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Carte scolaire
La carte scolaire désigne un système dans lequel les élèves vont dans les établissements scolaires situés dans le secteur où ils sont domiciliés. La mise en place d'une carte scolaire a pour objectif principal une répartion selon certains critères des élèves (conditions sociales en particulier). On trouve une carte scolaire dans différents pays dont le Japon, la Suède, la Finlande ou la France.
En France, ce système de répartition a été créé en 1963 par Christian Fouchet, ministre de l'Éducation. Il représente deux choses :
- d'une part la répartition géographique des postes d'enseignants
- et d'autre part la répartition des élèves en secteurs d'affectation.
Pour la répartition des élèves, le système est progressivement supprimé en France.
Sommaire
Principe général
Il faut distinguer trois choses :
- la carte scolaire des écoles maternelles et élémentaires qui est déterminée par les conseils municipaux (L212-7 du code de l'éducation) lorsque les communes comportent plusieurs écoles ;
- la carte scolaire des collèges qui est déterminée par le Conseil Général (L213-1 du code de l'éducation).
- la carte scolaire établie pour les lycées. Celle-ci est toujours sous le contrôle de l'État. Les conseils régionaux n'interviennent sur les lycées que pour la gestion de l'équipement et de l'aménagement.
Dans les communes qui n'ont qu'une école, c'est l'article L212-8 qui s'applique. C'est-à-dire que les parents résidant à proximité de plusieurs écoles peuvent faire scolariser leurs enfants dans une autre école que celle de leur commune. Par contre la commune de résidence n'est tenue de participer aux frais de scolarisation de la commune d'accueil que si les élèves rentrent dans le cadre des 3 exceptions prévues par l'article L212-8.
La sectorisation permet également à l'Éducation nationale de planifier les ouvertures et les fermetures de classes en fonction du nombre prévisionnel d'élèves. Certains départements, notamment du Midi, ont vu leur population scolaire augmenter tandis que, dans d'autres départements, c'est un tassement démographique qui a eu lieu. La carte scolaire évolue donc d'année en année.
Pour contourner la carte scolaire jusqu'en 2008, il était nécessaire de demander une dérogation à l'inspecteur d'Académie. Les motifs de dérogation étaient limités [1] :
- Obligations professionnelles des parents
- Raisons médicales
- Continuation de la scolarité dans le même établissement après un déménagement
- Inscription dans un établissement de la ville où un frère ou une sœur est déjà scolarisé
Certaines familles recouraient à des subterfuges pour obtenir l'intégration dans l'établissement souhaité :
- Fausse domiciliation chez une grand-mère, tante, cousin qui habite sur la zone d'affectation, voire achat d'un logement sur la zone d'affectation de l'établissement voulu. Les agents immobiliers affectent ainsi une surcote de 10 % aux logements situés sur la zone du collège Henri-IV à Paris.[réf. nécessaire]
- Choix d'une option rare (langue par exemple).
En droit, l'administration doit accueillir tous les élèves du secteur (ceux y résidant). Ces élèves sont prioritaires par rapport à ceux résidant en dehors du secteur et demandant une dérogation[2].
Débats
L'objectif principal d'une carte scolaire est de limiter les inégalités scolaires entre élèves. Cependant ce système a nourri de très nombreuses controverses, en particulier sur son efficacité. Ainsi, cela a été un enjeu de la campagne présidentielle de 2007 et Nicolas Sarkozy a promis sa suppression, suppression engagée depuis.
Les partisans de la carte scolaire, tels Agnès van Zanten, directrice de recherche au CNRS estime que c'est un gage d'égalité et que, « les pays qui ont totalement libéralisé la carte scolaire [...] sans aucune régulation sont des pays où, globalement, les inégalités scolaires sont les plus fortes[3]. » Elle soutient ainsi que, aux États-Unis, au Royaume-Uni ou en Belgique, des systèmes ponctuels ont été mis en place pour limiter les effets inégalitaires de la suppression de la carte scolaire. Par exemple :
- Les établissements scolaires de certains quartiers de Londres fonctionnent par quotas. Chacun d'eux doit accueillir un tiers d'élèves aux bons résultats, un tiers d'élèves aux résultats moyens, et un tiers d'élèves en difficulté. Le choix des familles est donc limité par ces quotas.
- Des quotas ethniques ont été mis en place dans certaines villes des États-Unis. L'effet est similaire.
- Les chefs d'établissements scolaires belges de certaines régions sont tenus de maintenir un équilibre entre établissements[3].
Des expériences d'assouplissement ont été menées à partir de 1984, et plus récemment dans les lycées parisiens, sans être véritablement évaluées[4]. Selon la FCPE elles favoriseraient la concentration des problèmes dans un même établissement et ne feraient donc que renforcer les inégalités[5].
