts sur celles-ci se font toujours aux points de vitesse les plus élevées : intérieur des hydrauliques vortex et extérieur des hydrauliques mono et multicanaux (voir les photos suivantes).
Mais inversement, la bonne compréhension du phénomène peut permettre de l'exploiter. Des applications pour le nettoyage ont été proposées. En médecine, les ultrasons (lithotripsie extracorporelle) permettent de détruire les calculs vésicaux et rénaux. De plus, la densité d'énergie ainsi atteinte dans certaines bulles donne lieu à des réactions chimiques inhabituelles, domaine appelé sonochimie, et même dans certains cas à l'émission de lumière, phénomène appelé sonoluminescence. Certains chercheurs pensent qu'il est possible d'exploiter ces phénomènes pour réaliser une fusion nucléaire[réf. nécessaire].
La cavitation a un effet destructeur principalement sur les pompes oléohydrauliques haute pression : les microexplosions arrachent la matière et détruisent la pompe. Les causes les plus fréquentes sont un filtre d'aspiration colmaté ou une prise d'air sur l'aspiration.
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Pompe centrifuge détruite par la cavitation
Prévision
Pour prévoir ce phénomène, on introduit le paramètre de cavitation, adimensionnel, noté σ. Il est défini par :
Avec :
- ΔP une grandeur caractéristique du système,
- Psat la pression de vapeur saturante du liquide,
- Pa la pression en un point de référence.
Deux écoulements de géométries semblables avec le même σ verront la cavitation se produire en des points homologues, s’ils ont le même nombre de Reynolds.
D'une manière similaire, le NPSH (Net Positive Suction Head) est le supplément minimal de pression qu’il faut ajouter à la pression de vapeur saturante Pv, au niveau de l’entrée de la pompe, pour que la pression à l’intérieur de celle-ci ne puisse être inférieure à Pv. Le NPSH est défini par la relation suivante :
Supercavitation
Article détaillé : Supercavitation.La supercavitation est l'utilisation des effets de cavitation pour créer une grande bulle de gaz à l'intérieur d'un liquide, permettant à un objet de voyager à grande vitesse dans ce liquide en étant complètement enveloppé par la bulle. La cavité (c'est-à-dire la bulle) réduit le frottement sur l'objet et fait de la supercavitation une technologie très attrayante et pour cause : le frottement dans l'eau est environ 1 000 fois plus grand que dans l'air. La supercavitation est assez étudiée en magnétohydrodynamique (MHD).
Utilisation de la cavitation dans la nature
La cavitation est exploitée de façon assez singulière dans la nature par une crevette tropicale qui possède l'une de ses pinces surdéveloppée par rapport à l'autre[1]. Lorsqu'elle referme cette énorme pince il en résulte un écoulement très violent engendrant une bulle de cavitation hydrodynamique, qui, en implosant, émet une onde de choc susceptible d'assommer, voire tuer le plancton environnant. Selon un article paru dans la revue scientifique Science Magazine[2], on a longtemps cru que le bruit provenait de la pince elle-même, avant qu'une équipe hollandaise ne démontre l'apparition d'une bulle de cavitation à l'aide d'une caméra rapide. La même équipe a d'ailleurs démontré que cette bulle était luminescente.
La cavitation existe aussi chez les plantes vasculaires, elle intervient dans le xylème. Les bulles d'air rompent la continuité de la colonne d'eau[3] et du coup les feuilles ne sont plus hydratées. Des épisodes récurrents de cavitation vont menacer la survie de la plante.
Références
Bibliographie
- Cavitation. Mécanismes physiques et aspects industriels, EDP Sciences, 1995 (ISBN 2-86883-451-5)
Liens externes
- (fr) Ultrasons et fluides
- (en) Cavitation and bubble dynamics - Ouvrage de C.E. Brennen (1995)
- (en) Bulle de Cavitation à l'intérieur d'une goutte: Collapse, Jets, Choque
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