A l'inverse, les détracteurs de la carte scolaire soutiennent que la carte scolaire favorise ceux qui sont déjà les plus favorisés; le sociologue François Dubet déclare ainsi : « La carte scolaire ne marche pas pour deux raisons. D'abord, dans les grandes villes, elle reproduit fidèlement les inégalités entre les quartiers, elle les cristallise et les accroît. Ensuite, une partie de la population [..] triche pour éviter le collège de son secteur, ce qui aggrave la situation des établissements difficiles. »[6] Il défend donc un aménagement de la carte scolaire. Partageant l'analyse sur les défauts de la carte scolaire, Philippe Manière écrit dans L'aveuglement français : « la règle, comme souvent en France, n'est incontournable que pour ceux qui n'ont pas de relations. Aux autres ,le principe de l'égalité ne s'applique qu'avec une inflexibilité modérée ».[7]. De même, Alain Madelin déclarait en 1999 que la carte scolaire conduit à la « ghettoïsation » de la société car « seuls les enfants des couches les plus favorisées ont les moyens de contourner la carte scolaire »[8]. Les opposants à la carte scolaire défendent donc sa suppression ou son réaménagement, arguant qu'ainsi la sélection se fera par le mérite et non par l'argent ou les relations.
D'autres pointent la privation de choix que représente la carte scolaire. Ainsi, Rod Paige, ancien ministre de l'éducation américain, « [refuse que] les élèves soient enchaînés à une école par un diktat légal et un mandat bureaucratique ». Il estime que la fin de la carte scolaire est une chance pour l'enseignement public, l'obligeant à s'adapter aux besoins des élèves : « Le choix sauvera l’école publique »[9].
Situation actuelle en France
L'opposition à la carte scolaire a rencontré un écho dans plusieurs mesures gouvernementales depuis 2002 en France : Gilles de Robien ou Dominique de Villepin ont pris parti pour le « réaménagement » de la carte scolaire et Gilles de Robien avait permis une dérogation à tous les titulaires de la mention très bien au brevet originaires d'une ZEP. Cette mesure a eu un impact ambigü. D'une part, elle aurait augmenté la mixité sociale dans les lycées favorisés, mais elle aurait globalement réduit la mixité scolaire selon Agnès van Zanten[3].
Lors de l'élection présidentielle de 2007, Nicolas Sarkozy a demandé sa suppression et Ségolène Royal son réaménagement, « l'idéal étant la suppression ». À l'inverse François Bayrou et Laurent Fabius se sont prononcés très clairement pour son maintien : « Un assouplissement serait un faux libre choix ».
Après l'élection présidentielle du printemps 2007, la carte scolaire fait un retour marqué dans le débat public. Le PCF proteste contre la volonté du gouvernement d'assouplir la carte scolaire, une mesure que le PCF juge « révoltante », en affirmant que « le gouvernement Fillon entend ainsi proclamer purement et simplement la fin de l'école de la République »[10].
En décembre 2007, Xavier Darcos confirme la suppression de la carte scolaire. Il argumente cette décision par la réussite des expériences d'assouplissement menées au début de la rentrée 2007, qui ont permis d'augmenter la satisfaction des parents. La mesure est mise progressivement en place. Un rapport de l'Inspection générale de l'Éducation nationale rendu public en juin 2008 après huit mois estime que la suppression de la carte scolaire renforcerait la ghettoïsation des établissements en favorisant la baisse de la mixité sociale[11]. « Sociologues et spécialistes de l'éducation sont d'accord : excepté le Chili de Pinochet, les pays qui avaient totalement supprimé la carte scolaire sont revenus sur cette mesure, encore pire que l'absence de choix. »[11].
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
Bibliographie
- Agnès van Zanten et Jean-Pierre Obin, La Carte scolaire, Puf, coll. « Que sais-je ? », Paris, 2008, (ISBN 213056691X)
Notes et références
- ↑ Article 212-8 du code de l'éducation
- ↑ Article D211-10 et D211-11 du code de l’éducation « Les collèges et les lycées accueillent les élèves résidant dans leur zone de desserte ».
- ↑ a , b et c École : à quoi servent les recherches ?, interview de Agnès van Zanten par Martine Fournier, parue dans Sciences Humaines n° 198, novembre 2008.
- ↑ « Plus de vingt ans d'expériences d'assouplissement », Le Monde, 12 septembre 2006.
- ↑ « Faut-il supprimer la carte scolaire ? » Débat avec Faride Hamana dans Le Monde du 28 septembre 2006.
- ↑ Faut-il supprimer la carte scolaire ?
- ↑ Philippe Manière, L'aveuglement français, Stock, p.41
- ↑ « La carte scolaire conduit à une ghettoïsation », entretien avec Alain Madelin, La Croix, 8 octobre 1999.
- ↑ [1]
- ↑ Le Figaro du mardi 22 mai 2007.
- ↑ a et b « Des cartes scolaires mal rebattues », Le Canard enchaîné, n° 4574, 25 juin 2008, p. 8.
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